Roman
Première partie
Région d’Öskemen.
Sur la rive droite de Boukhtarma l’Altaï a surgit au grand jour.
Il y a un silence vierge là, où l’Irtych tombe des hauteurs de sud d’Altaï en ruisselant dans le planement et le district Kourchim, séducteur de l’automne, s’est caché.
Kourchim d’Altaï est une roquerie des Naïmans, faite depuis des temps immémoriaux, ils y sont assis densément, par clan.
L’hiver à Kourchim est tenace, et c’est la motte pelucheuse et non pas le flocon de neige qui tombe du ciel, mais l’été s’envole par la petite brise rapide de montagne.
Dès qu’il fait plus chaud, la neige commence à fondre et courir par un ruisseau, tout de suite tout le bétail jouit, se frotte au aïeul de pin l’Altaï, en piétinant précieusement son sein régénérant et protégeant, comme au bay.
Le vieillard l’Altaï a levé sa main vers sa tête et y garde le lac grisant Markakol — à ne pas toucher! — avec le goût de miel, avec les mystères célestes et la face céleste.
Le collier de Markakol est fait des yourtes d'une blancheur de neige du peuple d’Altaï avec le reflet de perle.
Les montagnards, favoris d’Altaï, comme les cerfs élaphes, ont leur caprice — ils regardent les autres du haut en bas, rien et personne ne les limitent — leur liberté est dans le charme de la haleine de Markakol.
L’eau de Markakol est fraiche et emmiellée. Nourries par son eau et la petite herbe, les bêtes aux mamelles de Dieux, blanchissent les hanches des femmes lors de la traite des trayons énormes en remplissant les seaux en cuir — ce n’est pas le lait, mais une bénédiction; et le koumis curatif, épais, avec les tâches dorées de graisse fermente dans les outres assombrisses à cause des temps passés. L’homme boit une tasse, rougit, la bouche bourdonne comme le kobyz, et tombe dans les bras du monde des Turīyas paradisiaques, ivre, respirant plus légèrement que la petite mouche, mis à cheval tous les soixante-dix vents d’Altaï, organise les jeux de lutte et les courses, et les chevaux font claquer par les fers à cheval en jouant, les montagnes grondent comme les hochets.
Et si on essaie de décrire les beautés d’Altaï, les mots manquent à tous les Dieux d’Altaï. Seulement les miroirs leur faisant l’éloge peuvent refléter leurs visages: les yeux comme chez les biches, la peau blanche comme la neige, le rire est une aube impétueuse, libres dans leurs tailles, comme une branche de saule; elles regardent en arrière en ayant balancé légèrement, font une sourire avec morgue, et vous êtes férus. Et si tu es pris pour leur cible, elles t’épinglent tout de suite au plus haut avec tes fantaisies sensuelles, peut-être, directement au toit d’univers.
Mais il ne s’agit pas de cela! Êtes-vous prêts d’écouter, les «prêts à tout »? Je vais vous expliquer à fond: comment tout était et pourquoi. Approchez-vous, prenez vos places et écoutez. Ce n’est pas un conte, il était une fois... je vais raconter mon histoire avec des mots simples, elle ne sera ni brève ni longue. Donc, laissons la conversation futile, peut-être, je commence. Je ne peux pas m’exprimer en poésies, ne m'en veuillez pas, si je ne vous semble pas le beau parleur.
Alors dans ceux pays sur les sentiers nocturnes un cavalier solitaire pénètre sur un cheval bariolé, un gars obscur. Il a laissé Kourchim en arrière, et le Karaye-kch, la gorge rocheuse aveugle couverte par le scirpus, est en avant. Ce n’est pas une gorge, c’est une crevasse, si on y entre, on ne peut pas s’en sortir; il cache le visage de l’Altaï noble, il a glissé au trot dans la nuit vers l’abri en pierre. Qui est-ce, entrant dans la porte étroite de sousol, s’il n’est pas une bête poursuivie par la mort ou une âme mortelle qui a mis le bétail en déroute?
Le cavalier, avant de s'enfoncer complètement dans la gorge, a arrêté le cheval, a regardé autour. Au bord du mur rocheux quelqu’un en gris est couché sur le lit en pierre avec un fusil. Le gris, après avoir vu le cavalier sur le cheval bariolé, a levé le mouchoir blanc, et celui-ci a agité son chapeau blanchâtre par réaction. Ensuite et le cavalier maigre, et le propriétaire gris du fusil se sont rapprochés et se sont dirigés ensemble en profondeur de la gorge.
Et à Kourchim voilà: les gens et le bétail engraissés sur les pâturages de montagne de Markakol sont descendus aux pieds des montagnes et s’habituaient de nouveau à leurs lieux d'hivernage. Les valets de Mamyrbay ont fermé les chartils, ont fait le ménage à la maison, ont allumé le four. La femme de Mamyrbay la baybiché[1], se dandinant d’un air important, a ordonné à la bonne de dépoussiérer le feutre de yourte et, après avoir plié le ranger au plus loin. La fifille aimée de Mamyrbay Akbilek en robe blanche flottant dans le vent en faisant sonner par les boucles d'oreille en or et les pendeloques en argent, a secoué les couvertures rouges et jaunes et était en train de les amener dans la maison. Elle passait devant la mamma, quand celle-ci, en clignotant d’un air sombre a prononcé en grognant, en précipitant les mots:
— Qu’est-ce qui est tombé dans ton œil? — et elle s’est mise à tourner sur place...
— Rien n’est tombé... heureusement... dans quel œil?
— Pas de raison pour être heureuse, — l’œil gauche, — et elle s'est tue: qui est-ce qui a envoyé ce malheur?
Après avoir payé pour le foin livré et veillant le ménage dans la grange, Mamyrbay a réfléchi sur l’air frais à propos de la politique, il ne pouvait pas être à part quand tout le monde était préoccupé par les soins de parti, et il est revenu chez lui vers le soir.
Le bétail descendait des flans montagnards et allait à son gîte. Le bruit d’enfant, le cri des travailleurs, le mugissement de bétail, l’aboiement des chiens inquiétant l’âme... L’aoul s’est mis à fumer. Le grondement de la rivière. Les crépuscules rouges. Après avoir pris des soins de bétail, après avoir fait le thé, les gens eux-mêmes se sont mis à s’installer pour le repos.
Le soleil ne s’est pas caché encore quand de la gorge profonde, dont on en avait déjà parlé, quatre cavaliers ont sauté comme les loups, à la queue leu leu. Un d’eux était sur le cheval bariolé, qu’on connait déjà. Les trois autres sont vêtus de capotes, avec les fusils et les sabres. Tous les quatre excités et lancés se sont précipités vers la dépression. Les mors dans les gueules des chevaux ont grincé. Voûtes, en passant par les sentiers sinueux, ils ont fait irruption dans l’aoul installé confortablement comme dans la tanière. Ils ont fait irruption bruyamment. Ils ont fait peur, écrasé le peuple levé:
— Ah, les salauds! Amène les chevaux!..
Le fusil est dirigé sur toi, le kamtcha[2] est au-dessus de toi! Si on ne trouve pas de chevaux, on est perdu?
Et les chevaux sont pris, et le trépied du dessous de la chaudière, les affaires... les tapis, les couvertures, les sacs, les pantalons... — d’un seul coup tout n’est pas à toi!
— Sire... Monsieur...
— Oh, Seigneur sauve!
— De grâce, nous ne sommes en aucun cas responsables... — ils ont pu dire seulement.
À la maison de Mamyrbay on venait d’apporter le thé fraîchement préparé, on venait de célébrer les louanges d’Allah, quand un des travailleurs de Mamyrbay est entré en courant dans la pièce:
— Ils se sont jetés!
— Qui, qui?
— Les gris – les gris...
— Qui ils sont alors?
— Entièrement les Russes!
Tout ce que Mamyrbay a pu dire:
— Enferme, cache, courrez, cachez-vous!
La nappe est restée pas rangée, la vaisselle a roulé, les affaires sont jetées en désordre, Mamyrbay lui-même se jetait avec le bruit vers la porte, en profondeur de la maison... une seconde — et il ne verra ni sa femme, ni sa fille, ni messager-malheur. Enfin il s’est décidé de se sauver lui-même, il a ouvert toute grande la porte d’entrée, et trois canons ont appuyé contre sa poitrine. Le bay a chancelé et s'est affaissé tout de suite.
Les hommes d’aoul battus par les crosses, pressés par les lames en soufflant du halètement, ont mis leur bienfaiteur l’aksakal Mamyrbay dans le hangar froid de viande et ont pendu le cadenas en fonte. En rappelant le Dieux et en trottinant par les pieds à partir de l’angle jusqu’à ce bâtiment, la baybaché s’est précipitée et est tombé tout de suite sur les Russes.
— Tu viens d’où?
— Et... voilà, — elle a commencé...
— Tiens — «et voilà»! — et la cravache est tombée sur elle, même il a flambé dans les yeux. Le turban blanc a glissé sur le visage, et la bouche a glissé du visage.
— Traîne la fille! J’ai dis: traîne!
— Traîne la fille, le bienfaiteur?!
— Ta fille, la tienne!
— Aïe, je n’ai pas de fille!
— Tu as la fille! Tu vas la traîner!
Le Russe a fouetté de nouveau. La femme s’est mise à pleurnicher:
— Non, je n’ai pas de fille, — elle mentait comme elle pouvait.
— Je vais aller tout seul, — a jeté le Russe et s’est mis à chercher.
Les trois Russes ont pris les flambeaux et ont commencé à fouiller toute la maison, ils ont regardé derrière les balles avec les affaires, derrière le four, ont fait tomber la pile des bouses sèches pour le feu, ils n’ont manqué aucun toutoumier, aucun creux; et là où on ne pouvait pas jeter un coup d’œil ils ont enfoncé plusieurs fois la hampe pointue. Tout est en vain, il n’y a pas de fille.
Dès que la baybiché a attendu parler des Russes à l’heure de thé, elle a attrapé sa fille et l’a mise dans la petite porte basse en arrière et en traînant Akbilek derrière elle, elle s’est jeté silencieusement voûtée bien loin de la maison; ça et là, enfin elle l’a fourrée dans quelque trou dans le sol: «N’ose pas bouger!» — et elle-même, elle est revenue. Et elle est tombée sur ceux trois vêtus en capotes grises qui n’ont pas pu trouver la fille. Les Russes par dépit, mais avec la même insistance ont serré la mamma, après avoir lui donné vingt-cinq coups de cravache. Elle avait peur: si son cri atteint Akbilek et son âme de jeune fille en panique s’en sort du petit corps doux, elle a serré ses dents, en se laissant uniquement les grincer. Et comment pourrait-elle faire autrement, comment elle peut livrer aux outrages aux infidèles son enfant gâtée protégée du petit vent froid et de la chaleur de soleil?
La nuit méchante de l’aoul insouciant s’est remplie par l’aboiement méchant des chiens. Avant un affreux hurlement des gens s'est levé. Tout le peuple à l’aoul, mais, voyez-vous, seulement trois loups-garous avec les fusils lui ont coupé le sifflet en un moment.
Sur la périphérie de l’aoul pénétré par la peur, le cavalier au visage désagréable et aux sombres pensées courait en prêtant l’oreille et en amenant derrière lui encore deux chevaux. Quand le hurlement s’est levé au-dessus de l’aoul, il s’est dirigé sans précipitation plus loin dans l’obscurité. L’animal au-dessous de lui s'est ébroué bruyamment, s’est tordu. Le cavalier a serré la bride, a vidé les étriers lentement et a sauté sur l’herbe doucement. Après avoir noué solidement les ceintures d’attelage de trois chevaux, il s’est incliné, s’est composé comme un loup et s’est mis en mouvement en avant. Cinq-six pas prudents et ses oreilles ont capté un son incertain passé à travers l’aboiement incessant terrible à l’aoul, il était proche au frôlement des plantes. Il a fait encore un pas — son pied s’est arrêté au-dessus du trou, dans lequel quelque chose se remuait faiblement.
— Tonton... — la voie a murmuré.
— C’est toi Akbilek? — comme il le savait avant.
— C’est moi, sauve-moi, tonton, — et elle s’est mise à sortir de la petite caverne.
— Je vais te sauver. Cache-toi. Reste couchée encore ici, — a répondu le Kazakh et s’est caché avec agitation.
Et Akbilek est restée avec les bras tendus. Et cet homme il paraît s’est arrêté quelque part tout prêt, il paraît il est monté à cheval et s’est pressé. Peut-être il a décidé de revenir la chercher à cheval et maintenant elle est sauvée de la mort. Seigneur! Elle a imploré, mais le bruit des sabots ne s’est pas approché, mais a commencé à s’éloigner. Les bras se tenaient encore, comme s’ils attendaient une aide d’ange de l’armée de Sauveur, mais le claquement est plus loin et plus loin... il s’est éloigné au galop.
Les bras se sont surmenés, les genoux ont glissé en bas, et, il lui semblait qu’elle tombait dans le zindan[3] souterrain sans fond.
L’aboiement désespéré de la part de l’aoul s’est calmé, le jappement des chiots a remplacé le grondement méchant des chiens, et parfois une chienne poussait des cris perçants. Et ensuite comme quelqu’un a sifflé. L’aboiement éloigné des chiens a commencé à s’approcher de nouveau, il déchirait déjà, r-r-r-r!.. Et la mort avec le grondement va se jeter sur la pauvre. Et encore le bruit des sabots de chevaux à l’aoul. Quelque part à côté on a commencé à parler à mi-voix. Le cœur d’Akbilek a commencé à palpiter frénétiquement. Mais qu’est-ce qui pouvait lui arriver encore si le sabot au-dessus d’elle a résonné! Pour cacher les fracas dans sa poitrine, elle a couvert le cœur par ses mains. Et ce ne sont ni les pierres ni le fer, c’est la mort qui a grincé, s’est mise à frapper dans les tempes. Et comme ses précurseurs trois visages froids ont sailli au-dessus d’elle. Le trou est devenu plus profond comme le tombeau. Elle se battait contre les murs froids en terre comme une alouette dans la cage. Elle est devenue folle complètement:
— Petite maman, aïe!
Sa voie s’est emporté vers les montagnes et s’est cassé avec le bruit contre les roches. Malgré que sa bouche fût serrée par les doits impatients forgés, son appel désespéré s’est débrouillé avec elle pour un moment et est monté de nouveau, a atteint et s’est enfoncé dans les oreilles de la mère. Perdue dans l’obscurité et la douleur la mère s’est jetée comme un hibou sur le cri de son petit. Elle a rejoint, on ne sait pas comment elle est arrivée à arracher sa petite belle aux deux soldats et la couvrir de soi. Les Russes la tiraient de sa fille de mille façons, enfin, par les crosses, et elle, après avoir laissé la fille, s’est accrochée à eux. Elle a renversé le premier, le deuxième, et s’est mise à les battre, le troisième a reculé. Akbilek libérée s’est jetée vers sa mère, mais après avoir vu de quoi celle était occupée, s’est précipitée pour revenir dans son trou, la mère s’est jetée derrière elle. C’est à ce moment que le militaire resté de côté a tiré directement sous l’omoplate de la femme.
— Allah! — elle a poussé un cri et est tombée.
Les trois Russes ont mis Akbilek à travers le cheval et se sont cachés.
La petite appelait avec avidité à sa mère, la terre et le ciel se sont mis à trembler, les sabots grondaient, suivis par les montagnes, les chiens se sont mis à aboyer de nouveau. . .
— Où, comment? — et la poursuite tout de suite.
— Aux chevaux!
La terre, le ciel hurlent, le grincement des pierres. Après avoir remarqué les persécuteurs, deux Russes ont interrompu la couse et ont commencé la fusillade ajustée. Un des persécuteurs s’est brisé, s’est accroché dans la crinière de cheval, en glissant tristement de la selle. Ceux qui galopaient derrière lui ont serré les brides de leurs chevaux, et ont commencé à descendre d’eux.
Qui est-ce qui était ce type sur le cheval bariolé? Qui était ces Russes qui ont volé la fille? Et quel est le nom de celui-ci qui a été blessé par eux dans sa tentative de libérer la fille? Est-ce que ce sont nous qui pouvons dire tous les noms? Ou on fait les répondre eux-mêmes?
On vote. Qui vote pour que tout le monde fasse son propre rapport, levez vos mains. Un, deux... non, laissons lever les mains ceux, qui veulent entendre les voies des héros... Quatre, cinq... Avec moi même — la majorité. Ainsi, laissons-les rendre compte.
Le premier va parler le garçon, qui a attrapé la balle.
Je suis bronzé, de taille moyenne, mes yeux sont enfoncés —, mon nez est en relief comme chez le mouton, mais en revanche ma moustache est comme chez le renard. J’ai vingt-sept ans, à peu prêt. Mon prénom est Bekbolate. Sur ma tête j’ai un bonnet d’hiver en astrakan bordé par le velours, sur mes épaules est le veston de coupe russe, le tchapan pris, serré avec la ceinture en maroquin avec argent, sur mes pieds sont les bottes qui ont marché assez. J’ai un imperméable en cuir, sur la ceinture se trouve le couteau pointu avec la poigné complexe en os et la petite courroie de la housse pour le tambour — on ne dirait pas que je ne m’intéresse pas à l’art.
Je suis un garçon de la famille riche, à vrai dire, par rapport aux normes d'aujourd'hui, de la famille aisée. On avait cinq cents moutons, deux cents chevaux, presque cinquante vaches, le nombre de chameaux atteignait le vingt, maintenant rien n’est resté des troupeaux anciens.
Depuis plusieurs années notre père a été le président du peuple, il a été à la tête de l’aoul et a jugé aux alentours. On peut le présenter comme l’autorité. Le frère ainé après son mariage s’est séparé, en recevant sa partie d’héritage. Le petit frère fait ses études à Semipalatinsk. Après la mort de ma mère à cause de phtisie en année de Cheval le père s’est marié avec une blanchâtre au nez en boorsoq[4], la fille pauvre qui coiffait sainte Catherine, après avoir payé au-dessus de la rançon encore quinze têtes bovines. Depuis elle est à sa charge.
Non seulement que le père payait l’impôt fixé à la mosquée et suivait strictement toutes les prescriptions au mois sacré du Ramadan, il avait près de lui le hadja tout rond avec la moustache retroussée. Le hadja paraît-il nous enseignait, les enfants. Nous avons souffert avec lui sept ans, en été dans la yourte mise séparément, en hivers dans le séjour de la maison. Malgré que je me défendais, et proférais des obscénités, en goûtant le bâton de professeur, cela revenait au même, on m’a appris à lire et à écrire. Seulement après que le père a mis dehors le hadja à cause de ses passe-temps avec la voisine, nous avons respiré plus à l’aise. Et c'est reparti à partir de quinze ans, après avoir écouté les bobards gais des garçons expériencés, je ne laissais pas tranquille aucune jeune femme, je marchais à pas de loup les nuits, forçais la porte, me frayais un chemin, pénétrais, arrachais... Je me suis fait une compagnie avec les djiguites braves parfaits, j’étais insatiable pour les jeux et les farces, j’ai appris à chanter et à jouer de la dombra, à tirer du fusil, à chasser avec les chiens courants et avec les aigles royaux. J’ai nourri autant d’oiseaux, j’ai guéri, dressé et perdu, que j’ai appris à parler la langue des oiseaux. Miracles, et plus encore! Au-dessous de ma selle est le coursier infatigable, sur mon bras est le faucon féroce, je suis habillé à la mode, je fais le tour de tous les bords, je chasse des canards et des oies, et les soirs noirs je guette les beautés, mais laquelle d’elles peut résister mon charme!
Et le père a ses soins, il juge et réconcilie toujours, en pénalisant les voleurs, en démêlant des chamailleries, en justifiant les innocents, en faisant rencontrer les juges le nez à nez. Tout le temps en voyage, mais s’il est à la maison, il est assis et parle des secrets avec les visiteurs et indique le droit chemin aux justiciables. Bien sûr, autrement ce n’est pas possible, les gens vont faire de bêtises. Mais moi au contraire de mon frère ainé je ne me mêlais pas dans ces affaires. Je ne suis pas amateur de parler, j’ai mes intérêts à moi. Mais eux aussi, il y a longtemps ils ont fait leur deuil de moi, à ce qu'ils disent, il est né comme ça, parfois ils louchent mécontentement, il arrive, ils louent quand je reviens de la chasse avec la bête à fourrure chassée, mais pas plus. Car toutes ces discussions des clans me sont égales ainsi que l’honneur de clan. Si, bien sûr, la bagarre doit arriver avec les étrangers ou il faut faire revenir la femme qui s’était enfuie de son mari, j’étais avec les autres.
Le père voulait me marier avec une fille maigre brune, mais je me suis défendu et a commencé à parler de la fille de Mamymbek Akbilek, sur laquelle j’ai déjà appris tout. Moi, comme fiancé n’étais pas attendu avec les bras ouverts, même comme invité on ne me voulait pas voir spécialement, on pensait peut-être que je convoitais plus pour la dot. Mais après, je pense, le père de la fille unique, à laquelle il paraît que j’avais aussi frappé à l’œil, a décidé de ne pas casser sa sort de sa manière et a envoyé un homme avec le message: laissons-la décider toute seule, et tout de suite je me suis précipité chez elle.
J’ai du revenir quelques fois et courir à toute vitesse qui arrivera le premier avec les lièvres roux qui sautaient de derrière des roches, pour ne pas les laisser couper l'herbe sous nos pieds. Si non, on ne serait pas à temps.
En s’approchant vers l’aoul nous avons entendu les chiens affolés, nous nous sommes arrêtés, et tout à coup on a entendu la piaillerie plaintive d’Akbilek: «Petite maman!» — et ensuite — le coup de feu, quelqu’un l’a prise de la place, ils s’emportent, et moi je n'ai pas pu résister, je pense, je vais y laissé ma tête, mais je ne vais pas les laisser partir comme ça! Je me suis jeté à la poursuite d’eux. J’ai commencé à attraper deux cavaliers, quand tout à coup la balle s’est enfoncée dans mon épaule droite, ma vue s'est troublée, tout autour s’est mis à tourner. Ce qui s’est passé avec moi après — je ne sais pas. Oui, mon ami, qui pourrait attendre le pareil! Miracles, et plus encore. Ils se sont mis autour de moi, ils ont eu peur, il faut croire qu’ils n’ont pas continué la poursuite. Si non, ils auraient rattrapé. Il est dommage jusqu’à l’abêtissement, on s’est mis, et on t’envoie au tombeau! Parents-amis, suis-je responsable de quelque chose? De ce que j’ai lâché Akbilek? Si dans votre âme une pitié a bougé soit comme une petite mouche, pourquoi vous vous dressez telle une colonne?
Il est possible, que les Kazakhs ont le droit de nous reprocher et les vols, et le kidnapping de la jeune fille, et la mort d’une personne; ils ont, on avoue, les raisons de penser à nous, comme aux bandits. Comment on peut leur expliquer nos objectifs et les faire nous comprendre, à eux, séparés par les montagnes et n’ayant aucune idée de ce qui se passe dans ce monde, vivant comme des animaux féroces.
Permettez-moi, messieurs, y-a-t-il une personne qui désirerait son exile du pays natal, la séparation avec les gens proches et les aimés? Qui n’aimerait pas la paix et la vie insouciante, remplie par le sens élevé parmi eux? Qui n’aurait pas un rêve de la rencontre fortuite avec la belle femme dans le jardin sombre, de l’étreinte douce et du murmure ravis sur l’oreille? Chacun est libre de vivre comme il aime, mais pourquoi la vie se passe autrement? En quoi consiste la justesse de sort, en avantageant une personne par le bonheur et l’autre par le malheur? Tout est prédéterminé précédemment. Et il ne reste pas à l’homme que se soumettre au hasard. L’Univers nous impose son choix irrévocable: la liberté lui est étrangère.
S’il n’était pas le sort universel, serrions-nous parmi les Kazakhs dans les mors de montagnes entre la Chine et l’Altaï? Je suis le fils cadet du propriétaire de la province de Tambov. Mon grand-père dirigeait l’armée lors de Sa Majesté Impériale Alexandre II pendant la campagne turque, et son chemin guerrier a été auréolé de gloire. Le père aussi a fait la guerre, est parvenu au grade élevé, au déclin de l’âge il est revenu à la propriété patrimoniale, il semait le blé, dirigeait l’exploitation richement. Le vaste espace des champs bien entretenus, le jardin ombreux, la propriété en pierre, l’écurie avec les coursiers, le chenil avec les lévriers... tout cela était!
Un de mes frères a terminé la faculté juridique de l’Université et ensuite avec moi il s’est inscrit à l’Académie militaire. Parmi quatre frères moi, je suis le plus minable, mais au front allemand je me suis fait remarqué le premier, j’ai été monté en grade. Sans réfléchir nous sommes allés à la guerre pour défendre le tsar, la patrie, notre peuple. Et si on n’était pas à la défense des frontières natales, si nous n’avions pas eu de notre puissance militaire, à nous les Russes, est-ce que ces Kazakhs ignorants auraient vécu en bonne santé et prospérité? Ils doivent nous être reconnaissants déjà uniquement pour le fait qu’ils se sont cachés au-dessous de la main souveraine à l’intérieur des frontières russes. Et quelle était leur utilité pour l’état? À moins qu’ils payaient les impôts de quatre roubles de l’exploitation et assuraient les stocks d’alimentation? Ils boivent du koumis, en amadouant le ventre, et regardent les femmes en frottant leurs cuisses. On s’est mis à les appeler uniquement pour les travaux de l'arrière, non, ils se sont entêtés tout de suite, ils ont eu peur. Les Kazakhs ont le trouilloment à zéro du service militaire. Ils avouent que lors de l’obtention de la citoyenneté russe, l’impératrice Catherine a fait un serment d’un trait de plume sur l’accord de ne pas leur mettre sac au dos pour recruter aux soldats. Proprement dit, la mauvaise volonté peureuse des Kazakhs de faire le service militaire n’a soulevé des objections spéciales à personne. Qui pourrait cautionner, que l’arme qui est passé dans leurs mains ne serait pas retourné contre nous, si on devient les ennemis tout à coup? Dans ce cas l’intégrité de l’Empire Russe pouvait être menacée. Il est tout à fait possible, que l’arme dans les mains, eux avec leurs terres, leur bétail, ils pouvaient révolter et se trouver sous la domination d’un autre état. On ne peut pas penser sérieusement, qu’ils sont capables de vivre indépendamment. Cela vaut dire, qu’ils doivent se soumettre à nous, les Russes. Il n’y a pas dans le monde entier de nation qui est capable de prendre soins d’eux de la façon plus fiable. Peut-être ils sont vexés à cause des terres. La terre appartient au trésor. Naturellement, si un manque des terres arables arrivait, on était obligé de transmettre aux paysans celle qu’ils croyaient la sienne. Ils en ont en trop. Tous les Kazakhs pensent, qu’ils ont le droit, comme avant, mener une vie nomade sur toute la steppe, comme il leur plaît. Mais à part eux dans le monde il y a d’autres peuples; et eux aussi ils ont besoin d’être nourris. C'est pourquoi ne te fâche pas, si les surplus de terre sont transmis aux autres. Toi aussi tu dois semer et récolter la moisson, construire les villes et y habiter. Dans ce cas le monde ne sera petit pour personne sur la terre. Mais les Kazakhs ne désirent pas le comprendre.
Les Kazakhs se croient humiliés et nous accusent. Et quelle forme serait prise par leurs vexations, si d’un coup ils étaient armés et les unités militaires kazakhes se trouvaient autour des villes et villages russes? Est-ce qu’ils ne se mettraient pas à voler et violer? D'ailleurs, le pareil a eu déjà lieu. Encore hier à Sémiritchier, quand on a coupé aux colons les lots de terrain, les Kazakhs se sont mobilisés en toute l’armée. Est-ce qu’ils ne déchiquetaient pas les paysans innocents par les lames? Ils prenaient leur bien, violaient les femmes? Rappelons-nous du joug tatar moqueur de trois cents ans, les Kazakhs y sont mêlés, et est-ce que la férocité qui régnait à cette époque n’est pas leur affaire? Les ambassadeurs russes arrivés à Horde ont été écrasés par le plancher en bois et on y a festoyé. Alors, mes chers, vos entreprises sont aussi connues. À Dieu ne plaise, si vous tirez une bonne carte, c'est peu probable que vous allez avoir de la pitié touchante à notre égard. Et quelle malchance, le cas ne se présente pas.
D'ailleurs, les Kazakhs ne nous inquiétaient pas spécialement. Personne ne supposait qu’on se retrouverait ici. Tout simplement l’Empire s’est renversée, s’est fendue en deux, le tsar est hors de trône, le pouvoir est usurpé par les idiots prolétariens, la soldatesque et les bolcheviks maudits, mais nous, les meilleurs fils de Russie, révoltés contre la dictature en reculant dans les combats à mort, se sont retrouvés au bout du monde. Ceux qui ont couru à toute vitesse se sont sauvés en Chine. Et nous, à peu près soixante-dix officiers de l’armée et de la flotte, les débris de toutes les unités reculant, nous nous sommes accrochés par les pierres d’Altaï et nous résistons les rouges comme nous pouvons. Ils ont projeté de faire nous mourir de faim, achever par les gels, quand il n’y a ni médicaments ni cartouches. Et autrement ils ne sont pas capables de nous y achever, là où il y a une entrée, mais il n’y a pas de sortie. Est-ce qu’ils pensent sérieusement, que nous comme ça, les mains croisées, vont mourir tranquillement dans les montages? Ils nous obligent eux-mêmes d’attaquer les Kazakhs et prendre le bétail sous le couteau, les feutres au-dessous du corps, les couvertures, d'ailleurs, et la vaisselle n’est pas en trop pour ceux qui sont encore vivants.
Vaut-il dire, que dans la crevasse déserte montagnarde, n’inspirant que l’ennui l’homme normal va s'abêtir sans les trucs connus? La concupiscence... la passion qui est loin d’être élevée, mais, je regrette, nous sommes jeunes, le sang dans les veines n’est pas encore froid. L'enfer avec la concupiscence, tout simplement on est fatigué d’être en colère discontinue et être prêt de s’entre-dévorer. Et nous savons aimer, sans s’imaginant la vie sans femmes, on n’est pas les derniers gars dans le village, sans doute. Et qui ont les femmes? Les Kazakhs. Ils sont aussi les gens. Les yeux noirs des femmes kazakhes ne cèdent pas par leur magie aux yeux européens. Si, bien sûr, on n’attend pas de leur part du charme des coquettes parisiennes.
L’aversion des Kazakhs à notre égard peut s’expliquer seulement par leur ignorance, qui leur est propre, ah, quel malheur, on ne plaît pas à leurs femmes non plus! Mais nous n’avons pas besoin de leur amour, nous avons besoin des filles. Et nos cœurs appartiennent aux beautés russes, n’est-ce pas? L’arriération met au monde l’aliénation, le peuple éclairé n’évite pas l’autre peuple, est-ce que les Kazakhs instruits de la manière européenne se mettraient se marier avec les filles russes s’ils ne tombaient pas amoureux?
Et si nous tuions les Kazakhs, cela s’est formé dans l'ivresse du combat, dans une confrontation folle... D'ailleurs, il est pareil: achever l’homme, et achever la poule, les deux tordent une-deux fois et c’est tout. Qui le sait d’où ça vient: ou on s’est habitué en vivant parmi la masse des morts, ou on est dévasté par la mort à l’intérieur... En principe, qu’est-ce que c’est que la vie, et la mort? L’homme naît pour mourir. Quelle est la différence: maintenant ou demain? Sans sourciller, toute la vie passe. C'est pourquoi, il faut prendre tout de la vie, tout l’enthousiasme et tout l’agrément, que ses moments promettent. Après il n’y aura rien. Et en avant l’hiver de loup aux oreilles rouges fait peur par la lame.
Les rouges sont partout. Demain c’est le froid, la faim, la mort dans la bataille. Et la mort est irrévocable, quelle que soit son apparence quand elle arrive. Si cela n’est pas aujourd’hui, cela sera demain, après avoir franchi la ligne de l’existence terrestre, nous allons perdre complètement le dernier espoir de voir nos proches et nos aimés, la maison paternelle, et qui alors prendra la liberté de nous désapprouver, que nous à l’agonie, on tuait et enlevait les femmes? Mais nous sommes vivants encore pour instant. La vie c’est la survie tous les jours. Et nous survivons. Les Kazakhs nous accusent, sans nous connaitre, et nos objectifs et nos idéaux non plus. Qu'il en soit ainsi. Tout le monde est pire.
Je suis de basse stature, avec le nez acuminé à peine, un gars essorillé, aux yeux à fleur de tête, avec les cheveux hérissés au-dessus du front bas. Mon âge est environ trente-cinq ans. Mon père est Toybazar, et moi-même je m’appelle Moukache, je n’avais de chance ni dans la selle, ni à table. J’ai gardé des chèvres chez un petit propriétaire avare, peu soigneux, vilain. Là sur les pâturages d’été les gens se délectent du koumis, font le fanfaron couchés sur le côté, avec indolence et ivrement, et moi habillé en pantalon déchiré, je chasse les chèvres rétives à partir de la masure sur les sentiers de montagne. Les gars commencent à peine à s'amuser sur la balançoire, à jouer au clair de la lune avec les chansons et les quolibets batailleurs, mais on me pousse déjà sur le dos vers la couche déchirée près de la yourte de bay: «Couche-toi, tu dois te lever tôt». Dès que je commence à dormir comme une marmotte, on me pousse de nouveau: «C’est l’heure! Mets les chèvres aux montagnes!» et on finit de réveiller par le coup de pied. Rien à faire, on frotte les yeux et on conduit les bêtes à cornes d'un air sombre, après avoir eu du temps d’avaler seulement une tasse de lait caillé. Jusqu’au grand soleil on chasse les chèvres, on lance les pierres dans leur dos et s'égosille.
Jusqu’à l’âge de quinze ans j’ai fait paître les chèvres de Chimanbay, c’est un imbécile qu’il faut chercher! Je lui dis: je suis mort de fatigue en marchant, non, il ne m’a pas permis de faire paître sur le cheval, en craignant qu’il causerait des dégâts à l’herbe des chèvres, soit disant, elles ont droit à leur propre herbe spéciale, et l’autre ne leur convient pas. Et avec le jeune taureau il n’y a que des tracas, le soir on le détèle, il donne des coups de corne, comme une vache folle, il tord la gueule, mais le matin il n’est pas possible de mettre la selle sur cette puante bête remuant, ce n’est pas l’équitation c’est un malheur.
Une fois la nuit je n’ai pas résisté, je n’avais pas de sommeil parce que les gars y s’amusaient, et j’ai couru aussi jouer, j’ai pensé vaille que vaille, comme Dieux le veut pour moi. On a commencé à jouer au cache-cache; j’étais le chien aux oreilles noires, et un gars était le loup. Il a emporté, comme c’est l’usage, et a caché au loin une gamine Ayche. J’ai couru en sautant la chercher et je vois que là autour d’elle déjà un autre tourne, soi-disant un grand gaillard «aux oreilles noires».
Allez à la malheur, je me fâche: c’est moi qui dois être à sa place; j’y pensais tout le temps, quand le lendemain, après avoir conduit les chèvres vers la source et après avoir entravé les pieds de jeune taureau, à midi je me suis mis à m’installer dans le lit sec, j’ai penché mon dos contre la pente raide, je tombais de sommeil. Tout à coup quelque chose a brûlé mon visage, on peut dérailler. J’ai eu peur. J’ai sauté sur mes pieds et je me suis jeté on ne sait où, comme un malade. J’ai regardé en arrière, et derrière moi Chamanbay va à toute vitesse sur le cheval gris, en agitant la cravache. Je me démenais partout comme une mouche, pas de salut, pas de possibilité de me cacher, je me suis retourné en lui tenant le visage: sus! Toute ma faute c’est ce que je me suis endormi, toutes les chèvres sont intactes.
J’ai eu une idée de me venger, mais je tenais ma langue au chaud. Il y avait encore un berger fâché contre son bay. Voilà moi et lui, on s’est mis d’accord et on a égorgé deux moutons de Chamanbay et une paire de brebis du maître de ce gars, on a noyé la viande dans la source froide, et on la mangeait tout le mois. On déglutissait avec peine (l’eau avec le temps fait disparaitre le goût de viande), mais on a bouffé toute la viande. Bien sûr, notre vol s’est révélé. Un berger, comme nous, nous a dénoncés. Chauve, comme la tête d'oignon, il essayait comme le chien de gagner les faveurs de son maître. Bien sûr, Chamanbay a calculé de ma rémunération deux fois plus, qu’il avait perdu, lui.
Ensuite j’étais gardien de chevaux chez un richard, c’est alors que j’ai commencé à devenir raisonnable un peu. Je procédais déjà tout-seul: tout-seul je rattrapais des chevaux éloignés du troupeau, dressais les chevaux sans aucune aide d’autres gardiens. J’allais au service de nuit tout seul de nouveau. Les tempêtes de neige ne m’empêchaient pas avec mon troupeau. Tout le danger fait une personne de l’homme. Seulement tiens-toi debout fortement contre le vent froid, les sabots des étalons féroces, les bandes de voleurs et de loups pendant les nuits infiniment noires. Le battu par le vent est capable de seller le vent. Toutes les distances, tout le danger sont uniquement l’amusement pour moi. Parmi les chevaux je suis devenu comme je désirais. La passion ranime: je faisais paître les chevaux et j’ai sauvé le tempérament gaillard.
Maintenant les femmes ont commencé à me remarquer, elles aussi. Mon nom a commencé à signifier quelque chose, on peut juger d’après mes vêtements: en bon état comme il faut. J’ai commencé à amorcer les femmes, celles, qui étaient plus pauvres, j’ai assez joué avec elles. Il arrivait, on amène chez la femme pareille tout le cheval pour la viande, et on retranche la perte au compte des loups. Le troupeau de bay m’a permis d’amasser la rançon, et de me marier. Je me suis adapté de refaire la marque au fer chaud et sur les chevaux aux autres, et j’en avais pas mal d’eux aussi. Et devenu l’homme de famille je me suis mis de respecter le carême au mois de Ramadan.
Engraissé sur les chevaux, je me suis ennuyé quelque peu, la bride courte n’est pas pour moi, je pense: soit qu’il soit, et je me suis engagé sur le bateau. J’ai vu toutes les villes le long du courant d’Irtych: Öskemen, Zaysan, Semeï. J’ai appris à parler russe un peu. J’ai flâné tout simplement parmi les Russes et j’ai commencé à me sembler quelqu’un d’impotence, la poitrine bombe en avant. Tout ce que je faisais me semblait correct. Je trouvais le langage commun avec les Russes nécessaires, et avec les Kazakhs nécessaires. J’ai appris tout ce qu’ils savaient faire — et mentir d'une manière cohérente, et faire courir un bruit, et cacher pour moi ce qui était mal rangé, et user de ruse ainsi que rouler dans la farine. Je suis devenu pas pire que chacun d’entre eux, car j’ai vu et j’ai pigé pas mal. Et je suis devenu le maître de juron, s’il le fallait, je pouvais remettre à sa place en russe: «Kakoy chort! Kak jé / Nejoly, ne imeyech prava/..» (« Zut ! Et comment / Vraiment, tu n’a pas de droit ») Maintenant je ne me perdrais nul part. Si la bisbille, la bagarre commence, ce n’est pas moi qui vais être battu. Quand je naviguais en bateau, je levais dix livres pour serrer la mesure. Je pouvais mettre sur mon dos n’importe quelle carcasse. Personne ne m’arrive à la cheville parmi les compatriotes, pourquoi je dois les prendre en compte? Je n’ai pas réussi dans une seule chose: je ne suis pas venu au bout de l’art de lire et d'écrire. Mais je ne suis pas le seul pareil. Hélas! Si j’avais su lire et écrire, j’aurais fait couler la rivière Kourchim en arrière ou j’aurais trouvé encore quelque chose comme ça...
Et quand je suis revenu sur la selle en argent chez mes parents, je me suis mis à m’intéresser à la politique, j’ai eu une idée de me caser à une fonction, mais la guerre a commencé, et ensuite le coup d’état. Les blancs courent, les rouges attaquent, ils sont entrés dans toutes les villes. Quand j’ai entendu dire, que les bolchéviks sont pour les pauvres, ils nomment ceux qui s’inscrivent aux bolchéviks les présidents des aouls, même du voloste[5], donnent un fusil, «ponimayech» (« comprends-tu »), on te donne un fusil, du bétail de bay et des femmes de bay collantes — qu’ils enlèvent la terre auprès les richards et la transmettent au pauvre peule, j’ai eu des insomnies et toute la gaieté a disparu. Je marche et je réfléchis: et si je m’inscris aux bolchéviks et reçois le fusil dans mes mains... Je ne vais pas vivre dans ma peau, si je ne réalise pas ce que j’ai projeté. Un Kazakh se saignait de la façon suivante: «Chort ty briy, vot ya y kyrychonniy» (« Ah, Diable! Voilà je suis baptisé. ») Moi aussi j’ai décidé: ah, on n’échappe pas ce qui doit se passer, on ferra le point après, et je suis allé et me suis inscrit à la cellule et a pendu sur l’épaule le canon à cinq charges.
J’ai comparu à l’aoul sévèrement: on s’est précipité d’égorger le mouton pour moi, de telle façon je me suis mis à exécuter mon service, tirant de temps en temps en l’air pour faire peur. Eh bien, comme de juste, j’ai confisqué l’arme qui était resté des blancs, j’ai effectué des perquisitions dans les maisons des individus suspects, j’ai confisqué les produits selon la directive, appelé prodrazverstka[6], et tout autre ce qui pouvait être utile pour le pouvoir. À vrai dire, les gens ont commencé à me tourner le dos avec hostilité, on m’a surnommé «krechtcheniy» (« baptisé »). Les premiers qui ont commencé à regarder de travers et rire les dents au vent étaient les parents. C'est clair, ils me regardaient avec jalousie, ils ont inventé de tous les galimatias sur moi, ils ont dit autant de bêtises! Rien à faire, comme on dit, si on cloue le bec à la foule, ceux qui se tenaient de côté vont jacasser. Surtout un petit maître d’école local faisait du zèle — le fils du bourgeois Mamyrbay. À cœur de journée, il se plaignait à la ville à ceux instruits, que moi, soit disons, je lui extorquais du pot-de-vin, que je l’ai plumé comme un pigeon, que je le menaçais - emprisonnais. Juste avant ma nomination de président de voloste ce petit maître d’école a amassé les bouts de papier de la part des plaignants avec les dénonciations à propos de moi et les a fourré aux Soviets. On a décidé que je n’étais pas digne, et on ne m’a pas choisi pour le président de voloste. Mauvaise graine de bay! Tant que je vivrai, je vous rendrai tout en totalité! Je me suis fait prendre mon fusil.
Dès le début tout ce que je confisquais aux aouls: les vêtements, par exemple, les denrées alimentaires, les couvertures, les feutres, les tasses et les assiettes, j’ai deviné à faire passer aux résidus des blancs, et je suis devenu le leur parmi eux. Ils ont demandé de leur trouver une jolie fille. J’ai pensé tout de suite à la fille de Mamyrbay Akbilek. C’est le cadeau de ma part à son frère ainé. J’ai souffert toute ma vie de la part des bays, ils se sont payés ma gueule assez. Je souffre toujours de leurs moqueries. Et pourquoi je dois avoir de la pitié de cette petite famille de bay? Je vais aboutir à mes fins, je vais me calmer, et si je n’arrive pas — je resterai l’engeance qui n'est bon à rien.
Akbilek, posée à travers de la selle, s’est pétrifiée complètement du long cahotage et quand on la jetait du cheval elle est tombée sur le sol par le corps mort.
Akbilek a repris connaissance dans une puante demeure tordue faite de six balises, couvertes par le feutre, — le koche, parmi les Russes qui lui sont étrangers en vêtements étranges pour elle.
Tout près, en la serrant par le bras tendu, était couché un poilu en brosse jusqu’aux tempes avec le nez enflé et les cheveux roux emmêlés. Elle fut saisie du frisson à cause de l’odeur chaude s’échappant de sa bouche tombante, comme des vapeurs de soufre infernal. Elle ne comprenait pas ce qui se passait avec elle et où elle était, son regard glissait sur le feutre lourd surtombant au-dessus d’elle, et quand sa mémoire lui a rendu les événements de la nuit, ses yeux se sont transformés en deux sources entrant en ébullition par les larmes.
Le rayon naïf de l’aurore a jeté un coup d’œil avec curiosité à travers du feutre déchiré, a glissé gaiement sur le visage d’Akbilek, mais ne s’est pas précipité de sécher ses larmes ruisselantes; l’obscurité qui avait écrasé l’âme a fait la petite lumière éclatante devenir triste, et l’imminence de l’événement passé est devenu évidente; pas se sauver, mais l’aspiration d’échapper du-dessous de ce bras roux ne renonçait pas. Akbilek a soulevé avec précaution la lourde patte, l’a détournée d’elle, en marchant comme le chamelon sur le sol glissant en regardant en arrière avec précaution elle a soulevé la couverture sur la baie et est sortie.
La masure, d’où elle est sortie, se trouvait au bord du camp de sept koches[7] fatigués avec les fusils y appuyés et toute sorte de frusques y pendues. Ses yeux n’ont été attirés ni par les sommets majestueux de montagne, se noyant dans la blancheur de lait, ni charmés par la dentelle des bois montant vers elles, ni enlevés par l’aigle royal parant dans l’altitude de montagne, ni intéressés par les branches de buisson recourbées d'une manière compliquée; elle a fixé ses yeux sur la cruche usée en cuivre près de l’âtre, sur le trépied enfumé et la luche salie. Pauvre louche! Moi, comme toi, je suis déshonorée, bavée, et les larmes ont commencé à couler de nouveau.
Akbilek marchait vite à pas de loup vers le buisson proche, quand tout à coup le factionnaire situé à la frontière du camp militaire a épaulé le fusil dans sa direction avec le cri: «Stoy!» (Arrête-toi »).
La rebuffade était si inattendue pour elle et si terrible, qu’elle est tombée tordue convulsivement. C’est comme ça qu’elle n’a pas pu s'évader; le Russe qui s’est approché d’un bond derrière l’a attrapée et l’a traînée en arrière dans le koche, Akbilek attrape l’air par la bouche comme un poisson pêché et crie de vive force... mais pas de son. Quand il l’a traînée à l’intérieur de la tanière en feutre, deux poilus qui y dormaient encore ont soulevé les têtes, se sont étirés en se frottant les yeux, et ensuite ils ont commencé à échanger quelques mots en riant en jetant les regards sur Akbilek, ils ont roulé le tabac pour la cousue-main. Il s’est trouvé que le Russe qui l’avait attrapée était ce roux, qui tantôt la serrait par son battoir. En serrant sa taille, il s’est tendu par sa bouche vers son visage, Akbilek s’est détournée, sans permettant de la toucher par la bouche punaise. Les autres se sont mis tout de suite à rire de leur copain roux. Le pâle Russe de haute taille avec la moustache noire dormant plus loin s’est réveillé du rire et sans se lever a examiné Akbilek. Il n’a pas commencé à plaisanter et rire avec les autres, mais est allé vers le lavabo en fer-blanc et en chassant de l’eau de son trayon, s’est lavé en restant plongé dans ses pensés.
Dans la compagnie s’amusant un homme assis avec un masque impénétrable se représente toujours énigmatique. Le rire des autres met sur lui l’ombre de la tristesse.
L’homme à moustache noire a paru à Abiliok justement comme ça — mystérieux, même marqué par la mort. Les choses incompréhensibles l’attirent toujours. Par quoi il a attiré l’attention émouvante d’Akbiolok perdue dans l’esclavage, qui le sait, peut-être, parce que, elle-même elle convoitait de la pitié, peut-être, de la supposition naïve, qu’il était étranger ici, il n’est pas exclu, que la nature féminine s’est faite sentir, qui se manifeste dans la solitude particulièrement grave, quoi qu'il en soit, il lui est arrivé quelque chose pareille.
Et la Moustache Noire soit à cause de l’inéluctabilité de voire la supplication désespérée dans les yeux d’Akbilek, soit à cause d’autres motifs, avec irritation a retiré par parole le Roux, essayant de nouveau de se coller à son visage. Et il l’a arraché de son étau. Le Roux ne lui a pas résisté, mais seulement a secoué la tête mécontentement et a répondu quelque chose. Cependant il a arrêté d’embêter la fille de ses baisers. Les autres en tout silence ont terminé leurs cousue-mains et sont sortis dehors. La Moustache Noire a jeté un regard doux sur Akbilek, a toussé, et ensuite a commencé à parler au Roux, mais déjà avec un sourire moqueur. Au début le Roux se faisant gros comme un bœuf se renrognait, insistait sur quelque chose avec une exigence morose, mais il cédait en scintillant par les prunelles de la manière méchante, ensuite il a commencé à hausser les épaules, s'est étendu, a fixé ses yeux directement sur les yeux de la Moustache Noire en jetant les mots brièvement et méchamment. Ils se tenaient debout l’un en face de l’autre, comme deux chiens, avec le rugissement: «Arc-arc!». Et encore quelque temps la Moustache Noire se jetait sur le Roux montrant les dents, ensuite, renfrogné, s’est retiré du koche. Le Roux est resté debout, a juré évidemment, en serrant les poings, et aussi s’est retiré derrière lui.
On s’est réveillé dans les autres masures: on entendait le clivage en verre dans les voix indistinctes. Certains d'entre eux entraient chez Akbaliok, la perçait par le regard: «Ah, Kizimka...»[8]— et après avoir souri malicieusement, disparaissaient. Akbilek cachait ses yeux des entrants, en attendant douloureusement, quand ils vont la laisser seule de nouveau. Non, ils n’ont pas laissé, ils se sont rassemblés dans le koche de nouveau. Bientôt ils ont suspendu au-dessus du feu de bois le seau avec de l’eau, ont fait du thé et se sont mis à prendre du thé, en trempant du pain sec dans les tasses en fer; après avoir bu assez de thé, ils ont amorcé un dialogue discontinu. Akbilek s’est rappelée comment le père disait: «On offre à ces chiens russes du thé, et eux ils commencent à bavarder qu’on ne peut pas les arrêter». Le Roux, comme il est naturel pour l’amateur de thé lors de l’agrément du thé, est devenu plus doux, couvert par les gouttes de sueur, coulant de tempe sur les joues. Le gonze assis près d’elle lui a tendu une tasse de thé, mais Akbilek n’a pas pris. La Moustache Noire, après avoir disparu, n’est pas revenu.
Après avoir bu assez de thé, après avoir fumé assez, les voisins sont partis. Le Roux a pris le fusil dans ses mains, y a dévissé quelque ferraille et s’est mis à le tourner, frotter, accoler de nouveau sur sa place. Akbilek avait peur, qu’il allait la tuer à l'instant. L’âme volait directement sous le petit bregma, comme si elle faisait ses adieux, encore un peu et elle allait s’envoler dans le ciel. Alors deux Russes, aux vêtements encroûtés au point de bruissement en fer-blanc, sont survenus en grondant par les sabres dans les gaines suspendus sur les ceintures, ils se sont arrêtés sévèrement et ont prononcé quelque chose au Roux d'un ton bref. Le Roux n’a prononcé en réponse qu’une paire de mots et ensuite a commencé à s’habiller silencieusement. Après avoir fait ses préparations, il a tiré fortement Akbilek par sa main et l’a traînée du koche. Le cœur d’Akbilek s’est mis à frapper en attendant le plus terrible. Les Russes se tenaient par groupes et discutaient quelque chose. Ayant vu qu’on a sorti la fille ils se sont dirigés à la queue vers le buisson.
«Voilà c’est ma mort, — a été effarée Akbilek. — Peut-être c’est mieux, s’ils tirent tous ensemble sur moi? Ou ils ont une autre coutume? Et s’ils ont une autre idée?! Aïe! S’ils le font tous, qu’est-ce qui va rester de moi...»
Sur la clairière derrière les buissons les Russes se sont alignés en rang. Trois se sont mis à l’écart. Le Roux a resserré Akbilek vers lui, l’a serré contre sa poitrine et l’a embrassée trois fois sur les lèvres cousues, ensuite accompagné par deux hommes il s’est dirigé vers ceux trois. Là ils se sont arrêtés six. Un d’eux a crié quelque chose à ceux qui ne sont pas allés derrière eux. On lui a répondu brièvement. Le Roux et la Moustache Noire se sont approchés face à face, ensuite ils se sont tournés et se sont éloignés, comme s’ils comptaient leurs pas; après avoir retourné de nouveau et en essayant de ne pas se rencontrer du regard, ils se sont figés l’un en face de l’autre. Le quatre restant s’est écarté et la voix a proclamé: «Un, deux, trois!» celui qui parlait a jeté en bas son bras levé et deux coups de fusil ont retenti. Les Russes se sont précipités en avant. La Moustache Noire a accouru vers Akbilek attendant le dénouement et l’a serrée dans ses bras hâtivement.
Quelque soldats ont levé et emporté le Roux mort. Et la Moustache Noire s’est précipité de conduire Akbilek dans le koche en embrassant et sans la lâchant de ses étreintes. Elle a compris que le duel mortel a eu lieu, mais pourquoi ils se sont éloignés avant? La Moustache Noire l’a laissée pour un instant et est revenu avec un homme aux yeux à fleur de tête, grêlé, aux cheveux bouclés. L’homme aux yeux à fleur de tête a commencé à parler avec elle en kazakh:
— Bonjour la petite sœur, — et il lui a tendu sa main. La langue natale a gagné le cœur d’Akbilek à son égard, elle lui a tendu sa main, mais l’a retirée tout de suite, en faisant revenir dans les yeux l’intransigeance telle qu’elle pouvait encore. Comme il s’est avéré, l’homme aux yeux à fleur de tête était interprète et il était invité pour parler avec elle.
— Tu as plu à ce monsieur. Il est un très grand gentilhomme. N’aie peur de personne. Quand il t’a vu, ici n’a pas pu résister, — et pour donner plus de clarté il a serré sa main contre le cœur. — Après t’avoir vue, il a demandé de lui te donner. Mais on lui a refusé. L’autre est aussi le noble, mais des petits nobles. Et ils se sont querellés, en sont venus aux mains. C’est pour ça que le duel a eu lieu — ils se sont battu en duel. Avant tu n’as pas aimé les Russes, tu es une fille kazakhe des steppes, n’est-ce pas. N’aie pas peur. Personne ne va pas te toucher. Ce gentilhomme va te soutenir du bec et des ongles. Il veut te faire sa femme. Autres gentilhomme voulaient te faire une femme pour tous, mais il était contre, il a dit: ça fait désordre, comme ça on va devenir les animaux. Il sait beaucoup, un gars sage. Lui, il est comme toi un humain. Dieux est le même, l’âme est la même. N’aie peur de lui, il faut l’aimer. Cette personne t’aime. Il va prendre soin de toi. Il va te donner les vêtements, et le manger, il ne te fera pas travailler. Comment ça se passe chez les femmes kazakhes? Elles sont les bonnes. Le bay bat, gronde, fait travailler, elle est sale, mauvaise. Et notre loi russe est bonne: on ne bat pas les femmes, — et il a serré le poing devant elle. — On les a ici, on les emmène au théâtre. On les autorise de se promener, — l’homme aux yeux à fleur de tête essayait fortement de persuader Akbilek, et disait de n’importe quelles sottises.
Parfois la Moustache Noire lui soufflait quelque chose. Akbilek s’est faite petite sous son tchapan de pardessus de tous les jours, en soie, à raies vertes, a caché sous le bas et les pieds, et les mains, et seulement de temps en temps elle lever les yeux remplis par les grosses larmes sur la Moustache Noire et écoutait humblement.
Et le truchement russe bavardait et bavardait sans cesse. Tout de quoi il parlait, ne rentrait pas dans l'esprit d'une jeune fille. Il dit: le grand gentilhomme. Et à quoi ça sert qu’il est le noble seigneur? Est-ce qu’elle rêvait du gentilhomme russe? Il la nourrira-habillera. La belle affaire. Est-ce qu’à la maison de Bekbolata qui la recherchait pour mariage elle entrerait comme la bonne? La Moustache Noire a risqué de sa vie pour elle. D’ailleurs, et alors, Akbilek savait d’elle était belle.
Elle s’est rappelée de sa mère, et les larmes ont commencé à couler de nouveau de ses yeux... sa mère est perdue, pour... Elle n’a pas pu même songer au pareil... A quel mari elle, gaffée, couverte de honte, peut penser, quand elle venait de perdre sa mère à perpétuité? Est-ce qu’elle va être la fiancée à celui-ci, qui a tué sa mère, qui l’a volée, elle, qui a saccagé son aoul natal? Où est son père? Où est elle-même? Qu’est-ce qu’on pense d’elle maintenant? Et pourquoi tu n’es pas morte encore? Quoi encore tu dois supporter? Il vaut mieux que la balle de maman l’aurait touchée... Il n’y a pas de la journée d’hier, et demain... qu’est-ce qui va se passer avec elle... on ne sait pas... Et avec tout ça je suis toujours vivante et comme toujours belle... Mais ce n’est pas moi... Je n’en suis pas responsable... Qui est capable de lui reprocher? Tout le monde perd, et se retrouve perdu. Innocents.
Les pensés tournaient l’une après l’autre dans la petite tête hurlante d’Akbilek, elle a penché la tête, en examinant une petite tâche d’huile dans l’équerre de surtout, quand la main chaude de la Moustache Noire a touché brusquement sa main, accroupi près d’elle. Akbilek fâchée a serré les lèvres, comme elle voulait prononcer: «Comment tu oses!» — mais tout simplement elle se noyait dans l’angoisse sans fond. La Moustache Noire a ordonné l’interprète par le mouvement du menton de les laisser et a soulevé avec soin sa main vers sa bouche. Akbilek ne s’est pas écartée... Il n’y a pas de force, seulement la peur.
•
Après le raid bruyant de nuit sur l’aoul dans les mains de Moukache se sont retrouvés deux chevaux de Mamyrbay, et une seule pensé dans la tête: comment se cacher, comment éviter les soucis de trop. Après avoir laissé, ce qu’il a obtenu, dans le camp des blancs et après avoir entendu de leur part: «Moukachka, bravo!» — lui, en revenant à la maison, il ne pouvait pas se débarrasser de tout le galimatias, qui venait à l’esprit.
Oui, il s’est vengé du petit fils de Mamyrbay avec succès et compétence, après avoir donné sa sœur aux Russes pour le plaisir. Mais quand il la recherchait, ces chiens ont tué sa mère. C’est trop, mais qui savait, que ça allait arriver? Et il paraît qu’un des ceux qui s’étaient précipités pour la poursuite est perdu. Ces héros avant qu’ils couvrent du sang tout ici, ne vont pas lever le camp. Qui le sait, peut-être, celui-ci, qui est tombé sur la balle la nuit, est un de ses frères? Ou ils ne vont pas me reconnaitre? Peut être, ils se fichent de moi? Tiens, ma raison a déménagé complètement. C’est le diable qui me guide, peut-être... Mais maintenant comment on peut arranger tout ça? Il ne va pas y arriver: si ça dévoile, on va lui arracher la tête. Mais je ne suis pas ennemis aux miens, je ne suis pas la mauvaise graine de serpent, je n’ai rien fait de grave...
Bien. Ce qui est fait, est fait, il n'y a aucun recours contre cela...
Et il n’y a pas de quoi discuter... Et si on pense que les richards ne l’ont pas mérité? Est-ce que eux-mêmes ne pillent pas les gens? De quoi le bay devient riche? Tout est obtenu par le dos du travailleur, ils engraissent sur le travail du
du pauvre monde. Je voudrais les voir, si le tayotrche
ne faisait pas paître leur bétail, les faucheurs ne leur amenaient pas de foin, les valets ne chauffaient pas les fours, et les travailleurs ne creusaient pas les puits. Le pouvoir soviétique n’est pas tombé sur leurs têtes tout simplement. Selon le mérite! Qui sait, peut-être, et moi j’étais guidé contre eux par un projet de Dieu…
Et alors, les blancs à force de crever de faim sont prêts de bouffer l’un l’autre, et sans moi, ils auraient attaqué l’aoul.
Si moi, je n’étais pas là du tout, de toute façon il se trouverait un Kazakh qui leur donnerait avec intérêt une fille. Et il y aurait un autre qui se jetterait en poursuite à corps perdu en vengeant pour ses parents. Rien à dire,
il y aurait comme ça et sa fin aurait la même. Bien sûr, chaque cas est spécial, les gens ne sont pas capables de le répéter au juste. Mais c’est sûr: dans le cas qui le ressemble, il aurait sûrement tel que moi. Combien de troupes sont passées ici? Combien de militaires ont essayé de gouverner le peuple, ils les pillent et oppressent. Et quoi le peuple? Rien, il souffre sans mot dire.
Et moi, je suis tout seul. J’ai un fusil. Et dix personnes ne vont pas prendre le dessus sur moi. J’ai appris à tirer chez les Russes, et j’envoie la balle dans la balle. Le jour je suis prudent, peu marquant. Mais la nuit j’arrive à mes fins... De quoi avoir peur? Malgré qu’il y a la peur, dès le début il ne me fallait pas me mêler de cette politique. Il ne me fallait pas m’inscrire à cette cellule, me fourrer dans la recherche des ennemis avec le fusil pointé. Non, je n’ai pas peur de la mort, on ne l’évite pas. Mais il y a morts et morts. Et la mienne est maintenant telle... uniquement elle va faire les gens me pardonner. C’est vrai, jadis je passais pour un gaillard, un luron et avais mon prix à la société. Attention de ne pas tomber de la selle...
Avec ces pensés Moukache est rentré à son aoul. L’aoul se trouve sur la pente ensoleillée de la grande montagne, et dans la dépression il y a cinq-six bâtisses basses. Elles toutes appartiennent à ses parents, et le chef pour tout le monde ici c’est Moukache lui-même, l’aksakal est le mollah Tézekbay.
Tézekbay n’est pas même capable d’écrire son nom, rien que la renommée du mollah. De quarante hadiths du Prophète appris jadis il se rappelait seulement de «halanabi gaylaysalam — ayt é paugambar galay salam». Il cite le Dieu et la mortalité de l’existence de l’humain lors de l’enterrement, la consécration des galettes funèbres et la même chose lors de la perte du bétail voilà toute sa messe; lors de la rupture de jeûne, il arrive qu’il marmotte, prononce une paire de mots arabes et c’est tout. Et lui il répète sans cesse: aytyl-koursy. Il répète la même chose lors des sacrifices et lors de la bénédiction, et s’il arrive qu’une femme ait l’anémie — de nouveau aytyl-koursy. À part les siens, personne ne le reconnait pas le mollah. Et lors des enterrements ailleurs il n’en a pas sa part de profits, si, bien-sûr, il ne faut pas enterrer les parents, les marieurs etc... Comme on dit, il n’en est résulté de dévotion, ne de connaissance du Livre Sacré. C'est pourquoi il n’est pas invité, et on ne l’autorise pas de faire le tour des musulmans et collecter l’impôt et les dons leur dus selon la foi; d’ailleurs, lui-même il ne supportait pas les insatiables aux régalades auprès les foyers aux autres: «Alors, qu’est-ce que tu veux? Il aurait fallu rester couché chez toi!»
À vrai dire, il n’y avait pas de mal spécial du mollah faux, si on ne compte pas ses remarques grogneuses à la vielle femme pour sa négligence ainsi que le fade brouet maigre, quand lui, promené un peu dans la steppe avec un bâton bien raboté mis à travers des reins et ayant suivi de loin les veaux, revenait à la maison. Et son mécontentement de la malpropreté de la vielle est plus de l’âge de vieillard, on ne peut pas dire que Tézekbay lui-même dès sa naissance était trop propre.
Soit qu’il en était, Tézekbay était respecté dans son aoul. En tout état de cause, soit le retour pour l’hivernage, soit la naissance du bébé, on le mettait au siège de complaisance et en face de lui on mettait un plat avec la tête de mouton proprement brûlée et cuite et avec l’os iliaque charnu. Et il était le premier à qui on apportait du colostrum à l’heure, et du koumis, et s’il arrivait qu’il n’était pas à table, on envoie les belles-filles le chercher: «Appelez le mollah!»
En poussant pour la montre son origine des masses opprimées, Moukache, au contraire, a fermé Dieu dans sa conscience avancé, mais lui, malgré ce pas si prémédité, il avait du respect au mollah, en essayant de l’éviter, ce qui était simple: il n’avait pas de quoi parler avec lui, il savait tout lui-même. Lors de la rencontre inévitable il le saluait comme il faut, mais pas plus ... Son comportement était clair pour le mollah, et lui aussi il essayait de passer plus vite et n’essayait pas d’entrer en conversation. Il n’a pas de façon pour l’homme de l’âge vénérable qui se respecte s’arrêter et en faisant du blabla avec n’importe qui.
Approché de l’aoul Moukache a éprouvé une crainte futile: «Le mollah est le dernier que je voudrais rencontrer». Il a tiré la tête dans les épaules, s’est courbé vers l’arcade de selle.
L’hivernage de Moukache sortait de l’aoul à l’est. La pierre féroce des murs aux rayons du coucher du soleil reflétait par la lumière pourpre malicieuse. La demeure de mollah s’est mise en avant majestueusement à côté par la porte grande ouverte. Le chien rouge couché sur le seuil, après avoir entendu le craquement des pierres au-dessous des sabots, s’est mis à aboyer. Malgré que Moukache ait pressé en précipitation le cheval vers la porte de son hangar, tout de même il a été accroché par un œil pas cligné de mollah sorti avec une cruche pour le lavage, en caoutchoucs et le tchapan d’hiver jeté sur ses épaules. Comme ça il va arracher mes pensés secrètes, Moukache s’est précipité de se cacher de mollah. Au-dessous du toit un petit chiot s’est mis à aboyer sur lui, mis pied à terre pour dételer le cheval au plus vite. La porte qu’il a fermée s’est ouverte et sa femme bronzée rondelette Altynay en trottinant et en s'enveloppant dans la pelisse s’y est fourrée. Mécontente, en tordant la bouche, elle a jeté: «C’est toi, ou quoi?» — et elle a disparu.
Moukache a répondu à voix basse dans le vide: «C’est moi», — il a installé le cheval, et lui-même — chez lui.
La puanteur de fumé habituée de la demeure basse avec une seule petite fenêtre miro a chauffé le nez par l’excédent. Il était aussi agréable de voire sur le tapis de ménage son fils de trois ans Médey au petit front plat et la morve bleuâtre au-dessus de la petite bouche ouverte, se tournant en dormant et jeté ses petits bras mignons de dessous de la couverture rouge en indienne. Il voudrait respirer délicieusement le parfum de son petit fils, mais quelque truc s’est installé dans sa tête à travers son désir. Et il n’a pas osé de toucher l’enfant angélique. Il paraît qu’il a eu honte: d’abord de mollah, et maintenant et de son enfant dormant. Et il a tressailli, comme s’il y avait un chien qui s’est approché à pas de loup vers son pied et a rugi. Mais sans réfléchir trop il a prétendu de donner un coup de pied au chien invisible directement dans la gueule: «Tais-toi!» — il a enlevé la ceinture, a arraché du lit l’oreiller rouge, l’a jeté près de la fenêtre et s’y est couché, ayant tiré les genoux vers les coudes.
Altynay, assise sur le banc sale couvert de la paille a enlevé son foulard et resté seulement en son surtout de nuit s’est mise à accomplir l’ablution avec application, comme si elle se préparer pour la prière, et ce faisant elle se mouchait avec du bruit. Elle est revenue au lit, en essuyant par un chiffon déchiré on ne sait quand les mains rouges comme léchées par le bouc.
— Pourquoi tu t’y es recroquevillé comme ça! Que faire avec le cheval? — elle a grogné sur Moukache.
Mais il n’a pas même levé sa caboche, seulement a passé à travers ses dents:
— Fais sortir vers midi!
Altynay a fixé son regard sur le mari et a commencé à parler avec irritation:
— Voyons! Tu ne te lève pas pour lui donner à boire? J’ai chauffé déjà.
— Non, — a répondu Moukache et a couvert sa tête.
Altynay n’était pas spécialement préoccupée par les disparitions fréquentes de nuit de son mari, ça doit être d’usage pour son service. Au début elle avait un peu peur de passer la nuit toute seule avec l’enfant, mais ensuite elle s’est habituée peu-à-peu. Et à qui se plaindre ici, à qui on peut faire confiance?
Altynay trait les vaches, surveille les veaux; met le tisonnier dans le four, l’allume, le cendre dehors, elle revient avec de l’eau, elle cuisine, coud; fait le ménage, balaye le plancher, nettoie la stalle du fumier. Tout ce qu’il lui faut d'en haut. Il semble qu’elle fait des grimasses qu’elle est fatiguée, disons, du travail de forçat, je tombe sur mes bottes, mais le matin: elle a secoué ses puces, et jusqu’à la nuit elle bouge tout le temps... À cœur de journée. Même s’il y a un petit temps libre, elle, après avoir jeté un coup d’œil chez les voisines ou après avoir lié la conversation avec elles dans la rue, ne lâche pas la quenouille de ses mains. Elle connaît son affaire — il y a assez de manger, les vêtements sont en bon état, quoi encore? La femme est responsable de l’ordre dans la maison, et le mari est responsable du bétail au pâturage. Et ça aussi est prédéterminé d'en haut.
Ce n’est pas comme avant, à présent Altynay est contente. Et pourquoi? Parce que. Son époux est à cheval, il est devenu on homme respecté. Et celui-ci il a la maison comme il faut. Les planchers y sont couverts par les presque neufs tapis tissés et par le feutre blanc. Maintenant il y a de quoi secouer, après avoir ouvert le couvercle du coffre bordé de fer et en pinçant le bien acquis. Si elle veut se faire belle: voilà les robes en batiste, voilà les gilets en velours. On peut même se venter de tel mari. Elle a le droit, quand même la femme du grade important.
Altynay, autrefois médiocre, moche, aujourd’hui se permet même prononcer des discours. Les femmes: «Il va où ton petit mari?» — elle: «pour ses fonctions chez le volostenoy» ou «Le volostenoy lui-même l’a appelé», — et le nez en l’air, la lèvre inférieure en avant. S’il s’avère que quelqu’un n’a pas payé assez d’impôt, ou la belle-fille fait des bêtises, ou il y a une autre difficulté, Altynay indique du ton protecteur: «Pourquoi tu ne nous l’as pas soumis à l’examen?» «À l’examen» était entendu souvent de sa bouche, et personne ne pouvait penser que si elle examine ou elle n'examine pas, c’est la même farine.
Les derniers jours, Altynay présentant son époux de telle façon n’a pas ragoûté quelque chose. On ne va pas comprendre tout de suite quoi? Ah, voilà de quoi il s'agit! Non, son goût de la vie est resté intacte. Jouer des clés avec hauteur était dans son sang, et cette habitude est restée avec elle. Elle, cachottière de nature, bien sûr, avant aussi avait dans sa voix de temps en temps des intonations méprisantes lors de la conversation avec son mari, il arrivait, le mécontentement feint glissait, mais, sans aucun doute, le mari l’arrangeait tout à fait. Et maintenant elle a commencé à le gronder, en ressentant par la peau, qu’il était juste. Peut-être, pour la raison qu’à partir d’un certain moment mauvais son «à l’examen» a arrêté de provoquer impeccablement l’obséquiosité fébrile auprès des gens comme avant?
Altynay a fait ses ablutions des mains et des pieds avant la prière, rien à dire, mais elle n’a pas commencé le namaz même.
Vous pensez, elle suivait l’exemple de son mari? Mais non, n’importe quelle personne approuverait son inapplication, il souffrirait lui jeter un coup d’œil comment elle dit des prières avec ses positions maladroites des genoux et la bouche se couvrant de bulles, marmottant des mots indistincts. Chaque pèlerin de Dieux pousserait un cri: toi chérie, il vaut mieux faire la vaisselle que se moquer de telle affaire sainte comme le namaz.
Altynay s’est assise sur le bord du lit, a commencé à mettre les bas de cuir sur les jambes et de nouveau sa main inlassable est tombée sur le trou dans la semelle usée de l’usage quotidienne. Mais quand elle va se débarrasser de tels trous? Il n’est pas bien que la femme du chef rayonne par les doits de pied sortant des chaussures... Cependant ici «à l’examen» dans sa tête, tout le tas d'affaires à faire est arrivé, et elle s’est précipitée de se lever. C’était déjà le temps pour aller à la traite.
Elle a trouvé la vache à la queue courte avec le veau collé à son pis; elle a sursauté, a arraché sa gueule, voyez, maudit, a sucé presque à sec. Elle a tiré le veau par le nœud sur le cou vers le bout déchiré de la corde pendant sur l’épieu de la stalle, mais elle s’est avérée trop courte, on ne pouvait pas l’attacher. De mille façons elle tirait la bête, lui donnait des coups sur le côté et, comme elle pouvait, enfin a lié les bouts de longe. Elle a commencé à traire la vache avec une petite calvitie sur le front. Elle tirait les trayons de telle façon que la vache même s’est accroupie. À cause des doits persévérants de la patronne ils se sont tout de même gonflés, et le lait a commencé à ruisseler dans le seau qui s’est mis à résonner. Altynay a commencé à réfléchir: où prendre la corde plus solide pour remplacer celle-ci arrachée. On ne peut pas décider tout simplement, on dit, s’il n’y a pas de brebis, on paie pour la corde de brebis par un chameau complet. La corde mélangée ne va pas. D’ailleurs, celle qui lui est nécessaire peut se trouver seulement à l’aoul Petit chez l’ouvrière Jamal-apy, dans son aoul on ne trouvera pas comme ça. C’est elle qui lui a fabriqué le nouvel écheveau, mais il a disparu, les gamins locaux, je pense, l’ont chipé, autrement — où est-ce qu’il pouvait rouler?! Qu'ils aillent au diable! Qui est le voleur?
D'un air menaçant en criant de temps en temps et en agitant les bras, Altynay a mis les vaches dehors du hangar dans la direction du pâturage, est revenue à la maison avec le seau de lait, a rempli avec lui l’assiette noire, le reste solide — dans le vieux plateau jaune. Elle sait bien, que le lait mis dans la vaisselle pas creuse monte à la surface par la crème fraiche épaisse. Quoi qu'on puisse dire, mais Altynay est la femme économe. De trois petites vaches elle pressait, — plus exactement!.. — arrachait du lait pour trois-quatre outres de beurre. Même si elles se cassent la pipe, mais qu’elles donnent le leur. Econome autant qu’en sortant la crème fraiche, elle pouvait se permettre seulement de verser une goutte dans la petite paume tendue en coquille de la manière suppliante de son petit fils. Tout le lait obtenu va bouillir jusqu’à l’état d’irimchik[9] doux et va faire le fromage blanc salé — le kourte. Elle se rappelle bien, comment il est important le soir d’hivers de tremper, broyer les morceaux de kourte — et le mettre dans le consommé; après avoir mangé à satiété de la soupe épaisse, on peut sortir même en une seule robe dans le hangar gelé, et seulement la vapeur s'élève en nuages de toi rougie. Elle fait un peu du commerce du beurre aussi, et pour le revenu elle achète des vêtements, de la farine, du thé. Quand les matrones âgées d’aoul commencent à réprimander leurs belles-filles peu économes, elles ne manquent pas de dire: «Tu es une salope pourrie! Regarde Altynay, elle taille deux gants d’une seule peau de puce! Voilà laquelle doit être la femme de Kazakh».
Altynay a couvert par son dos large et les produits des voyages nocturnes de Moukache, et sa passion de faire le fanfaron par les affaires, vivre sur un grand pied. Sa femme était assez intelligente pour ne pas faire étalage de tout, elle cachait dans les angles ce qu’il venait de cher. Mais est-ce que l’homme peut apprécier toutes ses qualités? Je crois bien qu’il s’imagine qu’Altynay comme femme est le rêve ultime pour les misérables.
Est-ce ta femme gronderait et se permettrait d’être malpropre, si elle n’avait pas d’autres qualités, telles que cacher habillement des yeux jaloux tout ce que le mari a procuré, et le savoir-faire de faire le brouet gras on peut dire de l’eau maigre, athée! Et où sont les caprices là?
Venue à bout du lait, Altynay a fait la vaisselle, a mis le sandre hors le seuil, a sorti du four la tasse noircie en bois couverte par les vieilleries, y a mis de la farine et s’est installée devant elle aux genoux, s’est mise à faire de la pâte pour les boorsoqs. Les articulations de ses bras bougeaient comme une machine, en un moment elle l’a faite, ensuite elle est allée en cuisine d'été pour allumer le feu. Elle a adapté le grand seau de la maison de mollah pour cuire les boorsoqs, l’ayant suspendu sur le tisonnier, s’est assise dans la fumée du beurre brûlant, et voici son fils sans culotte, encore endormi, en frottant les yeux et appelant sa maman, a atteint ses genoux.
— Tu t’es levé, ma puce? — Altynay, ayant l’entouré par son bras droit, elle l’a monté et embrassé sur le petit front.
Médéou s’est penché au-dessus des morceaux plats troués de pâte dorant avec inquiétude dans le seau et, en clappant, ouvrait sa petite bouche tortueuse:
— Maman, un morceau...
— Oui, chéri, voilà ton morceau, — la mamma s’est précipité d’être d’accord avec lui et, en perçant le boorsoq par le roseau, lui a donné dans les mains.
Médéou un peu mou et potelé, après avoir pris le roseau par deux bouts a porté le boorsoq chaud à la petite bouche et s’est mis à souffler avec zèle et la mordre, en faisant des grimasses. Le feu flambait, le beurre bouillait, les boorsoqs grésillaient. Son Médéou est près d’elle. Maintenant toute l’imagination d’Altynay était occupée par les réflexions, comment elle ferait bouillir la bouilloire, réveillerait le mari, installerait le petit près de lui, et eux seulement trois ils se mettraient à goûter d’une manière pieuse le repas leur envoyé par le très Haut.
Après avoir fait le thé et levé du lit son « à l’examen » qui avait dormi tout son soûl, Altynay a atteint et son rêve aussi.
Ayant installé à sa gauche le samovar soufflant avec le nez tordu exactement comme son mignon Médéou, Altynay, en soulevant la tasse avec une bordure rouge par ses quatre doits écartés, buvait du thé un peu amer et suait avec application. Son mari, installé librement, lui aussi tenait sa langue au chaud, en avalant un boorsoq après l’autre. Et son chéri Médéou essayait de ne pas rester en arrière, jeté sur les genoux de son père, il mâchait à peine le méli-mélo bourré dans la bouche, en ouvrant et en fermant des yeux de l’application.
Et ils se sont donnés autant de peine lors du thé, qu’il faut leur laisser tranquilles. Nous n’allons pas nous assimiler aux vieux insatiables et aux gamins rusés affamés, suivants tout le monde de tous les yeux, qui est en train de prendre le repas, nous aussi, nous avons du thé à la maison. Qu’elle aille au diable, cette tradition du Kazakh attendre l’invitation en fixant son regard sur la table des autres! Il vaut mieux apprendre, comment vont les gens après cet événement nocturne? Est-ce que le maître Mamyrbay a survécu sur son lieu d'un incendie? Revenons à eux, on va voir, suivez-moi, mes élèves!
Même après avoir bien reposé, longtemps les hommes ne pouvaient pas se remettre, ils secouaient la tête, regardaient en arrière, en se déplaçant comme avec les pieds accidentés, sortaient de leurs refuges, en appelant ses proches; les femmes, en bourdonnant, tremblaient, n’arrêtant pas de chercher et appeler leurs pères, maris, ce faisant elles se serraient l’une contre l’autre, comme elles espéraient de retrouver la reine salutaire parmi leurs semblables. On braillait, hurlait, courait avec agitation et les cris: «La hache, la hache», et ce faisant ils se sont terrorisés entièrement, se sont précipités au hangar alimentaire de Mamyrbay, l’ont forcé, et se sont mis à l’en traîner :
— Quoi? Quoi? Aïe, les Saints, aïe! Vous-mêmes, vous êtes intacts?
Les yeux de Mamyrbay sortaient des orbites, avec une respiration entrecoupée il demandait et demandait:
— Où est baybiché? Où est Akbilek?
— Aïe, bay, ohé! Où sont-elles? Nous n’avons pas vu... — ils s’étonnaient et se jetaient à gauche et à droit.
Bientôt les voix des femmes se sont réunies dans un hurlement des vaches, ayant déchiré instantanément l’obscurité de nuit par son désespoir bestial. L’âme se déchirait de tel hurlement terrifiant. Il s’est avéré — ils sont tombés sur le corps de patronne de Mamyrbay s’étendant du trou de terre. Et Akbilek a disparu, peut-être, ceux l’avaient traînée avec eux.
Mamyrbay a hurlé lourdement et est tombé comme un sac. L’aoul bêlait de manière compatissante déjà comme un troupeau de moutons, et à ce moment là ils ont entendu le bruit des sabots de cheval du cavalier approchant.
— Ils ont tué, tué! — le cri parvenu a fendu la foule agglomérée comme la lame, elle s’est divisée de nouveau, et le tintamarre a commencé.
-Quoi?
— Ils sont partis!
— La patronne est tuée! Aïe bay!
— On a tué Bekbolate! - ohé!
— Et lui qui est-ce, comment il s’est retrouvé ici?
— Mais lui il chassait avec Bekbolate. Ils ont entendu le cri de femme et tout de suite en poursuite...
— Est-il tué ou il est vivant encore?
— Il est encore vivant, mais qui sait...
Il s’est avéré que celui-ci arrivé était un des ceux qui avait emmené Bekbolate dans l’aoul, là ils lui ont mis une application sur sa blessure et ils sont allés dans les directions différentes.
«Oui, la mort, elle, ça... que tu veuilles ou non, elle prend le sien, on a beau faire cela, on la fixe dans les yeux, et elle de toute façon va s'approcher à pas de loup derrière, comme le vent, et on l’apprend quand elle fauchera... Mais qui peut lui tenir la tête?» — ont-ils parlé, et le lendemain, réunis ils ont enterré la vieille, en présentant à Mamyrbay leurs condoléances: «Que faire... il faut se résigner à son sort, c'est donc que son temps est arrivé...» Et personne n’a osé de dire à propos d’Akbilek plus que: «C’est pire que la mort... il faut espérer!» Telle blessure, qu’il n’y avait pas de courage d’appeler les choses par leurs noms. Cette blessure a déchiré non seulement Mamyrbay, mais elle a traversé la dignité de tout le monde, a humilié affreusement.
Et quand le sentiment dans l’âme des gens réunis pour le repas funèbre a cessé à peine de piquer autant douloureusement, qu’eux aussi ils étaient responsables de tout se qui s’était passé, ce qui résultait de leur nature d’esclave, de la mauvaise volonté de se défendre, ainsi que leurs proches, ils ont commencé à se rassembler étroitement, faire des suppositions et donner libre cours à son imagination, chacun de sa manière. Certains:
— Ce sont les parents, quelqu’un est en train de se venger avec l’aksakal. C’est quelqu’un des siens. Autrement comment auraient-ils pénétré par le flanc rapide de coteau dans l’aoul et n’auraient pas perdu la route...
On leur faisait écho:
— Certes, s’ils cherchaient les femmes, il y en a plein dans les endroits connus. Ici on ne s’est pas passé sans un Kazakh. D’où les Russes savent qui habite où? — ils ont conclu comme ça.
Les autres:
— Qui a eu cette idée?
— À qui est cet œuvre? — ils ont commencé à réfléchir.
— Qui est-ce qui détestait l’aksakal autant?
— Même la mauvaise herbe ne pousse pas sur la place vide, si, bien-sûr, les gens de Jamanbaylar ne sont pas mêlés.
— Laisse-les, qui entre eux ose pour le pareil? Et ensuite, ils n’étaient en mauvais rapports jamais. Probablement, c’est un étranger.
— Il paraît, que cet œuvre est sur la conscience des partisans de Kourban-kagy, ils sont devenu le parti, est-ce qu’ils vont avoir de la pitié envers les leurs? — on a dit de côté.
— Mais tu contes des fagots! Quoi, les partis ont apparu seulement aujourd’hui chez nous? Jamais on n’a pas eu d’affaires pareilles, tu parles de la bouche étrangère, tu veux apporter à quelqu’un un œuf intact, un melon mûr... Kourban-kagy n’est pas capable de donner en pâture aux infidèles la fille d’un musulman. Lui-même il a des enfants, comment il regardera les yeux de Dieux? — l’homme à barbe blanche a fait se faire petit l’accusateur avec le regard de loup.
— À mon avis, cet œuvre est à Aben, — a proclamé l’homme au bec bleuâtre sur le visage tacheté, après avoir renversé sur le paume la tabatière et assis confortablement. — L’année dernière il a glissé son cheval avec les calvities aux Russes, depuis son sang est monté à son intérieur: «Ah, comment je peux faire encore une fois le truc pareil!»
— Holà, mais qu’est-ce qu’il peut? Il n’ose rien sans directives de tels que Moukache. Mais s’il y a personne derrière lui, il n’est pas même capable d’essuyer son cul, — de nouveau a déclaré d’un ton péremptoire l’homme aux yeux de loup.
Ils se sont rappelés de tout le monde, qui avait le prétexte de se venger de l’aksakal, il y avait dix-quinze personnes, ils ont examiné toutes les variantes possibles, mais uniquement par les suppositions ils n’ont pu accoucher par le sabot personne. L’affaire se compliquait encore par le fait, qu’ils soupçonnaient certains et justifiaient les autres pour les raisons éloignées du fond de l’affaire liée avec les conflits de parti, les querelles parentales: quelqu'un a pris d’une mauvaise façon, et l’autre a rendu d’une mauvaise façon, certain n’a pas partagé la viande du bétail volé, l’autre parce que sa femme s’est enfuie de lui, ou au contraire, parce qu’il collait les femmes et les filles aux autres, et quelqu’un était responsable d’avoir lâché un mot de trop, — chacun dansait pour ses maux, en retournant ses fonds. Un a égorgé, l’autre a écorché. À part ceux qui faisaient de l’effort sincèrement à cette justice, il y avait aussi ceux qui sont venus se réjouir en secret du malheur de l’aksakal. Il y avait aussi les provocateurs non dissimulés, comment ils pouvaient laisser échapper une occasion de régler leurs comptes, s’ils voulaient autant! Ceux, qui sont venus à exprimer leurs sincères condoléances au chagrin de l’aksakal, n’étaient pas nombreux.
Les condoléances obligatoires qu’on exprime non seulement par rapport aux amis, mais aux ennemis, ont présenté: le marieur unique, certains de gens vraiment bienveillants et quelques voisins, avec lesquels la maîtresse de la maison était spécialement aimable avec le koumis jusqu’aux bords des tasses. Et les autres... même si les gens faisaient preuve d'empathie, ils ne pouvaient pas se débarrasser des pensées malséantes à propos de cet événement.
La société, dispersée après l’enterrement et toutes autres cérémonies de deuil, errait dans les recherches spirituelles, en écoutant, en reposant les questions et en réfléchissant, qui est-ce qui avait arrangé cette lâcheté. Parce que depuis peu, quelque chose pareille a commencé à arriver non seulement avec Mamyrbay coupé, encore quelque aouls ont souffert de la même façon. On a chipé le bétail, et on emprisonnait – pillait, humiliait et brûlait les habitants d’aoul. Et les gens ne gardent pas leurs yeux dans leurs poches, même si tout est fait en secret et en cachette, il y a toujours une personne, qui a entendu quelque chose, qui sait quelque chose, n’est-ce pas? Ils ont fait des potins, ils ont secoué des bruits et des soupçons autant qu’il fallait, et le lot est tombé, que dans cette affaire est mêlé nul autre que Moukache. Vous demandez, comment on l'a révélé? Et voici comment.
Il y avait un berger, qui a vu Moukache aller au trot vers Kara-chate ce jour malheureux vers le soir. C’est un premier accroc. Une relation de la femme de Moukache, quand celle-là se fâchait et ne lui a pas donné de tamis, disait: «Tu penses je ne sais pas, où tu as caché tout le bien aux gens! Enrage-toi, débrouille-toi! Je sais tout! Je sais, à qui est ce tapis rouge foncé, et je sais d’où vient ton feutre blanc et cette robe de batiste...». Ils ont entendu et ont envoyé tout de suite un petit homme peu marquant de la maison de Souleyman chez Moukarache, il est revenu et a fait le rapport: il a reconnu le tapis. C’est la deuxième preuve. Et la propriétaire de la robe verte de batiste et du gilet vert a été trouvée. C’est la troisième preuve.
Et il y a encore un gars appelé Souérbay qui assurait, qu’il a remarqué que le cheval bariolé de Moukache, évidemment, a passé toute la nuit sous la selle. Personne n’avait une confiance spéciale à ce Souérbay, mais tout de même... encore une preuve dans la même tirelire — quatrième. Et le mollah Tézekba a remarqué, entre autres, que Moukache était un amateur de passer les nuits n'importe où, mais pas à la maison. Il est une personne candide. Avec lui ça fait cinq. En plus tout le monde se rappelait, que le fils de Mamyrbay après avoir rassemblé les documents nécessaires pour Moukache, ne l’avait pas laissé devenir volostenoy, ce qui avait vexé le prétendant. Donc, si ce n’est pas Moukache, qui alors? «Moukache, personne que Moukache», — tout le monde a décidé de telle façon.
Maintenant Moukache est en vue du peuple. Que faire avec lui? Comment lui venger? On va le sabrer? On va le mettre en jugement? Ou quant même ils vont le touer eux-mêmes? On va lui bruler la maison ou mettre à la besace? Les gens étaient prêts de faire l’un et l’autre, et même tous ensemble. Cependant l’opportune ne s’est pas présentée. Mais un fait est arrivé qui a mis fin aux plusieurs projets. Et le fait consiste voilà de quoi.
Ayant perdu son épouse et sa fille Mamyrbay était assis tôt le matin sur la butte dans la steppe ouverte et regardait fixement quelque part, et tout à coup il a vu un cavalier s’approchant à toute vitesse du côté de l’aoul voisin, avec les oreilles du chapeau d’hiver flottant sur le vent, il s’est arrêté, l’a salué de sa selle. Et après avoir salué il lui a fait un rapport tout de suite :
— Monsieur le bay, avez-vous entendu parler, ce qui s’est passé cette nuit?
— Non.
— Aïe, bay, qu’est-ce qui se passe!
— Qu’est-ce qu’il y a, mon ami?
— Merci au Seigneur maintenant on va respirer à pleine poitrine...
— Quelque chose avec Moukache?
— Non, ohbay...
— Dis-le!
— Les rouges ont attrapé tous les blancs dans les montagnes.
— Comment? Et où est Akbilek?
— Il n’y a pas de nouvelles d’Akbilek... Pour ainsi dire, ont a attrapé tous sans exception.
— Comment ça... comment vous avez appris? De la part de qui?
— Il y avait les gens de l’aoul Tourkoulaka. Là un détachement des rouges s’est arrêté, et Moukache y a attiré les blancs, et les rouges les ont pris tous. Les blancs ont perdu contenance de surprise autant, qu’ils n’ont même pas bougé. Ces chiens sont forts uniquement contre les femmes, mais si on les pressent, eux-mêmes, ils sont nuls.
— Et comment Moukache arrive à tromper tout le monde?
— Il a trouvé la faille lacune, il est un coquin, un aventurier connu...
— Ça signifie, qu’il s’est abouclé avec les rouges de nouveau...
— Même plus que ça! Maintenant la place importante l’attend de nouveau.
— C’est ça qu’il a projeté le salaud. Oh les Saints, aïe, qu’est-ce qui s’est passé avec Akbilek? Tu n’as pas eu de nouvelles sur elle...
Mamyrbay s’est levé de travers et, en déplaçant ses pieds avec peine s’est dirigé vers sa maison. Et en pressant les gens il a envoyé cinq cavaliers pour la recherche d’Akbilek.
Pour que ces cavaliers fassent des tours des aouls, posent des questions aux passants dans la steppe, et nous allons raconter les nouvelles d’Akbilek.
Akbilek, gênée et effrayée comme la petite gazelle à goitre, avec les yeux aux larmes pensait et pensait à sa mère, à son aoul, en refusant même une miette de pain, ayant figée et repliée sur elle-même de la faim, en désirant une seule chose —
la mort, mais le petit papillon de son âme frétillait toujours dans sa poitrine, ne voulait pas s’envoler. Quelle goutte de nectar l’âme ailée recherchait dans cette vie ignoble, c’est étonnant!
L’être humain est vivace — il va survivre la mort, et il n’a peur ni d’esclavage ni de geôle, on habitue à tout, même à la guerre c’est la vie pour lui. Même l’homme condamné à la mort boit, mange, et voit les rêves douces, et la vie ne le fatigue pas. Je ne pense pas, qu’il y a dans le monde entier un être plus vivace que l’être humain.
Malgré qu’Akbilek était autant sphacéleuse, mais même elle, elle s’est habituée petit à petit à son sort.
Ou le charme de l’existence, ou la peur, ou l’instinct de conservation ou le tempérament passionné de l’homme... soit qu’il en était, la Moustache Noire lui ordonne: «Embrasse», — Akbilek touche son visage par ses lèvres, «Ris», — dit-il et voit sa bouche étendue par la sourire, il demande: «Parle», — et elle marmotte les mots russes retenus et incompréhensibles pour elle: «Je t’aime».
Presqu’un mois la Moustache Noire n’a pas laissé Akbilek seule même pour un moment. Il vaguait avec elle sur les prairies vertes de montagnes, dans le bois, en lui donnant le bras, en lui prenant par la taille, en lui entrelaçant les petites fleurs arrachées dans les cheveux et en cueillant les baies douces pour elle. Il l’emmenait vers les sources sur les pentes couvertes de buisson, lui enlevait les bottes et lui lavait les pieds et les embrassait, en lui faisant du câlin de petits talons par la moustache noire. Et si Akbilek était fatiguée, il la portait, en installant sa tête sur le pli d’un bras, et ayant posé le deuxième au-dessous des genoux. Il lui donnait à boire lui-même, lui donner à manger de sa paume, il faisait le lit lui-même dans un endroit le plus éloigné de la demeure et, après l’avoir installée avec lui au-dessous de la capote grise, il la serrait si étroitement contre lui et si goulûment et longtemps enfonçait dans ses lèvres, en caressant tout son corps, que le cœur d’Akbilek montait jusqu’à la gorge, le pouls s’accélérait chaleureusement, en brûlant, elle fermait les yeux et, ayant oublié elle-même, faiblissait et lui s’ouvrait ...
Ce qui se passait après, elle ne se rappelait pas elle-même... Comme si elle se retrouvait dans un autre monde.
La bonne volonté de Moustache Noire de tuer n’importe qui touchera sa kazimka, son admiration devant elle, allant jusqu’à la joie de chiot lui lâcher les pieds, la mauvaise volonté fatigant de s’éloigner d’elle soit pour un pas, le regard rempli de tendresse noyant, les paroles, comme les poésies, n’étaient pas compréhensibles à Akbilek. Est-ce qu’on se moque ou humilie comme ça? Ou il est vraiment amoureux d’elle? Si ce n’est pas ça, peut-être, son comportement peut être expliqué uniquement par le fait, qu’il n’a pas vu de femmes longtemps? Elle n’était pas capable de réfléchir plus loin, surtout si elle se rappelait, malgré que la Moustache Noire fut si proche avec elle, tout en lui — à partir de l’odeur jusqu’au geste — pour elle restait étranger. Ils étaient tellement différents, autant que le ciel et la terre se diffèrent, mais quand leurs corps confluaient, toutes les différences disparaissaient, il paraît. De temps en temps Akbilek, en pensant que l’homme ne doit pas se mettre à plat ventre, essayait de trouver la justification de sa génuflexion devant elle et elle trouvait, il faut dire. Il est l’homme, son mari, mais il est infidèle! Il est assis d’une autre façon, il prononce la prière d’une autre façon, il parle d’une autre façon, boit de la vodka, mange du porc, pue de la fumée de tabac. Et comment elle permet sa poitrine coupable de se serrer contre ses seins blancs?!
Entre chien et loup un jour de séjour dans le défilé les Russes excités, échangeaient quelques mots, se sont mis à se préparer quelque part: ils nettoyaient et chargeaient leurs fusils, examinaient l’attelage, sellaient les chevaux. Justement à ce moment Akbilek et la Moustache Noire revenaient de la promenade dans le fourré. Tout de suite elle s’est précipitée de se cacher dans la masure, s’y est roulée dans la couche de soldat et après avoir poussé un soupir, s’est rappelée de l’aoul, en se serrant vers la grille du koche. À travers le trou dans le feutre on pouvait voir la Moustache Noire se diriger vers les Russes, qui se préparaient d’une manière profitable et sérieuse, et ont commencé à parler avec lui. Il est revenu renfrogné, les lèvres serrées, a examiné la culasse de son fusil, y a enfoncé la cartouche, et a commencé à ramasser ses vêtements, a monté sa selle... Mais quand Akbilek a levé sa tête et a regardé son visage avec la question muette: «Tu vas où?» — il a jeté un coup d’œil avec inquiétude sur elle. Malgré qu’il ait duré uniquement un moment, il était si lourd, que la Moustache Noire a baissé les yeux tout de suite, s’est troublé. Dans un certain temps il est sorti et est déjà revenu avec le truchement. Celui-ci a traduit ses mots:
— Nous allons à la guerre. Et toi, qu’est-ce que tu vas faire? Akbilek a fixé son regard sur lui avec stupéfaction, sans savoir quoi même répondre. Mais après la question:
— Où est-ce que tu voudrais être? — Akbilek a laissé tomber sa tête, a haussé les épaules et a demandé par la petite voix pleurant:
— Et vous n’allez pas me ramener à l’aoul? La Moustache Noire a secoué la tête de manière négative et a demandé:
— Tu veux aller avec nous?
— À la guerre?
— À la guerre, — a prononcé la Moustache Noire et lui a posé la main sur l’épaule.
Akbilek a secoué la tête:
— Dans ce cas laissez-moi ici.
— Et la nuit tu ne vas pas avoir peur?
— Même si je vais avoir peur, tout de même... je vais rester... et vous allez revenir? — elle a échappé.
— Ça n’est pas possible, — a répondu la Moustache Noire par la voix vibrée.
Dès que la conversation s’est tue, deux Russes sont entrés. D’après leur mimique et âpreté de paroles Akbilek a compris, qu’un danger le plus terrible la menaçait. La Moustache Noire était fâché d’eux, ayant cligné de l'œil, il parlait entre ses dents et les a fait pâlir mortellement, les Russes ont eu un tic de leurs cous — ils ont commencé à retirer les cols par les doigts, comme à cause de l'étouffement.
Akbilek a deviné, qu’il leur a répondu: «Je ne vous donnerai pas en pâture», — et elle a fixé ses yeux sur la Moustache Noire avec reconnaissance. Après le départ de ceux Russes la Moustache Noire s’est assise et par le mouvement brusque de tête il a ordonné le truchement de les quitter. Il est resté assis un certain moment, avec la tête baissée et en essuyant les gouttes de sueur sur le front, ensuite après avoir agité le bras, a sauté sur ses pieds et a tendu son bras à Akbilek, comme demandait: «On y va». Elle s’est levée tout de suite.
La Moustache Noire, ayant pris Akbilek par la main, l’a faite sortir du koche et l’a amenée à droite, dans la direction du buisson autour de la source.
Le vent bourdonnant en soufflant par rafales. Pas de lune. Les épaisses ténèbres. Les nuages sombres, glaciaux, ébouriffés ont caché les sommets des montages comme le troupeau, et au ciel la poule noire affamée a picoré avec précipitation les petits grains des étoiles. Les petits rayons d’espoir allumés s'éteignaient avec les étoiles. Le cœur d’Akbilek plein d’angoisse s’est éteint avec eux. Elle regardait fixement le visage de Moustache Noire par les yeux brillés. Son visage est devenu sombre, le sang aux yeux, les narines tremblaient. Son pas est ferme, ce qui ne plaît pas spécialement, tout le petit cœur se serre, elle était plus morte que vive. Ils se sont enfoncés dans le fourré, et quand ils se sont retrouvés sur la clairière entourée densément par les arbres, la Moustache Noire s’est arrêté, est resté debout un moment en regardant fixement le visage d’Akbilek, l’a étreinte, l’a serrée vers lui et a embrassé trois fois sur les lèvres. Ensuite il a reculé de cinq-six pas, mais ses paumes couchées avant sur ses petites épaules il paraît ordonnaient avec leur atrocité: «Bouge pas». Il a attrapé son fusil de l’épaule et l’a dirigé sur Akbilek. Elle s’est jetée sur le canon avec le glapissement se transformant en gémissement. Le bras visant de la Moustache Noire a tremblé, et le fusil est tombé sur le sol.
— Pourquoi? Quelle est ma faute? Mon oncle! Qu’est-ce que j’ai fait?.. — Akbilek a éclaté en sanglots, elle avait des frissons dans tout son corps pendu sur son cou. — Embrasse-moi, s’il te plaît... Avec douceur.
La Moustache Noire a soulevé les bras et l’a étreinte faiblement, a donné une tape sur son dos par la paume — il a eu de la pitié. Et il s’est mis de nouveau à regarder fixement son visage, a levé le fusil et est revenu avec Akbilek dans le camp. Là il a appelé le truchement et s’est expliqué:
— Je t’aime, j’ai perdu mon âme pour toi, je ne veux pas que quelqu’un t’aime après moi.
Akbilek s’est glacé jusqu’au osselet minuscule. «Aïe, Créateur! Il ne faut pas croire à ce Russe! Tout ce temps il se comportait comme un mari aimant, mais en faisant ses adieux il a décidé de la tuer, il aime... il n’aime que lui! L’insensibilité... l’insensibilité, verser le sang est rien pour lui?! Lui-même il veut vivre... mais moi aussi je ne veux pas mourir! Pitié...» — tels pensées ont couru à toute vitesse dans sa tête et au dernier moment elle a eu l'esprit prompt:
— Ne me tue pas! Laisse-moi vivre ici! Peut-être un jour, tu vas avoir besoin de moi de nouveau, d’ailleurs, tu ne sais pas? J’ai vu un rêve, que je te suivais et t’appelais à une ville. Tu vas revenir vif et tu vas revenir avec les tiens... crois-moi.
«Bons vœux sont la moitié de la bataille» — c’est un simple proverbe, mais il va chauffer tout le cœur, surtout de celui-ci qui est prêt à mourir. La Moustache Noire a interprété les paroles d’Akbilek comme un bon signe et l’a embrassée sur les lèvres comme en acceptant ses prédictions.
Dans les crépuscules agréables seulement dans les maisons chaudes près des lampes confortables, les Russes en obéissant au commandement guttural, ont sauté dans les selles et se sont succédés en file indienne de l’orifice étroite du défilé. Akbilek a commencé à s’éloigner avec eux et son ombre effrayée pour toujours, humiliée et débauchée par les caresses masculines. Et pendant que le claquement des sabots de cheval venait, elle poussait un soupir involontaire: «Ah-ah..» et expirait tout bas: «Allah...»
Akbilek errait seule sur le camp des Russes laissé, comme un chiot errant, mais la solitude ne la pesait pas. Elle préférait mourir en vagabondant dans les montagnes désertes, que de la balle. Jusqu’au dernier son des cavaliers s’éloignant elle ne croyait pas: «Créateur, est-ce que tu m’a sauvée?» Il s’est calmé. Et elle, ayant jeté une poigné de sable dans leur dos, comme en les enterrant, elle a poussé un soupir de soulagement et enfin a regardé autour d’elle.
L’amas de nouages, humide et effiloché, a déjà couvert les sommets blancs des montagnes comme un mâle noir à deux bosses, s’est répandu par les ténèbres profondes sur toutes les pentes. Et voilà l’étoile, qui les surveillait, s’est précipitée de cacher du ciel, comme un berger timide après avoir vu les voleurs méchant s’approcher à son troupeau.
La brume froide, ohé! Comment on peut y voir le brouillard noir qui s'élève en nuages dans l’âme d’Akbilek?
Les feuilles d'automne! Pourquoi vous faîtes arrheu arrheu, qui est-ce que vous essayez de bercer, vous fanées, ohé?
Les cailles, vous êtes en harmonie sur les branches solides, insouciantes, ohé! Vous êtes bien à appeler et espérer pour la bonté de la nuit noire. Est-ce que vous êtes capables de soulager la tristesse dans le cœur d’Akbilek? Ou bien vous êtes sûrs, que vous pouvez porter jusqu’à Dieux les pleurs plaintifs d’Akbilek, un petit canard par la buse à queue blanche, en fonçant son aille cassée dans le sol parmi les koches vides penchés sur le côté et en regardant toujours le ciel?!
Les nouages, ohé, pourquoi vous ne vous dissipez pas?!
Les feuilles, ohé, au lieu de vous disperser sur la terre en froufroutant, il vaut mieux couvrir la beauté triste!
Les vents froids, ne zigzaguez pas de façon déréglée, mais portez au père la nouvelle sur sa fille aimée, abandonnée dans la crevasse paumé.
Oh les formes inhumaines de la nature, aïe! La beauté blessée ne connaît pas votre langue d’Altaï! Le bel otage est perdu n’ayant pas désiré tenir compte de vos masques moroses et complaire à votre volonté! Elle s’est fiée à Dieux d’Altaï et voilà elle est perdue!..
Le noir nocturne devenait plus épais. Akbilek était saisie d'effroi. Quelque chose, nombreux, est passé au-dessus de sa tête. Akbilek a des frissons dans le dos. Quelque chose s’envole avec craquement, s’agite dans l’herbe, froufroute dans les buissons, pousse un han — et Akbilek se fige en se couvrant par ses petits bras comme si les monstres inconnus vont l’attraper d'un moment à l'autre. Elle se couche — mais elle n’a pas de sommeil. Et rester assise est le plus effrayant. Et elle a peur de se déplacer quelque part, en plus il est très simple de s'égarer et s’accidenter dans l’obscurité... Mais de toute façon une pensée perçante ne la laisse pas: va-t-en d’ici au plus vite. Mais où aller, il est minuit? Elle ne se décide nullement. La maison paternelle lui apparait, dedans il y a des affaires kazakhes, la vaisselle kazakhe... Il paraît qu’à côté y il a une demeure, le koche, on pourrait penser qu’elle en est habituée, mais elle n’est pas capable d’y faire un pas, malgré qu’elle avait horreur au-dessous du ciel sombre.
Sans avoir une idée qu’est-ce qu’elle doit faire maintenant, Akbilek s’est assise voûtée, recroquevillée, en jetant des regards craintifs. Il paraît qu’encore une nuit a juxtaposé sur la nuit. Même la cuve à lessive traînant ici devant le koche proche, ne se voyait pas. Créateur, aïe! Est-ce que l’aube est proche?!
Dans le moment pareil il lui semblait que le hurlement venait du bois. Quel horreur. Les ombres ont remué dans le koche le plus proche ouvert à toute grande la porte et se cachant comme une sourcière. Il est arrivé à Akbilek d’entendre le hurlement de loup derrière l’aoul près des troupeaux: le son est le même. Ce n’est pas possible, aïe! Ce sont les loups? Que faire? Arrête, les loups ne vont pas oser, d’où ils peuvent savoir s’il y a des gens dans les koches, et les Russes avec les fusils sont si effrayants — ils vont avoir peur... Ou ils ont compris que ceux ont quitté le camp? Quand ceux étaient ici, les loups n’osaient pas pousser un cri...
Le jambage de koche a grincé silencieusement. Il paraît quelqu’un a apparu. Mais sans bruit. La peur grossit les objets, mais de toute façon on ne voit ni ciel ni terre. Elle voudrait bien se lever, mais elle n’arrivait pas. Elle a entendu de nouveau les hurlements, de plus en plus distinctement. Le hurlement devenait de plus en plus fort. En faisant trembler les montagnes, il détruisait tous autres sons. Les mains d’Akbilek toutes seules ont atteint et retiré une des perches de dessous du feutre de koche. Ayant attrapé le bâton de bouleau de longueur de sagène par ses mains — il va casser tout le dos, elle s’est retirée derrière la masure. Si ce n’est pas elle, armé de pied en cap, qui va rencontrer les loups, c’est vrai qu’il n’y a personne. Les hurlements ont commencé à se calmer. Après avoir posé sa massue sur terre, Akbilek a pris haleine un peu, mais il s’est avéré qu’il était trop tôt pour se calmer. La gerbe d'eau est venue du côté de la source.
Qui est-ce?.. Un humain? Un animal?.. C'est égal, qui c’est. Akbilek accroupie a attrapé de nouveau la perche. En retenant son souffle, elle est restée immobile.
Et c’est à ce moment qu’une paire d’yeux ronds a éclaté dans la voile noire de nuit. Tous rouges, ils brûlent comme le feu. Akbilek a sauté sur ses pieds et s’est retrouvée dans le koche, elle s’est enfoncée par son dos dans le bout le plus éloigné. Mais qu’est-ce qu’il lui restait à faire, si le bâton est tombé de ses mains et encore devant l’entrée de koche. Elle a rampé avec précaution, a tendu la main dehors et s’est mise à tâtonner sur la terre... tout d’un coup: deux petits feux se sont multiplié en quatre. Et si c’était le cas! Derrière eux encore une paire de petites tâches pourpres a éclaté. Akbilek voyait six yeux de loup brûlants comme soixante. La nuit toute noire ne s’est remplie que par les yeux brûlants. Ils tremblotaient, en s’éteignant et en s’allumant de nouveau, scintillaient, s’approchaient...
Est-ce pour de bon?.. L’herbe froufroute déjà au-dessus d’eux.
Çà et là, les voilà...
Ohbay, aïe! La meute de loups!
Où est-ce que je peux partir?!
Prends garde, les voilà agitent les rideaux de koche, flairent le sol.
Aïe, Créateur, aïe! Est-ce qu’ils vont me trouver?..
Aïe, tous les Saints, aïe! Un des gris a trouvé un os près du foyer éteint et l’a saisi avec ses dents.
Imagine-toi pour un moment ce qui s’est passé avec Akbilek!..
Elle n’osait pas respirer, et elle a figé.
Bientôt dans la baie ouverte de koche, qui a caché Akbilek, la gueule de loup a apparu en hurlant...
Fendant la nuit, le cri désespéré d’Akbilek a fait le gros loup se jeter de côté, en offrant l’espoir pour le salut pour une seconde, mais les yeux rapaces ont éclaté de nouveau, les gueules ont montré les dents, le gargouillement est devenu plus fort. Les loups se jetaient en avant ou se tournaient sur place, grondaient par le bourdonnement de ventre. Comprenant que les animaux vont absolument se jeter sur elle, Akbilek a décidé de les anticiper, elle a dégringolé au-devant d’eux, a attrapé le bâton et avec le cri s’est mise à l’agiter de côté et d'autre: de toute façon elle ne voyait rien.
De temps en temps elle entendait le hurlement spécialement méchant. Parfois le coup de perche était rendu avec délices dans les mains ou sur le carnassier tombé sous la main, ou sur le koche. Le tournoiement est plus rapide et le plus fou. Akbilek affolée agite et agite le bâton. Les loups se sont serrés en cercle autour d’elle. Akbilek rosse, les loups s’esquivent, Akbilek rosse, les loups se jettent. Akbilek prie Dieux, les loups deviennent enragés. Akbilek piaille... les loups hurlent... Akbilek jette de hauts cris, les loups hurlent... Comme ça elle se battait avec eux, longtemps...
Akbilek a failli de perdre le souffle dans la crise de nerfs, dans la fièvre et les lancements, elle périt, il n'y a pas de salut... «Je vais tomber, en ce moment, ils vont se cramponner, déchirer, manger...» — courait dans sa tête à toute vitesse, et tout d’un coup quelque chose s’est enflammée d'un feu clair sous ses pieds. Les loups ont fait un bond en arrière. Il s’est avéré, les braises du feu de bois — on a bu du thé, mais on n’a pas éteint les braises jusqu’à la fin... Tout de suite Akbilek s’est mise à les jeter sur le cercle par ses pieds. Miracle! Le feu, la cendre et les petites branches couvant en cachette se sont enflammés avec une nouvelle force. Les loups se sont reculés du feu de bois enflammé.
Akbilek s’est précipitée de jeter dans le feu des branches sèches et de l’écorce traînant là. Et le vent lui a fait du plaisir, il a soufflé le feu de bois très haut, comme en se justifiant: «Moi, toujours, j’étais de ton côté, tu vois?» Plus fort le feu de bois s’enflammait, plus terne devenait le feu dans les yeux des loups. Tu ne va pas mourir avant la mort du feu. Dès que le feu s’éteint, et la vie d’Akbilek sera destinée à s’éteindre. Et comment elle pouvait ici ne pas pratiquer le chamanisme elle-même?
«Envole-toi, mon feu, envole-toi! Enflamme-toi, Mazdâ, enflamme-toi, donne du feu, vas-y! Les animaux peureux, ennemis muets! Voilà le feu, voici le fusil! Allez-vous-en, ne vous approchez pas! Vous allez brûlez dans le feu! Je vais vous brûler, flamber!» — Akbilek sautait et poussait des cris à la folie jusqu’à l’aube: «maz-dâ, mazdâ» et elle s’est sauvée.
L’Altaï a secoué de ses reins couverts de rides la nuit sombre avec les yeux sanglants et les crocs monstrueux, a tracé finement les traits de la beauté inouïe ensoleillée Kounékey sur le ciel en plomb au clair disparaissant de la lune. La voûte du ciel à l’est se rassasiait par la blancheur, les sommets des montagnes ont scintillé par la dorure. Et dès que la porte de l’aube s’est ouverte, paradisiaque et belle, Akbilek, est allée en regardant en arrière. Ceinturé par la corde de la couverture en feutre, couverte la cheminée du koche, et en bottes de soldat trouvées dans le koche, les tiges lui allaient jusqu’à la taille, la perche de nuit est dans sa main. On ne sait pas qui encore elle allait battre avec, de toute façon, elle a attrapée avec elle.
Le soleil s'est levé, le vent s’est remis, les gros nuages se sont divisés. Les alouettes envolées des nids se sont précipitées avec les roches, en exigeant après des masses en pierre le paiement pour le droit de voir les premiers Kounékey au visage de soleil. Les alouettes, ohé, il vaut mieux de lui demander pour Akbilek. D’ailleurs, il ne faut pas, elle est en train de marcher en brillant. Son visage est illuminé. La journée rayonnante est devant elle! Elle a oublié tout de suite la longue nuit terrible, la danse mortelle avec les loups, elle claque d’une pierre à l’autre par les petits fers à cheval des talons d’armée, on ne peut pas l’égaler!
Akbilek courait comme le son de la lettre «Э» (Eh). Elle se précipitait vers les siens, elle a déjà vu assez de Russes, d’étrangers, vilains, ils voulaient la tuer — comme ça! Et elle n’avait pas d’autre chemin, que passer à travers l’œil d'une aiguille. Les montagnes désertes étaient en arrière, les montagnes pleines de monstres: d’ours, de loups, d’albastes[10], de sangliers avec un œil dans le front. En avant il y avait un sentier étroit, et il y en a assez d’animaux: personne ne va garantir, que les crocs de nuit ne vont pas la rencontrer sur la route à faire.
Qui est-ce qui va la faire sortir, si elle ne le fait pas elle-même? Et la douillette de maman bouge les bottes lourdes, ayant oublié le manger, le sommeil, la fatigue, en désirant uniquement de voir un petit bout de l’aoul natal.
En s’éloignant avec précipitation sur la pente de montagne, Akbilek a jeté le dernier coup d’œil en arrière. Les koches de camp en bas avaient l’air penché sur le côté, faux. Mais ce bois de montagne, celle clairière, cet endroit ombreux, ces pierres roulantes — tous sont les témoins de son humiliation, là on a bafoué son honneur de jeune fille. Dès que le regard y tombe, et tout de suite la honte brûlante la saisissait tout de suite, où tout était mêlé: et le sentiment de culpabilité, et le dégoût. De même façon le chiot dans son froc sur le paillasson proprement balayé de la maîtresse de la maison, on le prend par le garrot, on lui met sous le nez sa propre saleté, et il tourne sa gueule, geint, essaye de reculer. Et Akbilek est aussi comme ce chiot. Elle ne voulait rien voir, elle s’est retournée. Malgré qu’Akbilek se précipite, de toute façon les roches, la pierraille, les fractures en pierre cachaient d’elle le visage natal plat de la steppe. Mais il est arrivé le moment quand le soleil s’est levé au-dessus de toute la chaîne de montagnes sur le sommet de lance, et Akbilek haletée s’est retrouvée au bout de piège de pierre, a vu l’espace brumeux de steppe. Elle s’est réjouie, comme si elle était près du seuil natal. Elle était ravi, si elle avait eu des ailles, elle se serait envolée!
Les genoux fléchaient, il a craqué dans les chevilles. C’est rien, elle s’est traînée plus loin. En essayant de ne pas agiter les mains, elle est descendue dans la dépression par la pente. Le craquement dans les jambes s’est calmé, il paraît. Elle espérait, qu’il lui restait encore de la force; effectivement, il était plus simple de marcher sur la surface plate, mais quand elle est montée encore sur une hauteur, les pieds sont devenus plombés, ont commencé à lanciner, on dirait que les os se sont cassés.
Où sont ses petites jambes infatigables, rapides dans les jeux au chat, comme les jambes de petit lièvre? On l'a jeté le mauvais œil ou quelque chose encore pire s’approche d’elle? Il est effrayant de s’imaginer, aïe, les crampes d’un seul coup! Si au moins un aoul se montrait, s’il n'y a pas d’aoul, soit un seul Kazakh, s’il n’y a pas de Kazakh, soit peut-être un animal. Mais les collines courbaient et avaient l’air de ne pas être que les obstacles, et on ne voyait rien et personne.
Après avoir passé le terrain inculte suivant, Akbilek est tombée sur l'escarpement étendu à travers... Grâce de Dieu! Une rivière, une rivière! Il y avait une route sur la rive opposée. Cela vaut dire que les gens sont tout près! En faisant le reste de ses efforts Akbilek s’est mis à marcher plus vite. La rivière s’est avérée étroite, elle roulait avec clapotis les petites pierres dans le fossé de pierre. Elle est arrivée sur la petite rive droite, a enlevé les bottes, a enlevé le tchapan, le pourpoint, a pris le bas de la robe, a roulé les manches, s’est lavée le visage, a bu de l’eau. La gorge était complètement séchée, elle était très fatiguée. Après avoir apaisé la soif, elle a respiré avec soulagement.
Près du bord de l’eau Akbilek assise a passé assez longtemps. Elle pensait: «Voilà l’eau coule et s’arrête, coule et s’arrête, et il n’y a pas de sa fin, rien ne la menace, et elle ne connaît pas la mort. Elle ne sent rien. Si j’en bois ou pas — ça lui est égal, elle va donner à boire pour le mauvais homme, et pour le bon. Elle est aussi la vigne de l'abbé. Sa charité à Lui! Mais moi, je n’en ai pas reçue!»
Pendant toute sa vie l’eau coulait devant ses yeux, mais elle n’avait pas de pensées pareilles. Elle s’est étonnée elle-même, comment elles étaient arrivées dans sa tête. Elle s’est penchée vers le miroir des eaux près de ses pieds et a vu sa réflexion. Les cheveux se sont avérés ébouriffés, elle s’est précipitée de mettre les mèches en plis en les mouillant par l’eau. Elle a voulu de les peigner. Mais elle n’a pas fait après avoir pensé: «Pour qui se faire belle?» Elle s’est levée, en regardant autour d’elle dans la recherche de l’endroit retiré à proximité, pour s’y reposer un peu. Il s’est avéré qu’elle a eu des fourmis dans la jambe, elle a pincé trois fois les mollets, les hanches, il paraît qu’il s’est passé.
À gauche une ravine pas profonde dans la berge s’est jetée dans les yeux. Sans trop penser, Akbilek a mis le pourpoint, a jeté le tchapan sur ses épaules et, en traînant derrière elle sa massue, s’est dirigée vers elle.
Là, près de l’anse, on peut se cacher. Le mur de l’argile de pierre est derrière, l’eau est avant, l’anse est à droit, le rempart coulé de l’escarpement est à gauche. Elle s’est assise en entourant les genoux par ses bras, et voûtée, elle jetait les coups d’œil sur l’eau. Le soleil a commencé à brûler, le front devenait plus chaud.
«Voilà est la rivière. Mais où sont les gens qui vivent ici? Est-ce qu’il n’y pas d’habitude de s’installer près des rivières? Et la route le long de la rive... Aïe, peut-être, les gens d’ici s’en sont allés au plus loin des Russes! Tout est arraché acharnement autour! Maintenant ils sont personne ici! Combien de filles, telles que moi, les pauvrets, ont disparu! Mais il est peu probable, que ce qui s’est passé avec moi, s’est passé avec elles. Je n’ai pas vu d’autres au stationnement des koches... Ou ils les ont tuées tout de suite?.. Les Russes, oh, sont impitoyables avec les gens! Je ne vais pas me rappeler des maudits, et s’ils venaient de nouveau! Pourquoi ils ne sont pas revenus? Peut-être, ils se sont rencontrés avec quelqu’un? Avec qui ils ont la guerre? Peut-être, avec les Kazakhs bordiers? Non, pourquoi les Kazakhs vont leur faire la guerre? Qu’est-ce qu’ils veulent? Ou ils veulent exterminer tous les Kazakhs, et se prendre leurs filles, femmes, tout le bétail? Dans ce cas pourquoi ils se sont disparu tous ensemble d’un seul coup? Pour piler tout l’aoul il suffit que trois-quatre aillent avec les fusils... Eh ils partaient en regardant autour d’eux comme effrayés. Ou on leur a mis la raison? Qui est leur ennemi? Aïe, les Saints, aïe! Le père disait quelque chose à propos des «blancs, rouges». C’est là le problème? Les rouges sont aussi les Russes? Eux aussi ils attrapent les filles et s’en fuitent? Si les Russes.. Dans ce cas, peut-être, ils sont comme la Moustache Noire. Il voulait me tuer. Aïe, ma petite tête! Le Créateur, aïe! Qu’est-ce que je dois faire?!» — elle a fait des suppositions et a laissé.
L’eau coule, clapote proprement... Akbilek regarde l’eau transparente, et les pensées troubles la bercent. Elles l’ont endormie, les paupières ferment. En craignant s’endormir, ayant peur d’inattendu, Akbilek ouvre et ouvre les yeux collants. Mais elle n’arrive pas: le soleil chauffe — un, les clapotis de l’eau, la question sans réponse — deux, et en plus elle n’avait pas dormi toute la nuit, elle avait marché une demi journée, elle s’est fatiguée...
Ayant tressailli en se réveillant Akbilek a levé la tête d’un seul coup. Elle a eu peur, je crois bien! Elle s’est retrouvée on ne sait pas où, presque dans un trou près d’une rivière. Tout de suite elle s’est rappelée comment elle courait du défilé morose. Elle a sauté sur ses pieds. Le soleil s’est penché vers l’horizon, il faisait plus sombre. En regardant fixement elle a examiné la rive celle-là, et attentivement – la rive celle-ci, a recherché le gué, les pieds flottaient de nouveau dans les bottes. Elle fait les allers-retours. Il n’y a pas de gué. Elle mesure la profondeur par sa perche, c’est profond partout.
Pas de sitôt elle a trouvé les basses eaux, d’un bout à l’autre couvertes par le caillou rond. Le courant allait à toute vitesse dans les rides. Elle a enlevé les bottes, a levé les fringues de coulisse – comme elle pouvait au-dessus des genoux, elle a mis les bas en cuire sous les aisselles et, en marchant attentivement par les petits pieds blancs mous sur les petites pierres, a traversé le torrent.
On voyait la hauteur à une demi-verste. Elle a décidé d’y monter et chercher les gens avec ses yeux.
Elle a escaladé, il s’est avéré, derrière elle il y avait encore les hauteurs plus hautes. Akbilek s’est mise à examiner autour d’elle, en tâchant de trouver la route. En avant — la steppe coupée de collines, en arrière — la chaîne de montagnes. L’aoul d’Akbilek se trouvait au pied de chaîne de montagnes. Pas plus à l’ouest, mais à sud-ouest, les montagnes ne ressemblent pas ses montagnes natales, elles s’étendaient en travers de ces sommets lointains ceux-là. Cela voulait dire qu’il fallait aller dans la direction de Mecque non pas en s’éloignant des montagnes, mais en les contournant. Après avoir décidé tout cela, Akbilek s’est mise à marcher sur les cols, en essayant de passer sur les endroits en pente douce, ouverts.
La vallée cabrée déserte. L’entrelacement des herbes pâles, les broussailles de fleurs sauvages, des buttes, des remblais, le limon sableux rouge, les crevasses envahies. Les souries grises, les pies bariolées, les lièvres, les alouettes — à part eux on ne voit personne. Les gens, qui peut se montrer, ohé! La steppe déserte se ressemble avec la brulure. Et comment les bergers peuvent y faire pâtre les troupeaux et ne meurent pas d’ennui? Holà, le vaste terrain inculte dénudé! L’air du pèlerin solitaire dans la steppe déserte est triste.
Akbilek marche tristement sur la steppe promettant encore le salut, les genoux flottent dans les tiges. L’émerillon court à toute vitesse derrière la sourie, trompète, comme un aigle. Là loin l’alouette s’envole et tombe, pénètre les nuées, en tremblant par les ailes, incapable de rester immobile soit pour un moment. La voix de cet oiseau inquiétait spécialement, les autres chantaient autrement, qu’est-ce qui s’est passé avec le petit pauvre? Encore quatre-cinq oiseaux tournaient en rond à toute vitesse autour d’elle, en s’approchant et en s’éloignant; ils sollicitaient les protectrices minuscules: ils s’approchent, gazouillent avec indignation et s’envolent à l’écart.
Un moment l’alouette est tombé comme une pierre imprudemment, comme pour une attaque. Et Akbilek a couru à toute vitesse vers l’oiseau. L’endroit où elle s’est jeté, est couvert dansement par l’herbe. Akbilek est pressée en regardant fixement. Le petit ailé disparu dans les broussailles herbues, s’est mis à bouger, y a remué en se pénétrant dans les broussailles de tiges épaisses, en agitant l’herbe, a commencé à faire du bruit. Qu’est-ce qu’il a, le pauvre? Elle s’est approchée en courant, et là, ayant étendu la verdure le serpent gris est couché fermement.
Le serpent a levé la tête aigue, à son intérieur — la mort, les petits yeux de diamant dévorent du regard l’alouette, la petite langue bifide tremble; le serpent en sifflant, rampe par son côté, en charmant, il se roule, et il s’allonge, en poussant les vapeurs empoisonnées, voilà il est prêt pour le saut. L’alouette n’est pas capable de détourner les yeux de petits yeux étincelants de serpent, bat des ailes trépidant, se levant misérablement, il s’est groupé en boule — et en bas, directement sous les dents de serpent, et il y tournement. Un: hop, et c’est fait. Le serpent terrible, ayant enfoncé son regard à travers l’oiseau, il se lâche par la petite fourchette de langue, couché et attend le moment quand il saute tout seul dans sa gueule.
Akbilek a eu de la pitié envers l’alouette. Elle a flanqué un coup par sa perche directement sur la petite tête aiguisée scélérate. Elle l’a enfoncé dans le sol, le corps étroit a commencé à se tordre avec les tics. Le pauvre oiseau a repris ses sens un peu: a bougé, a tourné sur le sol, a fait un cahot, comme s’il secouait quelque chose préhensile, a agité les ailes avec bruit et s’est envolé dans le ciel comme une plume. Akbilek a flanqué encore deux fois sur le serpent bougeant et s’en est allée plus loin.
Elle a fait un pas et s’est rappelée ce qu’elle avait entendu encore en enfance: «Le serpent mange l’alouette après l’avoir charmé». Comment? «Tu va voir toute seule», — on lui répondait. Il est intéressant, ce qui était que la magie dans les yeux de cette canaille? — s’étonnait-elle. On dirait que le cas avec l’alouette a enlevé sa fatigue, elle s’est mise à marcher à pas rapide, le cœur battait fortement, en revenant par le plus régulier. Elle était heureuse qu’elle ait sauvé l’alouette de la perte sûre. Et de son courage de tuer le serpent. C’est un bon signe. L’oiseau est si abandonné, pourquoi il doit mourir?
L’oiseau, l’oiseau est mon nom,
Je suis une boule de plumes,
Le garçon me faisait du mal, Deviens l’orphelin toi-même!
L’oiseau maudit de telle façon dans les jeux d’enfants. Il n’est coupable de rien. Elle a trop réfléchi. Et ensuite la question qui l’a fait réfléchir: «Mais envers qui je suis fautive?» Elle s’est imaginé une alouette, et ses offenseurs étaient les créatures rampantes. J’ai battu l’assassin de l’oiseau, et quelqu’un va tuer absolument mes offenseurs aussi, et elle a pensé que sa décision était correcte.
Elle marche, réfléchit de telle façon, et tout à coup en avant sous la hauteur une tâche blanchâtre à pointe a apparu. Akbilek a eu peur et ayant retiré la tête dans les épaules s’est accroupie. Elle s’est cachée, on ne la voit pas. Elle a peur de jeter un coup d’œil en se levant, elle a peur, et si ce sont les Russes, mais elle n’a plus de patience pour se cacher — autant elle veut jeter un coup d’œil: Qui est là? «Si ce sont les Russes, de toute façon ils vont la trouver, tout autour peut être vu, soit qu’il soit, je vais jeter un coup d’œil», — a décidé elle et, resté assise encore un peu, elle s’est soulève et a regardé fixement. Quelqu’un remuant va à côté au pied de la colline, comme dans la cours, se marmotte un étrange dans sa barbe, on dirait que l’hibou est campée sur sa caboche. Un soupçon est arrivé, que les Russes n’ont pas de bonnets si pointus, il est devenu plus facile pour le cœur, et le cône sur sa tête est devenu compréhensible: c’était un douana ordinaire - sorcier, et guérisseur, et homme de Dieux. Voilà et le bourdon dans sa main.
— Ohé, le douana! — et elle n’a pas compris, comment elle a poussé le cri, comment elle a osé de l’appeler.
Le derviche s’est arrêté comme le cheval en pleine activité, s’est levé, est resté immobile un peu, et ensuite, après être tourné, s’est dirigé vers elle.
Akbilek a commencé à se rappeler de lui: les pieds sont salés par l’argile, le sommet pointu du bonnet blanc est couronné par les plumes de grand duc, le bourdon d'obier est couvert par un couture sèche, décoré par les bagues et les sonnettes, tinte, et avec lui l’omoplate d’agneau conjecturale, sur son cou il y a un chapelet de prophète Khidr, le couteau est sur son côté, les narines se gonflent, la poitrine est déboutonnée, la pomme d'Adam sort, les avant-bras sont dénudés, les doigts sont tendus, il est renfrogné avec méfiance, la barbe sort par les mèches, s’est détendu, mais veille plus fort... Lui, on le voit une seule fois, on se rappellera toujours, — Iskander lui-même.
Qui est-il, le derviche Iskander? Est-il dangereux pour Akbilek? Et pendant qu’il se déplace avec précaution vers elle, essayons de raconter, comment il était cet Iskander.
Il n’y a pas dans le monde de sentiers de sortilège et de cols de montagne qui ne sont pas parcourus par Iskander. Prenons, par exemple Öskemen, ou Borovouye, ou Semipalatinsk, ou Karkaralinsk — partout ses pieds nus ont laissé leurs traces. Il a vu et le bateau et le train. Il a même créé une chanson à ce propos: «ba-teau-oh, ba-teau-oh!..».
Iskander n’a pas de maison. Là où il se case vers le soir — là est son abri. Quelque gorge, un fossé herbé, un vieux mur tombal demi détruit peut être son habitation. Il n’a pas de parents, lui. Ses parents sont tous les Kazakhs. Il n’a pas de bétail non plus. Toute sa fortune est devant vous. Il est indifférent envers les objets. Si on lui donne de l’argent, voilà le prix, pour lequel il organisera dans le premier aoul le combat, les courses pour les enfants. Il flâne sans besace, ne prend ni friandises, ni un morceau nourrissant, si on lui donne quelque chose à manger, il est content. Arrivé chez les gens il se dirige à le place la plus honorable et s’exclame: «Allah est la vérité!» — il pousse quelque chose inarticulée en expirant, frappe autour, bouge du bourdon ça et là et s’en va. Il donne à n’importe qui son collier de nacre et les plumes de grand duc. D’ailleurs, toutes les filles et belles-filles lui demandent de décorations.
Iskander n’est pas capable pour la tromperie, il ne sait pas comment on peut mentir, jamais il ne pense mal de l’homme. Il appelle les plus âgés les pères et les petits oncles. Et il s’adresse aux femmes: «maman», soit même c’est une jeune belle-fille dans une maison étrangère. Toute la race humaine pour lui est «mes petits enfants», il n’élève jamais voix à personne. Il ne répond rien à la personne qui l’a vexé, uniquement hausse la tête. Il arrive on lui demande:
— Douana, fais peur ce polisson.
Il répond après avoir caressé l’enfant coupable: *
— Laisse le petit enfant, mon chéri, ne lui fais pas peur!
Le plus, Iskander adorait les enfants. Iskander arrive et les enfants sont à la queue leu leu derrière lui, ils ne le laissent pas jusqu’à son départ. Et les chiens le marquent aussi spécialement; ils le suivent, en aboyant et en hurlant. Il marche, en déplaçant le bourdon sur un rythme lent, et même si quelque chien arrache le bâton par ses dents, jamais il ne va battre l’animal. Si les enfants sont occupés par les études, Iskander se précipite de saluer à la main le mollah leur enseignant, et les enfants tout de suite sautent sur les pieds et tendent vers le derviche leurs petites paumes. Iskander demande auprès de mollah de laisser partir les enfants et leur donne une liberté. Parfois il reste dormir dans l’aoul, il s’accroupit près de quelque maison le soir et tend son bras plié à l’enfant qui d’habitude est à côté de lui, et se met à le tourner ça et là. Tel est son combat. C’est intéressant pour les gamins, ils font la queue pour la bataille avec lui. Le garçon tombe, il lâche son bras et dit: «Ohé, l’hercule est tombé», — et si celui-ci tient sur ses pieds, dans ce cas: «Ohé, l’hercule, tu as gagné».
Iskander croit à tout ce qu’on lui dit. «On dit, que celui-ci voudrait te voir, il veut que tu lui amène du charbon de la ville», — on dit au derviche, et lui: «Ah, c’est comme ça», — et se dirige vers le Monsieur Un Tel. Dans les jours d'hiver féroces Iskander a marché cinquante verstes jusqu’au ichan Isakay, entraînant sur son dos un sac de charbon, il y avait un cas pareil. Et en outre il marche, en ameublissant le sable et la neige, les pieds nus, telle est son âme que ses pieds n’ont jamais connu de chaussures.
Ce qu’Iskander aime, c’est l’éloge. On lui dit: «Cher douana, on dit, vous avez eu une compétition avec le bateau?» — il répond très content: «Oh, mon père, ça m’est arrivé». Il jouait à qui arrivera le premier avec le cheval ambleur et avec les chevaux attelés dans l’araba. Il prétendait qu’il n’était resté en arrière sur personne. L’aptitude à la course — voilà est c’est tout, de quoi il pouvait se vanter, mais ceux qui l’ont sa course assuraient, que seulement dans les courses à long distance il était en arrière les chevaux. Il arrivait qu’il lui vienne quelque chose dans la tête, et il commence à courir tout comme les étalons près des aouls deux-trois versts. Et si on lui demande: «Douana, comment tu arrives à ne pas te fatiguer?» — il répond: «Oh, Dieux donne de la force».
Et Iskander courait sans chercher le repos. Il franchit quelque seuil sur son chemin, s’exclame: «Véritable!» — il passe les paumes sur le visage comme pour la prière, Il y n’y est plus.
Il ne dit pas la bonne aventure, ne prédit pas le sort. Il assure: «C’est le péché», — et aussi la tête de côté et d'autre. D’ailleurs, on ne peut pas dire qu’il était appliqué dans ses prières. Parfois lors du namaz il passe sans ablution de ses talons noirs vers les musulmans priant, s’installe à côté. Il ne prononce rien spécial des sourates du Coran, mais il bouge ses lèvres, comme s’il les lit mentalement à part soi. De temps en temps il s’exclame: «Véritable!» — et pousse un son triste, et c’est tout.
Iskander n’est pas capable de causer, ses réponses sont courtes. Et quand il commence à parler, il peut répondre en poésie. Si le maître de la maison dit tout à coup: «Douana, nous n’avons pas de mouton pour la régalade», — on peut entendre de sa part telle vire langue, à ce propos ou mal à propos:
Hé, si on ne vous a pas donné de mouton,
Cela vaut dire que vous n’avez pas de sagesse.
Tout le monde voit votre sagesse,
Cela vaut dire que la fête est donnée d'en haut ...
Personne n’a vu Iskander mécontent, avec la lèvre dépassant, chaque fois quand on le regarde: il est affable, souriant. Et personne même ne pensait pourquoi il était comme ça, comment le cœur bat dans sa poitrine, quel sang coule dans ses veines, quelle énergie fait avancer son corps. On lui tutoie seulement: «Douana, douana», — et on remarque: «Le pareil peut tout». La vie d’Iskander est un mystère. Bien sûr, Iskander est un homme. Mais quel homme?..
Peut-être, c’est tout, ce qu’on pouvait raconter de celui-ci qui a rencontré Akbilek. Le derviche approché d’elle a dit:
— Eh, mon enfant, mon chou, chéri... D’où es tu?
Akbilek s’est troublée, a baissé la tête sans savoir quoi répondre.
— L’oncle douana... moi... moi... je suis d’aksakal Mamyrbay... — et elle s’est tue.
Elle avait honte d’avouer qu’elle était sous les Russes, malgré que ce fût contre sa volonté... on ne peut pas éviter de répondre, il faut dire quelque chose. Elle a frotté son petit front, a fait battre ses cils et a baissé ses yeux sur le sol... Elle a marmotté:
— Je suis la fille d’aksakal Mamyrbay... je me suis perdue... et maintenant je ne peux pas trouver mon aoul...
La douana ne s’est mis à s’intéresser comment et quand elle s’était perdue.
— Eh-eh, mon enfant... tu es perdue? Mamyrbay, Mamyrbay, Taouyrbay, Souyrbay... je sais, je sais... je vais te prendre avec moi, je vais te surveiller, je vais t’amener à la maison, — et lui a tendu le bras.
Réjouie que le derviche n’ait rien demandé, Akbilek l’a suivi avec joie. Iskander la traînait par la main gauche, et par la main droite il déplaçait le bourdon: ses pieds secs comme coupés de bois ne faisaient que danser. Il marche, marche, et plaint dans le rythme des pas: «Eh, mon enfant, eh, mon enfant, les yeux ont gonflé, les pieds sont battus, tu as souffert de faim, et toi-même tu es fanée...» Et Akbilek ne trouve pas de mots pour répondre, seulement parfois elle regarde la barbe de pèlerin sortant par les mèches ou sa poitrine bronzée sous le soleil. Les doigts verruqueux tiennent avec ténacité le poignet d’Akbilek. Il est pressé de telle façon qu’on dirait que quelqu’un loin l’attend jusqu’au désespoir. Fatiguée vite, Akbilek n’arrive pas à déplacer ses pieds, elle est complètement penchée comme un petit enfant, qui est traîné par la mamma sévère. Enfin elle n’a pas supporté et s’est mise à supplier:
— Oncle douana, ne pourriez-vous aller un peu moins vite...
— Eh, tu es fatiguée, mon enfant? — et, après avoir laissé son bras, il s’est mis à marcher pas ci vite.
D’ailleurs, il mesurait les pas par ses pieds endurants accompagnés par le bruit de taureau sortant de sa poitrine vivement comme toujours, tant que bientôt on ne pouvait pas l’appeler. Restée assez en arrière, Akbilek a essayé de le retarder par la conversation:
— L’oncle douana, est-ce que l’aoul est loin?
— Ah, — il s’est arrêté. — On va y arriver, on va y arriver.
Et de nouveau il s’est jeté en avant. Akbilek s’est fatiguée complètement, mais elle avait honte de l’avouer. Et elle a commencé de nouveau à lui parler en espérant de retenir le voyageur:
— Douana! — elle a presque crié.
Cette fois-ci elle a demandé, s’il n’avait pas rencontré par ici des militaires.
— Eh, une armée? Plein d’ennemis, il y en a, il y en a, — le derviche a marmotté dans sa barbe.
Akbilek, insatisfaite par la réponse, a demandé dans quelle direction se trouvait son aoul.
— Là-bas sous ce nez sortant, — et il a indiqué la montagne se dessinant bleue au loin.
Il est devenu clair pour Akbilek, qu’aujourd’hui elle n’atteindrait le seuil natal. Au moins qu’on s'approche en traînant les jambes à quelque demeure... Ce qui pour douana avec sa vitesse est proche, pour Akbilek émaciée, avec les genoux se cassant cela n’était pas accessible. Il marche, elle se traîne à peine... Ils ont déjà marché autant... mais de toute façon elle n’y arrivera pas. Là, près de l’horizon, sur la pente on voyait quelque chose — soit le bétail de pelage foncé, soit les souches sombres.
Le soleil s’est penché en se préparant pour la prière de soir.
Akbilek avait faim, était exténuée. Elle a enlevé les bottes pleines de douleur. Il ne lui restait plus d’effort pour se déplacer et, et sans rien sentir, elle s’est assise tout simplement. Le douana qui s’était éloigné d’elle pour une demi-verste, après avoir entendu sa petite voix amincie plaintive, est revenu en sautant vers elle. Il a compris, que maintenant elle n’était pas capable même de bouger du petit doigt.
— Eh, mon enfant, les yeux se sont gonflés, les pieds se sont gonflés... tu es fatiguée, n’est-ce pas? Ah, je vais te porter sur mon dos, mon enfant. Vas-y, monte! — et il a mis son dos.
Akbilek tardait, sans oser de monter sur son dos, et elle a refusé. Il lui a semblé inconvenant, pour elle, la fille, grimper sur le dos d’un homme énorme. Elle s’est rappelée tout de suite, comment la Moustache Noire la portait dans ses bras, quand elle était sa femme, la serrait, l’embrassait... Et en général, est-ce que ce n’est pas un péché de permettre son corps souillé par les caresses du Russe infidèle, de se serrer contre le dos de l’homme de Dieux? Mais le derviche attendait avec patience, en répétant: «Grimpe, grimpe, mon enfant».
Les proches sont loin, il n’y a pas de force pour aller. Désolante elle a été obligée de monter, elle a soupiré un peu, en essayant, et elle a tendu les bras vers les épaules de douana. On dirait qu’elle s’est forcée de le prendre par le cou, et le douana rien — il a sauté sur ses pieds comme un cheval, et avec le cri: «Avec moi, c'est ma sainte fête!» il s’est mis à continuer à courir. Il a passé son bourdon à Akbilek, et les jambes flottantes sur les côtés il a serré par les angles des coudes, l’a serrée, a secoué pour l’affaissement plus solide et s’est mis à faire de grandes enjambées plus loin sur les buttes et les pierres.
Akbilek s’est imaginée quelle était amazone à ce moment, et elle était prête de rire et pleurer. D’ailleurs, elle était contente. Tout d’abord, qu’elle se voyait galoper des Russes. Là avec eux il n’y avait pas même d’espoir de rester humaine, là elle s’est résignée et aux souffrances, et aux humiliations, et au dévergondage, et à la mort même. Et le fait de voyager sur le dos de douana, il n’y a pas de mauvaise intention, et le gage est la sainteté du derviche. Elle désirait uniquement une seule chose c’est arriver à l’aoul, chez le père. Elle va le voir, elle va l’embrasser, elle va prononcer la prière au-dessus du tombeau de la mère et elle-même elle va prendre soin de son père comme la mère. Malgré qu’elle se calmait, de toute façon son cœur est cueilli, serré par la corde; par qui? Vous vous rappelez vous-mêmes. Et où est la joie? Où est le salut? On ne peut pas, on ne peut pas regarder tout d’une autre façon, la bêtise, que la voie se passe bien de nouveau, on a beau faire cela — les nuages noires arrivaient de tous les côtés en fermant la lumière, il restait seulement d’être atteint de la douleur, supporter...
Si on ne prend pas en considération le sentiment de gêne, qu’elle a eu au début de son équitation inattendue, lors de sa course Akbilek a oublié qui était au-dessous d’elle, il lui semblait que c’était sa maman qui la portait, la petite, sur son dos, et les jours d’enfance ont surgi dans sa mémoire. Vêtue de la petite robe blanche, la culotte rouge bordée par la soie noire brillante au-dessous du bas de robe, une petite queue de cheveux se fait voir sur son mésocrâne; aux pieds nus, la petite gamine préférant la course au pas réguliers. Elle décore le chevreau avec les boucles blanches et noires par la frange et les plumes de grand duc, s’imagine qu’il est son petit cheval, et joue à ce qui est le premier avec les enfants comme elle. Elle tombe dessus avec toute sa marmaille sur le père qui somnole tranquillement, et il s’alarme et capitule avec brouit au-dessous les enfants pendant sur ses épaules, son cou: «Vous m’avez fait tomber, vous m’avez fait tomber!» Ils jouaient au cache-cache, se cachant derrière les chameaux somnolant, les souches, les hauteurs, dans le fossé... Derrière la maison ils organisaient une petite maison du trépied fermé pour la poupée faite des osiers, ils mettaient des torchons au-dessous, et on pendait la mousseline sur sa petite tête, parce qu’on recherchait en mariage pour elle absolument, elle devenait une fiancée, et elles, comme les tantes expertes, faisaient point sur les comptes à ce sujet, exigeaient une rançon auprès des parents du fiancé-poupée... Elles ont coupé les morceaux pour les petites robes de la poupée-fiancée des coupons de maman, elle va absolument être punie par la maman pour cela. Mais de toute façon comment la maman peut ne pas l’aimer! Elle serre sa fille contre le ventre, l’embrasse avec du bruit sur son joue: «Je ne me lasse pas d'admirer ma petite fille blanche-blanche!..» Où est maintenant sa maman? Oh le Créateur, qui et quoi va remplir un vide retentissant à sa place? Qui va toucher de ses lèvres le petit front d’Akbilek, quand elle va apparaître à la maison natale? Avec qui elle va pleurer, qui va la réconcilier? Et Akbilek s’est désolée de nouveau, les petites larmes ont apparu de nouveau. Et elle aurait pleuré, mais tout à coup directement devant eux l’alouette s’est envolée en tremblant du buisson herbeux et l’a détournée des larmes. Vers ces moments et le soleil s’est penché vers l’horizon, le soir tombait.
Peut-être, c’était mal à propos, juste une pensée, qu’il était difficile pour le derviche de marcher avec le fardeau. Après deux-trois passages à travers les hauteurs et les fossés il a fait descendre Akbilek de son dos lui-même, il s’est reposé un peu, il a dégourdi le dos figé, s’est levé comme un cheval de selle. Akbilek voulait aller toute seule, mais le derviche n’a pas cédé et l’a faite monter sur son dos de nouveau. On ne sait pas d’où l’aboiement des chiens est venu. Akbilek s’est réjoui:
— On est arrivé à l’aoul!
— On est arrivé, mon enfant, on est arrivé, — a répondu le derviche et l’a lancée encore une fois sur son dos.
Akbilek a pensait qu’elle a senti l’odeur de lait bouilli entrelacée finement avec la fumée du fumier séché s’enflammant au-dessous de la chaudière.
— On est arrivé, oncle douana! Maintenant je vais marcher toute seule.
— Eh, mon enfant, on a encore beaucoup de route à faire, — a répondu le derviche, sans la laissant marcher.
Et quand on a presque commencé à entendre le glouglou de lait bouillant, le derviche s’est arrêté.
— Voilà ici plus en bas est l’aoul, — il a déclaré.
Akbilek a glissé de son dos. Elle a dégourdi les bras engourdis de derviche comme elle pouvait, elle a essayé de dégourdir ses pieds, mais il s’est écarté, en revanche elle a secoué les bouts de son tchapan et elle est allé de nouveau près de lui.
Bientôt sur la pente d’une petite montagne l’aoul serré contre elle s'est fait montrer. On ne peut pas dire qu’il était construit comme une colonie terminée, on n’y voyait même pas un rang régulier, on voyait ça et là cinq-six hivernages enrichis. On dirait qu’ils déclaraient à une personne attentive, qu’ils étaient comme ça, et leurs maîtres se tenaient au plus loin l’un de l’autre, sans utilité pour l’affaire, sans désirer de vivre d’un seul nid. Près de certains hangars le bétail était debout d'un air morose. Il faut croire qu’on va commencer à le mettre aux campements. De grosses bouffées de fumée montaient du gros bâtiment près de la butte de terre. Une certaine ombre se dirigeait vers lui de la part de la petite demeure située à droit. A gauche de la penché s’est casé le hangar, devant lequel on voyait quelques objets, à s'y méprendre, mais il en avait beaucoup. Akbilek ne sachant pas laquelle des maisons choisir, marchait par inertie, et le derviche a proposé:
— On va à cette maison.
— Elle est à qui?
— Au richard Moussa.
— Et si on allait à celle qui est plus près? Akbilek ne voulait pas aller à la maison riche, si elle est riche, cela vaut dire que tout y va bien. Et les gens absolument honnête y habitent. Dans sa situation actuelle il n’était pas prudent d’aller à la maison décente. Sous cette forme, et chez les gens décents.
— Pourrions-nous entrer à la maison la plus proche? — a répété Akbilek.
— Celles, qui sont plus proches, ont faim eux-mêmes, et toi, mon enfant, je pense, tu as faim... — a dit le derviche à haute voix.
— Et alors... Nous avons besoin d’une petite gorgée de lait, peut-être, il y aura un petit endroit, où on peut se coucher, — ne se calmait pas Akbilek.
Oui, c’est peu probable que même l’homme de Dieux est capable de dénicher ce qui s’est mis dans la petite tête de femme. Iskander-daouna n’a pas insisté, et maintenant peut-on dire qu’il était faible d'esprit, comme on croyait?
— Eh, mon enfant! D’accord, d’accord, — et il a tourné vers la première habitation misérable.
Mais quand il a fait un pas après avoir tourné, Akbilek a failli le prendre par son pied:
— Ne dites pas, s’il vous plaît, l’oncle douana, qui je suis. Dites-leur, que je ramassais du fumier séché, je me suis perdue, et vous m’avez trouvée.
Le derviche s’est refrogné et a dit:
— Eh, mon enfant! Est-ce que mentir c’est bien? Le menteur est ennemi d’Allah, et il s’est mis à marcher sans précipitation.
Le chien paresseux après avoir entendu le claquement du bourdon de derviche, a remué que les oreilles, mais quand il a vu et le bonnet d’un homme étranger, il a été obligé de se lever, il a appris qu’il ne pouvait plus se coucher, et il s’est mis à aboyer avec application. Et c’est à ce moment qu’une femme, au pantalon en cuir déchiré au-dessous de la robe retroussée, à la brassée avec un seau, est sortie de dessus de la vache, et a remis en ordre le capuchon de la femme mariée sale glissé de côté — kiméchok, d'où seulement le nez sortait, et a agité sont pied sur le chien:
— Va-t-en, va-t-en!
Le derviche a mis son bourdon derrière le dos et s’est approché d’elle:
— Eh, la mère, nous sommes les invités envoyés par Dieux.
La femme n’a pas répondu, a tendu le cou en essayant d’examiner Akbilek installée derrière le dos du derviche.
— Et qui est cette petite fille?
— On peut s’arrêter, alors? Vous permettez?
— Ohbay, ohé! Mais là les richards habitent... Nous ne pouvons pas recevoir les invités comme il faut... — elle venait de répondre quand Akbilek a sauté vers elle:
— La tante, mais on sera content du lait tourné. On allait chez vous et on savait que vous n’alliez pas nous offenser...
— Ohbay, ma chérie, ohé! Ah bah, si vous êtes venus... rien à faire ... partagez avec nous ce qu’on a, — la femme est devenue plus douce après avoir entendu la petite voix douce, elle était prête non seulement l’accueillir, mais de l’aider comme elle pouvait.
— Dans ce cas, entrez à la maison! — et elle a amené les invités inattendus dans sa demeure basse. — Ne frôlez pas la traverse. Plus bas la tête, par là, par là!
L’hôtesse suivait les invités en leur indiquant comment il fallait passer à travers la porte penchée. Ils sont entrés. Akbilek a tiré sur elle la corde cloué à la porte afin de la fermer, mais elle s’est penchée encore plus et comme le bétail têtu ne voulait pas absolument de bouger. Elle a laissé cette entreprise.
Il était sombre dans la pièce, comme dans une caverne de pierre. La femme amenait quelque part le derviche accroché aveuglement sur elle, et Akbilek s’y est traînée aussi. _
— C’est qui, maman? — ils ont entendu la voix d’enfant. Le foin froufroutait sous les pieds d’Akbilek. La puanteur venait de tous les coins. Quelque trou scintillait, évidement c’était une sorte de la fenêtre. Akbilek s’est installée maladroitement à côté de derviche sur une couche mise par terre. Ici le derviche a proclamé le sien:
— Véritable!
Akbilek a tressailli, et la femme sur le soupir s’est rappelée du derrière à cause de surprise.
L’enfant s’est mis à glapir, il a commencé à pleurer et en appelant la maman s’est précipitée vers elle. Et la maman lui dit:
— Taie-toi! Prends-le, douana! Il va te couper l’oreille! L’enfant s’est tu tout de suite.
— Eh, mon enfant, ne pleure pas! Je ne vais pas la couper, je ne vais pas la couper, — l’a calmé le derviche.
— Mais où est le sacré luminaire? — a demandé l’hôtesse, en bougeant par ses mains autour d’elle, et, en grondant, elle s’est dirigée dehors. Bientôt elle est revenue en portant le couvercle fumé de la cruche métallique, l’a mis de travers sur le bord du four, a mis une goutte d’huile sur la mèche se consumant, elle a pétri le petit feu par la main hâlée. Ensuite ses mains ont disparu de nouveau dans les ténèbres. Maintenant elle regardait dans le blanc des yeux d’Akbilek. En craignant que la femme s’est intéressée d’elle de nouveau Akbilek a demandé d'une voix plaintive:
— La tante, puis-je boire de l’eau?
— L’eau provoque l’hydropisie du cœur, bois du lait caillé, — elle lui a répondu.
— Dans ce cas, donnez-moi du lait caillé coupé de l’eau. Ma gorge est desséchée.
— Je vais te donner à boire, ma chérie, je vais te donner à boire.
La femme s’est mise à grouiller près du four, en faisant du bruit par la vaisselle.
A ce moment du four, comme dans le conte, s’est fait montrer une petite tête hirsute d’une salisson. Le derviche ayant penché le bourdon contre le mur derrière son dos, tout à coup s’est penché et a commencé à chanter-geindre quelque chose à lui. La salisson a ouvert de grands yeux sur lui.
La femme a amené à Akbilek la puisette plate sombre, en examinant attentivement son visage, et celle-ci a les paupières qui fermaient, il fallait lui tenir le vase près de ses lèvres. Pendant qu’Akbilek buvait, elle se tenait debout et en jetant les coups d’œil dans la direction de douana se frottait avec craquement son pied à travers le trou dans le bas de la robe. Elle n’a pas eu le temps de s’éloigner, mais Akbilek après avoir trouvé derrière elle soit une pelisse d’hivers, soit le pantalon doublé d’ouate, en gros, quelque friperie domicile, est tombée sur elle et s’est couverte par le tchapan. Dès qu’Akbilek a commencé à tomber sur le côté, le derviche a reculé, et ensuite s’est levé et sorti de la maison presque au toucher. Après avoir vu que son invitée s’est couchée, l’hôtesse est sortie aussi. Akbilek ignore ce qui s’est passé après car elle s’est endormie.
Dans la cour la femme s’est mise à interroger le derviche sur sa compagne. Et après avoir entendu: «La fille de Mamyrbay», a exclamé, après avoir compris tout: «Ah!» Le fait d’avoir fait coucher dans sa maison la fille de Mamyrbay lui-même, et lui a donné à manger était une nouvelle si grande, elle ne pouvait pas pouvoir contenir dans une seule femme, il fallait absolument aller vite voir la Chamelle à lait pour chercher une poignée de farine.
Quelle absurdité! Est-ce que la personne normale va demander de la farine à la chamelle? Elle ne va pas manquer d’aller voir sa voisine, appelée Boz-izen. Oui, les Kazakhs ont donné ce beau prénom à une femme honnête. Merci, on ne lui a pas surnommé comme Bout-gymasse, en faisant une allusion, que celle-ci ne va jamais bouger ses cuisses. Cependant, si vous désirez, on va vous raconter, qui était cette Boz-izen. C’est rien pour nous. Faire des potins sur le compte, user beaucoup de salive sont les plaisir pour nous, donc, si on a commencé, on y va.
On parle de la femme du Moussabay connu. Chaque chien de l’aoul sait, qu’on l’a appelée la Chamelle à lait pour sa manie de grandeur. Si même la steppe avait commencé de parler tout d’un coup de son importance, elle n’aurait pas eu le dernier mot avec Boz-izen non plus; le torrent de fanfaronnade jusqu’à ce moment coule de sa bouche, malgré que cette hâbleuse a vieilli considérablement. Malgré les efforts des ennemis, ils n’ont pas pu rassurer Boz-izen du choix fautif de sa passion. Son petit mari au cou maigre et la barbe usée, n’avait pas de droit même dire un mot, en écoutant son épouse. Oui, il est sûr, Boz-izen aurait été non seulement la première et incomparable dans l’aoul, peut-être même dans le demi-monde, s’il n’y avait pas eu de cette salope rousse au gros nez — la femme de Birmagan, elle ne la laisse pas ouvrir la bouche! Les femmes, charmant, commencent à se quereller, et elles entassent autant. Il est assez, LAISSONS-LES!
De quoi on parle? Ah-ah, de cette femme misérable, précipitée chez Boz-izen. C’est intéressant pourquoi elle n’est pas allée chez la Rousse, qui est entre outre une des ses parents? Il y a, alors, quelque ruse. Probablement elle a décidé en utilisant une opportunité incroyable de traire encore une fois la chamelle (il faut dire elle y est arrivée déjà).
Quand la voisine est entrée, Boz-izen berçait son enfant aux cheveux blonds Anouarbek, que la Rousse n’appelait que l’avorton. Dis donc — elle a appelé le fils en honneur de quelque Turque connu, mais elle a entendu de lui du coin de l'oreille! Et comment encore, le chien vilain est appelé le chien-loup.
— Calme-toi, Anouar-jan! Dors encore, mon chéri! — et elle tape la petite épaule de son petit fils par sa main, le caresse, rajuste la petite couverture, la borde sous le petit côté, regarde — admire.
Après avoir vu que la voisine hésite près de la porte, Boz-izen a froncé le sourcil d'un air important:
— Koumsinay, tu es venue pour une affaire ou comme ça?
— Pour une affaire... Il y a une... — Koumsinay s’est faufilée de Boz-izen.
Boz-izen a rajusté les bords de kiméchek sur ses épaules, s’est assise plus confortablement et en attendant les nouvelles plus-au moins fraîches a prêté son oreille à la voisine, on voyait sous le fin tissu blanc de pèlerine. L’autre a commencé à chuchoter.
— Ah, laisse! — Boz-izen a levé la tête, mais tout de suite elle s’est inclinée par la joue vers la causeuse, passionnément, comme le chasseur sur la crosse de fusil. — Alors, elle est seule?
Mais elle n’a pas pu parler à cœur joie, on l’a informée que son mari est revenu, et l’hôtesse a été obligée de se lever et aller dans l’antichambre. Elle est revenue avec une tasse de farine, l’a donnée à la voisine et a dit:
— Je vais venir toute seule.
— Venez, mais il n’y a rien à voir. Elle est en train de dormir.
Pour Boz-izen l’objection de Koumsinay est comme le trépignement de la puce pour l’oreille. Ne pas renvoyer aux calendes grecques cette affaire impotente, elle s’est précipitée dans la cuisine d’été, où sa belle-mère faisait bouillir le lait, et en faisant les clins d’œil lui a raconté tout ce qu’elle venait d’apprendre. La vieille a goûté le lait et s’est mise à allumer le feu dans le four. Avec un air, disons, ça m'est égal, Boz-izen a ajusté la tignasse sous le kaméchek et s’est dirigée chercher le mari. L’époux, soulagé sur l’arrière-cour, était en train de s’occuper de son pantalon: une main est au-dessus de la ceinture, l’autre est au-dessous. Après avoir heurté contre lui, Boz-izen a tiré sa main des profondeurs de fringues de coulisse et a stupéfié:
— Oh, tu as entendu parler?!
Après avoir informé de telle façon tout le monde dans sa propre maison, Boz-izen s’est jetée avec cette nouvelle dehors, elle est sortie et après avoir mis les mains par le poing sur le ventre d’un air important, elle s’est dirigée vers les maisons. Comme ça elle est allée avec éclat sur tout l’aoul et avec la queue rapidement formée d’une jeune fille et de deux femmes elle est arrivée à la demeure de Koumsynay.
Malgré que Boz-izen est une épouse de grand chef, mais elle était au courant de tous les événements arrivés au voloste, elle se mêlait des cancans de parti, et tournait les messieurs riches à son gré, elle faisait bonne garde, tout la concernait, c’est-à-dire, c’était une personne sociale. Elle pouvait se battre avec les hommes aux dames, aux cartes, mettre le tabac derrière la lèvre pour faire compagnie, l’invité chez elle va chanter absolument, et si elle s'en donne à cœur joie, elle-même chante une chanson avec lui. Et parmi les jeunes elle est la leur. Elle a seulement un défaut minuscule: sa robe est toujours en ordre parfaite, mais autres occupations des femmes ne la regardent pas. Les couvertures neuves sont jetées pêle-mêle, le lit n’est jamais fait, sali, les affaires sont en désordre. La vilaine Rousse n’arrête pas de blaguer: «Elle n’arrive pas même ourler son derrière!»
Tout près de Boz-izen tournait une jolie jeune fille romantique la ressemblante. C’est Aytjan, n’est-ce pas? Oui, c’est elle. Elle fait des éloges à son Aytjan, lui demande de faire de la musique sur le dombra, chanter des chansons, fait sa connaissance avec les gars et elle-même est avec eux, mais dès que le temps des blagues jusqu’aux les excès de langage, Aytjan n’est pas capable de lui faire la concurrence. Et donc, elle a marié récemment cette Aytjan, et maintenant elle s’ennuyait sans entreprises, et voilà ici Dieux même a envoyé cette opportunité de se distraire à Boz-izen:
— Mon Dieux, au lieu de venir chez nous, elle s’est traînée chez cette pauvre Kousynay, mais pourquoi?! — elle marche et s'indigne.
Boz-izen est curieuse: comment est la fille qui avait l'œil des Russes? Pourquoi son Aytjan est pire? Comment elle est habillée? Bien-sûr, les questions ne sont pas bonnes, il est important pour Boz-izen de voir, ce qui lui est arrivé après les Russes? Seulement ça elle voulait savoir. Les Russes étaient dans son aoul, les femmes et les jeunes filles se sont cachées parmi les roches, et elle-même est tombée dans les mains de trois soldats, elle a souffert d’eux. Une jeune fille de l’aoul inférieur n’a pas eu de temps pour se cacher et elle est devenue folle de telles affaires, elle reste toujours couchée près du four. Cependant est cette violence capable de détruire dans la femme sa nature dans son sens naturel sensuel?
Boz-izen entre avec sa suite sous le toit de Koumsynay, quelqu’un est couché roulé dans le coin. Il est peu probable que c’est le douana, lui, il paraît, se baladait quelque part, derrière la maison, d’où l’aboiement des chiens arrive. Boz-izen a passé la lampe à sa compagnie, s’est approchée de la couchée et a soulevé le bout de tchapan de son visage. Akbilek est en train de dormir en soufflant, le filet de salive s’est étendu du bout de la bouche entre-ouverte.
— Eh, la pauvre! Koumsunay s’est fourrée de l’arrière:
— Et qu’est-ce que vous vouliez? Laissez-la dormie.
Boz-izen a soulevé le tchapan de la dormante plus haut, a examiné les boutons en os de la robe, elle a failli de regarder au-dessous du bas de la robe, a tâté toutes les poches, a touché légèrement les bas en cuir. Après avoir terminé sa manipulation, elle a mis en ordre les cheveux en désordre et a fait la conclusion:
— La fille, de tous les côtés la fille!
Elles se sont mises à discuter et le tchapan en soie, et le gilet, brodé avec les pierres semi-précieuses, et la robe en batiste, elle disait: «La robe est comme la robe d’Aytjan», l’autre n’était pas d’accord: «Celle d’Aytjan est meilleure». Boz-izen a été obligée de donner son opinion elle-même, à son avis il résultait que les femmes ne comprenaient rien dans les affaires, tout ce qu’avait Aytjan était cinq fois de meilleure qualité et plus riche. Aytjan est plus intelligente. Ceux Russes n’ont pas pu l’atteindre, elle s’est cachée de l’opprobre. Et elle aussi, elle a eu de la chance (le fait qu’elle est devenue grosse d’un d’eux à l'instant même ne se compte pas).
Les femmes ont causé à leur gré et sont parties — chacune vers sa chaudière.
En attendant sa femme, Moussabay a réfléchi autant, mais il n’est arrivé nul part dans ses vains efforts mentaux, courbé sur le lit comme la lettre arabe ^. L’essentiel était qu’il était des nouveaux riches et il se sentait dans cet état encore assez inconstant (encore hier il était parmi les pauvres de la ville, comme d’ailleurs, et sa femme). Mais il s’est levé grâce à son épouse, on peut dire que tout est gagné par sa taille. Mais l’année dernière deux ses juments se sont disparues et on les a trouvées sur les pâturages de Mamyrbay, mais il n’a pas pu les atteindre. Pour Mamyrbay il fallait absolument couvrir les siens, même si leurs affaires étaient le vol de chevaux évident, autrement quel air il va avoir devant ses gens, qui il va garder sous lui? Et maintenant sa fille est tombée chez lui, comment ne pas prendre sa revanche, voilà quelle petite idée sombre rôdait dans sa tête. S’il cache la fille, mais tout l’aoul est déjà au courent d’elle. Même si les siens ne vont pas dénoncer, Birmagan va démasquer. Ce travailleur se querellait tout l’été avec tous les hommes, collait aux femmes comme le goudron. Et la femme rousse aussi... Et si on l’amène chez quelqu’un plus loin? De toute façon il est impossible de cacher. Tout le monde est au courent qu’Akbilek est recherchée. Peut-être on la met sous quelque gars, pour plus d’honte? Mais dans ce cas quel est sont revenu? Non, il faut chercher un cours douloureux pour Mamyrbay, pour qu’il sache... Mais qu’est-ce qu’on peut faire? Voilà le problème — le problème assez compliqué. Et voilà est sa femme revenue et elle s’est mise à raconter quelle beauté était cette Akbilek, et elle la dépeignait autant, qu’il a eu des idées lascives. Mais qu’est-ce qu’il pouvait en passant Boz-izen?
— Mais sa beauté ne me regarde pas! — a-t-il exclamé seulement le cœur gros.
— Mais qui a dit qu’elle te regardait? — elle l’a remis à sa place.
Il ne restait à Moussabay que se coucher sur son côté en soufflant et en braquant les yeux. «Pousse-toi!» — soufflait sa femme, elle lui a tourné le dos et s’est attristée en se rappelant de la vieille question insoluble: «Et comment j’ai pu me marier avec cet imbécile?»
A minuit on asseyait de réveiller Akbilek pour le thé, mais elle ne s’est pas réveillée. Le matin elle a ouvert les yeux — la maison est pleine de monde. Elle a regardé à gauche, et là son oncle Amyr.
— Ma chère! — a dit Amyr, sa mâchoire a commencé à trembler, il a écarté ses bras.
— Mon oncle! — a seulement exclamé Akbilek et s’est serrée par sa joue contre son épaule et s’est mise à pleurer.
Deux garçons arrivés de son aoul natal avec Amyr ont échangé un coup d'œil et malgré qu’ils essayent d’écraser les râles dans la gorge, ils ne sont pas retenus et ont fait trembler de hurlement la voûte de la maison de Koumsynay. Ces sons ont fait les femmes s'émotionner, et elles ont commencé à se lamenter toutes en chœur, même Boz-izen s’est penchée tristement contre le four et a soupiré:
— Mais comment autrement!
Mais de toute façon les femmes réunies n’ont pas été satisfaites par la sciène déroulée, elles ont cru qu’Akbilek ne pleurait pas assez douloureusement. Il n’y avait pas dans ses sanglots d’intonations frappantes. Elle n’a pas pu se lamenter la première, comme c’était l’usage même lors des adieux ordinaires ou les enterrements, sortir délicieusement, avec la fêlure de l'âme par le beaux mot son cœur caché, pour que l’angoisse qui la remplissant se verse par l’agonie plus au moins présentable, mais elle a éclaté en sanglots simplement, et c’est tout.
Beh, Akbilek n’a pas appris de se lamenter comme il faut, il lui semblait qu’elle était trop loin de son premier malheur — la séparation avec la maison paternelle, elle continuait à faire l’enfant à l’âge de quinze ans... Elle s’est lamentée seulement une seule fois près du corps assouplis de sa mère, et après elle était obligée d’être affligé de sa petite tête très doucement... On ne sait pas si les causes de son comportement si simple étaient compréhensibles en général, mais, en voyant devant elles uniquement une enfant pleurant, elles étaient très dessues.
Elles sont restées debout, assises, ont pleuré silencieusement par compagnie et échangeaient un coup d'œil, tant qu’Amyr n’aurait pas expliqué son arrivée rapide:
— Dès que le messager de cet aoul a apparu la nuit, il ne pouvait plus dormir, il est monté le premier cheval qu’il a trouvé et est allé ici.
Donc, tandis que Moussabay suçait ses pensées de vengeance, Birmagan a mis son homme sur le coursier le plus rapide et l’a envoyé chez Aman, sans prendre en compte les crépuscules. La femme rousse de Birmagan n’est pas hors du coup non plus, était en sympathie avec Akbilek plus que les autres, s’est trouvée plus proche que les autres à ce moment en la tenant par la main et en essayant de ne pas braquer ses regards sur elle, a prononcé:
— Dès qu’on a entendu parler, on a eu de la pitié de toi, plus que de notre propre fille.
Qu’est-ce qu’on pouvait encore? Un des copains d’Amyr:
— Voilà comment la parenté des parents se manifeste, — il a dit et a regardé fixement Boz-izen, comme a laissé comprendre: «Il paraît que tu jouais le premier rôle récemment, et alors?»
Il était au courent, bien-sûr, de la collision de Moussabay avec Mamyrbay. Et comment, il faut croire, il connaissait personnellement les barymtatchs[11] qui ont volé les chevaux de Moussabay.
Après avoir entendu sur les préférences, la Rousse s’est accrochée par ce qui a été dit et ayant fait son mouvement d'épaule et a ajouté:
— Eh, alors qu'est-ce qu'il y a à dire... Nous ne nous accrochons pas par la merde de quelqu’un, comme certains Kazakhs…
Mais Birmagan ne lui a pas laissé prendre son élan, après avoir coupé tout de suite l’attaque collante de femme:
— Quelle est la raison d’en parler!
Mais même la querelle entre les époux n’a pas fait plaisir à Boz-izen. Il faut croire, qu’elle ne va pas arriver de placer sa parole décisive, elle est devenue sombre, a serré ses lèvres plates. Est-ce qu’elle aurait du le supporter, si ce sanglier grognant avait envoyé le messager à cheval la nuit? Et sa femme rousse... La salope puante! Il est impossible de calculer ses saletés!
Koumsynay a commencé à faire du thé. Les habitants de l’aoul sont sortis pour dégourdir leurs jambes. La Rousse s’est mise à inviter Akbilek chez elle, mais Amyr, après avoir remercié Dieux a commencé à parler du retour à la maison. Et Birmagan a commencé à s'imposer son hospitalité, mais les invités se sont précipités.
— S'il en est ainsi, je vais seller mon amblier bai pour Akbilek, et je vais l’amener chez le père comme il faut! — a déclaré Birmagan et est sorti.
Tel tour des événements a atterré Boz-izen complètement. Elle est revenue à la maison et:
— Tu ne verras pas la vie, le glouton! Assis comme écrasé par le démon! — elle a commencé à harceler son mari.
Moussabay a évité de répondre.
Près de son piquet Birmagan, après avoir jeté la petite belle couverture sur la selle de son cheval bai, y a mis Akbilek, a sauté lui-même sur la jument comme un héros et près d’elle et Amyr s’est dirigé en route désirée.
Et le derviche est allé sur sa route.
En route Amyr a commencé à parler du fait, qu’il était bien que le derviche a été rencontré à temps, disons, même le douana pouvait être utile. Il erre ça et là et partout, cependant, il n’a pas approuvé son penchant pour la misère, il a cru que son habitude d’aller nu-pieds pour les pommes en hivers et en été était honteuse. Plus tard il a raconté à propos des blancs emprisonnés, et à propos de Moukache.
Allant avec le visage baissé Akbilek a prêté l’oreille. Ici on ne parle que des blancs emprisonnés... Elle a compris qui était cet homme, qui s’était approché d’elle cachée, rempliée sur elle-même cette nuit-là dans le trou, et lui ayant ordonné avant son départ quelque part: «Reste couchée ici pour instant». Moukache! Voilà qui a indiqué aux Russes sur elle. Elle a passé en revue tous les jours passés et a touché par le petit bout de sa mémoire la Moustache Noire. Un moment et de nouveau il est devant elle: avec les caresses... avec le fusil... Et elle s’est étonnée qu’elle fût vivante, qu’elle allait avec les oncles à la maison. Et suite à cet étonnement bizarre la honte lui est tombée dessus. Maintenant elle n’est pas Akbilek qu’autrefois, maintenant elle est mouillée de salive, salie... Son corps, jadis de propreté vierge, comme le colostrum, est sali, imprégné de péché, entre ses seins intacts, ses seins blancs comme la neige le corbeau a fait son nid, elle n’est pas la jeune fille, mais une ordure. Le cœur innocent avant a été percé par la sale vermoulure, il n’y a pas de justification.
Aïe-aïe! Et mon fiancé? Il va m’abandonner... bien-sûr, il va m’abandonner! Il n’a rien à faire avec les rogatons des Russes! Et s’il la quitte, qui va la relever? Moi je suis pour les gens, comme un ulcère, un ulcère purulent! Mais tout cela tu le savais, tu le savais! Peut-être, il y a quelque chose avec ma tête... Pourquoi cette nuit là les loups ne m’ont pas déchirée de façon à ne pas trouver un ongle de moi, impudente?!
Tout le monde va me tourner le dos! À la grue, usée, vieille grue. Et voilà sa peau est toute en plis, et il paraît que les seins pendent, le dos est tordu, les hanches sont comme aplatis... Les lèvres sont pâles, elle est toute froide. Elle regardait dans le miroir là, chez les Russes, — le visage était bouffi, et il paraît une taie a apparu... Elle a vécu un tout petit peu, mais elle est déjà la vieille!
Mon Dieux, mon Dieux!.. Pourquoi je ne me perds pas quelque part en cet instant, ne péris pas d'une manière ou d'une autre! Pour que le cheval trébuche au-dessous de moi, et moi je tombe sous ses sabots sans mot dire! Et que la terre s’ouvre au-dessous de moi et m’avale! Et on peut faire autrement: que le nuage noir vienne et la foudre me frappe! Et si celui-ci n’est pas possible non plus, dans ce cas pour qu’une sorcière tombe sur moi et m’étrangle! Et, si cela non plus ne m’arrive pas, dès qu’on m’amène chez le père, pour que je tombe, pan par les cils, et c’est tout, il vaut mieux mourir, que vivre et s’en rappeler!
Akbilek a examiné le ciel — non, le gros nuage terrible appelé par elle n’a pas apparu sur le ciel; elle a regardé en bas — la terre est comme la terre, elle n’a pas même tremblé; elle a donné un coup de pied sur les côtés de cheval en espérant, qu’il aille l’emporter, trébucher, — le mauvais cheval n’a pas même pensé à tomber, comme il marchait tranquillement dans le rang avec d’autres chevaux, et il continuait à marcher. Akbilek a jeté un coup d’œil sur les oncles. Mais les oncles ne pensaient pas à écarquiller leurs yeux sur elle, ils regardaient devant eux, en pressant légèrement les chevaux par les cravaches, seulement les étriers sous les semelles de leurs bottes craquaient: «Quand est-ce qu’on va nous libérer?»
Akbilek s’est décidée de voir ce qui était là en avant. Elle a regardé — et l’aoul le voilà. Elle a vu les constructions natales et les larmes lui sont montées aux yeux. Là les femmes qui l’ont vu de loin se sont précipitées vers sa maison paternelle. Là-bas et les chiens de la cour de sont père ont commencé à aboyer. Là-bas même les génisses-voisines se sont dirigées dans sa direction par leurs petits mufles, en mugissant. Et voilà elle a entendu les femmes hurler.
Il paraît que pour l’âme blessée il est devenu plus facile parmi les sons du chœur se lamentant, elle a voulu de pleurer avec elles, le soleil brillant s’est caché derrière la voile des larmes. Comme dans le brouillard les gens aux cheveux blancs se sont approchés d’elle, les vieilles soutenaient par les coudes, l’embrassaient sur le front et l’amenaient quelque part, et là on a mis devant un homme énorme. Devant le père. Akbilek n’arrête pas de pleurer...
Pauvre Akbilek! Si ce n’est pas toi qui doit pleurer à chaudes larmes ? Tu as perdu la mère qui t’avait porté dans son sein et t’avait nourrie avec patience, comme l’arouane[12] son chamelon! Elle a perdu la clé pour le bonheur de demain comme il paraissait inévitable, la chaudière d’or s’est renversée et a roulé loin de toi, l’huile d’or s’est rependue. Le cœur jeune de la jeune fille a arrêté de battre — il a charbonné.
Ton bouton de printemps, sans avoir eu de temps pour s'ouvrir, s’est fané, est devenu de la poussière de bois pourri. Ton âme lucide est couverte de cendre. Pleure, guéris par la larme! Lave la tristesse pas les larmes! Pleure de l’océan! Que cet océan soit déchaîné par la tempête! Que les vagues salées se soulèvent! Que ceux qui t’on vexée y disparaissent, et chaque gouttes dans l’océan que tu as pleuré devienne le poison pour eux. Que tous qu’ils aiment et aimés par eux hurlent de deuil éternel, comme toi.
Deuxième partie
BLESSURE
La balle de fusil arrache tout un morceau de viande — le poing peut y entrer. Si on ne guérit pas, néglige la blessure, dis vite adieux, si l’homme a attrapé la balle pareille, il n’y a pas de salut.
Le plomb a déchiqueté l’épaule de Bekbolate, mais de telle façon que la blessure s’ouvrait comme une caverne. «Il faut sortir la balle... L’herbe ruminée est contre milles plaies et blessures...» — tout le monde imposait ses conseils, avant que le télégraphiste de ville n’ait pas déclaré: «Si on ne le montre pas au médecin, il va mourir». On a décidé de l’amener pour le traitement. On a trouvé dans la ville le fils de Mamyrbay, il n’y avait personne d’autre. Toléguin, presque son parent, s’est mis à courir par tous les bureaux de la ville et a réussi d’obtenir le document pour le traitement.
Bekbolate est resté à l’hôpital environ vingt jours. Il faut croire que les médecins le soignaient parfaitement, une paire de semaines après le bras s’est ranimé, la blessure à commencé à se cicatriser. Avec le temps il paraît qu’il s’est habitué de l’hôpital, malgré que l’ennui règne partout, il a commencé à s’habituer aux draps gris, à la puanteur insupportable des excréments, à la nourriture végétale, malgré qu’il en ait le ventre gonflé énormément.
Le jour quand le docteur lui a permis d’aller se soulager lui-même, est arrivé enfin, et Bekbolate est sorti dehors.
Dans la cour les mémères aux cheveux blonds toutes en blanc, avec les brassards aussi blancs sur les bras se déplaçaient par ci et par là en échangeant des mots, elles portaient quelques petites bouteilles, des serviettes, des bouilloires, des tubs. Le médecin à la moustache tortueuse finement et aux cheveux lisses parlait russe avec les mémères en faisant la visite des malades et en donnant des ordres, aussi aux vêtements blancs croustillants. Et les murs d’hôpital, et le plafond, et les planchers sont lisses, comme si le rabot y est passé; il est balayé, propre partout — le moustique n’a rien pour s’accrocher. En voyant toute cet ordre et en se sentant de mieux en mieux d’un jour à l’autre, Bekbolate pensait: «Comment le malade ne peut pas guérir ici? On ne peut pas faire autrement».
Sur les pieds de Bekbolate il n’y a rien de convenable — les souliers écorchés, vêtu du surtout jaune avec le col en grosse toile, le foulard blanc est mis sur la tête, il se traîne en sautant, comme une sourie transie de froid, devant le docteur.
Le docteur a demandé: «Où est-ce que tu t’es préparé?» — il l’a regardé fixement et, il faut croire qu’il s’est rappelé, qu’il avait permis lui-même au malade de se lever, a dit: «C’est bon, vas-y, marche», — et lui a fait un clin d'œil.
Il faut croire que les boitements dans le couloir d’hôpital et la cour d’hôpital ont affirmé les articulations de genoux de Bekbolate, et tout le corps s’est affermi, il paraît.
Bekbolate, ayant entrebâillé la porte, est sorti dans la rue. Il ferait bien ne jamais voir l’hôpital et le lit caduc imprégné par l’odeur insupportable des médicaments, devant lui est la journée brillante de toutes les couleurs, l’air tinte, et si on regarde seulement le ciel bleu, on se sent comme on vient de naître de nouveau. Son visage s'est illuminé et les pensés sont devenues plus lucides, il est devenu gai, et s’est dirigé revoir son clocher. Il veut autant revoir au plus vite les siens. Et si on parle des affaires de cœur, il s’est rappelé d’Akbilek. «Moi voilà j’ai vu le jour de Dieux, j’ai guéri. Et quelles souffrances supporte-elle? Enfermée, elle pleure toutes les larmes de son corps? Ou les Russes l’ont tuée? Ou elle embrasse un Russe? Ou eux, tous ensemble...» — il a fait descendre et s’est arrêté comme au bord de raide escarpement sans fond, tout le corps a été pris par la démangeaison, il semblait que sur le sommet du cœur la petite veine s’est rompue. Dès que la blessure a commencé à se cicatriser, ces pensées ne le quittaient pas le jour et la nuit, et il sentait l’abîme au-dessous de lui, et il avait le cœur arraché cent, milles fois, mais cette fois-ci il a senti les battements du cœur différemment. De nouveau il voyait dans ses pensées Akbilek, mais dans la steppe illimitée, remplie de courent libre et insouciant du monde vivant, à côté de la réalité il la voyait comme une petite tige fleurissant.
Toleguin, un garçon aimable, bien fait, a visité Bekbolate à l’hôpital deux-trois fois. Il arrive et demande avec compassion: «Comment est la blessure? Comment tu te sens? Comment est l’appétit?» — il ne parlait que de cela. Toleguin qu'on le veuille ou non est le frère germain d’Akbilek, ce qui gênait Bekbolate et lui empêchait de demander sur elle. Et l’autre lui-même ne commençait pas à parler de sa petite sœur. En essayant par les questions détournées d’apprendre soit une quelque chose, Bekbolate lui demandait ce que les gens en parlaient actuellement, mais Toleguin lui répondait simplement: «Beh en général tout est comme avant... On n’entend parler rien de spécial...» — et rien sur Akbilek. «Mais quoi est ce type, est-il possible qu’il n’y est pas allé, n’a pas vu son père? Pourtant on a tué sa propre mère, on a volé sa petite sœur, cela doit lui causer bien des soucis, à lui aussi. Ou il est vraiment comme ça? Il s’est endurci ici dans la ville, ou quoi? À quoi ça sert d’avoir tel fils pour le pauvre père?» — pensait Bekbolate en le regardant, mais malgré que ces pensées l’inquiétaient, il ne le reprochait de rien. Et l’autre parle un peu avec les médecins traitants, jette un coup d’œil en disant adieu et part de nouveau. Il prétendait de ne pas avoir une sœur. «Qu’est-ce qu’il veut de ma part? Pourquoi il arrive?» — se cassait la tête Bekbolate, il n’a pas pu comprendre comment il était ce Toleguin. Cette sa cachotterie conduisait Bekbolate à une impasse et inspirait les craintes vaines.
Maintenant Bekbolate levé ne patientait pas spécialement d’apprendre au plus vite tout ce qui s’est passé avec Akbilek... De qui et comment? Est-ce qu’il rencontre un Kazalh? Hier dans le lit il lui a paru que dans le couloir un Kazakh a passé, il a apparu dans la baie de la porte et a disparu. «Il est intéressant qui c’était? Comment il s’est retrouvé ici? D’ailleurs, est-ce qu’il n’y a pas de Kazakhs dans la nature venant chez les médecins?» — et en s’appuyant sur les murs il s’est traîné, a passé l’angle... Il a cheminé jusqu’à la porte arrière de l’hôpital... et là sur les marches deux hommes aux tréoukhs[13] en renard sont assis et parlent de quelque chose. Tombé sur eux, Bekbolate s’est réjoui:
— As-salām aláykum!
Les Kazakhs ont tourné les têtes et ont jeté les regards perçants sur lui. Un d’eux, comme il faut pour le Kazakh, a répondu à la salutation. L’autre chaussé en bottes russes et vêtu en tchapan parfaitement fait s’est adouci — c’est un vrai petit dimanche! — a lancé un regard étincelant par les yeux batailleurs et a avancé la lèvre. Au-dessus du visage lisse comme un ognon, surplombe le chapeau de fourrure soigné noir. Bekbolate a dit bonjour encore une fois. L’autre a répondu à contrecœur à la salutation, comme s’il disait: «On n’a pas attendu ta compagnie?» Les Kazakhs se sont tus dès que Bekbolate a apparu. Mais bientôt, je pense, ils étaient gênés eux-mêmes: le propriétaire des bottes a demandé au Bekbolate son prénom. Après avoir entendu comment il s’appelait, le garçon a commencé à parler plus amicalement:
— Ah, ce sont vous, Bekbolate lui-même? Asseyez-vous, — et il s’est poussé en invitant de s’assoir. — Vous êtes celui-ci qu’on a blessé il n’y a pas longtemps?
Bekbolate a demandé:
— Et je vous connais?
— Et moi, je suis le Brillant des takyroskys, — a répondu le garçon du ton pareil, que tout le monde doit connaitre sa figure brillante, a souri malicieusement et a passé sa main sur sa tête proprement rasée en soulignant la signification spéciale de sa brillance. — Et lui, il s’appelle Moussatay, nous sommes les parents. Bekbolate a dit au Brillant:
— Hé, j’ai entendu quelque chose sur toi.
Le Brillant a eu un tic et tout de suite l’a dévoré du regard:
— Et qu’est-ce que vous avez entendu dire sur moi?
Bekbolate a répondu en hésitant un tout petit peu:
— J’ai entendu que tu étais un garçon qui sait lire et écrire, débrouillard. Pour ces mots de Bekbolate le Brillant a répondu:
— Je crois bien que tu as entendu, comment on en est en venu aux mains à cause des larmes du peuple avec Aben Matayigngme? Qu'est-ce que cela fera seulement Allah sait, — et il a allongé le cou brusquement, comme un autour ayant vu un canard. Bekbolate a fait semblant qu’il ne l’a pas compris:
- Hé.«Hé!» — et pas plus que ça.
Le corbeau a trouvé l’aigle! Qui est Aben, et qui est lui? L’autre est un lion, et celui-ci est une sourie. Sept volostes boivent humblement les paroles de bay Aben. Est-ce que ce n’est pas Aben qui est allé à Petersburg et a rendu visite au tsar même? Et comment il a eu cette idée de se battre avec tel homme, à cause de quelle sa brillance, avec quelle sa petite force? Il faut croire qu'il n’est pas sérieux, ce petit gars... et c’est tout qui est arrivé à l’esprit. Mais Bekbolate ne s’est pas mis à donner son avis sur la bataille déclarée, il s'est ennuyé sans autres nouvelles et a commencé à chercher avec précaution à soutirer des renseignements sur une autre chose.
Le Brillant était dans le secret de toutes les nouvelles, a entendu tous les bruits, il suffisait de prêter les oreilles — tellement il chantait. La langue ne s’arrêtait pas. Bekbolate a commencé à être ahuri de son bavardage, le cœur s’en montait dans la bouche. Et l’autre n’arrêtait pas de mettre tout dans un seul tas: quel parti est victorieux aux élections, qui accepte des pots-de-vin, qui graisse la patte, qui a posé la candidature de sa propre fille aux élections comme une amorce, à qui le bétail et la maison ont été pilés, chez qui la femme, la fille s’est enfuie, qui est avec qui s’est querellé – s’est battu, comment les blancs font la guerre avec les rouges, qui a été poursuivi en justice, contre qui une plainte a été bâclée, qui était sous la presse, qui s’est retrouvé dans la prison, qui s’est libéré, pour qui on a payé le gage. Il n’y avait pas des akims[14] qu’il ne connaissait pas, il n’y avait pas d’homme avec lequel il n’avait pas parlé, et il connaissait toutes les lois. Et il a tout vu de ses propres yeux, au toucher, a testé à dent et il arrivait de porter tout sans avoir rependu une goutte, il convainquait, prêtait serment, de temps en temps en commençant à parler russe avec autorité. Bekbolate s'engourdissait, aigrissait, ce qui ne lui est arrivé jamais avant, ne croyait pas, et les mots de Brillant l'étonnaient. Enfin le moment est arrivé quand le Brillant ayant montré quel connaisseur des lois il était et comment il était éloquent, a atteint le plus haut degré de satisfaction de lui-même. L’épanchement de mots tombé sur Bekbolate lui semblait comme un buisson épais avec les branches tombantes l’une sur l’autre sans aucune éclaircie, et lui il se démenait parmi les phrases, comme le chien courant derrière le lièvre illusoire, et incapable de s’accrocher soit par un seul petit mot, n’entendait que le bruit. Malgré le bruit terrible dans la tête, il a quand même attrapé une nouvelle intéressante pour lui. Cette nouvelle est la captivité des blancs de la gorge de Kara-Chate. Dès qu’il l’a entendu, tout de suite il a commencé à parler lui-même:
Hé, bien! Les Saints, aïe! On a pris tout le monde? Tout le monde. On a condamné tous, on a laissé échapper personne. Il voulait demander: «Et où est Akbilek?» — mais il n’a pas eu le courage de demander sur elle publiquement, les Kazakhs peuvent penser: «Pourquoi il demande sur la fille, de laquelle les Russes avaient diverti?» — et ils vont se moquer de lui. Voyant que les questions multiplient et la conversation ne se termine pas, le Kazakh naturel arrivé chez le Brillant n’a pas supporté, et levé avec les mots: «Je vais aller quelque part — j’ai une affaire», est parti. Après son départ, Bekbolate s’est mis à regarder fixement le Brillant plus directement, en trahissant ses émotions. Et dans un moment il lui a fait un clin d'œil, comme la personne qui allait lui confier ses mots les plus secrets:
— Je voudrais vous demander sur quelque chose.
- Mais allez-y, demandez, — a dit le Brillant en précipitant les mots.
— Et qu’est-ce qui arrive à la fille de Mamyrbay: avez-vous entendu parler d’elle?
— Non. Je n’ai pas entendu parler d’elle. Les blancs eux-mêmes ont été amenés seulement hier vers le soir dans la ville. On peut se renseigner. Je comprends, elle, comme on disait, est votre fiancée, n’est-ce pas — a répondu le Brillant et a ajouté en russe: — Jalko, jalko! (C’est dommage, c’est dommage !)
— Les Saints, aïe! Si on peut se renseigner, renseignez-vous pour moi...
— Ça sera fait. Aujourd’hui ou demain je vais l’apprendre. Les gens arrivent de ces parages tous les jours... Mais quel en est le besoin maintenant? «Quel besoin?» — ces mots ont piqué au vif Bekbolate: probablement les gens pensent, que personne n’a besoin d’elle maintenant. Bekbolate a serré une boule dans la gorge et a dit:
— Quand même.
Le Brillant a consenti pour la forme. La mémère en robe blanche est sortie sur le campus et s’est adressée à Bekbolate en lui faisant signe de venir par le doigt:
— Ohé, le Kirghiz!.. Le docteur...
Bekbolate s’est levé de sa place, et le Brillant a secoué la tête avec reproche et s’est mis à parler russe, en jetant les coups d’œil sur Bekbolate:
— Non, ils ne peuvent pas sans humiliation: «le Kirghiz et le Kirghiz», l’engeance de va-nu-pieds! — Il a jeté un coup d’œil sur l’aide-soignant mémère: — Pourquoi tu ne t’adresses pas au camarade «camarade, citoyen»?
Bekbolate a souri malicieusement, on ne sait pas sur qui: «Et voilà! Il leur manquait de l’étalon pareil!» — et s’est caché derrière la porte d’hôpital.
— Hé, c’est de ce Brillant que le bruit courait! — a dit Bekbolate en passant par le couloir d’hôpital.
Il s’est avéré qu’on appelait à manger. Bekbolate s’est assis et a commencé à avaler à contrecœur le bouillon maigre de l’assiette en fer-blanc. Tout était de même goût, et la soupe, et l’eau: il raisonnait faux, comme dans le délire.
Est-ce que les Russes ont tué Akbilek? Où elle est vivante? Si elle est morte, il n’y a pas de quoi parler. Mais si elle est vivante, reste à la maison, quoi alors dans ce cas?
Comment elle était, quand il l’a vue pour la première fois, quand il est arrivé chez elle avec une compagnie des chasseurs avec les aigles royaux! Le visage blanc, le front ouvert, le cou de cygne, les yeux brillent, les sourcils fins, les lèvres affectueuses, potelées comme chez le bébé! La taille est faite au tour, sans aucun défaut, comme une pousse de printemps. Et quand elle s’est mise à sonner par ses colliers dans les tresses, en sautant sur ses pieds de sa place, quand elle a arrondi par ses genoux le bas blanc de la robe, assise de nouveau, quand elle s’est promenée en chaussures élégantes en sortant de la pièce, s’est mise à rire avec la sonnerie argentine, a chuchoté avec la mère quand elle versait le thé en se gênant un peu et en faisant la sainte nitouche, quand elle portait la piala en tenant par trois doigts, en lançant des œillades de dessous de lourds cils tombants, un de ses copains a fait tomber le sucre à côté de la tasse. Il a essayé de s'en tirer par une plaisanterie:
— Les canettes sont frémissantes dans ces parages! Elles sentent les autours de loin.
Et il a entendu la réponse de la mère:
— Comment donc, si les autours sont perçants. — Et tout de suite: — Akbilek, ma chérie, accompagne les invités jusqu’aux chevaux! — et elle est sortie avec elle, elle-même, pour détacher les brides du piquet; et celle-là a découvert son bras plus doux que la soie: «Bon voyage!» — et, après avoir lancé un regard étincelant, elle a penché la tête de manière affectée... il se rappelle de tout, de tout, il vaut mieux oublier.
Surtout sa voix est exceptionnelle. Dès qu’elle se met à rire, et tu ne sais pas dans quel monde tu es. Toutes les femmes dans le monde entier sont indignes de son petit ongle, de sa trace.
Et comme ça le jour et la nuit, et le lendemain Bekbolate pense à Akbilek. Malgré qu’il essayait de la mépriser, même détester, elle de nouveau se présente devant lui telle, qu’il l’a vue pour la première fois — l’ange en chair. Il essayait de débusquer son image de la tête, en se rappelant de son amplier, de son fusil, des histoires de chasse, — tout est raté. L’étalon, le gibier, l’animal, l’amusement, les fantaisies les plus recherchées —elle faisait oublier tout, et tout en fin de compte amenait aux pensées sur elle. Akbilek a charmé tout par elle-même. Il ne comprenait pas lui-même pourquoi.
Bekbolate se levait du lit, se couchait, mais c’était insupportable pour lui. Il est allé voir quelques fois le Brillant avec une seule et toujours la même question — pas de nouvelles. Tellement qu’il était complètement gêné de demander. Effectivement, bientôt il va devenir une risée de tous. Tout l’univers s’est installé pour lui sur le bout de langue du Brillant, il a envie de le voir, et c’est tout. Mais le Brillant est occupé tout le temps, il a des conversations sans fin avec tout le tiers et le quart de Kazakhs. Tout le Kazakh ayant parlé avec le Brillant donnait naissance à l’espoir dans Bekbolate: «Et, peut-être, celui-ci, a raconté quelque chose sur Akbilek». Mais ses attentes ne se réalisent en aucune manière.
Bekbolate est en train de se tenir debout en s'accoudant à la rampe du campus d’hôpital. Le Brillant est assis sur les rondins près du hangar et parle avec le Kazakh suivant. Et voilà, enfin, le moment est arrivé quand il, après avoir accompagné le causeur, en secouant la tête a fermé la capote et s’est précipité vers Bekbolate, en se révoltant en russe:
— Vot joulik, vot machényk! (Quel filou, quel escroc)
— Quoi? Qu’est-ce qu’il a dit?
— Chorte znat! (c'est révoltant ! )— Et il a continué à sa propre langue:
— Il assure, qu’on a décidé que le facteur de la poste pilée n’est responsable de rien, maintenant on ne peut pas se garder des ennuis. C’est qu’on m’a arrêté à cause de cette poste!
Et le Brillant a expliqué le fond de l'affaire. Le bay Aben était ennemi avec le volostenoy... Le volostenoy lui a rendu le verdict et après l’avoir scellé du tampon de chef de l’aoul, l’a envoyé avec la poste dans la ville. Aben a appris sur l’intrigue et a envoyé derrière trois cavaliers. Ils ont atteint la voiture et après avoir pris la poste au charretier, l’on jeté sur la route, ensuite ils ont livré eux-mêmes la cargaison dans la ville. Ils ont détruit le verdict, et ont porté d’autres documents au Soviet. Et ils ont déclaré là-bas: «Le charretier lui-même nous a presque attaqué, il exigeait notre cheval unique, il n’a pas eu, et tout de suite il a dispersé le courrier sur les côtés, et nous alors avons ramassé les papiers sur la route, et voilà nous les avons livrés». Le volostenoy est le parent du Brillant. Le verdict avec la politique lui a été suggéré sûrement par le Brillant lui-même. Mais cela n’a pas marché, c’est clair, pourquoi il enrage tellement: «Chorte znat!» (C’est révoltant !)
— De toute façon tout est escamoté. Ça fait longtemps que les matériaux sont envoyés au gouvernement. Aujourd’hui ou demain, je vais emprisonner Aben. Dieux le veut! Je ne serai pas le Brillant, si je ne l’emprisonne pas! — s’excitait le Brillant, en résumant son discours à la fin par son «chorte znat!».
Quand enfin le Brillant s’est tu, Bekbolate a essayé de changer le sujet:
— Ce gars vêtu comme le Russe, a une place quelque part? Le Brillant l’a regardé avec embarras en devinant, pourquoi il le demande:
— Bah? Il est un agent de TcheKa.
Il n’y a pas de Kazakhs qui ne savent pas ce que c’est que le TcheKa, et qui sont les agents. Il vaut mieux se tenir au large d’eux. Mais tout est pareil pour Bekbolate, il continue le sien:
— Et qui est-ce qu’il est pour vous?
— Tu penses: il y a des endroits encore où il n’y a pas de nos gens? Au TcheKa tout le monde est à nous!
— Dans ce cas comment on vous a arrêté?
— Ohé, mon chéri! Ça dépend comment on le regarde, — et il a fait un clin d’œil à Bekbolate. — On ne peut pas m’arrêter. Je vais sortir le lendemain. Comment tu trouves mon prison? Toujours on peut trouver une solution. Je suis arrêté, rien à dire, mais voilà je suis à l’hôpital, — et il a fait adieu de la main on ne sait pas à qui.
Bekbolate a prononcé encore quelques phrases insignifiantes, et ensuite a demandé sur la fille. Le Brillant a répondu:
— Non, pas de nouvelles pour instant... — Et il a ajouté: — Au lieu de penser à la fille, il vaut mieux penser aux manèges des filles.
— Hé, ça n’a rien à voir?
— Chorte znat! L’agent a raconté une histoire amusante.
— Quelle histoire?
— Ici habitait une maîtresse d’école Madyche. Toi peut-être tu ne la connais pas. Le demi-sang. Il était un roux vieux arrogant un Nogay... Il avait un magasin. Et sa femme était Kazakh. Et ils ont eu trois filles: Kadycha, Madycha, Zaguipa. Les étourdies. Madyche était toute jeune. Et cette Madyche sortait avec le chef d’un détachement. Elle aimait faire un tour en coup de vent sur son coursier dans la campagne. Mais une nuit quelqu’un en bakhtha se débatte couché. Le vieux gardien est allé voir, ce qui était, et eux tous les deux se sont jetés dans les directions différentes. Le gardien a regardé — il y avait quelque chose blanche par terre. Il regarde et c’était le slip. Alors le vieux a porté ce slip au TcheKa. Comme il faut, on a fait venir Madyche au TcheKa et on lui dit: «Tu t’en rappelles?» — et elle essaye d’attraper le slip et pleure. Aïe, quel honte, aïe!.. On a ri sur ce cas... Elle a quitté et les Kazakhs et les Nogays, beh?
Cette histoire n’a pas fait rire Bekbolate, et il a bougonné, s’il s’agissait personnellement de lui:
— Mais c’était de sa propre volonté.
— Hé, ces filles de la ville n’ont besoin que secouer par leurs charmes, — a dit le Brillant et ensuite encore a commencé à parler des problèmes incompréhensibles.
Bekbolate l’écoutait et en ne voulant pas même dans ses pensées avouer l’implication d’Akbilek à cette siroperie, a prononcé:
— Bien-sûr, la ville est un endroit dépravé.
Ils parlaient de cette manière, et voilà dans la porte d’hôpital a apparu encore un Kazakh. Le Brillant tout de suite s’est précipité vers lui et a hurlé:
— Hé, Jambyrbay, comment allez-vous?
Après l’avoir salué, le Brillant a amené Jambyrbay de côté, vers les rondins, l’a fait y s’assoir, et ils ont commencé à parler entre eux. Ils parlent et ils n’arrêtent pas de parler. Bekbolate les regarde sans détacher les yeux. Enfin le Brillant a jeté un coup d’œil sur lui, et ensuite de nouveau s’est accroché sur Jambyrbay et a commencé à l’interroger sur quelque chose. Jambyrbay répond, le Brillant l’interrompe et cherche à soutirer des renseignements de nouveau. Ensuite il a souri à Bekbolate et lui a fait un signa de la main de venir.
— Suyunchy[15]! — il a exigé la récompense pour la bonne nouvelle.
— Prends, prends, — s’est précipité avec la réponse Bekbolate.
— La fille est revenue à la maison saine et sauve.
— Oh les Saints, c’est vrai? Les Saints, aïe, est-ce vrai? — il n’arrête pas de répéter.
— Pourquoi on mentira?
— Les Saints, aïe, les Saints, aïe!
A partir de ce moment il ne pensait qu’à ça, il vaudrait sortir de l’hôpital au plus vite. Le lendemain le Brillant lors de leur rencontre a commencé de nouveau à lui parler de bay Aben avec lui:
— Je veux lui déposer encore une plainte. Et si on écrit de ta part, qu’est-ce que tu en penses?
Bekbolate a été consterné. S’il a eu un procès avec quelqu’un, ce n’était que les loups et les renards, et le juge était l’aigle royal, et il n’a pas déposé les plaintes pour les animaux, merci Dieux. C’est clair, il a répondu comme il pouvait:
— Chéri, je ne peux pas. Je ne suis nul dans les affaires pareilles.
— Pourquoi tu es si craintif! Il y a rien à craindre. J’ai tous les faits dans mon sein, — et il a sorti de la poche intérieure un paquet de papiers, et de ce paquet une feuille, et a commencé: — Voilà, ce papier l’accuse complètement. Et il est déjà envoyé dans l’endroit nécessaire pour le dévoilement. Et ça c’est le brouillon.
Le Brillant a froufrouté par le papier et s’est mis à lire et Bekbolate a été obligé d’écouter. Ecoutons, nous aussi, qui sait, peut-être, un jour cela sera utile.
«Au goubprobkom de Semipalatinsk. La copie est envoyée à la direction de la «Langue Kazakhe». L’avertissement de Jamanday taykote-ouly, habitant de district X de voloste de Sarytaou.
1. Les enfants d’Aben Matayina enrichi ont sucé tout le sang de tous les gens de Sarytaou. Par exemple, en 1887 il était encore le volostenoy à Sarytaou. Et à ce moment-là il se comportait comme un souverain: du genre de l’autonomie, du pouvoir de khan. ... Tout — les impôts, les collectes auprès des gens simples, les revenus, le courrier, les titres, les grades, les fonctions — est uniquement entre les mains des suppôts de bay Aben Matayina. Et tous les documents des chefs d’aoul et des juges populaires, il a choisi lui-même, se trouvait chez son fils Aben, quad il lui faut, il sort un papier et le signe, quand il lui faut.
— C’est vrai?
— Comment je peux le savoir?
— Écoutez, alors.
2. Aben Moutay-ouly a propagé partout les voleurs de chevaux et prenait les meilleurs chevaux. Depuis ce moment il a dans ses mains: le cheval bai — c’est le voleur Ahmet Saguinay-ouly; le cheval moreau — c’est le voleur Bossaga Salyk-bay-ouly; et il a encore pris le gris.
— Je ne sais pas.
3. Aussi il a séduit la femme d’un homme, et ensuite faute de besoin il l’a vendue à quelqu’un pour le bétail. Cette son habitude est connue toujours. Il a séduit la femme de Bayssen Abiche-ouly, a vendu à Koulyk Bourgikbay-ouly.
Aussi il envoyait ses sous-ordres à rendre visite chez les chefs des aouls épris de liberté, et si le morceau de viande chez quelqu’un n’était pas gras, il les condamnait: autant de chevaux, autant de chameaux pour leur faute ils lui devaient égorger et apporter.
— Et c’est vrai?
— Ça lui est arrivé, il allait rendre des visites.
4. Nous présentons la liste des travailleurs d’Abent Matay-ouly: six gardiens de chevaux, la nuit quatre gardiens font pâtre, et le jour - deux, trois éleveurs de moutons, deux – la nuit, un — le jour, un fait pâtre les chameaux et encore un — les vaches. Pour ses deux maisons il y a quatre trayeurs des juments, deux nettoient le fumier, en plus pour ces deux maisons il y a six trayeuses. Personne n’a été payé. Les causes: les veuves doivent pour les maris, quelqu’un doit en bétail, il a promis à quelqu’un d’aider à se marier, à quelqu’un — de dompter la femme déchaînée, quelqu’un a été accusé du vol des chevaux, et il croit quelqu’un tout simplement est son esclave.
Il croit, que cela lui est autorisé par la foi et le service. Mais dans la vie est tel ordre qu’après le tsar-libérateur il n’y a pas de droit officiel d’avoir les esclaves. 52 ans ont déjà passé depuis. Son esclave est Moussapir Jaytougan-ouly, il élève ses chevaux. Et ses enfants aussi comme les esclaves, font pâtre les moutons de maître.
— Et alors, qu’est-ce que tu peux dire maintenant?
— Ce n'est pas pour des prunes chez lui? Si on est riche, comment se passer sans travailleurs?
5. Je vous informe également, qu’en 1914 Aben Matay-ouly a eu un marché à l’usine Kopkolskiy. Il y amenait le charbon, 11 kopeks par le poud, et il payait 9 kopeks à tous les charretiers. Il a transporté un million de pouds de charbon. Il s'avère, qu’aux frais des charretiers il a obtenu 20 mille roubles de bénéfice. À cette époque, si on calcule, d'une manière certaine le cheval moyen coûtait 20 roubles. Il en résulte, qu’aux frais de tous les charretiers il a acquis mille chevaux. Et il était ami du gérant de cette usine, il lui a offert deux beaux chevaux, deux fusils parfaits étrangers à deux canons. Et quand le marché s’est terminé, il a ordonné de voler les chevaux offerts à son ami-gérant. Et il a trahi son ami intime.
— Vous n’en avez pas entendu parler non plus?
— On a entendu, on n’en a pas parlé en vain. Mais d’où vous pouvez savoir quel bénéfice il a reçu du marché? Et il a rendu ses chevaux, c’est sûr.
6. Aussi en 1916 il a pris à la foire de Saradyrsk chez le marchand Piotr Pavlov un marché pour la livraison sur l’Irtych de 30 milles pouds de la laine non lavée, et il a reçu pour cela 1 rouble par poud, et il a payé les charretiers par 90 kopeks. Ainsi, il a mangé trois milles roubles d’argent du peuple. À cette époque une brebis coûtait 6 roubles. Il en résulte, qu’il s’est enrichi de 500 moutons.
7. Quand le 25 juillet 1916 à l’usine Karabasskiy une ordonnance a été passée sur le recrutement des étrangers pour les manœuvres, Aben Matay-ouly a obtenu le marché pour le recrutement. De la part de ceux qui désiraient se libérer du travail il a reçu 96 chevaux, en plus, le paiement pour les ouvriers recrutés de la part de l’usine d’après le marché. En plus il ajoutait dans les listes des hommes d’âge de 19 à 31 ans les enfants et les malades simulés, d’autres il exigeait par un cheval, et s’ils ne lui donnaient pas, il les menaçait de les faire coffrer. De cette façon il a reçu 140 chevaux. Il s’en est enrichi quatre fois, et il a divisé son revenu avec: Akyp Jamichbat-ouly, Seyit Tolémys-ouly... —
Ici le Brillant s’est arrêté court, car Seyit était le père de Bekbolate... Bekbolate perplexe a pu seulement dire:
— Non, notre père n’y est pour rien il paraît...
— S’il n’y est pour rien, cela vaut dire qu’il n’y est pour rien, — a dit le Brillant et a continué à lire.
8. En plus, devenu en 1919 l’ami du commandant d'armes Alexeev, il a étouffé les gens qu’il détestait, il les a fait coffrer. Pour la libération il a eu des sommes impotentes. Le commandant d'armes a arrangé la victoire pour Matay-ouly aux élections pour le poste du président de l’Assemblé du zemstvo. Après cela Aben Matay-ouly est allé à Chily et Chenguély, a embrouillé les habitants de là-bas et a amené avec lui 30 chevaux.
9. Aussi au mois d’août dernier le volostenoy gérant Abbas Matay-ouly, faisant les référence à l’ordonnance de Koltchak il paraît et du zemstvo, a ordonné de collecter l’impôt de montant 130 milles roubles, il pressait les employés de poste des aouls d’envoyer le détachement pour la collecte des impôts, il a pris l’argent chez tous les gens connus. De cet argent le tiers, nous croyons, a été appropriée par le volostenoy Abbas Matay-ouly, Aben Matay-ouly et... (et il a hésité de nouveau sur le nom) et le chef d’aoul Joussipe-ouly.
— Vous allez discuter, que cela n’est pas arrivé ou n’arrive pas?
— Mais pourquoi discuter? Il collectait de l’argent. Seulement qui sait, qui et comment s’est enrichi là-bas...
— Et si vous ne savez pas, écoutez la suite.
10. En plus en 1919, se trouvant à Semipalatinsk, il a trouvé la route au trésor de Koltchak et a promis de livré à l’armée 300 chevaux. Revenu à la maison, il a envoyé 70 chevaux. Il a amené d’étoffes pour 70 milles, du thé et du cuir d’apprêt de fabrique pour 30 milles, à part cela, de l’argent cent milles roubles. Et en échange de 230 chevaux non livrés il a viré au trésor de Koltchak 500 roubles. Mais après cela sous le prétexte de collecte des chevaux il envoyait dans ses troupeaux les meilleurs chevaux aux autres. Malgré les télégrammes officiels lui envoyés, il n’envoyait pas de chevaux, ainsi Matay-ouly et (il a murmuré indistinctement le nom)-ouly ces 230 chevaux ont été appropriés...
— Justement à cette époque notre père n’était pas d’accord avec telles exemples, et pour cette raison il s’est séparé avec lui, — s’est mis à assurer le dénonciateur Bekbolate.
— Et je n’en discute pas non plus, mais ils ont été en relations.
— Et on peut autrement?
— Non, on va le discuter après...
11. Après cela, les élections nationales ont eu lieu. Le représentant de Chamen Aydarbek-ouly est arrivé à Sartaou
et après les négociations avec Matay-ouly a proposé Joussip-ouly à une fonction de revcom de voloste, qui était il y 20 ans 3-ième chef d’aoul. Rien à faire, qu’est-ce qu’on demande, voilà comme ça un seule Matay-ouly a remplacé par lui-même le choix de toute la population de son revcom de voloste. Et ensuite il a déclaré, qu’il y avait une ordonnance arrivée d’égorger 40 taureaux, et à l’aide de la milice ils ont pris chez 40 personnes les taureaux qu’ils avaient.
— Certes. Et on nous a pris un taureau aussi.
12. Nous sommes au courent, que le Trésor a payé cette abattage du bétail. Mais cela nous fait une belle jambe, c’est que nous savons, qui de nos malfaiteurs a mangé la viande.
13. En plus Matay-ouly s’est fait les hivernages dans deux endroits. Un bâtiment est près de la source Chakate sur les terres d’Alkébay et Korabay, Boksar-ouly... La deuxième maison est construite sur la rive d’est du lac, après avoir pris la terre aux enfants de Kourmanbay, et il a occupé la rive de nord, après avoir pris la terre aux enfants de Toppazar, il a ruiné tout le monde, il a fait souffrir les pauvres hères.
— Et cela, tu vas me dire, est un mensonge?
— Non, il a construit les hivernages et a occupé les terres.
14. Il a réuni les meilleurs constructeurs des maisons en rondins de tous les côtés, les a fait travailler d’abord sur la construction du premier hivernage, ensuite sur le deuxième, et après n’a pas payé pour leur travail. Chez lui il ne cuisine pas, mais il donne les ordres aux voisins: on arrive vous voir, préparez le koumis et cuisez la viande plus grasse. S’il mange avec ses suppôts chez quelqu’un un mouton gras, les gens pensent que cette journée n’est pas non rentable.
15. Pour ne pas dire plus, les habitants de Sartaou sont les moutons, Aben Matay-ouly est le loup. Même s’il y a beaucoup de moutons, qu’est-ce qu’ils peuvent faire contre le loup?
Tous ces crimes sont connus à tout le monde, il suffit de les réunir ensemble, et si l’homme juste fait le tour des maisons des victimes, tout le monde lui va raconter à propos des crimes inconnus.
Le but de mon avertissement: si le pouvoir juste manifeste sa justice, les idéaux du grand nombre de peuple seront satisfaits.
Ainsi dans ma plainte je demande: garder mon nom en secret d’Aben Matay-ouly, j’ai peur de Matay-ouly, il ne me laissera pas tranquille.
Pétitionnaire. L’an 1920, le 20 mai.
Le Brillant a terminé de lire la dénonciation, a avancé le doigt démasquant, a gravé par l’ongle de l’annulaire sur le papier:
— Ici il y a 15 faits, 15 articles criminels insubmersibles, on peut même attacher la pierre au derrière, à tout crin à tous crins!
— Comment nous pouvons le savoir? Nous sommes les gens simples, — a dit Bekbolate et il a fait les grands bras, effrayé lui-même de ce papier.
À cette période de troubles son père était brouillé avec Aben. La cause était dans le fait qu’ils ne sont pas entendus lors du partage de la somme reçue de 300 chevaux non livrés à Koltchak, le voilà il s’est fâché contre Aben. Depuis il s’est excusé pour toutes les invitations. Aben a décidé que le trembleur ne lèverait pas la tête et lors de la collecte de 40 taureaux a pris un et auprès de Seyite. Seyite n’est pas devenu raisonnable. Alors Aben a commencé à soutenir la personne de son aoul Doubéouila pour contrebalancer Seyite, il a fait de lui une personne important. Seyite ne pouvait pas laisser Doubéouila être le chef et a organisé à l’appuy son parti. Aben engrainait Doubéouila. Et l’autre, sous le prétexte des dettes de Seyite envers quelqu’un, lui a envoyé la milice et lui a pris une vache. Seyite a essayé de retourner ce qui avait été perdu par les mains de son fils, mais c’était sans résultat. Depuis les coups de pied d’Aben ne faisaient que se multiplier. Il a même porté attention aux femmes de sa maison, à sa terre, a envoyé les voleurs de chevaux, que dire, il a fait beaucoup de belles injustes. Dans sa bataille avec Aben Seyite n’avait personne pour le soutenir, personne ne pouvait se produire directement, mais quand même quelqu’un a fait un effort et a chassé à grand-peine le protégé d’Aben du poste de volostenoy— et à sa place on a proposé le cordonnier de la ville, le communiste. Malgré qu’il était le communiste, mais de toute façon il était le cordonnier, il s’est avéré un peu chétif contre Aben et est devenu timbré un peu. Il s’est avéré un volostenoy médiocre — comment on l’a fait tourner facilement avec la poste. Bekbolate connaissait déjà par cœur cette histoire. Elle lui était désagréable, mais on ne pouvait pas la laisser de côté tout simplement.
— Notre père était vraiment mécontent de cet Aben. Est-ce qu’on peut enlever son nom de cette plainte?
Le Brillant a répondu en comptant sur la naïveté du copain:
— Hé, on peut absolument, — il a assuré, sans se rappelant que la copie de la dénonciation est déjà envoyée aux organes il y a longtemps. — Parce que le Brillant prenait soins des gens.
Mais Bekbolate a saisi quelque attitude évasive de la réponse et a décidé d’éliminer toutes les réticences:
— Et si cette demande est déjà envoyée?
— Hé, c’est facile à corriger. On trouvera une solution.
— Cela sera correcte, si on trouve, — et c’est tout ce qu’il a dit, mais il n’a pas cru complètement.
La méfiance envers Bekbolate avait sa justification. Et comment on peut croire ici?
Le Brillant est un chevalier d'industrie retenti. Il n’y a aucune intrigue où il n’est pas mêlé. Il a commencé comme le truchement chez le bay Aben. Il a eu une expérience parfaite chez Aben, il prenait tout ce qui était sous la main. Et il a été mêlé au vol d’argent d’état. Il «empruntait» chez beaucoup de gens — ils supportaient, il a institué de telle façon. Après le coup d’état, dès que le tsar a été jeté bas, il s’est occupé de l’organisation des élections, il a instauré la corruption active. Il arrivait on l’invitait à la fête à son honneur, mais il tordait le nez, disons, mangez vous-mêmes votre viande: il manifestait sa grande importance. Pourquoi ne pas faire des magnes, si sept filles te lavent les pieds. En se présentant comme «commissaire», ou «agent du fisc», en affirmant qu’il avait un ordre, un mandat, il collectait le tribut sur tous les volostes. Je ne vous raconte pas, mais il lui est arrivé de tuer les gens, voler, et préparer les faux documents avec les faux sceaux. Tout ce qu’il touchait se détruisait, était dans le guignon. Cent fois il s’est retrouvé en prison, cent fois il en est sorti. Il mentait en russe et en kazakh également parfaitement. Combien de filles il a séduites, a abandonnées, se marier et se divorcer pour lui est tellement simple comme retourner le chapeau et le mettre de nouveau. Même la pierre jetée dans sa tête y collait, on le battait, mais il ne faisait que s’engraisser, comme le blaireau. Il tord les sabots comme un étalon, le front bombé brille, les yeux scintillent, les narines du nez camard tremblent. Maigre, frétillon, il s’approche comme un diable. On ne peut pas avoir l'œil, et il agite déjà ses bras, on ne peut pas le suivre, et il est déjà reparti, cent masques sur son visage.
Bekbolate pensait avec stupéfaction: «Dis donc, il y a les gens comme ça! Il est sûrement immortel! Celui-ci va survivre même dans le pays glacial. Dans tous les cas il faut sortir de l’hôpital, chez les gens, dans la steppe, chez les Kazakhs, et celui-ci... qu’il aille au diable! Il ne fait que bourrer le crâne!» — avec telles pensées Bekbolate s’est dirigé dans la salle de malades. Dans le couloir il a rencontré le médecin sans blouse blanche, peut être il se préparait déjà aller à la maison. Et de nouveau il l’a pressé de question:
— Quand est-ce que vous allez me laisser partir?
— Demain, demain, — a répondu le docteur.
Cela a remonté le moral à Bekbolate un peu, il s’est couché sur le lit, et de nouveau s’est plongé dans les pensées sur Akbilek.
Le lendemain à l'heure fixée le médecin a examiné sa blessure, l’a saupoudrée de la poudre blanche, a bandé de nouveau et a donné une autorisation pour l’exeat. Bekbolate a enlevé la capote, s’est habillé de sien et est devenu il paraît un homme de nouveau. Il est sorti dans la rue, a secoué les bords de tchapan, a haussé les épaules, a rectifié sa position comme un oiseau sauté de la cage, et sans regarder en arrière, s’en est allé résolument.
Il était le temps couvert. Il a plu la nuit, il y a de la boue dans l’ornière des télègues.
La ville connue, la rue connue. Les mémères, les soldats y passent, et la traversent, la place devant le Soviet du district étaient plaine des chevaux kazakhs...
Bekbolate a passé deux-trois quartiers et est arrivé à l’appartement de Toléguen. Toléguen n’était pas à la maison, il était au travail. Une cuisinière russe était en train de préparer le déjeuner près du four.
— Aman, aman, — elle le salue en reconnaissant...
— Hé, ce n’est pas trop de viande à cuire?
— Les invités vont venir, — elle répondait en kazakh, comme elle pouvait.
— Quels invités?
— Les commissaires vont se réunir.
— Moi je vais être aussi un hôte, — a dit Bekbolate en souriant.
— D’accord. Il y a beaucoup de vodka, il y a du porc, — elle a plaisanté.
— Arrête, mange toi-même son porc!
La cuisinière s’est mise à rire. Bekbolate voulait parler de beaucoup de chose, mais pas avec elle, alors... et il est allé de la cuisine dans les pièces. La cuisinière qui venait de laver les planchers il n’y a pas longtemps, a crié:
— Ohé, essuie tes pieds! — et l’a attrapé par son bras.
— Hé, laisse-moi tranquille! Les pieds sont propres! — a répondu Bekbolate et après avoir passé les semelles des bottes sur le torchon mouillé posé sur le seuil de la pièce, y est entré.
Il y avait deux petites pièces propres. Le centre de la première est occupé par la grande table. Le long de la table il y a des chaises. Dans le coin sur le portemanteau les vêtements de Toléguen sont pendus: deux pantalons, dont un est de drap, l’autre est en diagonale, la pelisse, l’imperméable en grosse toile, le pourpoint court, le pantalon piqué. Et le pourpoint et le pantalon d’aoul n’allaient pas à Toléguen. «À quoi ils servent?» — a pensé Bekbolate.
Il est resté assis un moment, a examiné, a tâté le vêtement, a secoué la tête avec embarras: «Est-ce qu’il porte tout cela tout seul?», et est allé dans la pièce éloignée.
Entre deux fenêtres il y avait un bureau: sur le bureau il y avait une chemise bordée par le cuir avec les papiers, un vase en pierre quadrangulaire avec un petit couvercle en cuivre, deux chandeliers en bronze sont au bord et encore quelque trucs pour les stylos, les cigarettes. Une étagère est incorporée dans le bureau, elle est encombrée densément par les livres. En face près du mur il y a un lit réticulaire, des oreillers blancs, une couverture piquée. Sous le lit il y a une descente en peluche, et au-dessus — de grandes photos, près du montant du lit inférieur — l’armoire à glace, et six chaises recouvertes par le velours.
D’après sa nature Toléguen est le maître. Le maître soviétique. Et il a le titre soviétique. Les amis ne l’appellent que le Prodcome. Chez le Prodcome on peut trouver tout: et un complet fait par «Moskvachvéya», et du caviar. Et pour lui et pour ses amis son être Prodcome semblait naturel. Mais chaque médaille a son revers. Et il est obligé d’entendre parfois de ses copains à propos de son bien-être croissant:
— D’où tu prends tout cela? Toléguen sourit et répond:
— Tel est le cycle dans la nature.
La réception des invités à la maison de Toléguen est liée avec le même cycle. Et que faire! Les gens du parti ont commencé à parler qu’il fallait procurer une place à l’assassin de sa mère, la complice des violeurs de sa sœur. Ils prétendaient que Moukache a bien mérité du parti. Et le Revcome a été chargé de définir la place: le revkome Baltache est un pauvre, un homme évasif, qui sait, quelle idée il va avoir, et s’il envoie Moukache à Sartaou comme volostenoy. En plus il faut prendre en compte le fait que le bay Aben s’est querellé avec tous les volostenoys riches, il fait des erreurs: il ne va pas se tenir de côté.
Enfin Toléguen lui-même a apparu en tordant les lèvres incolores, avec la serviette gonflée sous le bras, en casquette grise, d’où on voyait les boucles noires et les yeux de souris. Entré à la maison il a échangé des mots avec la cuisinière, a regardé autour attentivement, et a apprécié:
— Parfait, parfait, — il a dit en russe.
Après avoir entendu sa voix Bekbolate est sorti à sa rencontre. Ayant rencontré entre deux pièces en saluant il a tendu les mains. Toléguen s’est précipité d’enjamber le perron, et seulement après il a mis ensemble sa main tendue quand même avec les mains de l’hôte. Il est impossible de comprendre, pourquoi, probablement il a entendu parler d’un signe russe, et il a été méfiant de se saluer sur le seuil.
— Comment est la santé, comment est la blessure? Tu as déjà guéri?.. Bien... Le travail occupe tout mon temps, je n’ai pas pu venir te voir, — et il s’est mis à se blâmer à haute voix et d’une manière ennuyeuse qu’il n’avait pas visité Bekbolate à l’hôpital le dernier temps.
Il a mis la serviette sur la table, est allé dans la cuisine pour donner quelques ordres à la cuisinière et a continué en revenant:
— Il y a des nouvelles et de la steppe. Et à notre aoul tout va bien... Et notre père... — il a fait une pause. — Son humeur n’est pas mauvaise, il paraît.
Il n’a dit mot que sa sœur était retrouvée. Il attend comment Bekbolate va se comploter, et l’autre avec une joie qui se manifestait un peu a dit:
— Oui, j’ai entendu parler, tout s’est arrangé.
Toléguen après avoir senti qu’Akbilek est toujours bien-aimée pour Bekbolate, l’a regardé plus amicalement. Ne sachant pas comment lui exprimer sa sympathie, il a sorti de la poche le porte-cigarettes en argent rempli de cigarettes chères élégantes:
— Tu fumes?
Bekbolate n’ayant pas d’habitude de fumer du tabac a cru qu’il n’était pas commode de refuser, il a tendu son bras maladroitement vers le porte-cigarettes, a pignoché par deux doigts et en répandant les cigarettes il a accroché quand même une. Deux-trois cigarettes sont tombées sous la table.
— C’est rien, c’est rien, — Taléguen s’est précipité de calmer l’habitant de son pays un peu sauvage et les a ramassé tout seul dans sa porte-cigarettes.
L’affabilité presque frémissante du frère aîné d’Akbilek a flatté Bekbolate, et lui dans ses pensées a admiré son future parent: «Ce garçon a atteint tout, n’importe qui se vanterait du beau-frère pareil».
Taléguen a sorti de sa poche profonde le mouchoir blanc parfumé copieusement par l’eau de Cologne odorante, l’a agité et en poussant le coin dans la narine par le doigt posément, a essuyé le nez. Garder le silence avec l’hôte, surtout avec le fiancé de sa sœur, est impossible, indécemment, il n’est pas un sauvage, mais il n’est pas clair de quoi parler, Taléguen marche dans la pièce, essuie le nez par le mouchoir et réfléchit au sujet acceptable de la conversation. La tablée prochaine lui a paru un sujet convenable:
— Aujourd’hui je suis obligé d’accueillir les invités. C’est parfait que vous êtes arrivés à l’heure convenable.
Il voulait prononcer une ritournelle que l’hôte inattendu est guidé par la chance du maître de la table, mais s'est abstenu de dire, il lui a semblé qu’elle était trop kazakhe, trop à double sens, le fiancé peut ne pas l’aimer. Et Bekbolate voulait répondre à ses mots aimables, a bougé, mais il n’a pas trouvé quoi dire, mais uniquement a adouci l’expression du visage, ce qui lui semblait plus expressif que tout le flot de paroles:
— Ah-ah, — et c’est tout.
— Un camarade est arrivé du centre de la région. On l’a invité, — a expliqué Toléguen.
Il fallait comprendre: regarde, c’est mon monde, ce sont mes connaissances, deuxièmement, j’ai des relations avec le centre de la région, pour toi le petit fiancé je suis une personne importante. Bekbolate devait soutenir la conversation, il a bougé de nouveau:
— Et qui est ce garçon?
Toléguen a répondu que son nom était Akbala et qu’il était le membre du revcome de la région.
Après avoir parlé dans cette direction Toléguen est sorti sous le prétexte de la nécessité de contrôler la préparation du repas. Après avoir cru qu’il n’était pas convenable de rester seul sans le maître de la maison dans les pièces, Bekbolate est sorti avec lui dehors pour se dégourdir.
Les premiers invités étaient Ykan et Typan. Toléguen les a accueillis:
— Ah, Yka, entrez, — il lui a serré la main, l’a fait asseoir.
Bekbolate a serré la main contre sa poitrine et lui a tendu son bras également. Ykan a jeté un coup d’œil sur lui au-dessus de ses lunettes et lui a donné de tenir quelque temps sa main d’enfant:
— Comment allez-vous?
Toléguen a proposé la chaise et au homme bronzé mafflu:
— Ah, Tyla, je vous pris.
Bekbolate a décidé qu’il était en vain de saluer par deux mains, a pris son courage, et a serré seulement par une seule main large sa petite main douce. Typan a essayé de le regarder du haut en bas:
— Comment ça va, mon cher? — et il paraît ayant haussé les épaules s’est assis à côté d’Ykan.
Toléguan s’est adressé aux invités d'un ton badin:
— On a beau demander, mais de toute façon les citoyens avec les vestiges kazakhs ne veulent pas venir à temps! Je suis ravi de vous voir! — et il a regardé la montre avec le bracelet fin.
Cela a sonné assez tristement, Ykan a eu peur avec affectation et, comme s’il était convaincu du crime terrible, a écarquillé les yeux et a proclamé, en ouvrant la bouche de la manière comique:
— Est-ce qu’on est arrivé plus tôt? — et a secoué la tête avec accablement.
Typan n’a pas tenu tête à Ykan:
— Ce ne sommes pas nous qui devons avoir honte de traditions des pères. La honte est inutile pendant qu’on a faim? — et après avoir jeté un coup d’œil sur Ykan a glouglouté par la sourire.
— Non, pas tôt. Tout d’abord je voudrais vous dire que suis ravi de vous voir. — Toléguen s’est mis à sourire. — Voilà, fumez, s’il vous plaît! — et il a sorti de la poche le même porte-cigarettes et a ouvert le petit couvercle.
— Et, cela change tout, — a dit Ykan d’une manière satisfaite, a sorti de sa poche du court bechmète usé la tabatière oblongue, l’a ouverte avec précaution et a mis devant lui. — Merci! Je ne fume que le tabac à moi, — et il a ajouté quelques mots en russe.
Ensuite il a sorti de la tabatière le carré du papier coupé, a léché la feuille posée sur le doigt, a versé du tabac granuleux et s’est mis à rouler la cousue-main. Après avoir roulé plus fortement, il a mouillé de salive le bout par la langue comme il faut, a collé une cigarette d’épaisseur comme un annulaire avec un petit bout ressemblant au bout incirconcis du gamin, et l’a fourrée avec précaution dans le fume-cigarette rongée come par le cheval. Il a retourné les feuilles restantes dans la tabatière au-dessus du tabac, a fermé par le couvercle, et a mis la tabatière dans la poche. Et de là-bas il a sorti le briquet et le silex, a serré fortement le briquet par la main gauche, et le silex — par la main droite et s’est mis à faire feu, la petite flamme a jailli et s’est allumée.
Bekbolate observait attentivement toutes les manipulations de tabac d’Ykan. Il a été charmé par le soin et la suite sévère dans les actions du fumeur, qui ne cédaient pas aux préparations des pèlerins sévères pour le namaz avec leur douche de la bouche, l’ablution des pieds et l’étalement de la carpette de prière. En fumant, Ykan remplissait la bouche par la fumée et ensuite la laissait sortir par les bouffées complètes. Il a rappelé à Bekbolate le taureau inquiet, qui fait monter les tourbillons de poussière par les narines énormes le soir. Il y était quelque exagération. Ykan agissait de la manière plus cultivée, en soufflant par la fumée le nuage de fumée déjà pendu devant lui, sa main avec le fume-cigarette serré entre l’index et l’annulaire planait de côté. Il jouissait d'un bonheur parfait.
Quelqu’un, peut-être, peut être étonné par la description tellement détaillée de l’utilisation de tabac d’Ykan, comme s’il n’y a pas de quoi écrire. Je vais vous dire qu’il en a. On peut commencer à fumer tout seul.
Quand on est de mauvaise humeur, on s’ennuie, on ne veut voir rien et personne, quand on est assis et regrette qu’on a gaspillé encore une heure, regrette, qu’est ce qui peut te distraire mieux que le tabac, l’opium et la vodka? Les médecins appellent l’opium et la vodka le poison, ils assurent, on en empoisonne notre corps, brulons les veines, et on endommage le sang, provoque les maladies et le vieillissement rapide et en général on se tue. Mais tout d’abord est-ce que la tristesse n’est pas le poison non plus? Est-ce qu’elle ne bouffe pas l’âme? Et la colère, s'élevant en nuages dans la poitrine, — est-ce n’est pas le poison et est-ce qu’elle ne raccourcit pas la vie avant? On extermine le poison par le poison. Nous n’allons pas les désapprouver pour l’euphorie de fumée d’Ykan, qu’il se mette même le nasvay derrière sa lèvre.
Notre indulgence envers Ykan peut s’expliquer. D’abord il habitait dans une grande ville, passait pour le propriétaire de haras, connaissait le prix du coursier, et du vin, il était marié avec une dame russe. Il prenait part aux congrès des partisans de Kerenskiy; et comme il pensait lui-même il a vu le monde: il a couru le monde. Et quand les rouges ont pris le pouvoir, toute sa vie quotidienne a été détruite, il a été obligé de revenir là d’où il était avec les cheveux gris et l’infirmité sénile; les locations des appartements, des coins, il n’est pas capable d’acheter le manteau pour la fille, les chaussures pour le fils, et il ne lui reste que grogner librement dans l’oreille de la vieille. Sa fonction est sans importance, il s’est casé comme adjoint du chef d’une partie de département. Et pourquoi Ykan doit être raisonnable? Qu’est-ce qu’il lui resterait à faire, s’il ne fumait pas avec les manières raffinées le tabac âcre? Laisse-le, ne t’occupe pas d’Ykan?
Et Typan?
Typan, lui, il est assis les jambes croisées avec les bottes neuves. Le pantalon noir de drap de bonne qualité, bien que ce ne soit pas que les restes de l’ancienne garde-robe, la veste sombre n’est pas encore démodée, le col rabattu amidonné de la chemise est noyé par la cravate à pois noir. Ainsi qu’Ykan il n’a pas fait ses études à l’université, il méprisait son travail, mais il avait de l’autorité dans la société des siens.
C’est évident, que l’ordre actuel ne plaisait pas trop à Ykan. Chez les bolchéviks l’honneur et les principes ne coûtent même pas cinq kopeks, ils n’ont rien à faire avec tes connaissances, ton expérience, tes cheveux gris nobles. Et de nouveau le mal de la tête c’est la retraite. S’il va l’avoir ou pas ce sont des ténèbres. En plus la jeunesse a commencé à avoir une trop haute opinion d’elle, se mêle avec les instructions: «Procède comma ça, fais comme ça». Tels que Baltache même ne disent pas bonjour à la rencontre, ils ont l'œil en coulisse, seulement Toléguen fait une exception, il n’oublie pas Dieux.
Et Typan ne voit partout que «l’horreur» et, ayant avancé la lèvre mécontentement, engueule de toutes les façons tout le monde... mais il n’a pas de réclamations concrètes envers le pouvoir Soviétique, et veille et accomplit sont travail avec zèle, vogue en pleine mer. Il est comme ça, Typan, partout il va trouver un trou, pour passer là où il faut. Ykan est privé de talent pareil, il se comporte comme à l'article de la mort: «Allez donc au diable!»
Ohé, nous n’avons rien dit sur l’âge de Typan et Ykan! Vous n’allez pas trop vous tromper, si vous supposez pour la première fois, qu’Ykan a cinquante ans, pour la deuxième — soixante, sa vive mimique ne permet pas d’examiner plus attentivement. Mais l’âge de Tykan ne soumet pas à la définition, il varie en fonction du pays de connaissances: dans le questionnaire il écrit 45 ans, mais parmi les femmes il a 30 — 35 ans.
On ne comprend pas très bien, pourquoi Toléguen a invité ces deux citoyens âgés dans la compagnie de ses jeunes copains, peut-être, il a suivi quelques traditions kazakhes, peut-être, il a prévu les utiliser dans l’avenir. Bien sûr ils sont contents: «Il fait état de nous», ils sont venus volontiers, restent assis et se croient on ne sait pas qui.
Typan est privé de sérieux, il dit vivement: — Et alors Toléguen? Comment est le travail, les succès?.. Est-ce que tu as rendu les céréales d’après ces impôts-là?.. C’est une vraie horreur... — il a commencé à parler comme un vrais défendeur des intérêts de Kazakhs sur les plaintes des habitants des aouls sur la violence, l’oppression...
En écoutant le discoure enflammé de Typan, Ykan écarquille les yeux avec étonnement et dit:
— Hé, c’est vrai?! Hé, c’est vrai?!
Dans le bureau Ykan est débordé par les centaines ordres, rapports, questionnaires, demandes, et lui-même est comme une demande désespérée, il ne sait rien sur ce qui se passe hors les limites de sa table de travail, c’est pour cela qu’il s’étonne. D’ailleurs, à vrai dire, il n’a jamais eu d’idée de s’intéresser lui-même, quels sont les malheurs dans la steppe.
Ils ont parlé plus du salaire, moins des appartements, du chauffage des maisons, du tabac, de ce comment vivre et faire fortune. Et les jeunes commissaires encore verts avec les serviettes gonflées sous le bras les ont retrouvés occupés de telle conversation.
Un des arrivés est amical comme un agneau, Akbala; le deuxième est sombre du visage et du vêtement Baltache; le troisième est grêlé Doga avait une lèvre sortant, le nez plat, un œil regarde le ciel, l’autre demande du pain. Le quatrième est Jorgabek se courbait comme une selle devant Doga, et devant Baltache il se repliait comme une manche de hache. Jorgabek était spécialiste de l'aménagement foncier, Doga était son chef, et Baltache était le chef du district. Dès que les quatre ont apparu, en se croisant dans la porte, Toléguen a exclamé:
— Ah, entrez, entrez! — et s’est jeté à les accueillir. Et notre Bekbolate a sauté sur ses pieds et s’est mis au garde-à-vous près du seuil.
— Hé... — a dit Typan et s’est levé amicalement. Ykan ne se décidant ni de se lever ni de rester assis comme avant, a commencé à ramper sur la chaise et s’y est tordu, décidez vous-même: s’il s’est levé ou s’est effacé.
Typan a échangé une poignée de main avec deux camarades, et a dit aux autres:
— On s’est vu aujourd’hui? — et sourit sciemment. Ykan en saluant Akbala lui a fait un signe de tête. De côté Bekbolate fourre sa patte vers les mains des invités arrivés.
Les commissaires ont dispersé à la va-vite leurs serviettes, ils sont arrivés pour se reposer alors. Baltache est allé jusqu’au lit et s’y est laissé choir. Jorgabek s’est profité de l’amabilité de Typan et s’est assis sur sa chaise... Akbala s’est arrêté près de la table et s’est mis à feuilleter les livres de l’étagère. Doga s’est installé de côté, s’est assis près du miroir, a commencé à fumer en clignant de l'œil.
Parce que les jeunes messieurs arrivés tout de suite ont fait danser devant eux toute la maison, Bekbolate, après avoir examiné chacun a préféré de s’assoir au loin.
Toléguen entrait et partait de nouveau à la cuisine, aiguisait ses couteaux, préparait la viande pour la table.
Akbala en examinant un des livres, a dit:
— Hé, Il y a même Kautsky ici. Toléguen a répondu du séjour:
— J’ai Engels aussi, on suit le marxisme quand même.
— Ohé, tu parles! Tu n’atteins pas le marxiste, — a déclaré du ton hautain Baltache couché au lit.
Jorgabek et Typan ont trouvé un autre sujet acceptable pour eux, en le discutant à mi-voix, ils s’échangeaient des sourires et faisaient des grimasses. La conversation revenait à la vodka.
— Et pourquoi on ne boirait pas? — a résumé Jorgabek.
Incapable de se trouver dans cette « conversation des oiseaux», Ykan gardait le silence de côté restant assis en solitude à côté de Bekbolate. Ayant baissé la tête il s’est plongé dans le processus compliqué de fabrication d’encore une cigarette. Après avoir fumé, Ykan a regardé Akrala marcher sans précipitation dans la pièce, a touché l’épaule de Typan et a demandé:
— Qui est ce gars-là?
— C’est le membre de Goubrevcome le camarade Akbala, — a répondu Typan et a serré les lèvres.
À ce moment le membre du revcome avec l’air perdu arpentait le long du lit luxueux sur le tapis laineux, arrêtait le regard sur les chaises couvertes de velours, sur les photos du camarade Lénine, du camarade Trotski et la photo de Toléguen lui-même pendue entre eux, il a examiné l’armoire, la table, la garde-robe du camarade Toléguen, l’a tâté et ce faisant a poussé un gémissement: — Ym-ym...
Qui travaille au district? Qui vit comment? À qui il faut croire, avec qui on peut travailler? Par quoi ils sont tous préoccupés?
Quels livres ils lisent? Qu’est-ce qu’ils pensent des Russes? Qui est pauvre, qui est riche, qui est honnête, qui est saligaud?.. Akbala est préoccupé. Après avoir passé dans l’appartement et y examiné tous les objets, est-ce qu’on ne dirait pas: «ym, alors...» et ne ferrait pas des conclusions. Akbala s’est arrêté d’un coup près de Bekbolate et a dit:
— Toutes les fortunes importantes sont gagnées par le pillage. N’est ce pas, les camarades?
Toléguen tout de suite a répondu:
— C’est reçu d’après l’ordre au Soviet. J’ai le droit comme le président du comité d’alimentation.
Baltache qui regardait le plancher après avoir entendu la question a tourné la tête et après avoir jeté le coup d’œil sur Akbala, a dit en ébouriffant et lissant ses cheveux:
— Hé, mais cela est réquisitionné aux richards! — Dans ses yeux on lisait la citation simple: «Comme le communiste au communiste».
La simplicité est pire que le vol. On a supposé que le camarade de région a commencé la conversation habituelle sur la lutte des classes, mais ce n’est pas le cas. Vu qu’on ne le comprend pas, Akbala s’est exprimé de la manière plus claire:
— Tous ces meubles sont enlevés uniquement auprès des Russes? Ou on réquisitionnait chez la bourgeoisie kazakhe aussi?
Tout le monde s’est inquiété. Baltache a regardé dans la direction des camarades assis sur les chaises en velours et a répondu en essayant d’échapper le fond de la question:
— Hé, il arrive, que nos garçons prennent quelque chose du bien nationalisé par l’état, et on l’a chez eux, comme le souvenir sur les bourgeois!
Toléguen, se trouvant à ce moment dans une autre pièce, s’est précipité, a traversé en courant d’une pièce à l’autre et a demandé en regardant Baltache:
-Quoi?
Baltache s’est refrogné comme s’il s’est mêlé dans la conversation qui ne le concernait pas, et a répondu d'un ton tranchant:
— Rien.
Toléguen s’est perdu pour une seconde, a senti qu’il était le temps de prendre l’initiative dans ses mains, et a exclamé:
— Allez-y les amis! À table!
Les invités avec une paresse de façade se sont dirigés dans le séjour. Bekbolate s’est installé au bout de la table. Les jeunes messieurs l’ayant pris pour sont travailleur, ne se sont pas même intéressés de son nom. Si cette situation était humiliant pour Bekbolate — il est difficile à dire, mais le fait que lui-même il ne sympathisait pas aux commissaires, — c’est sûr.
La table était pleine de victuailles.
D’abord on a mis les morceaux complets de la viande de mouton bouillie aux oignons, avec de la sauce de bouillon poivrée et salée copieusement. Les nouilles faites à la maison ont suivi la viande. Ensuite le rôti était prêt. Et la pastèque était pour le dessert.
Dès qu’on s’est mis à couper la viande, Toléguen a sorti en cachant ostensiblement quelque vase en verre de la pièce lointaine. Typan a fait une grimasse embarrassé et a fait semblant de s’intéresser:
— Qu’est-ce que tu as dans ta main? — et l’a tiré par la manche.
— Rien... Un tout petit peu de celle-ci... — Toléguen s’est troublé et s’est précipité de caser le flacon amené sous la table.
— Quoi, l’alcool pure? — Typan ne le laissait pas tranquille.
— Un peu «pour l’élan». — Toléguen a examiné les invités de dessous de ses paupières et a souri d’une manière innocente.
— Aïe, il n'est pas permis, — a dit Baltachare devenu plus sévère et a accroché Akbala par le coin d’œil.
— Je ne sais pas, comment c’est chez vous, et nous ; nous n’avons pas peur de ça, — a dit Typan et a caressé son ventre.
— C’est vrai qu’il y a plein de mal ici. Uniquement pour l’appétit, — a assuré Toléguen et a mis sur la table la bouteille scintillante.
Tous ont fixé leurs yeux sur ce vase.
— Quel malheur, où est-ce que tu la trouves? — s’est étonné Jorgabeke et a clappé.
— Il arrive, ça tombe sous la main... — a répondu Toléguen.
— Il connait les assiettes au beurre, — a remarqué Doga et a fait un clin d'œil.
— Est-ce qu’on a la réunion de soir? — a demandé Baltache à Typan.
— Aujourd’hui elle n’est pas prévue... — a répondu Typan et a caressé la bouteille d'une manière enjouée. — On ne va pas la fâcher, je sais moi-même comment elle se fâche sérieusement
Il y a longtemps qu’Ykan n’a pas goûté de vodka. Et ici quelle richesse! Foin de tous, il va en avoir ou pas?! La compagnie s’est mise à préciser les degrés de la vodka, en faisant les grimasses, ils discutaient de milles façons ce sujet amusant... Ykan n’a pas supporté, il a levé le verre devant lui et a déclaré:
— Assez de faire souffrir la petite blanche, verse, mon cher! La tablée a éclaté de rire. Akbala restant assis modestement jusqu’à ce moment a ordonné:
— Verse comme l’aksakal a ordonné!
Toléguen en souriant a coupé l’alcool par l’eau préparée, et l’a versé dans les verres préparés:
— C’est correcte!
Baltache a regardé autour et a demandé à Toléguen:
— Il vaut mieux baisser les rideaux. Les invités ont levé les verres:
— Et alors, à qui on trinque?
Se prenant pour le chef de la table, Typan a regardé Akbala et s’est précipité à dire:
— Je pense qu’il faut boire à l’honneur de l’invité arrivé.
Akbala s’est secoué:
— Non, ça n’ira pas. À quelque chose d’autre... À quelque idée socialiste, peut-être... — a dit-il, en refusant il n’a fait que souligner qu’il la présentait lui-même.
Sur-le-champ Baltache a sauté de la chaise et a exclamé en levant le verre:
— Vive le pouvoir soviétique! — et il s’est mis à trinquer avec tout le monde personnellement.
— Vive! — ont repris tous autour.
Malgré qu’Ykan essait de s’exclamer plus distinctement «Vive!», il n’y avait pas, comme chez les autres de ravissement frisant la folie. C’est Typan qui portait un toaste le mieux.
Le deuxième toaste était aux bolchéviks, le troisième était à l’autonomie kazakhe, après aux invités, à la fin à la santé du maître de la maison, la vodka était versée et bue. Seulement Bekbolate n’a pas pu lever son verre, il tenait à peine même sa fourchette.
Un demi-litre d’alcool a fait un litre et demi de vodka. La vodka a ranimé visiblement la compagnie, on riait, la conversation est devenue plus amusante. Akbala se vantait de toutes ses forces de son activité à la région, les autres écoutaient. Doga et Baltache, qui étaient moins échauffés, préféraient de rire des blagues de Typan et Jorgabeke que bavarder, en blaguant de temps en temps avec eux. Ykan s’appliquait spécialement dans l’excès de table, mais Doga et Typan se sont jetés sur la viande avec une insatiabilité spéciale. D’ailleurs, les manières ne regardent personne, les invités se sont déjà enluminés, ils attrapent l’un l’autre par les coudes, ils mettent les bras sur l’épaule du voisin, les petits yeux se sont rétrécis, quelqu’un a renversé de la vodka, les cigarettes cuvant sont dispersées sur la table, la nappe va s’enflammer bientôt. Ils fument, bavardent en russe, rient... on peut devenir fou. Après avoir mangé et bu assez, les invités ont passé dans la pièce lointaine. Leur comportement devenait de moins en moins compréhensible pour Bekbolate. Ils se sont mis en valeur comme les gens d’un autre monde, il est resté entre eux, comme entre le ciel et la terre, peut-être, il a pensé que c’était à cause de son manque d'instruction.
Bekbolate n’a pas suivi les autres, il est resté dans le séjour. «Mais ils sont les mêmes garçons que moi, ohé! Si on avait fait les études dans la ville, on aurait été aussi comme ça!» — a pensé-t-il et a repris le pied pour quelque temps. Et tout de suite la honte: ce n’est pas bien d’avoir une attitude dédaigneuse envers soi... Eux aussi, ils ne sont pas sans défauts. Mais par quoi leur vie est plus intéressante et plus pleine que ma vie, si on ne compte pas les bouffées de fumée, l’ivrognerie, la paperasserie, le bavardage en russe? Mais comment on peut ne pas mourir d’ennui dans ces pièces aux plafonds bas, ne pas s’ennuyer dans les rues étroites de la steppe volontaire et des pics d’Altaï, de la verdure de forêt, de la chasse avec les chiens courants et les aigles royaux?! Mais comment on peut vivre sous courbé au-dessous du plafond, penché contre le mur? Les Saints! Ils se sont enfoncés irrévocablement dans cette existence infernale, ohé! Est-ce qu’ils n’ont pas envi de voir leurs parents, leurs proches? Ils ne sont pas meilleurs. Et probablement, ils nous méprisent, moi, Akbilek...
La cuisinière est entrée, s’est mise à déplacer les chaises, débarrasser la vaisselle de la table. Bekbolate ne voulant pas l’empêcher, est sorti dans la cour, a lavé les mains, le visage et a repris haleine. La fumé de tabac l’a empoisonné jusqu’au mal de la tête.
Après avoir repris haleine, Bekbolate s’est installé librement, comme il pouvait, sur le campus. Le récit du Brillant a résonné dans la tête, comme s’il s’est retrouvé de nouveau à l’hôpital, l’envi de s’en aller d’ici a apparu. Aller bien loin de ces commissaires kazakhs enfumés, ivres, affairés, aller chez les gens! L’envi est devenu plus fort. Il y a longtemps qu’on devait le visiter de l’aoul. «Pourquoi il n’y a personne? Le père est bien... il aime aussi se présenter comme un homme d’état! Ou il n’a plus besoin de moi?» — il a pensé de cette façon et s’est fâché contre son père.
Revenu à la maison Bekbolate a entendu que dans la pièce lointaine les jeunes messieurs discutaient de quelque chose d’une manière furieuse. «Matayin Aban... Moukache», - est atteint ses oreilles. Moukache — Moukache celui-là. Aben est l’ennemi de son père. Voilà avec qui il voudrait se voir avec la cravache face à face dans la steppe! Bekbolate a passé avec précaution plus loin et après s’être assis sur la chaise près de la porte de la pièce lointaine il s’est mis à écouter attentivement les voix en arrivant.
Baltache était en train de parler. En se tenant debout près de la table il a claqué de sa main un tas de papiers et a passé en russe:
— Dans toutes ces plaintes tout est la vérité... Pourquoi le richard s’enrichit? Pour lui les gens sont le bétail, il s’enrichit de leur travail, il suce le sang aux les plus faibles. Le bay Aben, à mon avis, est un vrai salaud, un élément le pire, combien de gens il a détruits! Je crois, qu’il faut terminer avec lui. C’est ce salaud, qui a collecté les documents pour Moukache ! À vrai dire, moi aussi, je ne crois pas que Moukache est une personne absolument non compromise. Peut-être, il offense les gens, mais il a fait justice des bays aussi. Il est un vrai communiste, un communiste engagé. Qui veut la fin, veut les moyens.
— Camarades, permettez-moi de dire quelques mots, — a dit Doga, en levant le bras et en clignant les yeux.
Akbala ayant soulevé le menton a jeté un coup d’œil sur lui et a permis:
— Parle.
— Je voudrais dire... — a commencé expressivement Doga, ayant mis les mains sur les hanches. — Effectivement, Aban Matay est un bay, et le fait qu’il était volostenoy est aussi vrai. Et qu’est-ce que cela signifie? Cela signifie, qu’il avait de l’autorité parmi les gens, qu’il a de l’autorité. Est-ce qu’il va être correcte de détruire tous les bays en une seule journée, en se basant uniquement sur le fait, qu’ils sont riches? Non, cela ne va pas être une bonne solution. Donc, beaucoup de choses dans les plaintes pour Aben Matay ne correspondent pas à la réalité, ne correspondent pas. Tout cela a été écrit par le citoyen Takirov, connu à tout le monde comme le chicaneur. Il faut dire, le chicaneur parfait. À ce moment une action pénale est commencée contre lui, il est arrêté, oui, elle est commencée. Donc, nous ne pouvons pas avoir confiance complémentent en ces dénonciations, on ne peut pas... En ce qui concerne Moukache, il utilise le parti, comme la pelisse, uniquement pour couvrir ses propres affaires, il utilise, rusé, il est très malin... Alors, son but est devenir volostenoy lui-même. Jusqu’à ce moment les voleurs et les escrocs s’arrangent pour se pénétrer dans le parti. On sait, par exemple, que dans la cellule de parti de l’aoul Jaman sept voleurs de chevaux se sont inscrits, on le sait parfaitement. Donc, on ne peut pas appeler les gens comme Moukache les vrais communistes. Il a fait de tout: il agissait de complicité avec les blancs, les excitait contre les aouls, favorisait la prise des jeunes filles, des femmes, il emmenait sur elles lui-même... — et là il a jeté un coup d’œil sur Toléguen.
Toléguen a baissé les yeux. Et Bekbolate à sa place a fixé son regard sur le plancher.
— Oui, donc, ses documents sont à nos mains, — a continué Doga, en gesticulant. — Cela vaut dire, qu’on ne peut pas leur donner la suite, avant qu’on ne les vérifie pas, on ne peut pas...
Dès que Doga s’est tu, Baltache et Typan ont demandé la parole en tenant les bras: «À moi.. Moi...»
— Qu’il émet son avis, — Akbala a montré de doigt Typan. Bekbolate a aimé comment Doga avait lancé une pointe contre Moukache, mais son appréciation d’Aben il ne pouvait pas accepter, il pensait en écoutant attentivement: «Et ce type, qu’est-ce qu’il va dire?»
— Ohé, braves garçons, camarades! Regardons cette question, sans nous échauffer, à la kazakhe... Braves garçons, camarades, bien sûr, vous êtes communistes, mais les Kazakhs les sont aussi. Tous, nous travaillons pour le bien du peuple kazakh... Et nous travaillons plus qu’une dizaine d’années... nous avons usé sur cette voie beaucoup de paires de souliers, plus que vous... il ne sera pas une vanterie, si je dis, que nous connaissons les affaires kazakhes plus, — a exclamé l’orateur et a regardé les présents, en essayant de comprendre, quel était l’effet de son discours.
Baltache a fait la grimace et s’est détourné, en faisant comprendre: «On sait, comment tu travaillais pour le bien des Kazakhs». Jorgabeke s’est refrogné: «Mais il va gâcher tout!» — et il a jeté les coups d’œil sur Akbala et Tupan. Doga a fait un signe de tête affirmatif: «Vas-y, continue!». Ykan en becquetant le bout de table comme un oiseau roulait une cigarette. Toléguen continuait à rester assis avec un regard perdu et avec la tête baissée très bas, comme cette conversation ne le concernait pas.
Le petit papillon condamné tourne en cercle autour du feu sans cesse. Typan a remarqué le mécontentement de Baltache, a pris contenance et a commencé à parler autrement:
— Je l’ai dit comme ça... comme plus âgé... Cela ne nous concerne pas, au moins que vous ne considérez pas utile de savoir l’avis des oncles...
Mais Akbala a encouragé Typan:
— Mais non, parlez. Et votre avis sera utile. Effectivement vous avez beaucoup travaillé pour le bien du peuple.
Typan comprenait bien tout le caractère illusoire de ses paroles, il a continué à rester sur ses positions, mais il évitait déjà les affirmations «mais nous, les Kazakhs»:
— Parlons franchement. — il a éclairci sa voix et a continué: — Cette affaire scandaleuse. À Sartaou les gens sont possédés d'une idée des partis... Deux parties sont en mauvais termes l'un avec l'autre, écrivent les plaintes et mêlent tout avec la politique. À Dieu ne plaise, qu’est-ce qu’ils peuvent mentir, de quoi ils peuvent accuser... Ne faites pas attention au mot «Dieu», ce n’est qu’une ritournelle... — Il a éclairci sa voix de nouveau. — Sans toucher des papiers accessoires, pour une exemple je vais parler à propos des dernières lettres... — et il a commencé à parler du pillage de la poste connu pour Bekbolate des paroles du Brillant.
— Mais à qui il faut croire ici? On ne peut pas embrasser par les yeux ce que les Kazakhs ont menti ici, toutes leurs plaintes...
Typan s’est échauffé — un type courageux, il a presque donné une vraie riposte à toutes les difformités kazakhes à l’échelle planétaire, ensuite il a glissé progressivement sur la personnalité d’Aben Matayin lui-même, il a déjà commencé à parler dans une autre direction. Aben apparaît comme une personne instruite, abonnée pour les journaux et les revues, il construisait des écoles, enseignait les enfants, il recherchait des moyens pour la nourriture des pauvres, comme on dit! — il se préoccupait et de leur vie quotidienne, les poussait vers la culture, vers les limites les plus avancées de la civilisation, il payait les bourses aux élèves, détruisait les restes des détachements de blancs, enseignait aux garçons l’art militaire, abritait les refugiés, réchauffait ceux qui ont souffert de la guerre, et tout cela noblement, il pensait d’abord au destin du peuple, il avait de l’autorité absolue pour tout le district. Mais s’il n’y avait pas lui, il y aurait du chaos, de l’anarchie, de la rébellion! — il a exposé tout cela d'une manière cohérente, qu’il n’y avait rien à ajouter.
L’éloquence de Typan a fait un effet tellement fort sur la compagnie, qu’elle a écrasé sur pied toutes les tentatives de Baltache d’objecter, il a seulement a eu un tic de tête comme un cheval non dressé, et s’est fâché. Doga s’est égayé, en fermant son œil bigleux avec satisfaction, et de tout son air il disait: «Ah, bravo, tu as fait mouche!» Malgré que Baltache fasse des efforts pour objecter, Akbala comme une personne mandatée par le centre, sans vouloir troubler le temps de parole, a passé la parole au suivant, Jorgabèke.
Jorgabèke est allé tout de suite de l’amble. Il ne s’est pas mis à contester l'avis de Baltache, il n’a fait aucune remarque pour répondre à Doga, et il a seulement précisé quelques moments dans le discours de Typan. Il ne s’est pas mis à développer le sujet abordé, n’a pas cru nécessaire de revenir aux querelles séculaires entre les Kazakhs, mais quelle était la raison de discuter ce que n’avait pas de sens; il a parlé du lendemain, du fait que le peuple qui veut devenir une nation, tout d’abord est obligé de relever l’enseignement, établir la justice... et cætera... et tout cela est à faire par la jeunesse kazakhe, et c’est entre les jeunes gens que l’unité doit s'établir, il faut faire tout de concert, l'unique, l’espoir est aux jeunes... — et il couvrait de fleurs la jeunesse de pays et rappelait de nouveau à l’union, il prononçait un discours selon la ligne du parti, on ne peut pas s’accrocher à un seul mot.
Bekbolate est assis comme une andouille — il ne comprend rien: qui a raison dans cette discussion, qui a tord. D’une façon certaine, il a aimé uniquement les accusations contre Moukache. Tout le reste ne valait pas la peine même d’en parler.
Il lui est clair, pourquoi une des parties maudit Aben, mais il ne comprend pas ceux, qui font des éloges de Moukache, en assurant qu’on ne pouvait pas de ne pas le soutenir, ne pas solliciter de fonction pour lui. Quelle absurdité! Quelle est la raison? Donc, il y a une raison. Vous allez me demander laquelle, voilà laquelle.
Baltache est le chef du district. Mais il n’est pas originaire de ce district. Il n’est pas le parent aux locaux en aucun germain. Mais Baltache est le fils du pauvre et il est fier qu’il n’ait rien. Il n’aime ni Doga ni Toléguen, ils croient que tels qu’eux, ayant pénétré au travail soviétique, gâchent tout. Profité de son absence, Doga et Typan ont poussé pour le poste de volostenoy l’homme d’Aben. Revenu, Baltache a été en colère, il a jeté bas le suppôt de bay et y a mis son volostenoy — le cordonnier Kourenbay. Le cordonnier pensait qu’il avait de l’obligation au commissaire, et il a collecté les peaux de putois pour la doublure du manteau d’hiver de Baltache. Malgré que Baltache les lui ait payées, pour chaque queue, de toute façon il est resté content de son volostenoy. Et voilà contre le personnel pareil les bays font monter des cabales! Voilà tout le secret de son aversion d’Aben.
Et Doga, alors? Sans descendre dans les détails, il est de ville, Dieu sait d’où. À vrai dire, les parents de sa mère se reportaient à la famille d’Aben. Lors des élections à Sartaou Aben l’appelait son neveu, s’est montré charment à son égard, l’a nourri copieusement, sans être avare lui fourrait les billets croustillants dans ses poches. C’est tout? Non, je pense. Doga s’est trouvé une beauté. Et non sans cause il croyait, qu’Aben était de ceux qui l’aideraient à se marier.
Et Typan? Aïe, nous ne sommes pas capables de vous raconter tout ce qui s’est passé dans sa vie précédente. On rappelle seulement, qu’à l’époque remarquable de tsar, Typan travaillait comme le truchement chez Aben. Plus tard il travaillait comme interprète chez le juge de paix, ce qui a influencé considérablement sur son poids. Typan est de la même famille qu’Aben, et sa femme est d’origine toujours de la même voloste. Pour Typan le pouvoir même est Aben, et tout le reste n’est que le cas. Mais on ne va pas fouiller plus, il est assez.
Discutons maintenant Jorgabèke. Il venait à peine de se caser au travail d’état. Son père est des volostenoys connus. Au gymnase il passait pour un élève intelligent, débrouillard, ayant la langue bien affilée, mais il n’a pas terminé ses études. Il serait allé loin, mais une petite tache noire se cachait dans sa biographie : le travail à l’administration de Koltchak, après lequel avec l’arrivé des rouges il se cachait longtemps aux aouls des parents. Son caractère se ressemblait en quelque chose au caractère de Toléguen. Avec cela il était plus rusé, rapace, instruit, entreprenant, ce qui faisait de le traiter avec un plus grand égard, que Toléguen. Il savait gagner le cœur à son égard de tout le monde qu’il rencontrait dès les premières phrases. Parce que son idée principale est ce qu’il ne cherche pas les ennemis. En général, on parlait de lui de telle façon: «Jorgabèke est un djiguite!»
Ykan après avoir attendu à peine la fin du discours de Jorgabèke, a demandé la permission du maître de la maison et s’en est allé. Il n’avait rien à faire avec les discussions pareilles. Il a vécu trop longtemps parmi les Russes et s’est détaché autant des racines de sang, qu’il a refroidi complètement à tous les nuances des intrigues kazakhes, il préférait le baratin ne signifiant rien avec un petit verre de vodka aux logomachies émouvant les allusions sur la famille, les troupeaux et à ce que, qui et quoi amène du marché. Peut-être, la vodka bue a influencé, ayant éveillé les souvenirs des débauches effectivement sans foi ni loi, peut-être, il redoutait des reproches douloureuses de la vielle pour la beuverie qui a trop duré, mais quoi qu'il en était, Ykan a cru nécessaire pour lui de se retirer.
Toléguen gardait le silence. Pourquoi prendre la parole? Doga et Typan ont déjà exprimé tout ce qu’on pouvait et ce qu’il fallait dire. C’est à eux qu’il comptait.
Akbala ayant donné la possibilité d’exprimer son avis à tous les camarades et ayant écouté attentivement tous les orateurs, enfin a décidé d’émettre son opinion lui-même. Il était de ceux jeunes, mais roublards, qui ont coché leurs noms dans la liste encore aux meetings les premières années de coup d’état révolutionnaire, est passé pour l’organisateur, est resté dans la mémoire, on parlait de lui: «Et bien, il déchire!» Il publiait ses articles dans les journaux, écrivait des rapports solides. Il passait pour un cadre avec autorité de l’appel dernier de la jeunesse. Il s’est inscrit dans le parti communiste il n’y a pas longtemps, mais, lui-même, il déjà appelait les jeunes de s’inscrire au parti, il désirait sincèrement se faire un vrai communiste, le garçon instruit. Les masses charmées par son discours éveillaient de l’enthousiasme sincère dans son âme. Il étudiait chaque décision du congrès de parti, chaque nouveau livre édité. Surtout il aimait se plonger dans les discussions de Lénine, Trotski et d’autres participants célèbres des congrès, il apprenait par cœur certaines phrases fortes, les mots exactes, et s’il ne les citait pas mot à mot, en tout état de cause comme il fallait. Il arrivait qu’il sortait les aphorismes des leaders de telle façon, qu’on avait impression qu’il était l’auteur de ces sentences. Tout ce qu’il a lu ne faisait que sortir de lui, si on fait une pression un peu, il passera pour le civilisateur, malgré que lui-même, reculé de la tribune, je doute qu’il ne soit pas capable de répéter tout dont on en a été parlé.
Mais de toute façon, ne vous précipitez pas de l’appeler le bavard frivole, au contraire, il faisait semblant d’une personne réservée, sachant agir en grande dame dans n'importe quel environnement et parler substantiellement. Il croyait lui-même qu’il était très instruit, cultivé, éloquent. Mais si une erreur lui arrivait, si ayant fait un pas mal à propos il trébuchait, il ne devenait pas confus du tout, ne se flagellait pas, il construisait un nouveau projet et trouver une sortie du cercle créé des ennuis aux lendemains qui chantent.
Akbala se présentait modestement comme le messie, dont les idées et les buts ne pouvaient pas refusés. Et la cause pour laquelle il ne se précipitait pas d’émettre son opinion, mais préférait d’écouter les autres, est digne d’une explication plus détaillée. Il ne s’agissait pas du fait qu’il ne voulait pas effectivement comprendre cette situation-là, qui s’est créée à Sartaou. Et non plus, qu’il ne voulait pas détecter au district l’ennemi caché, en attendant que quelqu’un laisserait échapper un secret, et montrerait son propre vrai visage. Il s’agissait de son envi de trouver parmi les orateurs celui, qui convenait pour la réalisation de ses idées fondamentales.
La partie forte d’Akbala consistait en fait qu’il parlait aussi bien le russe et le kazakh. Après avoir commencé à parler en kazakh, il a gagné tout de suite Bekbolate:
— Oui, camarades! Maintenant je vais exprimer mon avis, — il a touché les lèvres par le mouchoir et, sans lever les yeux, a continué: — Le cas que nous sommes en train d’examiner, il faut prendre non seulement à l’échelle d’un seul voloste, district, ce cas est typique pour tout le Kazakhstan, — il a redressé les épaules, a croisé et a frotté les doigts, a soulevé un peu la tête, l’a secouée, en fixant les yeux sur le ventre de Typan assis en face de lui.
— Nous ne sommes pas prêts à la révolution. La révolution est tombée sur nous comme du ciel. Nous recueillissions le fruit, cultivé par le prolétariat russe, les bolchéviks russes, — a déclaré Akbala et s’est tu significativement.
Cette phrase a été prononcée mille fois, était citée dans les journaux, criée aux meetings, et quand même Akbala a déclaré cette affirmation usée comme une nouvelle révélation.
— Oui, le pouvoir appartient aujourd’hui aux valets, aux pauvres. La classe des travailleurs a déjà vaincu la classe des richards, a pris sous son contrôle la terre, les fabriques, les usines, le bien des richards... Mais faisons une comparaison quand même. Chez les Russes la lutte des classes s’est déjà déroulée de toutes ses forces, et dure plus d'un an. Mais chez nous la délimitation des classes n’a pas même commencé. Pourquoi? Est-ce qu’on n’a pas de bays, de pauvres, d’exploiteurs et de leurs victimes? Paix et quiétude, la vigne de l'abbé? Non, camarades! Nous avons aussi le pillage du peuple ouvrier, l’injustice, la violence, l’oppression sautent aux yeux. Mais le pouvoir est entre les mains des richards, et ils nous cachent les larmes des masses opprimées. Les masses souffrent au fond d’elles, elles sont humiliées, malheureuses... Oui, oui... les richards ne s’enrichissent pas de l’héritage. Ils s’enrichissent en suçant le sang du peuple ouvrier, leur enlèvent le pain de la bouche, s’engraissent en exploitant le travail des gens. Et c’est une vérité non dissimulée. La richesse d’Aben sert de l’exemple. Et cela est incontestable. Oui, oui... Pourquoi nos masses, devenues une classe, ne sont pas capables de s'opposer aux richards? Ou ils n’ont aucuns droits? Ils ne comprennent pas leur intérêt, ils ne comprennent pas qu’ils sont à deux doigts de la mort? Mais nous connaissons les causes. Nos valets, pauvres n’ont pas eu des centres unissant, mobilisant, organisant, comme les usines et les fabriques. Écrasés, pillés, enfoncés dans les égouts, les pauvres souffrent d’une manière séparée. Pour dire plus précisément, nous n’avions pas du prolétariat, et si on avait, il était peu nombreux, il est presque prêt d’apparaître, parce que nous sommes en trains de construire notre industrie. Nous avions les mineurs avant... Oui... oui... nos valets et nos pauvres ne sont pas capables de distinguer le blanc du noir, ils étaient aveuglés... Oui, les enfants des pauvres ont commencé à faire leurs études seulement le dernier temps. Avant uniquement les enfants des bays, des aristocrates, des volostenoys pouvaient faire leurs études... Oui, ensuite nous avons un vice, c’est une animosité entre les familles. Les aksakaux, les cavaliers en tête de leurs familles, lâchent une famille contre une autre, font les pauvres se battre l'un avec l'autre... Oui, maintenant le temps du pouvoir des pauvres est arrivé. Il nous ordonne d’aimer les pauvres, arranger leur vie quotidienne, les enseigner, caser au travail. Est-ce que nous devons aimer les pauvres? Nous le devons. Est-ce qu’il faut éveiller leur solidarité de classe, la haine de classe? Il faut. Mais comment? Quelles possibilités nous avons? Voilà où est le fond, — a conclu Akbala, a sorti de la poche les cigarettes, a commencé à fumer, a avalé une bouffée de tabac et a continué: — Pour cette question dans la région il y a deux solutions... Si on raisonne d’une manière plus globale, on peut dire, qu’il y a trois approches. Mais je n’appellerais pas la troisième approche de la solution du problème. Parce que les partisans de cette approche affirment, que nous n’avons pas de classes, et lient la lutte des classes uniquement avec les Russes, — et il a jeté le regard fixe sur Jorgabèke.
Jorgabèke a fermé les yeux avec un air compréhensif et approuvant.
— Nous, les communistes kazakhs, nous ne pouvons pas approuver cette approche... Nous devons nous-mêmes prendre la voie de révolution... Oui, c’est pourquoi il y a des solutions du problème soulevé. La première solution concerne en confiscation révolutionnaire de toutes les propriétés foncières des bays, des maisons, du bétail, y compris des femmes, s’il y en a quelques unes, et en partage en parties égales entre les pauvres, comme, un peut dire, par le couteau tranchant. Égaliser la condition patrimoniale des richards et des pauvres. Si non, si les richards vont comme avant disposer des pâturages et des sources d’eau, les pauvres ne verront pas de justice autant que c’est possible. Cette politique est menée par certains camarades russes, on peut y ranger tels camarades comme le cordonnier Kourenbay envoyé au voloste de la ville, ainsi que plusieurs camarades de la jeunesse misérable... Ce qui concerne la deuxième approche, ici aucune révolution n’est possible, les pauvres ne se débarrasseront de l’oppression... — et il s’est mis à avancer des arguments.
Les voilà: si aujourd’hui on enlève le bétail chez les bays, il sera usurpé par les vrais brigands, ils détruiront tout comme le trophée, mangeront tout de suite, et l’état n’aura aucune bénéfice, cela entrainera la peste, la famine, la guerre civile.
— Camarades, il est dangereux d’essayer de faire des pauvres les richards aux frais des riches, le pauvre sans bourse délier peut atteindre tel degré de jalousie, que le socialisme et le communisme deviendront pour lui le son creux. Il ne va pas s'habituer au travail appliqué et l’intelligence ne s’ajoutera, sans comprendre les simples choses comme «le doit et avoir», il gaspillera tout... Il faut enseigner le pauvre, il faut lui ouvrir les yeux, aider à trouver sa place, la justice et le pouvoir doivent être au services du pauvre peuple. Il faut créer les coopératives, les artels, il faut amener les pauvres menant la vie nomade à la vie sédentaire, il faut enseigner les métiers! — il a exclamé.
Après avoir examiné avec satisfaction l’auditoire stupéfié, Akbala a ajouté un peu plus tard:
— Nous devons regarder les richards et les pauvres de ce point de vu. Aben n’est pas seul, il y en a plein. Nous devons combattre contre eux, il est possible, que cette lutte sera longue. Ils ont aussi leurs possibilités, ils ont beaucoup de forces. Ils savent trouver la faille lacune. Ils ont leurs agents dans le district, et partout dans la région, d’où peut-on savoir avec qui sont-ils liés par le cordon ombilical? Tout d’abord, nous devons nettoyer nos rangs des citoyens, qui sont dirigés par les liens familiaux, il y a une influence hostile ici. Si nous ne sont pas propres nous-mêmes, nous ne viendrons au bout du rien, — et il s’est tu, cette fois-ci définitivement — il a soufflé le lampadaire.
Quoi qu'on puisse dire, mais Akbala a prononcé le discours formidable. Ce qui est fort est fort, cependant il n’a pas été aimé par tous les camarades. Surtout, le slogan « l’accentuation de la lutte des classes » ne s’est pas trouvé au goût de Jorgabèke et Tychan. Car ils sont les partisans de celle troisième voie repoussée. Ils cachaient les petites affaires kazakhes. Et pour Baltache, un vrai fils des pauvres, les mots «ne pas enlever aux bays le bétail et les pâturages» étaient dégoûtants. Et malgré que dans son âme il était prêt d’objecter, il s’est retenu. Il a été blessé qu’Akbala lui a déjà refusé deux-trois fois la possibilité de discuter, hors de là il a été mis sur ses gardes par la définition «la jeunesse misérable». «Et s’il m’y range, il vaut mieux se taire», — s’est méfié Baltache.
Uniquement Jorgabèke ne s’est pas calmé, il a commencé à poser pleines de questions sur Marx et le capitalisme ainsi que la construction du socialisme dans un seul pays et où étaient les Kazakhs avec tout cela?
Akbala a flanqué un coup d’œil sur Jorgabèke, a levé les sourcils après l’avoir écouté, et en cachant l’aversion avec application a répondu:
— Vos questions exigent une interprétation profonde. Mais je peux répondre même maintenant. Mais cette fois-ci je vais me retenir, parce que, premièrement, on a bu, on est devenu ivre de quelque façon, deuxièmement, je ne pense pas, que peut-être à ce moment donné j’ai cité exactement Marx et Lénine. Nous allons discuter ces questions plus profondément plus tard. D’ailleurs, on peut donner la réponse suivante. Si on regarde la racine du problème, nous n’allons trouver aucune autre voie différente de celle, qui a été déjà choisie par le prolétariat russe. Nous devons le suivre, en nous unissant avec lui, et non pas en créant sa propre politique kazakhe. Il n’y a pas de politique pareille! Ainsi qu’il n’y a pas de sa propre histoire séparée. Nous devons nous occuper du travail pratique. Il faut reporter l’attention sur la lutte des classes, et non pas sur le partages des ennemis et des amis selon l'indice de parenté. Vous connaissez Marx, et pourquoi vous n’avez pas d’état d'esprit révolutionnaire? — et il a fait la mine de rire.
— D’où vous pouvez savoir que nous n’avons pas d’état d'esprit révolutionnaire? — lui a retourné la question Jorgabèke et s’est mis à rire aussi.
Les questions de Jorgabèke ainsi que les réponses d’Akbala n’étaient pas plus compréhensibles pour Bekbolate, que les phrases arabes de Coran. Bekbolate n’a rien à faire avec le socialisme et le communisme, il regrette, qu’on a oublié Aben et Moukache en bavardant. Qu’est-ce qu’il faut faire avec eux! Le djiguite ne peut pas comprendre — les jeunes commissaires ne faisaient que faire le sort d’Aben et Moukache. Que faire — il n’était pas penseur, il pensait autrement. Bekbolate reste assis et il ne peut pas comprendre de ces discussions, qui est-il et où l'on est. Sa tête est devenue lourde des paroles incessibles, et il est allé bien loin.
La neige tombée la nuit était poilue jusqu’à l’invraisemblance. Il gèle très peu, sans le vent. L’air est comme le verre. Deux cavaliers s’éloignaient de la ville en résonnant par les sabots. Les traces des sabots sont comme les trous d'obus — comme ça la neige s'éparpille! Cela est de toute beauté! Le tagada! Le cheval bai maigre avec la nuance pourpre avait une petite tête élégante, les jambes endurantes, comme d’hémione. Le culeron est raccourci, la selle est confortable, les étriers sont abaissés. Un jeune cavalier un visage pâle en imperméable en feutre serre les genoux dans les côtés du cheval, caresse la croupe par le kamtcha.
Le cheval de pelage roux d’autre cavalier est sans selle. Dressé, en s’adaptant au cheval bai, il tient la course régulière. Le cavalier a un air simplet, sont vêtement est usé.
Qui entre vous a volé dans la selle comme le vent? Ce, qui a galopé sur le cheval, sait: l’âme va à toute vitesse sur le ciel à tous les Saints!
Le garçon sur le cheval bai a mis son kamtcha et est en train d’examiner attentivement les chaînons qui se voyaient.
— Ohé, c’est fou! Il tombe une neige fine comme sur commande! Waouh! — un coup de hampe de kamtcha sur la tige.
— On ne peut rien dire, — s’est mis d’accord son compagnon de route.
— L’aigle royal est dressé?
— Il n’y a pas longtemps, une-deux semaines seulement...
— J’irais aujourd’hui!
— Mais que faire avec la neige?
— Vous ne pensez pas à l’oiseau...
C’est Bekbolate qui prenait les soins de la passion d’aigle royal. Son ami Akberguen qui était avec les chevaux en retard dans la ville se justifiait: il venait juste d’apprendre de son être alité à l’hôpital. Ils ont pris le thé et sont allés tout de suite dans la steppe, vers les aouls. Et il faut voire, il a neigé beaucoup avant leur départ!
Bekbolate a l’aigle royal et l’autour. Il n’a pas vu ses oiseux de chasse le siècle! Si on lui demande comme il faut à la rencontre, à propos des moutons — tout de suite il changera le sujet de la discussion sur les oiseux rapaces.
L'autre jour, Akberguen est allé à la chasse des lièvres — il lui fallait nourrir les oiseaux, et l’aigle royal laissé dans l’abandon après avoir fait tomber de ses yeux le petit abat-jour, s’est jeté sur le renard apprivoisé et s’est cassé deux pennes. «Que faire, aïe!». D’ailleurs, si on lisse l’aile, il paraît qu’on ne le voit pas... Mais Bekbolate comme toujours va examiner chaque plume, les pennes ainsi que celles qui couvrent la poitrine, et de gouvernail de la queue. Il a été obligé de l’avouer. Bekbolate s’est fâché.
Akberguen est un ami sincère de Bekbolate. Ils ont grandis ensemble. Dès les premiers pas ils suivaient l’un l’autre.
Akberguen avait à sa charge sa vieille mère, sa femme et personne d’autre, si on ne compte pas deux vaches et un petit cheval. Il commence à jeûner au mois sacré de Ramadan à la maison, mais il termine près du feu de bois dans la steppe. Car il s’occupe des aigles royaux, est le chasseur, le chanteur et en général un brave garçon. Bekbolate avait de confiance en lui plus qu’en quelqu’un d’autre, plus qu’en son père. Mais comment on peut faire autrement, Akberguen était dans la confidence. Tous les deux ils ont passé par toutes les épreuves à partir des peignées des garçons jusqu’au premier amour à une personne, ici est la chasse, les amusements, ils ont souffert la faim et éclataient de rire, se consumaient de chagrin, et survivaient.
Akberguen a trouvé la trace de renardeau et a attrapé dans le défilé désert à un verte de longueur. Il grimpait sur la falaise droite, on met le pied à peine de mauvaise façon et on va directement dans les mâchoires de la mort, mais il a atteint l’oiselet de l’aigle royal. Il a guetté trois jours avec le renardeau attaché près du nid de l’aigle royal, trois nuits, en crevant de gel à pierre fendre, il dormait là-bas, dans la gorge. En effrayant de faire prendre froid à l’oiselet déniché, il a enroulé l’aigle royal dans sa petite pelisse trouée. Se méfiant que le renardeau rusé n’atteigne pas l’oiselet, il courait jusqu’à l’hivernage, son pied a glissé sur la pierre et il a dégringolé et s’est cassé la clavicule. Il apprivoisait l’oiseau féroce — tout son bras est coupée par les serres. Le renardeau ainsi que l’oiselet sont pour Bekbolate. Tout est pour lui: il était responsable de lui aux années de jeunesse téméraires, piétinait le sentier au pays sans route, montrait les dents comme le loup, marchait à pas de loup, rampait comme un chien sous la yourte, tenait son cheval, comme le pal en fer. Qui encore est capable pour les sacrifices pareils, sauf lui? Qui le supportera?
Tout le vêtement d’Akberguen appartenait avant à Bekbolate, il se nourrissait de sa table, et son cheval lui a été offert par lui-même aussi. Bekbolate l’a marié aussi. Tout était en conformité avec les rêves d’Akberguen: et Bekbolate va se marier bientôt lui-même, il va vivre dans un aoul séparé, et près de lui dans une yourte discrète il lui fouettera le koumis, et en général se donnera beaucoup de peine pour le ménage de l’aoul de son ami. De quoi l’homme peut encore avoir besoin?
Si dans le monde sous la lune il y a une vraie amitié d’homme, c’est celle-ci, qui lie Bekbolate et Akberguen. Et elle est collée à demeure par une passion – la chasse, sans elle comme sans l’air, la vie est impossible; la chasse prenait tout: il n’y a pas de temps pour donner un coup de main dans le ménage, même pour les ébats amoureux ils regrettaient une minute; le père de Bekbolate les a appelé — «la paire de déraillés». Cependant ils avaient les caractères complètement différents.
Il y avait des circonstances dans lesquelles d’un seul coup Bekbolate commençait à manifester l’entêtement déplacé, ou se perdait, ou s’irritait extrêmement, Akberguen ne perdait jamais la raison, toujours il calmait le jeu par le mot nécessaire, il savait en général trouver une solution. Et dans les situations embarrassantes Bekbolate assez souvent recourait à l'aide d’Akberguen. Il pouvait vivre tranquillement et en harmonie, mais grâce à son ami il se faisait écharper toujours, et Bekbolate se sentait dans son tort. Mais Akberguen était à cent pas d’éviter les ennuis tombés sur sa tête à cause de Bekbolate, si je peux, croyait-il, tenir ferme, lever, se tortiller au nom de mon ami, donc cela doit être comme ça. Sans Akberguen cette passion de Bekbolate l’aurait été cent fois détruite, mais s’il n’y avait pas eu de Bekbolate, qui serait devenu Akberguen? Rien et personne, Ils complétaient l’un l’autre, ils n’étaient qu’un en deux corps, si on peut dire comme ça du sabot et du fer à cheval.
«Là où il y a le compte, il n’y a pas d’amitié», — on entend souvent lors de la tablée amicale. Ne croyez pas, tout a son compte. Et on n’a pas rencontré les amis qui ne font pas leurs comptes. Tout simplement les listes de leurs intérêts personnels et des pertes sont remplies profondément sous la peau, et il n’est pas dans l’usage d’en parler. Si les amis assurent qu’ils ne savent pas et ne veulent pas savoir, qui effectivement doit à qui et par quoi, donc alors, ou les deux sont très rusés, ou les crétins désespérés. Il n’y a aucune éternelle amitié d’homme, qui n’oblige à rien. Parce qu’il n’y a pas de tel homme qui serait prêt à oublier complètement ses intérêts, si on ne parle pas des crétins mentionnés ci-dessus.
Dans la ville Bekbolate et Akberguen ont eu du temps uniquement pour s’échanger de quelques mots sur la santé et la vie des proches, dès le soir ils n’ont pas pu parler à cœur ouvert dans la maison de Toléguen. Voilà seulement maintenant dans les selles à la steppe la conversation cordiale est liée. De quoi parle Bekbolate? Bien sûr, d’Akbilek. Mais tout d’abord il a commencé à parler de ces oiseaux. Il ne pouvait pas comprendre comment on pouvait ne pas surveiller l’aigle royal... Mais enfin, Akberguen a coupé:
— Et nous alors, ces jours-là on pensait aux oiseaux, ou quoi? Bekbolate s’est mis d’accord tout de suite:
— Oui, c’était de la folie. C’est comme si les étoiles se sont détournées de nous... il paraît que la neige est tombée régulièrement, mais regarde, là-bas les traces des lièvres ne sont pas précises... Qui pouvait penser que tel malheur peut tomber sur moi?
— Hé, là où Dieu veut, il pleut... Elle est aussi malheureuse, — a répondu Akberguen en devinant les pensées.
— Qu’est-ce que tu veux dire, qu’est-ce que signifie «malheureuse»? Parce qu’elle est tombée dans les pattes des Russes ou quoi? — a demandé Bekbolate en regardant attentivement le visage de son ami.
— Mais comment on peut l’appeler autrement? Tout est clair, les gens en parlent... Déshonorée.
Bekbolate a commencé à se fâcher et a remarqué avec irritation:
— Mais qui pourrait conserver son honneur dans ce cas? C'est la faute à pas de chance.
— Hé, c’est le destin. Qui pourrait penser, qu’elle ne verra pas le foulard de fiancée?
Bekbolate a souri malicieusement en comprenant où voulait en venir son ami.
— À quoi tu la mènes?
— À rien, — a souri malicieusement Akberguen. C’est clair: il n’a pas osé de dire que maintenant il n’est pas question du mariage avec Akbilek.
— Qu’est-ce que tu t’es mis dans ta tête? Je n’ai rien à avoir honte! — a crié mécontentement Bekbolate.
Le visage d’Akberguen a gelé, il gèle quand même... Il a commencé à parler d’un ton ferme, mais en bougeant les lèvres à peine:
— Je ne pensais pas te faire honte. Tu sais bien, je n'en ai pas besoin. Tout simplement je ne sais pas quoi dire... Et toi-même qu’est-ce que tu en penses? Avant de te fâcher il vaut mieux m’expliquer, à l’inintelligent... Qu’est-ce qu’on va faire? Ma caboche noire ne pouvait même pas s’imaginer, que les choses pareilles sont possibles au monde...
Après telle tirade le cœur de Bekbolate a adouci. Il a serré son ami sans ses bras, il voulait même l’embrasser, ce qu’il n’a jamais fait de la vie, mais il a changé d’avis.
— D’abord est Dieu et ensuite tu es, mon ami, le plus proche à moi. Jamais je ne cachais rien de toi. Et maintenant je ne vais pas le faire. À part toi je n’ai personne à demander le conseil. Je pense à elle... J’aurais dû te demander à propos de mon père, ma mère, mais je demande à propos d’Akbilek… et je ne peux pas de ne pas parler d’elle, et je ne suis pas heureux de parler. Mais tu le vois toi-même... Alors, voilà où en sont les choses...
Et il s’est mis à parler, après avoir commencé par les rêves de la jeunesse sur la belle jeune fille; qu’après avoir vu Akbilek il a été tué raide... il a écrit tout un poème pendant la marche. Et il l’a terminé de la manière suivante:
— Ce qui est arrivé, est arrivé. Est-ce qu’il est écrit sur mon front que je suis malchanceux? Quoique... je ne sais pas. Mais de toute façon il faut se marier. Mais chercher une autre fiancée, envoyer le père pour rechercher en mariage... oh! la barbe! Là où Dieu veut, il pleut, en tout état de cause, que les gens disent ce qu’ils veulent, mais je fais ma vie moi-même... je veux la marier, — et il s’est tu, après avoir soupiré.
Pendant que Bekbolate était en train de parler, Akberguen faisait des signes de tête affirmatifs avec un air entendu et faisait chorus : «Hé, hé», disons, tu as raison en tout. Mais quand il s’est tu, il a commencé à avouer et assurer, qu’à partir de cette minute il était de concert avec lui. Mais à la différence de Bekbolate il ne parlait pas avec force détails et émotions, mais posément. Il a souligné:
— Mais si tu as cette intention, qu’est-ce qu’on peut dire contre? L’ami est unique, comme on dit, les ennemis sont nombreux... Et ce sont eux qu’il faut s’en méfier, il faut qu’on pense, qu’on pèse le pour, où garder le silence, à qui dire quoi, amener tout de telle façon, que tout soit correct... Ton amour est ta loi.
Bien sûr la loi est un mot fort, mais de toute façon Bekbolate sentait qu’il doit se justifier même devant son ami le plus proche:
— Comme Dieu disposera... et il me reste à vivre. Ce n’est pas de ma faute ce qui est arrivé. Le malheur est tombé du ciel. Qui peut en couvrir? À vrai dire, est-ce qu’il y a beaucoup de femmes aux alentours, que les soldats russes n’ont pas serrées? Toutes les armées ont passé: blanche, rouge, noire... Mais je n’ai pas entendu parler que quelqu’une d’elles s’est déclarée une femme dépravée. Même dans le nid intact on trouve un œuf clivé. Même la terre se fend... Et aujourd’hui tout ce qu’on aime est défiguré par la lame, — il lui a apparu qu’ici il a complètement tué son ami par les arguments.
«L’honneur du défiguré», — a pensé Akberguen, mais n’a pas commencé à discuter de nouveau.
— Mais alors, qu’est-ce que les gens vont dire? Et nos familles comment vont réagir?
— Les gens ont déjà dit, qu’est-ce qu’ils ont à ajouter encore. Je n’ai pas d’oreille en trop pour écouter tout ce que les gens disent... Ceux qui n’ont pas pu préserver leurs filles et leurs sœurs eux-mêmes, seront heureux d’entendre à propos d’Akbilek. Ils vont se réjouir du malheur d'autrui un peu, d’ailleurs laissons-les faire. Et les parents qui nous sympathisent, soient un tout petit peu, ne vont pas me désapprouver pour le moment. Et de la part d’Akbilek, ils vont garder le silence aussi. Et en général, il vaut mieux se marier avec Akbilek, et non pas avec quelque Tonneau.
Les amis se sont éclatés de rire. Il était dans leur aoul une vieille fille — stupide, criarde, bancale, avec le ventre gonflé. On t’a prise pour une femme, réjouis silencieusement et mes au monde des enfants, non: il n’y avait pas de conversation où la bancale ne déclarait pas qu’elle était la fille chaste quand elle s’était mariée jeune. Les béjaunes Bekbolate et Akberguen taquinaient cette femme affreuse comme la mort, avec quelque acharnement stupide, cruellement au dernier point.
La voie restante jusqu’à l’aoul les djiguites ont parlé uniquement des femmes. Ce sujet pour les jeunes hommes est sans fin. Il n’est pas capable de fatiguer nos deux héros, surtout quand il s’agissait des personnes accommodantes. Pour nous, il faut l’avouer, il est déjà ennuyeux. Alors, on ne va pas le développer.
Les djiguites contents bavardent, rient aux éclats.
Le cœur de Bakbolate est devenu un peu plus léger.
Baltache est entré dans le bureau.
La table est couverte par la toile rouge. L’encrier est en pierre grise tachetée, un petit verre pour les stylos, un chandelier, des trombones. La chaise est couverte de velours. Les meubles sont polis. La table est énorme, on peut y mettre une tente. À droit est le portrait de Lénine, à gauche – de Staline. Le téléphone est sur la table. On tend le bras il y a un bouton électrique. On presse par le doigt, le secrétaire arrive par l’appel avec la tête baissée.
Voilà dans quel bureau est entré Baltache.
Le fauteuil ainsi que la chaise sont installées confortablement, n’est pas pire que la calèche: «Assis-toi et vas-y!».
Baltache a mis sa serviette sur la table, a déplissé les joues par la main et assis dans le fauteuil souple, s’est rejeté sur le dos. Il a écarté la manche du veston avec les petits boutons et a regardé la montre. Il est dix heures. Il a tiré le tas de papiers du bord gauche et a commencer à les tondre successivement par la plume comme on tond les moutons. Sur une feuille il adopte une résolution: «À étudier», sur le deuxième: «À vérifier», sur le troisième: «À mettre pour la réunion», sur le suivant: «Il n’y a pas de financement», sans oublier les décisions telles que «À examiner», «À revenir à ce sujet». On a frappé à la porte.
— Puis-je?
Le solliciteur était le chef du département financier, le financier du district Schtein. Il s’est assis et a commencé à remuer les mains, comme le magicien, dans lesquelles les papiers apparaissaient et disparaissaient. Il n’est pas clair, comment cela s’est passé — mais n’étant pas d’accord avec lui sur toutes les questions, Baltache finalement a signé: «Je n'ai pas d'objections», et il lui est arrivé de mettre la signature juste après avoir prononcé: «Ah?..». Baltache n’est pas un expert en finances. Le sens des mots bizarres: «le budget», «le débit et le crédit», «le plan trimestriel» le passe. Comme un travailleur responsable il craignait de faire une gaffe au travail, mais toujours il y a un papier qui sort, où elle pouvait glisser, mais comment, de quelle façon — il ne pouvait pas s’imaginer. Cependant, il n’osait pas contredire aux arguments des spécialistes pareils avec le nom se terminant en «...schtein». Ils sont habiles. Et il n’y a aucuns accrocs ici. La veille il a essayé d’analyser tout seul une facture, il l’a décomposée de milles façons. Tout de suite les chiffres faux se sont jetés sur les yeux, mais Schtein s’est mis à jacasser et recalculer, qu’il a eu le contraire, toutes les colonnes des chiffres ont coïncidé, chez le teneur de livres pareil «le débit et le crédit» coïncide toujours.
Dès que Schtein a quitté le bureau, Baltache s’est frotté le crâne et a dit:
— C'est révoltant, ils trouvent toujours quelque raison pour obtenir de l’argent, les salauds.
La réception a commencé. Il a autorisé à contrecœur un solliciteur de donner la main, devant les autres il se tenait fermement sur ses talons, ensuite il s’essayait de nouveau, signait les papiers à quelqu’un, refusait sévèrement à quelqu’un d’autre.
À ce moment Typan est arrivé en courant au bureau et ayant penché le front comme la gazelle à goitre, a serré posément la main de commissaire par sa main soignée douce avec l’amour fidèle.
— Comment ça va? — il a souri avec précaution.
Quand même à partir d’hier soir il y avait quelque incertitude et elle s’est mise à l’inquiéter dès le matin: peut-être, sous l’influence des vapeurs d’alcool il avait dit quelque chose de trop, qu’il s’est conduit d’une mauvaise façon... C’est pourquoi il se démenait comme un diable dans un bénitier. Et il n’a pas manqué à rendre perplexe à tout hasard:
— Aujourd’hui vous faîtes un rapport, — et il a tendu quelques feuilles de papier.
À l’intérieur de Baltache tout s’est écroulé jusqu’au rectum. Vous pensez qu’il avait peur? Ou parce qu’il connaissait lui-même une appréciation médiocre de ce qu’il a fait? Non. Il a fait les rapports plusieurs fois sans aucun effet pour son poste, mais les personnes importantes étaient derrière lui. Tout simplement n’importe quel rapport provoque le tremblement à notre employé. Et son derrière n’est pas tranquille avant qu’il ne prenne pas la parole, et ne le termine pas. Faire le rapport pour la réunion, je dois vous dire, que ce n’est pas plus simple que passer de l’enfer au paradis sur le cheveu fin de pont.
Baltache ordonne:
— Préparez tous les documents en ordre dû.
— Cela va être fait, — il a fait un signe de tête et est sorti. Il paraît l’affaire est mise sur ses railles, mais le chaos avant le rapport inquiète le fond de Baltache, se soulève vers la gorge, demande la tribune. Le visage de Baltache devient plus sévère. Le garçon camard aux yeux à fleur de tête l’a retrouvé comme ça quand il est entré dans le bureau. Et en marche:
— Comment allez-vous, camarade? — et lui a tendu la main au-dessus de la table.
Le commissaire, saisi par l’inquiétude de travail, n’a pas aimé la gueule et le sans-gêne, avec lesquels la main de ce Kazakh de steppe a été tendue. Baltache, en ne le regardant pas, a dit:
— M-m-m...
La personne entrée était Moukache.
Baltache connaissait la raison de l’arrivé de Moukache. Malgré que le solliciteur soit une personne parfaite, mais le fait, qu’il est solliciteur, ne provoque pas déjà plus de sympathie. En plus hier Akbala a laissé entendre clairement, qu’il faut encore tirer au clair tel que Moukache. Pour cela Baltache ne lui a pas proposé de s’assoir, mais il ne l’a pas mis à la porte tout de suite. Moukache a eu la hardiesse de s’approcher de la table et de s’assoir tout seul. Baltache a jeté un coup d’œil sur lui. La poitrine est bombée, il presque mange des yeux les autorités: voilà, je suis prêt à la lutte pour le pouvoir des Soviets. Et l’exigence régulière a suivi cet air:
— Vas-y, camarade! Quelle décision a été prise à mon égard? Et il était clair d’après ses yeux — il savait, que les membres de bureau n’avaient pas eu d’objection pour son nouveau poste.
— Qu’est-ce que tu veux? Où est-ce que tu veux servir?
— Comment, où servir? On peut servir uniquement pour le bien du peuple.
— Tu veux travailler parmi les masses d’aoul ou dans la ville?
— Pour la ville je n’ai pas assez de formation. Il sera juste parmi le peuple d’aoul.
— Et au milieu du peuple en qualité de qui?
— À l’heure actuelle chacun veut devenir volostenoy. Nous aussi désirons être à ce poste.
— Hé-hé, donc, tu veux devenir volostenoy?
— Mais pourquoi ne deviendrais-je, si je suis foutu comme quat'sous? Avant les volostenoys ont été les bays... Maintenant c’est notre pouvoir, et nous devons être volostenoys, — et il a souri.
Baltache n’aime ni ses mots, ni son aplomb. Il demande:
— Dans quel but tu t’es inscrit au parti?
Cette question a paru à Moukache une tentative évidente de se débarrasser de lui. Une expression s’est manifestée sur son visage: «Tu es tombé de quelle montagne, tu me contrôles?», mais la langue bouge plus doucement:
— Mais quel pouvait être mon but? Nous nous sommes inscrits, pour défendre les pauvres et les proposer pour le service, enlever le bétail aux riches et le distribuer aux pauvres. Nous sommes opprimés. Nous étions les valets. On subissait le joug, on travaillait d'arrache-pied pour les riches. Est-ce qu’aujourd’hui notre jour n’est pas arrivé? — et il a écarquillé les yeux.
Baltache a pensé: «Doga avait raison, ce salaud ne veut qu’empocher, et ce n’a pas d’impotence où et à qui». C’est sa nature. Baltache est assis dans son fauteuil et pèse la situation: tantôt il ajoute le poids des principes de parti, et il le retire. Quelque chose n’équilibrait pas, et il a dû réfléchir à haute voix, et s’il laisse échapper un secret, le salaud, et décide son destin lui-même:
— Si le parti connaissait dès le début tes buts, il ne te laisserait jamais t’approcher des masses... Tu as offensé plusieurs personnes... — est-ce qu’il va s’effacer ou pas?
Cependant Moukache, on sait, n’est pas timide. En se levant il demande insolemment:
— Alors, il n’y a pas de poste pour moi? Baltache a proposé:
— Tu veux être un milicien? Moukache a secoué la tête:
— Non. Quel effronté!
— Si tu ne veux pas, va-t-en, — et lui a fait un signe de main.
— On va voir! — Moukache a frappé de la porte.
Il est sorti, a juré Baltache, a sauté dans la selle et a dirigé le cheval vers l’immeuble du bureau de parti. Dans l’immeuble connu il s’est dirigé au camarade Ivanov, le vieux maigre membre de parti. Devant la porte du camarade Ivanov quelques personnes languissaient. Moukache a tiré tout de suite la poignée de la porte, mais d’un coup un Russe au visage d’enfant l’a tiré par l’épaule et l’a déplacé en arrière: «Chacun à son tour». Rien à faire, il a posé le kamtcha, les mains au dos, et, après avoir fixé le regard sur le mur, s’est mis à patienter. Devant lui était un professeur habillé à la tatare. D’où le professeur pouvait savoir, que devant lui était le futur volostenoy! Il ennuie par sa question:
— Camarade, vous êtes d’où?
— Qu’est-ce que tu veux? — Moukache a levé le menton.
— Tout simplement j’ai pensé, que si vous êtes de Torbagataya, on pourrait revenir ensemble. Je travaille comme professeur là-bas...
Moukache a cru inutile de répondre, il a seulement fait claquer sa langue contre le palais et a fait un signe négatif de tête.
Tout de même le petit professeur a passé devant lui. Mais voilà est son tour. Il est entré avec enthousiasme.
— Moukachka! — a exclamé Ivanov et lui a serré la main. En agitant le kamtcha Moukache, comme il pouvait, s’est mis à exposer l’histoire sur le fait, comment on ne lui a pas donné le poste:
— Est-ce que le pouvoir soviétique, comme on disait, n’est pas pour la pauvreté? S’il est pour la pauvreté, moi je suis le plus pauvre des pauvres. Mais qui a luttait pour le pouvoir Soviétique plus que moi? Et celui-ci fait le grand seigneur? Pourquoi il fait du fla-fla, ce Baltache? Même s’il a fait ses études, il n’a pas de droit de m’envoyer me promener. Il ne m’a pas nommé, il y aura celui-ci, qui va nommer!
— Et qu’est-ce qu’il veut?
— Mais il ne veut pas entendre. Il est quelque bourgeois, peut-être.
— Quel bourgeois? — a exclamé Ivanov, a tendu sa main vers le téléphone et a demandé au commutateur le camarade Baltache.
Moukache reste debout et écoute.
«Quels documents? Mais laissez, laissez... je sais... les paroles vides... laissez, s’il vous plaît, ça ne va pas...»
Il écoute, mais ne comprend pas, ce qu’il faut laisser et ce qui ne va pas. Mais quand même d’après l’expression mécontente du visage d’Ivanov, et d’après ses gestes il voyait, que le secrétaire était de sa part.
Ivanov a coupé avec bruit et a dit:
— Attends. Demain on va voir à la réunion. Tu vas être volostenoy à Sartaou.
Moukache a dit mal à propos: «pojalysta» (s’il vous plaît), a serré fortement la main et, en craignant qu’il a trop serré les petits os de la main d’Ivanov, est sorti dehors.
Dans la rue il a rencontré sa vieille connaissance, qui a déjà été agent, milicien, instructeur. Il parle russe mieux que Moukache, un débrouillard. Ils ont entamé la conversation:
— Mes félicitations! Tu es devenu volostenoy!
— Qui t’as dit?
— Les gens de Sartaou en parlent.
— Pas encore.
— Aïebay! Si c’est comme ça, sache, il y a les gens, qui prennent fait et cause pour toi, ils s’intéressent à toi.
-Qui?
Le copain a amené Moukache, amolli tout de suite, dans la cour d’hôpital chez le Brillant. Le détenu d’hôpital, attendant Moukache il y a beau temps, l’a serré dans ses bras et s’est mis à le flatter en précipitant les mots et critiquer ses ennemis, tout d’abord Aben Matayina:
— N’accepte pas moins que le poste de volostenoy, n’accepte pas! Quoi qu’il en soit, de toute façon nous te mettrons volostenoy à Sartaou. Ce qu’il te faut faire c’est rentrer dans le suif au chef des bays, cet Aben! Si tu as besoin d’un conseil judicieux, n’hésite pas, demande-moi! Nous sommes avec toi, mais nous ferons tout pour toi!
Le Brillant à cause de sa « maladie » n’ayant pas le droit de sortir hors l’hôpital, a ordonné l’ex-instructeur: «Reçois le camarade Moukache comme un invité chez toi, fais tout ce qu’il te demande». L’autre a amené Moukache à la maison de sa connaissance dans la banlieue, a dit de cuire la viande pour l’invité, lui a donné à boire de l’eau-de-vie et n’a pas oublié de nourrir le cheval. On lui a glissé dans la poche « une petite douce», et on lui a trouvé une jolie petite femme accommodante. Moukache tend ses lèvres vers elle. Moukache est content, il est déjà volostenoy! Et il s’est mis à faire le fanfaron et faire des projets! Le camarade Ivanov fait ses cours, il va conduire tout le bétail de bay Aben aux marchés de viande de la ville — il va stocker l’argent dans les sacs, parce qu’il est le pouvoir!
Le lendemain il arrive voir Ivanov de nouveau.
Ivanov est complètement différent, il ne l’a pas salué amicalement comme hier: «Moukachka!», et ne lui a pas serré la main, mais l’a salué froidement et a demandé:
— Tu veux avoir quel travail?
Moulache a répété sa demande avec perplexité. Ivanov a secoué la tête:
— Tu veux devenir un agent?
Moukache ne désirait pas être un agent. Comment donc, mais à partir d’hier soir personne ne l’appelait autrement que monsieur-camarade volostenoy.
Ivanov tantôt a toussé, tantôt a dit sèchement:
— Dans ce cas, reviens chez toi. Si on a besoin de toi, on t’appellera.
Moukache ne se rappelle pas comment il s’est retrouvé dans la rue.
Voilà ce qui s’est passé: Baltache a parlé immédiatement avec Toléguen, celui-ci a vu Doga et Typan. Ils ont trouvé leur personne au TcheKa et ont envoyé un des agents secrets à tenir en observation Moukache. L’autre a reflété scrupuleusement tout dans le rapport: où Moukache était allé, avec qui il avait eu un rendez-vous, de quoi ils avaient parlé, chez qui il avait été invité, avec qui il avait bu, et avec qui il avait couché. Et le matin ce rapport de TchéKa s’est retrouvé sur le bureau d’Ivanov, et l’autre avait de quoi être figé. Il ne pouvait pas s’agir de la question de Moukache lors du bureau de parti, il restait seulement être d’accord avec la proposition de vérifier l’ancien travail de Moukache. Le camarade Ivanov a toussé et a pensé: «Qu'il aille au diable! Il ne faut pas me mêler dans leurs affaires kazakhes».
Moukache, stupéfié, s’est précipité chez le Brillant et lui a exposé tous ses ennuis. Après avoir appris l’avis d’Ivanov, l’autre ne s’est pas mis à s'affairer auprès de volostenoy manqué comme hier. Il a seulement consolé:
— Ici une seule bande de famille procède. Occupe-toi de tes affaires pour instant, là où tu as fait des traces, on te couvrira.
Moukache a flâné dans la ville encore quelque jours, il a essayé de fourrer son nez tantôt dans un bureau, tantôt dans l’autre, mais sans résultat, et il a été obligé de rentrer bredouille et regagner ses pénates.
Troisième partie
TRISTESSE
Et voilà, il y a cinq jours depuis qu’Akbilek est revenue à la maison. Et sa seule occupation était la suivante: elle rencontrait sous le foulard noir les femmes arrivées chez elle avec les compassions, les sanglots, les soupires navrants et les hélas, les larmes coulantes comme l’eau du pot à eau, qu’elle penchait elle-même au-dessus des mains de ces voisines. Elle met la nappe, offre le repas, mais elle se replie sur elle-même, une seule chose qu’elle peut manger c’est un petit morceau de galette, elle erre à l'aventure dans la steppe et de nouveau reste assise de côté des autres avec la tête baissée
Tout est différant qu’avant.
Mon truité est allé loin,
Je n’ai qu’amulette de maman.
Nous nous sommes séparées pour toujours,
La joie s’est cachée pour cent ans.
Le fossé s’est ouvert devant la porte,
Seulement les oies y trouveront leur abri.
J’ai perdu ma maman bien aimée,
Pleine de tristesse, je reste assise sans paroles.
Ces sanglots ont lui été enseignés par les bonnes tantines, les gens arrivent, il faut rassembler ses esprits, pleurer tristement que possible, de manière la plus déchirante. Tant que les tantines ordonnaient, Akbilek procédait. En effet les lignes «Mon truité est allé loin...», «Le fossé s’est ouvert devant la porte...» lui paraissaient absurdes, même vides, sans aucun sens. Mais en pleurant sans cesse, elle a remarqué, qu’entre la tristesse qui a niché dans son cœur, et ces mots absurdes un petit pont a commencé à se tendre.
D’abord elle s’étonnait: «Les Saint, ohé! Et comment les femmes peuvent pleurer sans cesse leurs sanglots, quand le cœur reste à travers la gorge?»
À partir du moment quand elle a vu l’oncle Amyr, et ensuite son père, les femmes d’aoul, elle est devenue presque muette, elle ne sait pas dire "fève", elle n’arrêtait pas de se cacher dans les coins. Dans quelques jours elle a appris auprès de ces tantines les chants de deuil, griffait son visage et ne courait pas de tout le monde. Sa conduite précédente lui a paru déjà de l’enfantillage, une stupidité absurde. Mais, dans ses pensées elle se calmait: «Est-ce que les gens ne comprenaient pas le premier jour, comment je brûlais de honte, je ne me cachais pas par bêtise de chaque rayon de soleil, me taisais comme la personne muette?»
Dès qu’elle est entrée dans l’aoul, les femmes l’ont prise sous les bras et l’ont traînée, tombante, chez le père. Elles s’accrochaient, déchiraient, tiraient chacune vers elle-même, comme lors de kek-beru[16], et elle, se tourmentant comme un oiselet dans les mains tenaces de celles qu’elle jadis même n’apercevait pas, a été à bout de forces, a failli de devenir folle. Et elles crient de tous les côtés sans cesse: «Chérie, aïe!», «Notre bien aimée, aïe!», «Tu es notre petite larme!», «Notre soleil!», «Man petit âme!», et elles étranglent dans leurs étreintes, caressent, crient dans la figure la même chose; elle lavaient son petit visage, en la tenant fortement par son cou fin, elles ont failli tordre ses bras, se sont mises à la faire manger: «Mange, mange, chérie!» — et elles se penchaient au-dessus d’elle, presqu’en évanouissant, plaignaient, prenaient soin d’elle. Est-ce qu’il n’y a pas parmi elles telles, qui, à contrecœur, lui permettraient, à celle, qui a imploré la vie, de poser le pied à terre pure des ses contreforts? Elle a survécu en vain, c’est sûr, parce que qui elle est maintenant, si elle n’est pas un vase lâché par le chien, il est clair pour elle-même: elle est une femme déchue par le corps et par l’âme...
Comment elle va toucher le visage de son père saint par ses mauvaises lèvres couvertes de baisers? Comment elle va entrer dans la maison paternelle, bénie comme la mosquée, sans avoir peur de colère de Diu? Elle va marcher de pieds serrés par l’infidèle, sur le plancher où on met un tapis de prière? Comment à table elle pourra tendre ses mains, couvertes de salive des baisers, qui ont étreint le kâfir, au plat familial?
Mais pourquoi tu n’y as pas pensé avant! Il fallait te rappeler! Elle a passé son âme tremblante, les Saints, ohé! Qu’est-ce qu’on pense maintenant de moi? Il est trop tard, est-ce qu’on peut trouver soit une personne, qui croit, que je suis revenue tellement propre que j’étais avant? Personne n’y pense, qu’est-ce qu’ils ont à voir de mon âme, mais ils vont penser, dès qu’ils vont me voir: «Oui c’est celle... une grue, qui a été sous la foule des Russes!» Et peut-être, ils vont jeter cela dans la figure de mon père!
Mais quoi qu’il en soit, Akbilek s’est fiée à tout le bon, ce qui se passait autour d’elle, elle ressentait tous de la famille: on me plaint, on m’aime encore. Et voilà dans l’aoul, qui l’a accueillie cordialement ont exprimé le dernier: «Chérie!», «Notre rayon de soleil!», et la mer de tristesse répondue devant elle a reculé, il paraît, les pensées lourdes, la faisant souffrir et battant dans les tempes au moment de son arrivée à l’aoul: la sale vilaine pétasse... il paraît qu’elle s’est couverte de cendre, ils ont commencé à oublier. «Pour vain j’ai couvert ma tête du bouillard noir, pour vain j’ai pensé, que les gens allaient faire le dégoûté de moi, mépriser, reprocher... Je suis restée la même petite fille...» — et elle s’est calmée.
Les jours passent l’un après l’autre.
Tout, le murmure des feuilles, le clapotis de l’eau, l’ébrouement de la chamaille, berce Akbilek, comme on couvre par la couverture et roule la tristesse... quelque part tout près, on entend le mémento sur le voisin qui est mort depuis longtemps, une personne digne: «...Allah yakhdou... au nom d’Allah... nous sommes les esclaves d’Allah...», en lui amenant le calme. La nature de femme est increvable. Mais de toute façon quelque chose lourde bat son âme, et cela juxtapose, juxtapose...
La vie coule, et ceux qui bénissaient la fille sauvée sont devenus moins nombreux. On a commencé de cuisiner moins. Et par conséquence, moins de femmes voisines venaient à la maison. Seulement sa tante Ourkiya, qui aimait Akbilek, ne la quittait pas. C’est elle, après la mort de la mère d’Akbilek, qui gérait le ménage. Elle arrivait à suivre tout, et réussissait toujours. Et elle prenait soins des enfants.
Vous demandez: quels enfants? C’est vrai, on les a oublié, ohé. Akbilek avait encore un frère de douze ans Kajéken et une sœur de sept ans Sarah. A vrai dire, Akbilek a commencé à s'affliger du fait qu’ils sont devenus orphelins, que de son malheur. Kajéken, comme amateur de jeux, courait sans cesse quelque part avec les gamins. Et la chérie Sarah, jolie à merveille, on dirait s’est collée à Akbilek, elle s’assoie près d’elle décoiffée, et elle reste assise, sans bouger. Hé, la petite pauvre, aïe! Les souffrances suivantes arrivent, Kajéken n’entre pas à la porte. Mais, dès qu’Akbilek se met à pleurer, Sarah pleure avec elle tout de suite. Kajéken restait toujours le béjaune frétillon, mais Sarah s’est apaisée, a maigri. Dès que le cœur devient plus léger, Akbilek essaye de laver toutes les robes de sa petite sœur, de raccommoder, de mettre les boutons déchirés; elle lui lave la tête, l’installe sur ses genoux et la peigne fin, en cherchant les poux.
Le père n’était pas bavard avant, mais maintenant il s’est tu complètement. À moins qu’il demande le travailleur: «Est-ce que les chameaux sont revenus?» et ordonne brièvement: «ce colis est à mettre à la maison». Parfois il appelle Kajéken, l’installe sur le cheval et lui ordonne de conduire les veaux. Il n’a jamais parlé avec Akbilek après son retour. Au début il éviter de regarder dans sa direction. Avant il suffisait à sa fille de s’éloigner, il s’inquiéter tout de suite: «Mais où est Akbilek?» Il l’appelle et demande quelque chose, mais s’il n’y avait pas du tout de quoi parler, lui demande d’aider la mère. Parfois Akbilek se permettait de ne pas entendre ce qu’on lui ordonnait, mais elle s’assoyait près du père. Il l’embrasse sur le front: «Ma chérie, emmitoufle les reins, boutonne-toi, les courants d’air sont partout», — et il n’a plus besoin de rien, il est content.
Ni paroles affectueuses, ni regard doux, rien n’est resté. Akbilek le justifiait à part soi: «Il s'ennuie de la maman... Les étrangers sont à la maison, c’est pourquoi il se tait...» — mais cela n’aidait pas, de toute façon le silence du père l’offensait et la chagrinait. Il a commencé à lui sembler qu’il évitait exprès, et sa présence avec lui dans la même pièce lui pesait, comme s’il y avait un serpent entre eux. Il n’y avait pas de gué à lui, on ne peut pas se glisser dans le trou qui l’a caché. Il ne lui restait qu’attendre: quand le cœur de père va dégeler, quand il va sourire de nouveau, quand il va dire soit un seul mot... Elle reste assise et sans aucune espoir cherche à trouver par les yeux noirs le regard de son père. Et il lui paraît: il lui suffit de jeter un coup d’œil sur elle, et la tristesse va disparaitre, et elle va devenir plus heureuse. Mais il ne tourne pas même le visage vers elle.
La tristesse.
Sur la butte de steppe il n’y a pas de salut de la tristesse, elle sort avec Sarah, la serre contre elle, et les larmes coulent comme les perles. La petite sœur ne comprend pas pourquoi, pourquoi Akbilek pleure, elle la regarde avec la peur: «Arrête... arrête». Akbilek rassemble ses esprits, essuie les larmes, passe sa main sur la tête de la sœur. Elle reste comme ça un moment, et de nouveau il pleut de larmes.
La tristesse d’Akbilek n’arrêtait pas de grandir. Elle a grossi tellement, qu’elle n’entrait plus dans elle. À qui s’adresser? Avec qui parler? Mais qui est là? Il n’y avait que sa tante Ourkiya, qui la connaissait dès l’enfance.
Ourkiya est la femme d’Amyr, le neveu de Mamyrbay. Amyr passait pour une personne très croyante, la sainte nitouche. Ourkiya est mariée avec lui depuis dix ans, et elle a vingt-sept ans. Elle est une femme parfaite, à moins que Dieu ne lui a donné de ses propres enfants. Uniquement à elle, la mère d’Akbilek confiait ses enfants quand elle partait, disons, rester en visite dans l’aoul lointaine.
Mais qui si ce n’est pas la tante Ourkiya, la plus aimée après la maman, qui va se rappeler d’Akbilek? Elle va et la cherche. Une fois, après l’avoir trouvée sous la hauteur déserte, elle s’est assise à côté: «Et alors?» Et Akbilek lui a raconté à propos de son offense. L’autre l’a écoutée et a dit:
— Chérie, je n’ai rien vu de pareil, comment on peut ne pas t’aimer? Et lui, il aime. De sa propre manière.
Elle a dit, mais elle a deviné que l’aksakal a commencé à traiter sa fille plus froidement. Elle comprenait: rien ne pouvait consoler Akbilek et, ayant baissé la tête, s’est mise à tordre l’herbe qui poussait à côté. Elle s’est mise à réfléchir ne sachant pas s’il fallait dire à Akbilek à propos de son soupçon ou pas. Akbilek l’a anticipée:
— Mais moi je le remarque. Il me voit et il se tient à l'écart de moi. Comme d’un étranger. Pourquoi tu ne le vois pas? Toi, bien-sûr, tu vois. Hier on était assises avec Sarah silencieusement, il est entré, nous a vues et est ressorti tout de suite. Et toi tu es entrée tout de suite. Tu sais, mais tu ne me dis pas. Tu as peur de me chagriner... Tu penses, que je ne comprends rien? Tu es la seule, avec qui je peux encore parler. Est-ce que toi aussi, tu vas arrêter d’être sincère avec moi? — a dit Akbilek et a commencé à pleurer.
Et Ourkiya a commencé à parler avec elle. Elle parle à travers les larmes:
— Mon petit cœur, ohé! Est-ce que avec ce visage j’essayerai de te cacher quelque chose... Même si je vois quelque chose, c’est vrai, j’ai peur de te chagriner... Aïe, aïe! Qu’est-ce que je peux faire! Mais qu’est-ce qui lui arrive, chérie! Qui sait, ce que les hommes grands que lui ont à leur tête? Chérie, ohé! Comprends-le, toi aussi. Tu penses, qu’il ne comprend pas, pourquoi les gens s’attirent à votre maison? Tout le monde qui vient, écarquille ses yeux sur toi: «Comment elle est maintenant, après les Russes? Est-ce qu’elle a changé? Ou pas? Il est intéressent ... comment ça se fait chez les Russes?» — elle a avalé les larmes. — Dès qu’ils se fixent leur regard sur toi, mon cœur se serre et brûle... Mais qu’est-ce qui se passe avec son cœur, tu t’imagines?
Elle parle, blâme, mais les mêmes questions tournent dans la tête d’Ourkiya: «Qu’est-ce qu’ils t’ont faite?» Elle est tentée de demander, mais elle craint, que sa bouche tordra. Mais avant la peur elle plaint la pauvre, on ne peut pas l’offenser, la pauvre...
Akbilek s’est étonnée, ses larmes se sont séchées tout de suite dans les yeux agrandis, comme s’il avait quelque chose fantastique qui a raisonné. Et de nouveau, comme la coulée de boue de défilé Karachatskoyé, les jours y passés ont passé en cout de vent devant elle.
— Personne ne croyait que tu reviendrais vivante... Nous-mêmes, nous avons perdu tout l’espoir... On pensait, les Russes — qu’est-ce qu’on peut attendre de leur part — ils t’ont tuée et quittée. J’ai vu de mes propres yeux moi-même, comment ils tuaient la tante. Mais il n’y a pas de tel endroit, même le plus terrible, le plus sombre, où Dieu ne sauve pas, s’il décide de sauver. Vive, l’âme a une lueur dans le corps, qu’est-ce qu’il faut encore...
D’après l’expression d’Ourkiya Akbilek a deviné, comment elle voulait entendre d’elle toute l’histoire dès le début jusqu’à la fin, pourquoi, pour quelles qualités les Russes lui ont laissé la vie sauve. Et malgré qu’avant Ourkiya ne lui demandé rien de pareil, Akbilek était prête elle-même à l’initier dans tous ses secrets, ce qui était — c’était. «Mais qu’est-ce qu’il y a à raconter? S’il y avait quelque chose de bien qui est arrivé...» — et elle a caché dans elle-même tous ses souvenirs. Maintenant elle a décidé, que le temps est arrivé pour raconter, tout comment c’était, et elle a commencé son récit. Ourkiya l’écoutait attentivement. Parfois elle poussait des cries craintivement: «Oh, les Saints, aïe!» — comment donc, imagine-toi la bouche dirigée sur toi, les loups craquant par les crocs... Quand Akbilek a terminé sa narration, elle a secoué la tête et a dit d’une manière compatissante:
— Chérie, aïe! Chérie! Qu’est-ce que tu as supporté... Akbilek a demandé de faire le serment de ne répéter à personne vivante ce qu’elle avait entendu. Ourkiya lui a prêté un serment: personne! À partir de ce moment les rapports entre elles sont devenus particulièrement cordiaux. Le secret est une chose sincère, ça fait plaisir d’en chuchoter et il est toujours désirable. Dès qu’elles restent seules, Ourkiya commence à demander Akbilek à propos de son traintrain de la vie au défilé Karachatskoyé. Akbilek se sentait plus âgée que sa tante mature, il paraît: elle sait tout sur cet animal — l’homme, elle juge courageusement et de ceci et de cela, et apprécie facilement toutes les actions et le caractère de la Moustache Noire. Le temps vécu récemment au défilé était plein des scènes dégoûtantes, mais avec chaque récit elles changeaient, comme devenaient plus claires. Et certains cas même se tournaient par la partie même plaisante, comme dans le conte. Akbiolok respirait plus à l’aise, elle a commencé à sourire de temps en temps.
Mais une chose continuait à la faire souffrir — son père l’éviter toujours. Il paraît, c’est clair, pourquoi, mais ce n’est pas compréhensible quand même. Akbilek se démenait de long en large, restait derrière la porte et peu à peu s’est faite à la vie créée, elle a commencé à s’occuper du ménage, gérer la maison, comme sa mère avant. Qu’est-ce qu’elle pouvait faire encore, mourir de douleur, ou quoi?
Mais pourquoi l’aksakal Mamyrbay a refroidi envers sa fille? Qu’est-ce qu’il lui est venu à la tête? Parlons de ce sujet.
Réservé, d’un air sévère, l’aksakal Mamyrbay, quoi qu'on en pense, se distinguait par son amour des enfants. Comme il a été dit les siècles avant par le juge légendaire Edite — Edite Intrépide — à son fils nouveau-né:
Qui n’aime pas les enfants?
Tu es né, mon Nouraly,
J’ai fait une grande fête,
Le peuple, mange, bois et chante…
Je t’ai mis dans un berceau de famille,
Pour que tu vives tranquillement,
Comme le jour dans la nuit de calme
Tu seras un héros!
Que tu manges et bois délicieusement,
Et aies de l’or et de l’argent.
Qui parmi les pères anciens et ceux qui sont en train de vivre n’a pas désiré d’habiller leurs enfants de tissus les plus chers? Qui ne désirait pas que son enfant grandisse terrible comme le lion, énergique comme le tigre, sage comme Platon et comme Jyren-ché — éloquent, et en plus qu’il vive jusqu’aux cheveux gris dignes, qu’il vive dans l'abondance, et ait dans la steppe des troupeaux?
Mamyrbay, comme il le faut pour l’homme importent, ne souhaitait que du bien à ses enfants. Cela vaut dire comme chez les gens. Et ses vœux étaient simples: qu’ils ne soient pas habillés pire que les enfants de leur âge, quoi qu’il n’y ait pas de raison pour la jalousie, qu’ils apprennent les métiers, et en générale, comme il faut dans les familles... Il a amené Toléguen à l’âge de douze ans pour les études dans la ville. Il a fait ses études pendant six-sept ans, et il est devenu le chef. Il n’a pas insisté sur son retour à l’aoul, sa femme avait raison: pourquoi l’accrocher? Il est devenu une personne d’un autre milieu, qu’est-ce qu’il a à se balader parmi les gens d’aoul, qu’il grimpe plus haut dans la ville, ce lui est donné, alors ! Et si c’est donné, qu’il ait plus de jours heureux! — ce sont les rêves de la vielle maman. Mais le vieux a déjà été inquiété par le sort de sa fille, il embrasse le front propre d’Akbilek et lui met de différentes pendeloques et des colliers en or et en argent. Il s’est mis à lui chercher le fiancé, quand même elle n’était plus une petite enfant, comme assurait la maman, il était le temps de la marier. Bien-sûr, Bekbolate n’atteint pas la figure nécessaire, il n’est pas assez riche, mais sa fille gâtée l’a aimé, que faire, il a été obligé de céder — il a accepté les marieurs. Il n’a pas pensé des jeunes — il était encore tôt.
Et malgré que son fils aîné fasse honneur à son éducation, l’aksakal ne croyait pas qu’il était nécessaire d’être trop ravi de lui. S’il est intéressant, voilà son appréciation: quel est l’intérêt du fait, que Toléguen est un habitant de la ville etc... Alors, il sait lire et écrire, il occupe un poste, mais il s’est russifié, est devenu présomptueux, il est possible, qu’il n’a pas vécu même un an parmi les siens. Il n’arrive pas pendant dix mois. Ce n’est pas juste. La fortune accumulée et multipliée ainsi que le bétail ne l’impressionnent pas. Est-ce que pour le père ce n’est pas un grand chagrin? Et s’il se marie sans la permission de père avec une fille de ville sans attaches ni traditions. Les rumeurs l’atteignaient, que son fils couchait avec quelque Nogaïse de Russie... Pour l’aksakal Mamyrbay les Nogaïs sont comme le couteau dans le cœur; il ne pouvait pas oublier, comme un marchand de petits objets le Nogaïs Nacyre lui avait monté un bateau avec le cheval roux.
En sentant que Toléguen avait quelque éloignement du foyer d’aoul, tout l’amour paternel de vieux Mamyrbay a passé à sa jolie fille Akbilek, elle était sa joie, elle était sa seule préoccupation. Tout en elle l’attendrissait: son visage ainsi que son caractère. Ce n’était pas une nullité, elle était une personne de tact, sage, et elle avait une attitude très digne. Si ce n’étaient pas les lois de Dieu, il ne la marierait jamais. C’est pour cela qu’il tardait autant qu’il pouvait, en n’acceptant pas la rançon de fiancé, en espérant de retenir la fille près de lui encore quatre ans, et peut-être, même cinq, ce qui était complètement irréel. Il a tardé... voilà comment le sort a déformé son Akbilek...
Avant il n’est pas arrivé à l’aksakal de se fâcher contre son fils, mais cette fois-ce il l’a vexé! Figurez-vous, ni la mort de la mère, ni le kidnapping et le retour d’Akbilek survécue à peine n’ont pas faits son fils abandonner toutes ses affaires de la ville et se précipiter chez le père pour partager avec lui la solitude, dissimiler l’obscurité tombée sur lui. Quelle créature étonnante il a élevé! Qui pouvait même s’imaginer, qu’il n’arriverait pas? Tout le monde attendait, mais non, il n’a pas apparu. Même s’il n’était pas capable d’aider, il devait, il était obligé absolument d’être avec le parent inconsolable, et ensuite va comme tu pourras, oh, l’engeance vilaine!
Pendant toute cette période-là l’aksakal préférait de croire que sa fille était morte. Son esprit comprenait qu’elle ne vivrait pas, mais le cœur n’était pas d’accord avec sa mort. Encore hier elle attendrissait son regard, réjouissait par son rire sonore, par les espiègleries amusantes, son petit rossignol! Oui, la place de son épouse est devenue vide, mais l’espace, occupée avant par Akbilek, bâillait par le trou, la maison s’est écroulée, s’est éboulée en galgal. Et il paraît c’est sans Akbilek que les enfants plus jeunes, comme les chiots abandonnés, ne sont pas lavés, ont maigri, sont couverts de poux, leur lessive n’est pas faite. Si elle était à côté, elle ne les laisserait pas se perdre; quand est-ce qu’il encore se mariera de nouveau, restaurera la famille complète et se sentira de nouveau le maître complètement, comme avant? Est-ce qu’on peut confier tout le ménage aux parents? Chacun d’eau prend soins de lui-même, traîne tout sous son toit, on ne peut pas veiller à tout...
Mais Akbilek s’est perdue irrévocablement. L’irrévocabilité, à vrai dire, couvrait toute l’ambiguïté de sa position, bien qu’on détourne n'importe comment, mais sa fille ne s’est pas perdue tout simplement, mais... De toute façon, personne n’aura pas de courage de dire, qu’elle a passé de main en main des Russes. Mais dès qu’il a entendu que les blancs ont été arrêtés, tout de suit il a oublié tout, les questions humiliantes irrévocables, toute sorte de l’honneur, il ne se rappelle pas comment il a crié: «Et où est Akbilek?» Comme en fièvre il a envoyé les cavaliers la chercher dans toutes les directions.
Elle s’est retrouvée. Elle a apparu devant lui déchevelée, cracra, avec un air sali, battu; et dans la tête d’aksakal les pensées se sont éveillées: ce n’est pas elle, ce n’est pas elle! On l’a déflorée! On l’a pervertie! Elle s’est bien amusée! Elle est devenue incorrecte... Il n’y a plus de son enfant innocente, le petit mouchoir propre est chiffonné, mouché, gâché, ce n’est pas une petite fille, mais une demi femme.
Le vieux lésinant était un vrai égoïste, même la virginité de sa fille il considérait comme sa propriété. À son avis sa fille même après le mariage devait rester une jeune fille chaste. Maintenant Akbilek n’est plus son enfant... Mais à qui, on ne sait pas. Mais est-ce que c’est elle? Non, ce n’est pas Akbilek devant lui. Ainsi qu’elle n’est plus une Kazakhe un peu... On l’a pilé, ruiné, refilé quelque grue. Et comme ça il a répondu à ceux, qui ont commencé à cligner de l'œil, disons, avez-vous vu la fille de Mamyrbay dépravée par les Russes? — cette fille n’est pas à moi!
Ainsi Akbilek a commencé à peser à la main de son père. La femme n’a pas encore accouché, mais de toute façon elle donnait impression, qu’elle allait sortir un petit singe extraordinaire et commencer à se tourner avec lui dans ses bras, le bercer devant tout le monde. Et elle tient debout, ne bouge pas... pouah! Elle assure sa contenance... cette assurance était pour l’aksakal comme un gifle.
Telle est la situation faisant le vieux détourner le regard d’Akbilek, et l’éviter en général. L’amour et la jalousie paternel, la pitié et la méchanceté, l’aversion pour elle et pour soi-même — tout, après avoir confondu, le fâchait; elle est restée vivante, bien-sûr, mais elle s’est accroupie ici comme une plaie sur la prunelle. Cependant, comment couper sa main? Peut-être, il lui reste seulement de cette honte insupportable une seule voie : le coup de couteau sur les veines et au ciel? Et l’aksakal erre ça et là, en faisant le bruit par son bâton, comme par ses os, en écoutant la douleur dans l’estomac, comme le loup nourri par le poison.
Parfois il s’asseyait de côté et commençait à réfléchir longtemps, en plaignant de temps en temps sa fille: «Mais où est sa faute, la pauvre?». Il semble, qu’il comprend qu’il n’a pas de droit de la blâmer, mais dès qu’il se rappelle de tout ce qui s’est passé. Quelque force l’éloigne d’Akbilek, ne lui permet pas même de s’approcher d’elle. D’un coup une pensée: «Mais si on se débarrasse d’elle au plus vite de quelque façon?» Mais comment? Et le fiancé ne se précipite pas, si non il la lui fourrait dans les pattes et cela serait fait. D’ailleurs, il ne faut pas être pressé ici, et les enfants mineurs vont se retrouver dans l'abandon. D’abord il faut se marier avec quelque femme convenable, et encore après s’occuper du sort d’Akbilek sera correcte. Tel était le dernier fruit de longues réflexions profondes d’aksakal.
Avoir une idée c’est simple, mais trouver une femme n’est pas déjà facile pour lui. L’âge, il faut dire, est avancé, regardé: cinquante-cinq ans. À cet âge il n’est pas raisonnable de diviser le bétail pour la rançon de quelque jeune fille et ensuite l’éduquer à la fin lui-même. Et est-ce que celle-ci sera capable de remettre sur pied ses jeunes enfants ? Est-ce qu’elle va prendre soin de son vieux mari? Et s’il se trouve une étourdie pâle, et elle va rire et s’échanger des sourires avec les jeunes hommes célibataires, quelle honte, il vaut mieux aller tout de suite dans le tombeau. Quoi qu’il en arrive après: va-t-en. Il n’avait pas de sympathie pour les femmes divorcées non plus, elles sont effrontées et débauchées de leur nature. Et si on prend une veuve, elles ont des enfants, et les veuves ont des obligations envers les parents du trépassé, elle va y traîner son bien. Oui, comment on peut trouver une jolie femme, modeste, et forte pour le travail? Oh mon Dieu, aïe! Il ne souhaite à personne perdre la femme sur ses vieux jours! Peux-tu t’imaginer la plus grande malchance? Comment faire? Quelle guigne! Et cette question a pris racine dans la tête d’aksakal, malgré qu’il l’envisageait de mille façons, elle le garrottait.
Mamyrbay n’était pas de ces bays, qui nageaient dans la prospérité, mais il n’avait besoin de rien. Tout le monde vivait confortablement, il faisait les honneurs de la table avec plaisir en été par le kopumis et le mouton, et en hiver par la viande grasse des plats complets, et sans manquer la conversation gaie. Il jouissait d'une grande considération et avait du poids parmi les chefs du district, et pour le volostenoy son mot signifiait quelque chose. Jadis il a été élu le juge local, ensuite il a laissé les affaires chicaneuses et se contentait du fait qu’il était parmi ses parents une personne importante. Son mot parmi les siens signifiait plus que l’avis d’autres aksakaux. Ce faisant il ne bavardait jamais, contrôlait sévèrement les gens, les travailleurs, chaque tête est comptée, il veillait lui-même les réserves et les prix.
L’hiver est arrivé, la neige est tombée sur les pentes de Karachache: les bienveillants avec leur compassion ennuyante ont commencé à arriver plus rarement, il paraît qu’Akbilek suffirait comme l’hôtesse, et Mamyrbay a commencé peu à peu à se plonger dans les soins de ménages. Est-ce qu’il n’y a pas plein de soins du ménage: reçoit là, rend là, prépare les réserves de viande pour l’hiver, les soins de la VILLE, les soins de STEPPE...
Un de ces jours tourbillons, un certain Aldékey, qui jadis déjà descendait chez lui, est arrivé.
Aldékey était une personne sans valeur, mais le frétillon, qui ne se fatiguait pas de perdre son temps, et aller voir tout le monde. Voilà maintenant chez deux hommes respectables deux juments ont disparu, une était avec une narine raccourcie, permettant de la monter uniquement du côté gauche avec la marque «torse», l’autre était une jument rousse à la crinière avec une tache planche sur le dos, c’est d’elles qu’Aldékey s’occupait. Il allait dans les aouls, demandait les gens, observait, et sur sa route il est passé chez son ancien copain, avec qui on peut parler des temps passés et en même temps exprimer son regret et bénir la fille retrouvée. Ou peut-être, tout simplement il faisait la nuit pour chercher un autre toit pour y passer la nuit, de toute façon il a fait ce qu’il a fait.
Après avoir entendu qu’Aldékey est entré dans la cour, Mamyrbay a jeté: «Quel diable avait-il besoin de venir !». Mais il ne pouvait pas négliger la conversation avec Aldékey. Même s’il n’avait pas des événements connus, il aurait de quoi parler avec l’hôte, et il s'ennuyait sans conversations. Il faut impérativement avoir la personne, avec qui on peut faire part de ses idées et grandes agitations, autrement quelle est la raison de se taire avec les siens? Il suffit de commencer à parler de quelque chose importante avec un voisin ou avec un parent, tout de suite on te monte sur la tête, te prive du calme, on ne laisse pas ton bétail passer tranquillement, on t’accroche comme les chiennes le chien, il paraît qu’ils sont les hommes, mais la caboche, d'une manière générale, est féminine — il n’y a pas de proportion, ils sont prêts à te pousser de ta place.
Tout d’abord Aldékey a récité trois fois «Lām-Alif» et «Koulkoual», en les présentant les surates de Coran, a dit bonjour, et ensuite a raconté une histoire, comment un juge éloquent a dissipé le cafard à un khan au front baissé des malheurs, et seulement après a exprimé sa condoléance à l’aksakal en l’appelant de tenir forme. Il a même cité les mots d’Abay: «Rencontre la tristesse en lui faisant face!» Cet Aldékey en général était le maître de sagesse poétique, il se rappelait de l’antiquité plusieurs histoires par cœur: «Mille et Une Nuits», «Quarante vizirs», «Quatre-vingt idées fausses de perroquet», «Six doigts», «Vengeurs chanteurs-danseurs». Dans sa jeunesse il passait pour un costaud, un dragueur soigné, un lutteur, un chanteur, un musicien, un humoriste, mais tombé du roché
Baychouak, il s’est blessé très fort. Toute la littérature et l’art sont sortis de l'esprit, si on ne compte pas son habilité de mettre du tabac derrière la lèvre, blaguer ainsi que raconter des bobards et donner des conseils: «Faites comme ça, procédez comme ça..»; un vieux vorace, s’asseyant à peine, sans les dents labiales, mais dès qu’il s’assoie, il ne se lève plus.
Aldékey s’est assis confortablement et s’est mis à passer en revue les morceaux, dont il se rappelait encore du récit «Aaroon Rashid». Ensuite il a passé à «Az Janybek», «Orateur Jyrenché» et «Régent Luqman». Il a extrait par un trop grand effort les sermons utiles de l’héritage de ces sages, autant que la mémoire lui a permis, et, il faut dire, ses efforts n'ont pas été vains. L’aksakal Mamyrbay, accablé par sa destinée médiocre, a repris le courage, s’est détaché, enfin, de l’existence odieuse et s’est animé autant, qu’il a ordonné les valets décidément:
— Aïe, appelez-moi ce berger-là! Qu’il choisisse et égorge le mouton le plus tendre pour l’invité pareil. Les gens âgés ont leur santé, et la viande doit être bien tendre.
Et Aldékey a sorti de tige usée la tabatière de la corne pour le nasvar, a mis sur la main ce qu’il en restait, et s’est mis à pétrir la mauvaise graine par l’ongle du pouce. Il a mis le tabac derrière sa lèvre — un tout petit peu. Et maintenant on peut agiter la tabatière, on peut chasser le tabac de la corne — rien, d’ailleurs, on peut la frapper par un truc, vas-y, frappe.
— Il vaut mieux préparer le nasvar, à quoi bon jeter le cendre dans la rue, — il a donné une ordonnance à son ancien ami Aldékey.
Il n’y avait que le cendre du foyer, bien-sûr, qui faisait partie du mélange enivrant à mettre derrière la lèvre, il faut aussi le tabac parfait, et en plus le cendre du saxaoul brûlé, et encore deux-trois substances. Et prend et sert tout à Aldékey! Mais comment refuser à la personne pour laquelle on est prêt d’égorger même l’agneau?
Mais il n’y a pas beaucoup d’invités maintenant, pour lesquels les maîtres mettent sous le couteau tel bétail, si on ne compte pas les miliciens, les agents de TchéKa et les volostenoys. Mais nous ne parlons pas aujourd’hui des finesses de l’abattage du bétail, mais du flair d’Aldékey non seulement pour la viande et le nasvar, mais pour quelque chose encore plus importante. De sorte qu’Aldékey avait toutes les raisons pour prendre des airs d'importance. Quoi que hier on lui a offert dans une maison que de la viande séchée périmée, il lui a tordu tout le ventre, heureusement, qu’il pouvait dire des injures — il a réussi à peine de riposter par des injures la mort accroché sur son ventre en route.
Aldékey, après avoir jeté sur ses épaules la pelisse grise bordée sur les manches par le drap sombre de bonne qualité d’aksakal Mamyrbay, après avoir mis sur sa tête son chapeau et l’ayant noyé par le ruban sous le menton, s’est mis à boire le thé avec tout son plaisir. Akbilek, vu qu’on fait la fête pour l’hôte avec tout le respect, a fait du thé avec la meilleure sorte de thé et a mis les confiseries chères. Il était assez pour les réflexions ignobles d’Aldékey vieilli; «La fille d’aksakal s’est avéré une femme douce. Il est seulement dommage, que les Russes l’ont usée!»
Après avoir bu du thé et chauffé la courbature de vieillard dans les os, Aldékey s’est mis à faire rire le veuf par les blagues différentes, il fallait travailler en remboursement du mouton égorgé. Et pendant que la viande était en train d’être fumée, sa bouche ne se fermait pas. Et il a donné son avis aussi sur le sujet suivant:
— Que vos enfants, cher aksakal, ne dépérissent pas sans les soins de la mère, il vous faut vous marier pour eux.
L’aksakal a jeté un coup d’œil dans la direction d’Akbilek et a dit:
— Oh, Aldékey! Quelle est la raison de prendre une femme sur ses vieux jours? On devinait dans sa réponse la postface: disons, si un jour je me marie, cela ne sera pas de ma volonté, mais en me soumettant aux bons conseils des gens sympathisant, si vous me trouvez une femme, alors je vais obéir. Il est gêné de se chercher une femme devant ses enfants!
— Hé, mais de quoi vous parlez? Vous êtes encore bien planté sur vos jambes. Malgré que je suis sans les dents, mais avec ma Soulima je dors seulement à la brassée. Je vous dirai, sans femme on vit à la six-quatre-deux, — et il s’est mis à raconter les mots pour rire encourageants. — Vous préférez qui, ohé? Il paraît que cela ne vous va pas de prendre une jeune fille. La jeune fille est comme un oiseau, elle aime s’envoler. Pour vous tout juste une veuve travailleuse conviendra, — et il s’est mis à passer en revue les noms des femmes qui sont devenues veuves.
Comme il a deviné les pensées secrètes d’aksakal.
Après le thé de matin l’aksakal s’est isolé avec Aldékey dans le coin près du hangar, et ils ont parlé longtemps de quelque chose. Mais de quoi, qui le sait? Le cheval d’Aldékey était déjà près de la porte avec la selle, enfin l’aksakal a ordonné aux travailleurs:
— Ohé, aidez Addek à monter en selle.
Aldékey est arrivé et reparti, mais un miracle s'est produit: l’aksakal a commencé à traiter sa fille de telle façon, comme si rien n’est arrivé avec elle. Les notes de tendresse ont apparu dans sa voix, quand il commençait à lui parler à propos des affaires ménagères ou autres: «Chérie, fais ça, et fais ça!» Akbilek s’est ranimée, et pour elle son père est presque s’est relevé des morts. Et le repas lui porte profit, et le visage s’est illuminé.
Les petites branches fragiles de frimas fondent sur le verre de fenêtre et coulent par les petites pleurnicheuses. Dans la flaque sur l’appui de fenêtre flottent les mouches glacées. Le soleil d’hiver a tendu ses rayons blancs vers le tapis de prière étendu au fond de la pièce. Deux personnes avec les têtes baissées sont assises près de la fenêtre et sont en train de coudre et s’échanger des secrets. Une d’elles est Ourkiya, elle a mordu le chiffon bleu et d’y arrache les fils. Akbilek après avoir mis le petit pourpoint sur ses genoux, y coud les boutons en argent. Derrière leurs dos dans le coin de la pièce la petite Sarah échevelé découpe par les coups avec les ciseaux la robe pour la poupée. Akbilek s’est retournée vers elle et l’a appelée: «Viens ici, la chérie!». La petite sœur s’est approchée et elle tient debout devant elle. Akbilek lui a mis le pourpoint cousu, a arrangé en tirant par le dessous et a arrangé la poitrine. La petite est contente d’avoir le nouveau pourpoint. Et la sœur aînée est contente de son travail. Elles sourient l’une à l’autre. La joie remplit la fille et elle se jette sur le cou de la belle sœur, et la serre dans ses bras fortement. Akbilek l’a embrassée sur la joue et a ordonné: «Chérie, porte avec précaution, ne le salis pas!». Comment le pourpoint lui va !
Uniquement le visage d’Ourkiya est impassible, elle a toussé. Elle regarde le visage de Sarah, doux, comme la fleur, et dans sa poitrine la douleur s’éveille et bouge doucement. «Oh, la vie! Je n’ai pas besoin de beaucoup, seulement un tel être échevelé, et quel bonheur! Qu’est-ce qu’il peut être dans le monde le plus cher et doux, que l’enfant? La vie est maudite, tu es comme un arbre sans aucune feuille. Un bout de bois. Il n’y a ni fleur, ni fruit, pourquoi elle doit coudre ces petits pourpoints? Et elle aussi aurait pu les décorer par les boutons brillants et les agrafes. Elle serrerait dans ses bras, elle serrerait contre poitrine, elle aimerait tellement, qu’elle aurait mangé l’oiselet pareil! Mais quand est-ce que son sein maudit va se ranimer, quad est-ce que son vœu va être accompli? Ohé, le bonheur de maternité, aïe! Mais pourquoi j’ai de la fièvre, peut-être j’ai attrapé froid?»
Si on parle des enfants en présence d’Ourkiya, elle devient malade tout de suite, elle n’a pas de force d’écouter, le morceau passe à côté de la bouche. Dès qu’elle voit une femme enceinte, tout son sein vide gonfle jusqu’à la rupture. «De quoi encore on peut rêver?» — pense-t-elle. La richesse, la pauvreté, la famine, et les maladies, la paix, la joie ne signifient rien, si on n’a pas d’enfants. Qu’est-ce qui a plus de valeur sur la terre que l’enfant? Rien. Une maman donne un coup de main à son enfant dans sa présence, et Ourkiya devient glacé d'effroi: «Quelle salope! Comment elle a pu crier, lever la main, agonir d'injures l’enfant, le faire pleurer?» — elle ne comprend pas. Ourkiya regarde la petite élégante et se noie dans sa douleur encore plus profondément. Personne, peut-être, n’a pas désiré tellement de vivre pour la vie d’enfant. Toutes ses trois cents soixante veines sont séchées du désir ardent d’accoucher, tout son sang a bouilli, telle soif maternelle la faisait souffrir, que son cœur s’est fendu, comme la cruche surchauffée. Même les pèlerins perdus dans le désert n’ont pas de soif pareille. Tout le monde entier pour elle est un seul désert. Elle demande l’enfant au Dieu le jour et la nuit; qu’est-ce qu’elle n’a pas fait pour devenir enceinte: elle est allée voir les baksys-chamans, et a prié avec les pèlerins et mollahs, a passé les nuits près des tombeaux saints, portait sur son cou l’amulette, combien de fois a fait de sacrifices... et tout est en vain. Ourkiya n’a pas peur que son mari, après l’avoir repoussée, décidera de se prendre une autre femme, elle est fidèle et elle lui a proposé elle-même surtout aux moments pénibles d’amener à la maison sans enfants la tokal[17]. Comme ça elle pourrait garder les enfants…
— Batifoleuse, ma chérie, viens ici, s’il te plaît, plus près — appelle Ourkiya la fille. — Tu vas être ma fille? — et la serre très fortement contre sa poitrine.
Sarah a la question dans ses yeux adressée à Akbilek: «Elle le dit sérieusement?»
— Oh Créateur! Est-ce que le jour quand on serrera notre enfant viendra? — de nouveau soupire Ourkiya .
— Tu es encore jeune, Dieu est bon, tu serreras absolument.
— Qui sait! Que ton vœu se réalise, ohé! Comment je veux te croire. Aujourd’hui j’ai vu un rêve. J’ai vu en rêve que notre aoul s’est levé pour se déplacer. Et je vois que nous toutes les deux, nous sommes restées en arrière du koche, nous sommes perdues. Nous avons passé le col, et devant nous dans le vide entre deux montagnes comme sur la main de Dieu il y a une roche. Et sur le sommet de cette roche il y a un aigle royal noir, et brusquement il s’envole et vole directement sur nous, il s’est approché et t’a ramenée. «Aïe, aïe, aïe ! Il va la déchirer!» — je crie, et je ne sais pas quoi faire. Ta robe flotte sous la poitrine de l’aigle royal, et il t’amène directement à l’est. Il s’envole en t’emportant, et voilà il se voit comme un point minuscule. Là-bas, très loin, il a commencé à tomber en bas. «Il va la déchirer absolument et manger, ohé!» — et je cours, en sautant d’une pierre à l’autre... J’arrive en courant et je regarde, et toi tu t’es transformée en petit oiselet blanc ébouriffé. L’aigle royal n’est pas là. Tu es assise sur le rocher et écarquilles les yeux. Je ne sais pas d’où il est arrivé, mais je vois: derrière toi le douana, dont tu avais parlé, est arrivé. Il prend l’oiselet dans ses mains et continue son chemin. Je lui dis: «Le douana, ohé! Rendez-moi l’oiselet!» Il le rend. Je le serre contre moi et je vais...
— Aïe, les Saints, aïe! Le rêve de ciel! Comment le deviner? Mon Dieu, aïe! Est-ce que quelqu’un va m’emporter de nouveau? — et les yeux d’Akbilek sont devenus ronds de la peur.
Et elles interprètent ce rêve de milles façons. Elles ont eu peur toutes les deux, sans avoir compris le rêve. Enfin, elles ont commencé à calmer l’une l’autre: «Le rêve ne signifie pas plus que la crotte de renard».
Sarah est allée montrer son pourpoint aux voisins et collecter les confiseries en l'honneur de son nouveau vêtement. Ourkiya et Akbilek après avoir pris avec elles le pot d’eau chaude, sont allées pour s’assoir à côté de l’aoul.
Il faisait du vent. Les montagnes en vêtements blancs surplombaient l’aoul. Les brebis grouillaient sur le blanc comme les mouches. Plus haut étaient les bergers comme les oiseux féroces hérissés. La fine couche de neige de la pente de sud collait aux semelles. Le froid brûlait entièrement. Du côté de la gorge profonde, ouverte pour le regard, où on devinait les silhouettes des chevaux, un pèlerin marchait en posant ses pieds largement et en posant son bâton de la même façon.
Ourkiya et Akbilek, roulées des tchapans, se précipitent sur le sentier de montagne.
— ...ici dans ce rêve, restées en arrière, nous sommes restées seules?
— C’est ça qu’il me paraît, — a répondu Ourkiya, en regardant autour d’elle.
— Oh Mon Dieu, il s’est jeté du haut sur moi, comme une balle?
— On prie pour la santé: les saints protégez-nous!
Quelques jours ont passé après la conversation sur le rêve terrible mystérieux. À partir du moment quand le père a arrêté de se refrogner, Akbilek a commencé à penser à son fiancé. Elle a appris de la part d’Ourkiya, il n’y a pas longtemps, que Bekbolate était blessé et à ce moment était à l’hôpital de la ville. À ce temps-là Akbilek ne voulait pas demander les détailles. Elle veillait l’humeur de son père. Mais maintenant son humeur est déjà différente. En plus tout le monde qui voulait la consoler, s'en est déjà donné à cœur et l’a laissée tranquille. La veillée avec Ourkiya est devenue plus longue. Malgré qu’il n’y ait plus de secrets, il paraît... Pourquoi ne pas parler de Bekbolate maintenant? Ourkiya comprend son intérêt à lui, qu’elle parle de lui: «Est-ce qu’il m’aime encore ou pas, ma tante? Tu penses qu’il a changé?» Elles n’ont pas pu trouver le mot de cette énigme, il n’y avait que des suppositions et des espoirs. Elles ont demandé à un garçon, qui allait dans la ville, de se renseigner comment allait Bekbolate. Elles se sont mises à attendre et regarder dans la steppe cet amateur de flâner dans la ville. Bien qu’on voit la personne de loin.
Tous les derniers jours Akbilek n’arrêtait de penser à son fiancé, et elle a fini par la chaleur dans la poitrine. Avant elle ne remarquait jamais chez elle ce tempérament passionné anormal. Pour elle tous les hommes plus âgés n’étaient pas que les oncles ou les frères aînés, et les garçons de son âge personne du tout. Mais maintenant, après avoir vu un bel homme, elle sentait envers lui une attraction inexplicable, il pourrait s’arrêter, commencer à parler avec elle, la toucher avec tendresse, elle s’imaginait, comment elle le serrerait dans ses bras, le caresserait. Son imagination dessinait les silhouettes des hommes nus, tout à fait en chair et en os. Ces images la désespéraient, elle essayait de s’en dégoûter, mais tout était en vain. «Oh les Saints! Qu’est-ce que m’arrive? Quelle honte, ohé! Peut-être, je suis vraiment dépravée?! C’est parce que je suis maintenant la femme?! — elle s’étonnait elle-même. — Est-ce que toutes les femmes ont la même chose dans leurs pensées? Probablement, je suis la seule comme ça...» Elle voulait en parler avec Ourkiya, mais la crainte, qu’il y aurait encore quelqu’un qui allait savoir à propos des fantaisies honteuses l’a arrêtée. Qu’elle pense à moi comme à une fille qui a grandi devant ses yeux.
Avec chaque jour et chaque nuit le désir de se retrouver dans les embrassades du fiancé devenait plus insupportable. Elle se rappelle de lui et elle saute sur ses pieds, se démène à travers la chambre — chuchote son nom, et le nom de ce nom est la fornication. Resté seule à la maison, Akbilek se couche sur la couverture, se boule, s’allonge, s’étend, s’étend, de telle façon que les seins soient debout... ferme les yeux et le voit dans ses rêves... Elle le serre dans ses bras, l’embrasse... Et il paraît que l’ardeur refroidissait un peu. Dès qu’elle voit Ourkiya elle lui demande tout de suite:
— Il n’y a pas de nouvelles de la ville? Mon Dieu, pourquoi c’est tellement long? — comme si elle a fait un serment à Bekbolate de l’attendre tellement passionnément.
— Non, pas de nouvelles... Qui sait, qu’est-ce qu’ils font là, — l’autre lui répondait avec méfiance.
Mais Akbilek ne comprend pas des allusions.
— Mais pourquoi il ne donne pas de ses nouvelles? Mais pourquoi il me fait m’inquiéter autant? Mais pour nous les filles, tout n’est pas indifféremment!
Le soir tombe. Il est encore tôt pour allumer une lampe, mais la maison est déjà plongée dans les crépuscules. Akbilek, isolée, est couchée sur un petit tapis au fond de la chambre, son visage est caché dans le coude plié.
— Ma belle, ohé! — l’a appelée Ourkiya entrée dans la maison. — Pourquoi tu es couchée à cette heure-là? Pourquoi tu n’allumes pas la lampe?
Akbilek lui a répondu par la voix langoureuse et capricieuse:
— Elle s’allumera...
— Où est la lampe? Je vais l’allumer...
— La tante, mais pourquoi tu es pressée? Il est encore tôt, — a dit Akbilek et, après avoir tourné le hanche, s’est soulevée.
— Alors, on va voir, comment tu vas te débrouiller sans la lumière! — a dit Ourkiya et s’est accroupie près d’elle, lui a tendu la main serrée. — Alors, qu’est-ce que j’ai dans ma main? Devine.
— Dans la main? Du courte.
— Non.
— Du sucre.
— Non.
— Une monnaie.
— Non.
— Quoi alors? A quoi ça se ressemble?
— C’est blanc.
— Blanc, blanc... Mou? Dur?
— Je ne te le dirai pas. Au total, c’est une chose douce.
— Blanc, doux — du sucre quand même.
— Non, ce n’est pas le sucre, mais une chose très désirée.
— Qu’est-ce que c’est, la tante?
— C’est une chose très chère, et elle contient le plus intéressant.
— Aïe, les Saints, aïe! Mais qu’est-ce que c’est?! Ne me fais pas attendre, dis-le, la tante!
— Ce que tu attendais est là.
— Oh, très bien, aïe! C’est une lettre!
— Tu as deviné, tu as deviné... Je pensais ne pas te le donner, — a taquiné la tante encore un peu et a tendu à Akbilek une feuille de papier pliée comme un petit paquet.
Indifférente à la lumière jusqu’à ce moment, Akbilek a sauté sur ses pieds et, il semble, d’un seul mouvement de la main a allumé la lampe, l’a mise près d’elle sur le plancher et a failli avaler la feuille remplie. Elle l’a couverte des bisous. Mais comment autrement, si dans cette lettre se trouvent les phrases tellement désirées avec les mots tatares en mode:
«Chère Akbilek-jan nous vous envoyons nos nombreuses salutations avec notre hommage. Si vous vous intéressez à nos affaires, sachez que nous allons bien, la blessure est guérie avec le concours de votre frère aîné Toléguen. Et à ce moment nous sommes dans la selle à la chasse au faucon.
Nous avons entendu parler de votre délivrance des mains infidèles et nous en sommes heureux...
Le temps de la mort de chaque personne est au ciel, je suis sûr que votre défunte mère vous envoie la charité. Soyons reconnaissants à la mort, soyons patients, quels que soient les malheurs qui arrivent.
Nous avons envoyé avec impatience notre ami Akberguen pour avoir les nouvelles de votre santé et pour l’expression de toute notre sympathie, qu’il soit clair: dans nos sentiments il n’y a rien, ce qu’on peut appeler l’aliénation. Et nous espérons que dans vos sentiments il n’y a pas d’aliénation non plus. Nous vous souhaitons de la patience de survivre les jours courts de tristesse. Nous vous souhaitons du courage, quoi qu’il en soit. Que tout le monde soit en bonne santé.
écrit par votre connaissance Bekbolate avec utilisation de la plume».
Cette lettre ferrait danser de joie toute la femme. Akbilek a pouffé de rire.
— La tante! Que c’est bien! — a dit elle, en tournant la lettre dans ses mains et en la déplissant, même sans penser à la mettre dans sa poche.
— Alors, qu’est-ce que j’ai dit?
— Et où est Akberguen?
— Il est chez nous.
— Est-ce qu’il ne vient pas chez moi? — elle a demandé et s’est reprise tout de suite: — Non, on ne peut pas comme ça.
Akbilek a sympathisé Akberguen, comment donc! C’est lui qui a amené la lettre de son fiancé. Elle voulait beaucoup le voir, mais dans sa situation cela semblerait, au moins, irréfléchi.
— Mais que faire?
— Que faire? Et toi aussi, écris une lettre.
— Mais qu’est-ce que je peux écrire?
— Tu sais toute seule, écris ce que tu sens. Est-ce que tu as de la honte, n’est ce pas?
— Oh les Saints, aïe! Qu’est-ce que je peux écrire?
— Il part demain matin. Ecris maintenant. Je vais passer encore, — a dit Ourkiya et est partie.
Akbilek s’est accroupie près du coffre de main avec un simple crayon rouge « Aton» et quelques feuilles de papier, après avoir mis le livre «Kyz-Jybiok» au-dessous, ensuite elle s’est couchée à la renverse et mordait le crayon. La lettre s’est écrite elle-même:
«Cher..» и «...si tu veux savoir comment nous vivons...» et bien-sûr, « »,
Mais après il n’y a pas de paroles. Plus exactement, la fourmilière de mots tournait sur la langue, mais elle ne pouvait pas choisir les mots nécessaires. D’un côté elle voulait écrire de beaucoup de choses, de tout, d’un autre côté, elle décidait d’être réservée, laconique. D’ailleurs, malgré qu’elle remplisse plein de feuilles, de toute façon elle ne pourrait pas raconter tout ce qui lui est arrivé, tout ce qu’elle a senti, tout ce qu’elle a pensé. Elle lâche la tige de crayon, l’enfonce dans le papier et se trouble tout de suite. Mais quand même elle a tracé soigneusement:
«Et nous n’avons pas de sentiment d’aliénation non plus. Après avoir reçu la lettre très attendue, nous ne voulons que votre arrivée la plus rapide. C’est écrit vite, je vous demande pardon. Akbilek».
Bientôt Ourkiya est arrivée et a récupéré la lettre avec elle.
Tout le monde s’est endormi, mais Akbilek est seule dans ses rêves — elle a rêvé de la belle apparition de la fiancée. Le visage est couvert par le voile en soie blanche, et elle porte la robe légère blanche de mariage. Ourkiya et Sarah sont près d’elle, et voilà, elle en tout le silence sort du jardin fleurissant, et à côté de l’aoul elle est rencontrée par les jeunes filles et les belles-sœurs, habillées en rouge et en vert. Leur rire, leurs bracelets et les boucles d’oreille résonnent doucement. Les femmes la parsèment par les petites monnaies, et les enfants d’aoul se mettent directement dans les jambes avec du bruit...
La faible brise fait flotter le voile sur son visage, mais elle n’a pas de courage de l’enlever complètement, oh! Et parmi les jeunes filles et les belles-sœurs Akbilek marche avec les yeux brillants. Le monde attend avec impatience le début... du bruit, des voix...
On amène les jeunes mariés dans la yourte, plaine de son dot: des tapis, des coffres, de la vaisselle, des tas de couvertures. Toujours cachée par le voile, Akbilek s’assoie entourée des amies. Les femmes âgées entrent: «Nous désirons voir la fiancée». Une voie autoritaire à quelqu’un résonne: «Ouvre le visage!» — une des filles soulève le voile devant Akbilek levée. Akbilek est comme le disque de la lune, comme le rayon de soleil. Les femmes sont enchantées. «Bonne chance, chérie! Assied-toi, ma chère!» — et Akbilek s’assoie de nouveau en faisant frou-frou par le bas en soie.
La noce est terminée. Les gens partent. Akbilek est dans la yourte des jeunes mariés... Elle est la belle-fille. Elle a la coiffe d’une jeune femme, elle est vêtue aux habilles légers. Elle est assise sur le lit en bois et découpe par ses doigts blancs la chemise blanche pour son mari. Bekbolate est couché à côté d’elle et touche les cordes de dombra. La mélodie de beaux kuy[18] sonne, elle émotionne, et Akbilek en souriant regarde fixement le visage de son époux par le regard chaleureux, en exclamant dans son esprit: «Mon amour, ohé!» Bekbolate lui répond par la sourire et tend ses bras vers elle. En se perdant et en se troublant, Akbilek s’approche de lui. Le mari la prend par ses épaules, embrasse sur la bouche ouverte, très doucement sur le cou de cygne. Ils se rencontrent par les regards. Ils se regardent en admirant...
Peut-être, le samovar de matin à la maison des parents est en train de bouillir, mais dans la yourte des jeunes mariés le soleil n’a pas encore jeté le coup d’œil, Akbilek essaye de laisser les reflets de soleil sauter sur le rideau en soie, et son époux se précipite déjà de la serrer dans ses bras de nouveau, caresser, il la fait rire et ne laisse pas partir. «Il est assez, mon chéri!» — dit Akbilek, se lève, s’habille, et après avoir pris la cruche pour se laver, va vers les hauteurs.
Les chamelons folâtrant, ne restant pas en arrière l’un après l’autre, les petits enfants tenant les poulains, pendant qu’on fait la traite de leurs mamans aux crinières, les filles-jeunes filles, rassemblant à l'entour de l’aoul le fumier séché... Akbilek regarde toute cette image et revient sans précipitation dans sa yourte. Après avoir fait son ablution, maintenant elle verse de l’eau sur les mains de son mari, enlève de paravent la serviette bridée, la tend à son époux...
Vers le soir son mari revient sur le cheval ambleur avec les canards - oies fixés à la selle et avec le faucon sur son bras, et elle reste devant la yourte blanche et le regarde en attendant...
Et voilà le temps de déménager. Akbilek a roulé les manches, s’est ceinte, elle décompose la yourte. Le campement suit son ordre, les jeunes filles et les belles-filles restées en arrière invitent Akbilek sur son cheval gris dans sa compagnie rieuse, et les blagues commencent, et encore le concours qui chante mieux. Et elles vont plus loin par une petite volée chantante et riante, et leurs maris s’approchent amicalement d’elles, et chacun a un faucon sur son bras ...
Akbilek est devenue maman. Elle a accouché d’un garçon admirable à son aimé. Le mari avec son copain Akberguen sont bien-sûr à la chasse de faucon, et elle près du berceau embrasse les doigts du bébé écartés devant elle, elle met sur la main son dos fragile, le lève vers ses seins et le nourrit. Avant le départ à la chasse le papa a fixé les plumes protecteurs de grand duc, et maintenant elle va avec le fils à sa rencontre.
Elle exclame: «Papa, regarde son oiselet!» — et le bébé dort en ronflant délicieusement. Le papa quand même lève en haut son fils et hume l’odeur puérile du sexe masculin de son héritier...
Le matin dès qu’Ourkiya a passé, Akbilek s’est précipitée de demander:
— Il est parti?
— Oui, — a répondu Ourkiya.
Sa précipitation s’expliquait par la honte que dans sa lettre elle appelait le fiancé chez elle, peut-être je pourrais récupérer la lettre.
Il semble, qu’encore quatre-cinq jours sont passés. Le vieux n’est à la maison, Akbilek est devant la fenêtre en tenant Sarah par la main. Les bergers conduisent le bétail dans les hangars, les traiteuses ont commencé la traite, au-dessus du toit de hangar on voit une tache écarlate. C’est le foulard d’Ourkiya.
Akbilek a envoyé Sarah appeller le frère.
— Prête-moi ton oreille, — et elle s’est mise à chuchoter quelque chose à Kajékin.
— C’est vrai?
— Mais oui?
— Et qu’est-ce qu’on doit faire?
— Il va s’arrêter chez nous...
— Cela ne sera pas délicat par rapport au père?
— Non, aïe-aïe! On ne sera pas ensemble, qu’est-ce qu’il y a de mal ici?
— Il faut égorger le mouton.
— Chéri, ohé! Tu parles? Bien sûr, il faut, on le recevait parfaitement toujours.
Le cœur d’Akbilek s’envole quelque part et plane. Elle est entrée dans les chambres. Elle a allumé la lampe. Elle s’est mise à faire le thé. Elle a déplié les bords des chemins mis de travers. Elle a pendu soigneusement le tapis de prière. Elle ne peut pas se trouver la place, elle va là, jette un coup d’œil ici: est-ce que tout est rangé, nettoyé, est-ce qu’il est propre des les coins. Comme si de la poussière sur les coffres dépendait tout son bonheur. Et il lui paraît que le samovar est crotté, les manches de Kajékin sont sales, les visages, les foulards des traiteuses sont sales, la nappe est en taches de graisse.
— Chéri, ohé! Comment tu as sali les manches! Si tu peux, n’essuie pas le nez par les manches, ne sois pas comme ceux-ci tous!
Elle a essayé les boursoqs cuits par la cuisinière et lui dit:
— Il faut que tu laves ton visage un peu, ohé! — Il lui a paru que le foulard de salisson est fripé, et elle lui a donné tout de suite le kiméchék[19] couvrant peu de temps la tête de maman.
Elle ne laisse pas tranquilles les bergers non plus:
— Est-il ennuyant de pâtre toute la journée les moutons? Les bergers ont été figés de stupeur: «À quoi bon tout cela ?»
— Mais pourquoi c’est ennuyant? — c’est ça ce qu’ils ont pu répondre.
Akbilek veut aider tout le monde, protéger tout le monde, réchauffer tout le monde, comme les oiselets sots sous ses ailes. Que tout le monde soit heureux et débordé de joie comme elle. Elle ne pense rien de mal à personne, elle ne veut vexer personne. La réponse des bergers «Mais pourquoi c’est ennuyant?» elle est prête à expliquer par leur ignorance qui leur est propre et pense: «Mais qu’est-ce qu’il leur reste, aux pauvres, à faire encore si ne pas pâtre ces moutons ennuyants, sans espoir, sans une attente de la rencontre avec l’amour? Ils se fatiguent, pas plus que ça».
Le thé du soir dure, il paraît, plus longtemps que toute la journée. Et la petite Sarah n’a pas encore de sommeil. Elle regarde fixement dans l’obscurité derrière la fenêtre, presse l’horloge sur le mur. Elle a débarrassé la table, a fait les lits pour les enfants, est sorti dehors. Elle est venue dans la cuisine et a ordonné à la cuisinière: «Comment est la viande? A-t-elle bouilli? Nous allons nous coucher tôt, nous avons du sommeil». Revenue, elle s’est lavée avec du savon parfumé, a lavé soigneusement le visage, et sous les bras, et le ventre. C’était un vrai rite de purification. En cachant de petits yeux noirs de Sarah la suivant, elle a sorti la robe de jeune mariée, l’a roulée dans le foulard de maman et l’a fourrée sous sa couverture.
Pendant que la viande mijotait Sarah s’est endormie. Kajéken s’est installé près des bergers et les a fait lui raconter un conte sur la sorcière aux griffes en cuivre. On a servi la viande. Akbilek n’a pas faim, mais elle n’arrête pas de prier à manger encore un peu. A la fin du dîner la tante Ourkiya est arrivée.
— La tante, mange de la viande! Ourkiya:
— Je vais seulement goûter, — et elle a goûté un petit morceau. Après le dîner, après avoir mis Kajébeke se coucher, Akbilek est sortie avec Ourkiya dans la cour, s’est arrêtée devant la fenêtre et s’est mise à demander ses conseils — comment il faut accueillir l’invité, où l’accueillir. Ourkiya pensait, qu’il lui fallait tout d’abord amener Akbilek chez elle, et y accueillir l’invité, et y recevoir. Akbilek ayant honte de se rencontrer avec l’oncle Amyr, a prétexté qu’elle ne pouvait pas laisser les enfants tous seuls à la maison, et a refusé. Bien qu’Ourkiya ait raison, il serait super de rester assise ensemble avec le promis au clair de la lampe à la même table et regarder fixement son visage! Elles pesaient le pour et le contre, et enfin Akbilek, assurée que le frère avec la sœur dormaient sur les deux oreilles, et elle a accepté d’aller à la maison de son oncle, toutefois elle ne va pas organiser le rendez-vous de nuit chez elle!
Les enfants font les rêves, et Akbilek a mis sa robe et le pourpoint de la fiancée, a versé une goutte de parfum sur elle, a jeté sur les épaules le tchapan en soie et en marchant silencieusement, a ouvert la porte avec précaution, a franchi le seuil avec le tremblement dans les genoux.
La lune est brillante. La neige brille comme l’argent. Les étoiles brûlent. Le sentier pratiqué se voit bien entre deux maisons. Ce sentier est comme le chemin amenant au paradis. Et il semble, si on fait un pas dans cette direction et on se retrouve devant la porte, derrière laquelle se trouve la vie la plus belle, la plus douce, la plus heureuse. Et avec chaque pas la porte de bonheur est plus proche. Le cœur bat d'une manière assourdissante. Ourkiya est sortie à sa rencontre.
— Et où est l’oncle Amyr?
— Il est dans l’antichambre. Je vais vous installer dans la chambre lointaine. Oh, Allah, aïe! Est-ce que le sort a voulu qu’Akbilek aille s’assoir près de lui?
Ourkiya a ouvert toute grande la porte. Si on arrive avec la lampe à l’homme dormant dans l’obscurité, réveillé il va absolument se couvrir contre la mèche tremblant à peine. Et ici la lumière a jailli directement de la porte de paradis! Akbilek est comme jetée en arrière, elle est intimidée, a hésité — les yeux baissés.
— Entre, chérie, entre!
On ne le voit pas. Mais toute la pièce est remplie par sa présence. Akbilek tenue par la tante, est entrée par les petits pas accompagnés par le frôlement de la robe. Elle regarde et voit que tout autour de Bekbolate brille des rayons de l’aurore! Akbilek s’est assise de côté. Elle n’ose pas de le regarder, elle regarde le plancher.
— Comment vas-tu, la sœur ? — C’est Akberguen qui la salue le premier.
— Je vous remercie... — elle pu bouger à peine les lèvres.
Le silence s'est fait.
— Nous te souhaitons d’apprendre dans la vie tout ce qu’il y a de bien, ce qui a passé votre mère! Tout est dans les mains de Dieu, ce qu’il nous reste c’est obéir à Sa volonté. Que tout s’arrange au plus vite chez vous comme il faut! — Akberguen a présenté ses sympathies et vœux et a jeté le coup d’œil sur Bekbolate.
Bekbolate s’est tu en guise de réponse.
Akbilek a essuyé les yeux par le mouchoir en soie froissé. Bekbolate regarde de côté silencieusement.
À cette époque Ourkiya est arrivée avec le plat de viande et l’a mis sur le dastarkhan[20] étendue devant les bienvenus. Ils ont rincé les mains de son pot à eau. Sur le plat est la moitié de mouton — une dizaine des parts les plus importants, parmi eux la poitrine — la régalade offerte uniquement au fiancé.
Akbilek ne peut pas s’assoir plus haut et plus près du fiancé, il lui semble, qu’entre eux il y a encore quelqu’un allongé. Et elle reste immobile presqu’à côté de la porte. Akberguen a sorti son couteau et a jeté un regard interrogateur sur Bekbolate: «Puis-je couper?» L’autre a fait un signe de tête.
— Pour le marieur, acceptez! — a dit Akberguen en désirant au Premier passer la tête de mouton brûlée et cuite jusqu’à l’état de gelée à l’oncle assis dans l’autre chambre.
— Aïebay, mangez vous-mêmes, les chers! D’abord le fiancé — c’est d’usage, et ensuite on va voir! — a réclamé Ourkiya.
Cependant, vu que Bekbolate s’excuse en mangeant ses mots, comme un bègue, elle a porté la tête à son mari, lui a pris une pincée pour une dent creuse et est revenue à sa place. Ils se sont installés autour de la nappe tous les quatre et se sont mis à manger. Ourkiya en jetant les coups d’œil sur Akbilek n’arrêtait pas de répéter:
— Chérie! Assied-toi plus près! Pourquoi tu es tellement gênée en présence de Bekbolate. Ici il n’y a personne plus proche pour toi que lui. L’âme est en train de chanter, chérie, n’est-ce pas? Elle chante tellement, c’est le plaisir, n’est-ce pas?
Akbilek s’est agitée timidement et humblement, soi-disant elle s’est déplacée, sans avancer ni au mouton appétissant, ni à Bekbolate bien-aimé.
— Voilà vous devez vous assoir l'un à côté de l'autre, côte à côte! Il n’y a personne des grandes personnes, pourquoi avoir honte de vos sentiments, — a encouragé Akberguen aussi.
En comprenant que ces deux ne vont pas la laisser tranquille, Akbilek a bougé encore et cette fois passionnément, que le bout du bas de tchapan bordé a touché le genou de Bekbolate.
«Mangez», — de quoi encore on peut parler autour du dastarkhan? Le silence est compréhensible: après avoir commencé la viande, même les bavards devenait muets, comme Aldéké, qu’est-ce qu’on peut exiger de Bekbolate arrivé en cachette et se cachant. Tout est cérémonieusement, décemment, tous sont courtois, attentifs, pénétrés du grand respect au compagnon de table, c'est trop fort! Toi, peut-être, tu as décidé, qu’ils mangeaient de la viande? Tu te trompes, tout le monde est en train de goûter quelque chose connue comme la «satisfaction». C’est un plat bizarre: tu n’es pas rassasié, tu n’es pas battu et tu caches l’honte, mais tu es content.
Bekbolate jette les coups d’œil par les bouts des yeux sur sa fiancée. Il voit qu’Akbilek est devenue plus belle, la raideur de fille a disparu, les épaules se sont arrondies, elle luit toute. Son cœur s’est mis à battre avec vantardise, la sourire se cache sous la moustache, quelle promise il a! Akbilek est timide un peu, les joues sont rouges. Ce qui la trouble aussi c’est le fait que ses doigts lui rappellent les mains de la Moustache Noire, et c’est trop — quelle honte. Les souvenirs déchirants sur ces jours dans la gorge l’inquiétaient, comme les mouches importunes d’automne. C’est clair que Bekbolate ne peut pas s’en douter. «Et s’il le sent?» — Akbilek inquiétée en lissant la mèche de cheveux, s’est renversée en arrière et a regardé Berbolate; les regardes se sont rencontrés. Ses yeux disaient: «Je n’aime que toi». Même dans les crépuscules on voyait dans les yeux scrutateurs l’affection éternelle, faisant s'évanouir. Et les yeux d’Akbilek répondaient: «Et moi aussi, je suis prête à te me donner complètement». Comment le feu d’amour ne pouvait pas s’enflammer dans ses yeux noirs, comme une étincelle du coup de briquet sur le silex. Et la lumière de l’amour éternel les a rempli tous les deux...
Après la tablée Ourkiya a accompagné le fiancé et la fiancée vers la porte et avec les plaisanteries les a fait partir. Il ne restait qu’aller jusqu’à la maison d’Akbilek plongée dans l’obscurité. Mais les amoureux n’ont pas même passé le hangar, et leurs pieds ne voulaient plus marcher. Il était difficile à faire un pas, ils se sont arrêtés. La main de l’affectionné a glissé sur la taille de l’affectionnée. Akbilek a renversé la tête avec provocation, la pleine lune brille de toutes ses forces. «Si tu désires embrasser, embrasse!» — disaient les étoiles du ciel en souriant. Et quand la moustache ressemblant aux lames a touché ses lèvres miellées... non, nous ne sommes pas capables de vous décrire cette image mieux que le poète Abay:
L’haleine chaude,
Le contact des épaules,
L’arrêt des doigts,
Le désir vague,
Le scintillement des visages,
Le baiser silencieux,
L’ivresse...
De quoi parlent deux amoureux brûlant de passion sur le lit étroit, de quoi ils convainquent l’un l’autre? Ce ne sont pas nous qui écrivons — ce sont eux, ils chuchotent jusqu’au matin: ce chuchotement est la plume écrivant le roman, la mer des sentiments est l’encre, le ciel des caresses est le papier...
Mais nous n’allons pas écouter, comme les vieux pique-assiettes, ce chuchotement dans la chambre sombre, vous allez leur demander vous-mêmes, de quoi ils ont chuchoté, s’ils vous disent. Quoi qu’il soit arrivé là-bas, à l'aube naissante Bekbolate était déjà dans la selle. Akbilek est à côté près de l’étrier, se roule dans le tchapan et lui souhaite du bon voyage.
Après le rendez-vous court avec Bekbolate la tristesse a commencé à perdre complètement son intensité méchante. Il est clair: ce qui l’inquiète maintenant est le plus important. Elle ne pensait qu’à ce qu’il y avait dans sa vie et à ce qu’il y aurait. Elle rêvait du retour le plus rapide de Bekbolate, la vie perdait les couleurs sans lui, tout devenait du noir et blanc... En lui disant au revoir, elle n’a pas pu le lui dire en se troublant.
Un jour elle a eu mal au cœur ... et l’inquiétude a niché dans le cœur, allez donc. Elle a envie de goûter les œufs des oiseaux. Elle s’étonne elle-même. Est-ce que c’est comme ça chez les femmes enceintes? Orkiya a entendu des femmes ayant le mou enflé et lui a raconté sur ce goût étrange. Tout, la grasse matinée, le recherche des œufs et le comportement changé, indiquait sur le fait qu’Akbilek était enceinte. Seulement cinq jours ont passé après la nuit avec Bekbolate. Akbilek s’est plainte de son malaise à Ourkiya, l’autre a confirmé son soupçon:
— J’ai peur que tu sois grosse.
— Mais laisse, la tante. Comment j’ai pu devenir grosse?
— Qui le sait.
— Mais c’est à l'instant même?
— D’où je peux...
— Est-ce que cela se fait sentir tout de suite?
— Non dans quelques mois.
— Donc, cela est arrivé avant...
— Si c’est comme ça, ça va être un scandale...
Chaque jour Akbilek était persuadée de plus en plus de sa grossesse. Et les tiges des bottes lui sont devenues étroites, et le ventre a arrondi... Nouvelles épreuves, nouvelles souffrances. Mais elle n’est pas mariée. Et on ne peut dire à personne, qu’elle a été avec le fiancé. En plus si on regarde: est-ce que c’est de lui... et qu’est-ce qu’elle doit faire... Les messes basses avec la tante se multipliaient. Elles ont commencé à chercher le moyen de se débarrasser du fœtus.
Ourkiya s’est mise à demander aux différentes vieilles plus mortes que vives comment on provoque un avortement. Cela s’est avéré possible en cas de la forte peur, lors de la chute, lors du mouvement brusque. Ourkiya a essayé d’effrayer Akbilek après être sortie devant elle du coin sombre: «Ohé!», elle la faisait sauter, gambader, la poussait dans le ventre. Sans résultat. Akbilek a seulement complètement perdu l’appétit. La faiblesse dans les jambes, le vomissement devenaient plus forts. Tout cela durait de la même façon, jusqu’à ce qu’une fois Ourkiya a dit:
— Tu sais, chérie, ohé! Il me semble, moi aussi je suis enceinte, le goût de l’oignon cuit m’est devenu dégoûtant, j’ai mal au cœur, j’ai envie de vomir... Et les odeurs...
— Mais pour toi ce n’est pas un problème! Tu veux un enfant... Tu veux rire de moi, j’ai assez... — a répondu Akbilek.
— Mais arrête, chérie, ohé! Est-ce que je peux!
C’est vrai qu’Ourkiya n’a inventé rien. Elle reste assise avec les femmes occupées par des ouvrages à l'aiguille, elle coud elle-même, mais d’un coup elle a sauté sur ses pieds, s’est jetée dans l’antichambre, où elle a vomi. Les femmes l’ont suivie, et y ont réjoui: il faut croire qu’elle est devenue grosse, enfin. À tout péché miséricorde.
— Ça se voit? — ce qu’elle a demandé seulement.
— Dieu fera preuve de charité, est-ce que c’est difficile, n’est ce pas? — les compagnes ont assuré avec plaisir la femme fatiguée.
Elles lui ont souhaité d’accoucher bien et n’ont pas tardé de rependre immédiatement dans l’aoul, et même pas seulement dans l’aoul, mais dans tout le district, qu’Ourkiya est devenue enceinte. Les femmes plus bienveillantes disaient: «Qu’elle ait enfin, la pauvre», mais les envieux de la maison de Mamyrbay: «Mais notre chien crevé va chienner plus vite, qu’Ourkiya va accoucher». Malgré qu’on fasse des potins sur son compte, mais on ne détournait pas de regard d’elle. Regarde ou ne regarde pas, mais dans un – deux mois son ventre a commencé à saillir.
À parti d’un certain moment l’aksakal a arrêté de descendre de la selle. Les affaires, les voyages dans les aouls, les rendez-vous sont oubliés. Et il est indécent pour l’aksakal de se cacher des gens avec l’air du veuf inconsolable, surtout quand parmi les parents les litiges, et les discussions n’ont pas disparu, et... l’Iblis je crois bien qu’a pris part, si cela se passait partout! En plus, il est impossible de garder son autorité, si on n’est pas inquiété par son importance, si on ne donne pas son avis ici, et on ne déclare pas là: ce ne sont pas vous qui avez raison, mais Dieu le très Haut. Autrement qui va continuer à t’appeler « aksakal»? Voilà Mamekin est obligé de partir.
Quelle mission il accomplit — qui le sait; cette fois-ci accompagné par un homme appelé Stelka, il s’est dirigé dans l’aoul de bay Aben. Dans cet aoul les gens n’allaient pas sans une raison importante. Et ce voyage d’aksakal, évidemment, n’était pas fortuit. Avant de partir, il a appelé chez lui le figaro de l’aoul pour mettre en ordre la barbe, et ensuite a exigé une chemise propre à Akbilek. Dans la petite poche du veston il a mis le petit mouchoir parfumée et plié en huit. Et il a fait le valet nettoyer les bottes sans épargner la salive. Il y a longtemps qu’Akbilek a vu telles préparations, il faut croire que le père se préparait visiter une place très importante.
L’aoul du bay Aben Matay est dans trente versts. Les gens de steppe d’habitude passent telle distance sans précipitation, en s’arrêtant chez les parents ainsi que chez les connaissances, et ils arrivent dans 6 jours. Mais l’aksakal Mamyrbay n’était pas comme ça, il ne traîne pas comme un mouton châtré. Il a galopé toute la route jusqu’à l’aoul d’hivernage d’Aben, où il n’a pas été, d’ailleurs, environ deux ans, en une marche d’une journée.
Les maisons de l’hivernage d’Aben, mur à mur, sont construites dans le vallon avec la source bouillonnante. Autour de la source il y a des buissons. La forêt entoure le buisson, les approches du vallon sont coupées de collines, et derrière le vallon et le bois se trouvent les montagnes blanches très hautes. Entre les hauteurs il y a un lac de roseaux. La maison longue d’Aben est juste après la source. Et là, la demeure solitaire avec le toit plat de son parent le hadja Satay s’est collée au passage de montagne.
Mamyrbay a passé la source et s’est approché du piquet de bay clôturé du côté sous le vent. Les bâtiments d’habitation, derrière la sortie large il y a tout de suite l’enclos pour le bétail capable de placer dans ses limites minimum cinq cents chevaux. Dans les constructions étendues par le mur complet sur la partie ombragé il y a un rang des portes. Toutes les portes amènent dans les sections de l’hangar pour les brebis et les génisses. Sous le toit de l’herbage transversal il y a les chevaux. Et la partie de soleil c’est l’habitation des maîtres. Là se trouvent les chambres de bay lui-même, à part pour ses deux femmes, les enfants mariés sont séparés aussi, il y a des chambres d’amis, les coins pour les travailleurs et les valets, la cuisine et la petite cuisine d’été, la pièce froide pour la conversation de la viande...
Les approches aux hangars sont proprement balayées. Deux chevaux errent dans l’enclos avec les pieds entravés.
L’aksakal après avoir a ttaché son cheval à la colonne, a fait un claque par son kamtcha sur la tige de botte, et en expectorant, s’est dirigé vers la porte basse amenant dans la demeure somptueuse de bay. Plongé dans ses émotions pénibles et en plus aggravées par le mucus intarissable dans le larynx, l’aksakal de grande taille est entré dans un couloir énormément veste avec les murs lisses et comme le gamin s’est figé stupéfié. Et les yeux de Stalka qui le suivait sont devenus énormes d’étonnement, la bouche s’est ouverte car il n’a jamais vu de demeure pareille. Et ils pouvaient rester stupéfiés avec les bouches ouvertes sans savoir quelle porte de nombreuses portes essayer, mais d’une d’elles un jeune homme de la domesticité est sorti, les a salués et les a invités de le suivre. L’aksakal, après avoir grincé par le seuil de la porte qui s’est ouverte devant lui, est entré dans le séjour. Dès qu’il s’est assis sur le banc, le valet s’est approché de lui en courant, s’est incliné et a retiré vite ses bottes. Et Stelka était toujours debout, immobile comme le balbal de steppe, de côté. Il faut voir — pour les bottes il y a une armoire de chaussures tellement grande que la pièce! Les planchers dans la maison sont exprès d’un niveau plus haut que dans le couloir, ils sont en bois, les plafonds sont plâtrés régulièrement, blanchis à la chaux. Les planches à partir de la porte sont noues, rabotées parfaitement et bien ajustées, au fond de la pièce elles sont couvertes par le feutre, les tapis et les couvertures. Entre deux fenêtres sur le mur lointain un ventilateur est fixé. Stelka a pensé: un moulin, ou quoi? Dans la niche près de poêle à carreaux de faïence est le tisonnier forgé, et sous le battant de poêle la bassine brille par le cuivre. Au-dessus de la place d’honneur, le tore, le tapis de prière et deux serviettes pour l’ablution sont pendus.
Mamyrbay a été installé dans la pièce centrale de trois pièces pour les invités. La chambre à gauche était aussi occupée. On entendait les voies indistinctes.
La nuit tombait. Le jeune valet a allumé sept lampes, a apporté trois chaises à longues jambes du bouleau poli sculpté et les a mises au centre de la pièce. Après avoir disparu il est revenu plus tard avec les mots:
— Le bay vient.
L’aksakal a rectifié sa position, a nettoyé sa gorge, a mis en ordre son gilet, a pris une pose digne à l’apparition du magnat et s’est arrêté immobile. Le bay est entré. L’aksakal a sauté sur ses pieds vivement et s’est jeté à le saluer avec les bras tendus. Le bay a prononcé à peine quelques mots bienveillants.
Monsieur le bay Aben était encore un homme de première force. Un aigle! L’homme bien de sa personne, la barbe roussâtre est peignée sur les joues, la moustache est en forme de sabre, à grand nez, la lèvre est avancé, les sils sont renfrognés, le regard sur le visage blanc est irréconciliable. Le maintien est comme chez le batyr[21] des temps héroïques il y a longtemps. À côté de lui l’aksakal Mamyrbay semble ne pas être l’aksakal du tout, mais un saligaud.
Le bay en restant debout a tendu son pied l’un après l’autre à son valet, le dernier a retiré les bottes et a déplissé par les mains le pantalon froissé de velours côtelé. Après avoir fourré sa main entre les mains tendues de Mamyrbay, le bay a passé à côté de lui et s’est assis sur la peau de chèvre noire corroyée tendrement.
— Ça va? — c’est ce qu’il a demandé seulement.
L’Aksakal à son tout s’est mis à poser des questions au bay sur sa santé, la famille, des proches et les parents, sur ses soucis durs des laïques. De même façon à toutes les questions il donnait la réponse courte:
— Allah merci.
Ils ont gardé le silence. Le bay a condescendu quand même, et a ajouté:
— Je vous souhaite aussi d’atteindre Sa grâce!
— Qu'il en soit ainsi! — s’est réjoui l’aksakal. Le bay a ordonné au valet:
— Appelle les gens de l’autre pièce.
Il a ordonné et tout de suite quelques personnes ont apparu. D’après la réplique de bay adressée à l’aksakal: «Installez-vous plus près», l’autre a compris, qu’il était ici l’hôte le plus respectable, et a pris des airs d'importance.
Parmi les invités il y avait le juge Imambay, Aldékey, Moussyrally. Les deux autres sont leurs copains. Dans ce même ordre ils se sont assis plus bas que l’aksakal.
Pendant que les invités se saluaient, on a étendu une nappe devant eux, on y a mis les boursoqs en petit tas, dans deux endroits on a mis des assiettes blanches avec les tablettes d’or de beurre, on a apporté un énorme samovar jaune. Deux valets se sont installés de deux côtés de samovar et se sont mis à verser le thé dans les tasses rouges en porcelaine alignées sur le plateau noir. Dans la cérémonie de verser le thé il y a son ordre: toute agitation était exclue complètement, le boisson dans chaque piala correspondait au niveau dû et à la qualité, chacune avait son adresse et ne se rencontrait avec l’autre ni sur le plateau, sous le bec du samovar, ni en flottant dans l’air, au-dessus de dastarkhan, les mains des verseurs du thé sont en vu, vous voyez: ils sont propres, appliqués et ouverts, regarde," parce que c'est l'usage — à ceux qui sont à la tête de table on verse le thé épais, de couleur d’or foncé, la crème y est d’une source séparée, et ceux qui sont assis plus bas que Moussiraly, avaient le thé qui bleuissait en rappelant le thé de ville à Semipalatinsk. Ils ne sont pas les regrattiers ici, personne ne va monter un bateau. Devant les moussyrallys même les boursoqs sont répandus seulement par-ci par-là, et il est difficile d’atteindre le beurre. Le bay après avoir remarqué comment notre Stelka courrait derrière les boursoqs comme le loup affamé, a ordonné:
— Envoyez sur ce bout.
Mamyrbay a jeté un coup d’œil lourd sur son homme plein de reproche: «Est-ce que c’est toi qui a organisé la chasse aux boursoqs, le ventre insatiable?» Ce qui a eu un effet: les boursoqs, comme les brebis près du berger ont pris souffle un peu.
Lors du thé ils parlaient des sujets différents. Au moment quand l’aksakal essuyait par le mouchoir plié encore la première sueur de son front, le bay a renversé sa tasse vidée en faisant comprendre qu’il a bu assez. Aux autres il ne restait que suivre son exemple.
On a débarrassé la vaisselle, la nappe est devenue déserte. En regardant le bay assis de la manière serrée à la kazakhe, personnes des invités n’a osé d’allonger les jambes plus librement. Ne prends pas de liberté. À moins qu’Aldékey était incapable de renoncer à sa faiblesse — il a sorti de la poche le corne noir avec le nasvay. La bay a fait un signe, et tout de suite le valet a mis devant Aldékey le crachoir avec le sable sec au fond. Le même vase était mis aussi devant le bay. Les gens comme Stelka, s’ils voulaient se mettre du nasvay derrière la lèvre, il leur faudrait courir pour cracher la salive coulante aux quatre vents.
Aldékey s’est mis à frapper légèrement avec le bout du corne sur la main, en versant le nasvay. Moussyraly a bougé tout de suite avec impatience, comme l’hibou qui a vu la sourie, et a tendu son bras vers la corne. Aldékey a jeté sur lui le coup d’œil avec distanciation, a secoué la tête et a fermé la tabatière par sa main large. Moussyraly s’est troublée, mais il ne l’a pas laissé tranquille:
— Un peu, un peu...
— Utilise le sien, — il a répondu d'un ton tranchant.
— Mais donne, je te dis! — Moussyraly a commencé à insister, a tiré le propriétaire du poison convoité par le genou.
Et le bay s’est mêlé en souriant ici:
— Et pourquoi Moussyraly insiste? — a demandé il à Aldékey.
— Je ne sais pas, pourquoi le chien a fait couler la salive, — a dit Aldékey le plus sévèrement possible, mais il n’a pas pu retenir la sourire.
Malgré que Moussyraly ait déjà vieilli, il était stupide, et d’habitude Aldékey, en le plaignant ne taquinait pas la personne de son âge. Le bay le savait, mais il était évident qu’il ne lui était pas assez d’une seule scène comique, c’est pourquoi il a commencé lui-même à faire le « baron » avec Moussyraly. Et l’autre ne comprend rien. Il fallait exécuter le caprice de bay lui-même, Aldékey a tendu le cou et a commencé à parler:
— Une fois notre Moussyraly faisait du commerce parmi les Nogaïs de tous menus objets...
La compagnie respectable a souri en se préparant de rire à ventre.
— Et à cette époque il a déjà été le marieur de Bokète. Bokète est un homme taciturne: il a dit comme a coupé net. Et alors Moussyraly s’est trouvé un autre interlocuteur — Issabay, se produisant dans la carrière du truchement chez les Kalmouks. Alors, les gens l’ont remarqué et raillent à Bokète: «Votre marieur, il paraît, ne s’aperçoit pas de vous!» Et Bokète, après avoir mis derrière la lèvre une bonne portion de nasvay répondait: «On voit le batyr avec le batyr sur le champ de bataille; l’orateur avec l’orateur — aux discussions; le mollah avec le mollah — lors des prières; et le chien avec le chien — près des rogatons. Qu’est-ce qu’il reste à faire au pauvre Moussyraly, s’il ne fait pas amis avec le truchement, malgré que celui-ci aboie en kalmouk, mais il aboie et comprend l’aboiement de l’autre, non pas que nous. Voilà le mot de l'énigme».
La compagnie respectable a éclaté de rire.
— Mais qu’est-ce qu’il raconte, ohé! Et toi-même qui es tu? — a essayé de se justifier Moussyraly rougi, mais Aldékey l’a interrompu et a commencé un nouveau bobard:
— Dans les temps anciens un bon khan est venu rendre visite chez un mauvais khan. Le mauvais khan, sans réfléchir, demande son invité: «Hé, le khan, est-ce que vos femmes deviennent enceintes? Est-ce que votre bétail fume le sol copieusement?» La femme de khan assise dans la chambre voisine a commencé à tirer par la ficelle attachée sur le pied de khan. Il ne restait rien au mauvais khan qu’aller voir son épouse. Le mauvais khan avait un vizir sage. Etonné par le comportement du mauvais khan, le bon khan demande ce vizir: «Pourquoi le khan est parti? Qu’est-ce que ses paroles signifient?» Le vizir répond: «Quand le khan a demandé sur la grossesse des femmes, il voulait se renseigner de la quantité de votre peuple, et quand il s’intéresser à l’abondance des excréments de votre bétail, il désirait se renseigner de l’aisance de votre peuple. Et il nous a laissés, car il a décidé, qu’il est inaccessible pour vous de comprendre sa langue». Et quand le bon khan est parti, le mauvais khan demande à son vizir: «Qu’est-ce que le bon khan a dit de moi?». Le vizir répond: «Il vous a fait des éloges». Et le mauvais khan dit: «Aïe, quelle dommage! On a tiré la corde trop tôt, j’aurais pu dire quelque chose encore plus sage!» Rappelez-vous et ayez de la pitié envers notre Moussyraly, ce n’est pas de sa faute, qu’il dit les bêtises. C’est de la faute à sa femme, parce qu’elle est paresseuse.
— Elle n'y est pour rien ! Elle n’est pas plus intelligente que moi...
— Plus intelligente ou pas, je ne sais pas. Mais elle est trop paresseuse pour venir avec toi et il n’y a personne pour tirer la ficelle à temps.
La compagnie respectable a éclaté de rire de nouveau. L'est-il ou pas, mais Moussyraly devenu cramoisi s’est mis à hurler:
— Quel garçon intelligent!
Cependant et ici aussi Aldékey n’a pas permis à son copain de développer son attaque tellement courageuse:
— J’ai eu une occasion d’entendre, qu’une personne que vous connaissez appelée Sembèke a décidé de blesser un homme d’Église le hodja Ja-nabila. Vous le connaissez tous aussi. Sembèke a dit le suivant: «Imam... On dit qu’une question a été discutée au majlis élevé et un des mollahs savants le Hodja Bakhaouddine a dit lors de son discours le mot de tablette préservée céleste de la façon suivante: «Zouljalal!». L’autre savant Taptazany a décidé de le corriger: «Il n’est pas correcte de dire «zouljalal», plus correcte est zaljalal». Bakhaouddine a commencé à discuter avec lui: «zouljalal» est correcte!», il l’a blessé, et il a proposé: «Regardons, comment ce mot est écrit sur la « Al-Lawh al-Mahfoûdh!» Ils ont regardé et il s’est avéré que: «zouljalal». Et Taptazany s’est mis à hurler: «Oh mon Dieu! Je sais que c’est «zaljalal»! Que faire maintenant, corriger ou comment?» Et Dieu lui a répondu: «Tu as raison, bien-sûr c’est: «zaljalal». Mais ce Bakhaouddine est un de mes esclaves les plus fidèles, et je ne voulais pas le mettre dans une situation délicate, c’est pour ça que j’ai corrigé sur la tablette préservée zaljalal pour zouljalal». Et dites-moi, le hodja: Est-ce que Dieu est capable de mentir? Le hodja Janabyl a répondu à Slambèke comme ça: «Quand Kazybek Kaz daousty Emphatique est mort, le Saint Bek Myssyk s’est approché de lui et a touché trois fois son corps par son bâton. Il avait intention de le faire quatrième fois, mais d’un coup quelqu’un l’a attrapé par la main: «Tu es fou ou quoi?» Alors le Saint Bek Myssyk dit: «C’est dommage que tu as arrêté ma main, ohé! Maintenant la sagesse de Kazybek-by se transmettra seulement à trois générations en comptant de lui-même. Malgré que notre Slambek soit le descendant de Kazybek Kaz daousty, mais il est né bien plus tard de générations marquées par le bâton, il n’est pas garçon intelligent comme moi non plus, bien-sûr, mais il ne passe pas pour l’imbécile. Voilà le grand père de notre Moussyraly était aussi touché par le bâton, mais seulement sur la tête et à tour de bras, de telle façon que son fils et petit-fils sont nés complètement sans la matière grise...
La compagnie respectable a ri à se pisser dessus.
Moussyraly mafflu, malpropre, qui ne vaut rien dans les affaires de parti, tout d’abord à cause de sa vénalité constante, était une personne idéale pour les railleries. Il est venu chez le bay pour le demander de faire son marieur rendre la femme enfuie de son fils, en plus l’imbécile.
Après s’être amusé de Moussyraly, le bay s’est réjoui et a ordonné par le geste à un des garçons bronzés de prendre la dombra. Ce musicien imbécile a imité une scène, comment le Kazakh avec l’Ouzbek répètent les chansons un après l’autre, ce qui a fait l’audience rire encore plus. Ensuite, de nouveau par le signe du bay, l’imbécile a pris les coins de son tchapan et en agitant les pans, en gonflant les joues, en avançant les lèvres, il s’est mis à imiter un oiseau. Il s’est approché à ceux qui étaient assis plus bas que les autres, s’est mis à tourner au-dessus d’eux, se jetait sur eux et tout à coup il a sorti au-dessus de Moussyraly ce qui pend chez les mâles entre les jambes. Et ici tous ont simplement étouffé de rire. L’imbécile a disparu et revenu déguisé de femme russe ayant le mou enflé. Cette «femme» s’est mise à faire la coquette avec chacun, en débitant des fagots en russe, exposait son derrière, a appuyé sur le bouillotte avec de l’eau cachée sous le bas et a commencé à arroser les invités par le filet d’eau. De nouveau il est revenu à ceux qui étaient assis plus près du seuil, et bien-sûr Moussyraly a été arrosé le plus abandonnement que les autres par le «jus de femme». Les aksakaux assis en tête de la tablée ne faisaient que tourner le dos au «baptême de femme» de loin, et n’étaient pas capables de dire un seul mot à cause du rire.
Pendant qu’ils s’amusaient des plaisanteries, les parties les plus appétissantes de poulain gras mises dans le kazan de cinq seaux ont commencé à être à point. Les domestiques ont chuchoté quelque chose sur l’oreille de bay, et il est allé dans ses appartements. Les invités sont sortis pour s'aérer: «Oui, aïe, c'est drôle, aïe!» — ils sont allés pisser, sont restés debout quelque temps, ont parlé du temps et sont retourné à la maison. Ils ont lavé les mains et rincé les bouches.
On a servi la viande — en pagaille, la moitié évidemment restera sans mangeurs. Mais on n’allait pas d’envoyer aux voisins de la table de bay, entièrement travailleurs de bay, tel ordre était établi chez le bay. En tendant la main vers le plat avec la viande s'élevant en nuages, Aldékey a dit presqu’en murmurant: «Comme ichan Toktar disait : il y a tout — quoi manger, et où s’assoir avec la jeune fille!» Il faisait du blabla, mais il fourrait dans la gueule les morceaux plus savoureux pas moins que les autres, en plongeant les doigts dans la graisse sans répit et d’une manière appétissante en prenant la viande. Peut-être, qu’il était obligé de sucer ses doigts gras pas tellement souvent, mais ici rien à faire — ce qui est autorisé à un glouton, n’est pas autorisé au discoureur de repas. Et ce qui est le plus important c’est qu’Aldékey s’est ingénié à exprimer avec la bouche bourrée le ravissement général par une seule phrase: «Qu’est-ce qu’on peut dire ici: si c’est le bay — c’est le bay». Les compagnons de table, en mâchant et en suant le soutenaient: «C’est incomparable! Oui, Dieu lui a donné!». Oui... Dieu lui a donné!
Le hongre a la queue de cheveu rare, si on la partage, il y aura deux vergettes. Il a l’air roussi. Peut-être pour ça, mais il est toujours avec la caboche baissée. La nature ne lui a pas ménagé l’échine plate. Dès qu’on badaude, on affaiblit la traction de bride, le hongre s'accroupit tout de suite et tend ses lèvres vers toute une paille, même sortant de fumier. Le hongre est osseux, mais le bedon, cependant, pend sérieusement entre les jambes fines comme les bâtons. Il est inutile de le nourrir — tout est sans aucun résultat: il n'a que la peau et les os. Il paraît que le sang froid coule dans ses veines, il cache son chanfrein dans quelque chose et somnole. En regardant son dos rond, les gens pensaient que le pauvre est né comme ça avec la charge sur le dos. Le hongre lui-même se fiche du fait qu’il avait l’air triste. Le plus importent c’est déplacer les sabots, mais qu’est-ce qu’il lui reste à faire, si ton maître et sur toi, et le maître a le troupeau qui vaut absolument se disperser? Le pas peu pressé qui suit le pas lent — on ne glissera pas. Soit sur la glace, soit sur la boue. Et le berger sur le dos de hongre est comme collé, le hongre ne se rappelait même pas combien d’années qu’on n’en descend pas. Il a presque oublié que lui aussi, il était un poulain il y a très longtemps, et il pâturait librement dans le troupeau.
Si on donne le fouet au hongre — cela fait le même effet que si on le lâche, l’habitude d’attraper tous les jours une portion de coups sur le derrière et de poing dans le chanfrein de la part du cavalier suivant faisait sentir — c’est comme ça chez les femmes d’aoul et les gamins. Mais n’erre pas n’importe où! Mais il aimait de marcher derrière les hangars et les haies, trouver une tige dans les mauvaises herbes et la mâcher. Et cela lui est arrivé qu’il allait on ne sait pas où. En le laissant errer comme une âme en peine, il ne sautera à la figure ni par sa constitution, ni par le petit trot, on peut ne pas payer l’impôt pour lui. Il arrive qu’on le fasse bouger un peu plus vite — le bedon fait du glouglou, on va tomber en ruines soi-même d'un moment à l'autre. Il paraît qu’il va du même pied, mais pour la personne qui est assise sur lui cela est loin d’être agréable. Au lieu de faire glouglou avec lui avec ses tripes, il vaut mieux être cahoté sur l’araba bossue. Une fois tu t’es mis à cheval sur la vache — toute ta vie tu vas suivre la queue de vache.
Le pire vœu est connu: que tu aies la femme paresseuse, le hongre sous la selle et le couteau émoussé. Mais quand même le hongre allait bien. C’est possible que grâce à sa vitalité étonnante le hongre a tapé dans l’œil des bergers, on ne va pas faire des suppositions, mais il marche toujours sous la selle.
Et il ne faut pas se casser la tête sur le fait, pourquoi nous avons décrit longtemps un hongre. Il y a une raison pour cela, et elle est importante. Comme vous le savez, le bay Aben a des invités, ils sont assis autour du dastarkhan et boivent du thé. C’est justement à ce moment que le béjaune Koytéké après être monté sur le hongre, est allé dans la steppe enneigée chercher les chameaux.
Nous ne parlons que du hongre, mais les gens aussi ont quelque chose des chevaux. Jugez bien. L’aoul des éleveurs héréditaires soudain confie aux bergers le pâturage de troupeau de chameaux, et ceux après avoir décidé que les chameaux ne perdraient pas eux-mêmes, se sont traînés derrière les moutons dispersés, et maintenant: où sont les chameaux, où sont les bergers? Vers le soir ils se sont mis à tenir conseil, comment trouver les chameaux. Il fallait envoyer quelqu’un habile sur le coursier rapide aux alentours, mais eux, ils ont mis Koytéké sur le hongre.
Vous allez demander qui est Koytéké? Il est un orphelin, son père a fait pâtre ces troupeaux à partir de l’adolescence jusqu’à la mort, la mère trayait les vaches de bay. De l’âge de neuf ans à l’âge de douze ans Koytéjé a fait pâtre les chèvres, et quand il a eu treize ans il surveillait les vaches. Pour les bergers cet adolescent naïf était le galopin: il prend ses fesses à poignée — et court. On grondait pas mal, bien-sûr, Koytéké, il était une personne appliquée, en plus il savait: s’il désobéit, il dégustera des coups des bergers aînés, c’est pour ça il allait ça et là comme il fallait.
Au-dessous du derrière maigre de Koytéké il y a un morceau de feutre, et sous le feutre se trouve le dos osseux de hongre, à sa main est le fouet de corde avec une bague sur la manche de fouet, il est vêtu en touloupe court, avec les gerçures sur les coutures, sur ses pieds sont les chaussures trouées de cuir tanné au graisse. Il veut trouver les chameaux au plus vite, il bouge les jambes et fouette de toute sa force la croupe de hongre. Mais le hongre est malin, pour lui les coups de fouet sont pareils que la promenade des poux. Il est comme ça, notre hongre, ohé!
«Aïe, vile créature! C'est bien fait pour ta peau! Dans ton oreille! L’engeance de chien!» — hurle Koytéké et donne le fouet sur la tête, sur le cou, en essayant d’accélérer le mouvement soit un tout petit peu. Mais le hongre, le chanfrein baissé, continue à bouger dans son rythme: deux pas — la rate fait glouglou, deux pas — le foie, c’est un vrai cheval ambleur! Qu’est-ce qu’il a à voir avec le gamin tournant sur lui, regarde comment il bat, comment il est fâché, il jure et maudit, et donne des pinçades de la faiblesse complète... Mais le hongre marche sans broncher. Houspillé, Koytéké a été en nage complètement, les bras et les jambes de l'épuisement complet. Mais même maintenant il n’a pas laissé ses stimulations. Enfin, monté sur quelque colline, il a vu de loin cinq petites tâches noires poilues. Et là il a dirigé le hongre, en se mettant de nouveau à lui donner les coups sur la nuque, sur les yeux. Le hongre n’a pas pressé le pas, Koytéké a seulement cassé le fouet sur ses os, en restant avec un morceau de la manche de fouet dans sa main. Il est descendu du hongre, s’est mis à chercher la corde du fouet tombée. Il a couru et a regardé ça et là, mais est-ce qu’on peut trouver la corde champignonnée parmi l’herbe sèche?
Avec la perte du fouet une nouvelle époque est arrivée pour Koytéké et le hongre. Et le triomphe de la bête à courte queue s’y est établi définitivement. Les tentatives importunes sur ses côtés endurant sont tombées dans le domaine du passé. Il y aura un moment long avant que sa peau sera touchée de nouveau avec l’objet dansant comme une mouche. Mais pour Koytéké les temps difficiles se sont éclatés. On ne peut pas donner le fouet par le tronçon de la manche de fouet sur le corps de cheval, le coup sera minime. Le hongre, cependant, ralentissait son déplacement sur la steppe irrégulière. Avec cette cours on ne peut pas atteindre ces cinq silhouettes sombres qu’on voit. Le béjaune sautait sur le dos de hongre, agitait les pieds, hurlait, jurait, se fâchait, tout est en vain: le hongre n’a pas chauvi des oreilles. Il a été obligé d’aller à pied. Il était tellement pressé qu’il n’a pas remarqué que la nuit noire s’est mise à avaler tout l’espace autour lui.
Koytéké grimpait en haut sur la hauteur et descendait de la pente vers les montagnes devenues troubles. Il lui était difficile à marcher, mais il essayait comme il pouvait d’allonger le pas. Les pieds flottaient dans les chaussures faites grossièrement, les semelles glissaient comme sur les pierres glacées. Et cependant il marchait sans arrêt, grimpait, se traînait avec peine de proche en proche. Il paraît qu’il a été en nage. Il a retiré le chapeau déchiré et l’a porté dans la main, a dénoué le ceinture sur la pelisse crevée. C’était une promenade comme il faut, elle l’a chauffé complètement, tout son corps lui démangeait, les gouttes de sueur apparaissaient d'une manière caustique sur le front. En sentant que toute la tête est trempée, il y a remis le vieux chapeau de fourrure. Il continuait à traîner comme ça, en déplaçant les pieds, pendant que l’âme se tient, rien à faire. Une tempête de neige s'est levée. Bien, il n’a pas même pensé qu’il faudrait aller à pied énormément, il ne s’est pas trompé, ne s’est pas mêlé. Pas de sitôt, de longtemps, mais il s’est quand même heurté sur le mufle tendu vers lui sur le long cou. Il a hurlé de surprise: «Va-t-en, le mufle, le choc!»
«D’où il vient?!» — se sont inquiété les chameaux, mais ensuite, après avoir vu que devant eux il n’y avait que le petit homme à pied, se sont mis à postillonner avec stupéfaction et malicieusement: «Yége — yége!» — et après avoir détourné le cou, ils se sont mis à disperser précipitamment, inquiétés par le craquement de vieille touloupe de Koytéké. Il a été obligé de les entasser, il est dommage qu’il n’y avait pas de meneur du troupeau parmi les chameaux. Les chiens aux cous longs! Tu l’atteins et commences à tourner un bossu, l’autre s’est déjà éloigné de côté, et ils ont fatigué l’homme autant, que son esprit y tenait à peine. Il a fait le troupeau et a conduit: «Allez au diable, l’engeance de chien!» Il faut dire qu’il avait des causes pour ce comportement sévère avec les chameaux.
Seulement après avoir tourné, Koytéké a réalisé le chemin qu’il a fait, les pieds étaient éculés, ils saignaient, chaque pas lui coûtait de la douleur. Il fait noir, le vent balaie la neige. Mais il ne restait pas d’autre solution que continuer à boiter en essayant de ne pas perdre les chaussures en montant. La halte n’était pas prévue, mais les pieds se sont glacés, claquaient comme de bois. Le froid se levait à partir des pieds dans tout le corps...
En tremblant et en claquant des dents, Koytéké conduit les chameaux vers l’aoul.
À ce moment la compagnie respectée bouffait de la viande grasse à la maison chauffée de bay, se moquait de Moussyraly, et l’imbécile courait par la femme ayant le mou enflé avec ses scènes vulgaires, et les invités en se soulageant au-dessous des avant-toits faisaient des éloges au bay: «Oui, Dieu lui a donné!»
Koytéké complètement gelé a amené les chameaux, est entré dans l’abri puant. Le berger au lieu de la compassion: «Tu as gelé le pauvre, ohé!» s’est jeté sur lui avec le cri:
— Où est le hongre?
Koytéké en essuyant le visage blanchi, plus blanc que le blanc, par les doigts inflexibles, a pu répondre à peine à travers la toux:
— Il est resté... là.
— Le claquedent maudit! Pourquoi tu l’as laissé? Et si les loups le mangent, qu’est-ce que tu vas faire? — le berger s’est mis à lui donner le fouet par les paroles en hurlant.
Koytéké en réponse ne faisait que haleter, en essayant en vain de se chauffer un peu, les jambes lui entraient dans le corps.
Il faut affiler par l’affiloir ce qui est solide, mais ce qui est mou il faut rouler par la main — est une simple vérité. Mais seulement la pauvre mère qui est venu voir son fils l’a suivi :
— Koytéké? Tu as mangé? Pourquoi tu te couches? Après avoir entendu le faible gémissement et le claquement des dents, la mère s’est précipité de se coucher à côté de son fils et l’a serré dans ses bras, comme elle pouvait, doucement.
Le petit fils a caché son visage dans sa poitrine et s’est mis à pleurer convulsivement. «Pauvre, tu es mon pauvre, pauvre, tu es mon pauvre!» — s’est lamenté la mère en tressaillant.
Koytéké ne s'est plus levé du tout.
Dans une semaine quatre travailleurs ont creusé le tombeau dans un des quatre coins de vieil enterrement et le matin ont enterré le petit corps de pauvre petit hère.
Le matin sorti dans la cour l’aksakal Mamyrbay a trouvé le bay Aben en pelisse d’astrakhan avec les boutons en argent, et s’est précipité vers lui pour lui serrer la main. Le bay suivait comment trois ses garçons s’occupaient de l’étalon moreau. Le fer à cheval est tombé et ils ferraient de nouveau. Après avoir dit bonjour Mamyrbay s’est mis à côté et a demandé:
— Le fer à cheval est tombé?
Le bay sans quitter les sabots de l’étalon des yeux a seulement prononcé le son: -
— Hé! — disons, est-ce que tu ne vois pas toi-même?
Un des djiguites tenait l’étalon par l’oreille et par la bride, le deuxième tenait sa jambe pliée, le troisième — le maître, arrachait les débris des clous du sabot. Il voulait sortir un des clous par le marteau, mais le bay n’a pas permit:
— Ça ne va pas comme ça. Extrais par la pince plate.
Le clou était enfoncé profondément mais il a été extrait par la pince plate facilement.
— Dans la grande pièce au tiroir inférieur de l’armoire dans une boite blanche il y a des clous pour les fers à cheval, va prendre six clous! — a ordonné la bay à un des garçons.
Ils n’ont pas eu de temps pour clignoter, mais le djiguite est déjà revenu. Quand ils ont commencé à enfoncer de nouveaux clous, l’étalon a commencé à bouger, à se tourner sur place. Le bay fatigué des gaffeurs a été obligé de prendre définitivement l’affaire dans ses mains, il s’est penché au-dessus du sabot et donnait des instructions:
— Ne touche pas l’articulation! N’enfonce pas directement, met le clou obliquement!
Le maréchal-ferrant aux mains maigres a procédé ainsi sans penser à contredire au bay, deux autres tenaient l’étalon, en caressant son cou et sa croupe: «Bouge pas, ma bête, bouge pas!» — ils essayaient de le calmer. Le cheval ferré s’est mis à regimber par les sabots, s’est levé brusquement. «Attention! Regarde!» — s’échauffait le bay. L’étalon s’est libéré des abots pendant qu’on s’agitait autour de lui.
— Pourquoi tu l’as dénoué, l’imbécile! — a hurlé le bay au garçon tenant les pieds de l’étalon.
Le djiguite a fait claquer sa langue par dépit et s’est jeté sous les pieds de cheval :
— La corde s’est rompue.
— Qu’est-ce que c’est que cette corde? Montre alors!
Le bay a examiné le fragment qui lui a été tendu et a hurlé:
— À qui est cette corde? La cochonnerie! Ce n’est pas notre longe!
Le travailleur qui a serré la tête de l’étalon excité a expliqué que la corde nécessaire a été utilisée pour le nœud de perche — le kouryke, et cette corde était au berger:
— Et où est allé le lasso de kouryke? Pourquoi on n’a pas enlevé le lasso de kouryke? Pourquoi personne n’est à sa place?
On lui a répondu que le kouryke a été pris par les bergers pour attraper les chevaux. Le bay ne s’est pas calmé, il continuait à interroger:
— Qui a fixé la longe au kouryke? -
On lui a donné le nom. — Fils de garce!
Après avoir compris que ce fils de garce n’aura plus de vie, les garçons se sont calmés. Tout le monde connaissait comment le bay s’exprimait aux moments de la colère spéciale entrainant les conséquences les plus terribles.
Dès que le bay a daigné de se mettre en colère, Mamyrbay s’est précipité à la maison, fuyons la tentation. Il s’est caché et a pensé qu’il était trop bas pour tel bay, dont les paroles sont bues par autant de gens, tout à coup de devenir furieux à cause de quelque corde. «Quel type chicaneur!» — pensait-il en s’étonnant que l’autre examine chaque petit clou.
Mais il ne faut pas chercher les défauts dans le caractère de bay Aban Matayine. Il savait toujours et il sait ce qu’il fait, et tous ses caprices c’est une partie de ses qualités qui sont loin d’être menues.
La bay Aben est connu à tout le monde, on peut dire qu’il est célèbre, mais s’il faut comprendre quelque chose, ou apprendre, il sait être élève à ce qui sait plus que lui, il est égal parmi les égaux, et à ceux qui sont inférieurs, il est le chef absolu. Il sait donner habilement, prendre en cachette et punir sévèrement. Il n’y a pas de telles intrigues dans lesquelles il n’est pas initiées, parce qu’il est une personne perspicace. Il n’y a personnes importantes ni parmi les Russes ni parmi les Kazakhs, qui pourrait le tromper, le circonvenir. S’il commence à être aux petits soins pour une personne importante, il le fait avec tel enthousiasme, telle générosité et se colle autant, qu’il termine par le vrai trouble de l'esprit. La personne signera tout, sera d’accord avec tout. Et ce faisant ne demandera rien jamais directement, mais construira la conversation de telle façon que celui qui fait les petits soins proposera lui-même tout ce qu’il faut. Et ce qui concerne les petites demandes, le bay charge ses familiers de les exprimer. Pour ça ils sont nourris, et enseignés à ses expressions: «Pour le bien du peuple... Pour le bien des Kazakhs... Pour le bien des orphelins, des vieillards infirmes...», ils sont dressés jusqu’à la politesse irrésistible, le savoir-faire de flagorner finement. Parce que le bay n’a pas de temps de s’occuper de petites affaires. Il donne une courte ordonnance: «Il faut faire ça comme ça, dire à celui-ci comme ça», — et c’est tout. Chacun, soit avec ses affaires de tribunal ou le fonctionnaire de voloste avec ses papiers de chicaneur, faisait tout son possible pour lui faire parvenir au plus vite son information juste, mesurée, chauffée, mettre devant lui le « plat prêt ». Et ensuite le bay décidera, s’il faut le consommer ou rissoler encore.
Après le petit déjeuner les gens familiers sont sortis spécialement pour se promener et parler séparément soit avec Mamyrbay, soit avec le juge Imanbay. Dans deux-trois heures ils sont arrivés à la décision commune dont le fond était le suivant:
1. Mamyrbay rompe le contrat de mariage, rend au marieur la rançon donnée pour Akbilek, car il est notre ennemi maintenant. Akbilek n’est pas considérée comme fiancée de Bekbolate, il faut lui trouver une autre place.
2. Imanbay doit séparer la veuve Oryk se trouvant sous les auspices avec ses deux enfants, la sortir de son aoul et la vendre à Mamyrbay pour six vaches ou chevaux. Un animal est à transmettre au bay Aben pour l’abattage du bétail d’hiver en signe de reconnaissance.
3. Le bétail de rançon pour la veuve il faut diviser. La moitié des têtes et deux enfants sont aux parents, à ceux qu’on trouve. La deuxième partie de bétail est à partager entre ses bienfaiteurs.
4. L’offenseur de l’aksakal Mamyrbay — Moukache — sera puni par le bay lui-même (Le châtiment sera choisi plus tard).
Ainsi, le temps passé à partir hier soir n’a pas été perdu en vain, tout a trouvé sa solution. Cela a été donné au bay par Dieu Lui-même! Mais on dit: «Si Dieu donne — attrape ce que tu peux».
Les Kazakhs souhaitent en pure perte sur le mouton de sacrifice que les serments des marieurs soient éternels. De quelle éternité on parle, si on peut décider et renoncer le marieur? Mais quand même ils continuent à prêter serment et souhaiter, car les serments et les souhaits résonnent bien, sincèrement.
Et ensuite. La séparation de la mère avec les enfants. Ceux qui ont le courage, ils se révoltent: «Les larmes des orphelins, les larmes de veuve... Il faut de la justice... Mais c’est le péché... Dieu existe...» Dites, pour Allah, où est la faute de veuve Oryk? Pourquoi ses deux petits enfants doivent souffrir loin de sa mère? Pourquoi Koytéké est mort absurdement? Pourquoi Akbilek et Bekbolate doivent se séparer après avoir touché à peine la crème de vrai amour par leurs lèvres?
Où est la vérité? Où est la justice? Où est l’humanité? Où est Dieu? Où est le châtiment divin?
Choisissez, les âmes innocentes. Le loup ne réfléchit pas.
Le père de Stelka, accompagnant l’aksakal Mamyrbay lors de sa visite chez le bay, était connu par le fait qu’il faisait pâtre les brebis et avait le nom correspondant, de chien, — Ytayak. Et le nom de son père était Bakyrache. Et personne ne se rappelait du nom du père de Bakyrache. C’est pour ça qu’on considérait que Stelka était l’esclave sans attaches ni traditions.
Stelka est un petit homme bronzé avec quelques cheveux sur le menton, ses jambes et ses bras sont comme les bâtons, une poule de caractère. Il faisait pâtre les chevaux, fauchait l’herbe, apportait le samovar et ne se mêlait pas avec les conversations aux honnêtes hommes, attendant quand on sert la viande. Il a environ quarante ans, mais il était toujours célibataire. La cause est simple. Il flânait parmi les femmes dans la cuisine, et il a eu une réputation dans l’aoul comme une femme.
Après le retour de l’aoul d’Aben, Ourkiya avec les femmes se sont mises à demander à Stelka:
— Qu’est-ce que le maître a fait là-bas? De quoi ils ont parlé? Stelka s’est mis à raconter en détails quelle viande grasse a été servie, le kazy[22] à quatre doigts, et il y en avait beaucoup qu’on ne pouvait pas manger. Ensuite il a raconté en détail à propos de la « femme ayant le mou enflé». Les femmes ne pouvaient plus se retenir, et enfin ont commencé à le gronder:
— Quelle poule! Un aigle! On ne t’a pas demandé à propos de la femme ayant le mou enflé.
— Mais qu’est-ce que vous voulez de moi? Je vous dis, ce que j’ai vu... — s’est troublé Stelka, en couvrant à tout hasard sa tête.
Elles n’ont pas pu avoir des nouvelles de Stelka. Alors elles ont commencé à examiner le maître. Si on juge d’après sa voix vive et contente, on avait impression qu’il a bouclé une grande affaire. Et déjà le lendemain il s’est avéré que l’aksakal avait l’intention de se marier de nouveau, ce qu’il a annoncé aux hommes respectables invités de l’aoul. Les parents ont exprimé leur joie et ont souhaité de la bonne chance. Ils ont laissé entendre, qu’il y avait longtemps, eux-mêmes, ils voulaient lui exprimer leur vœu, mais le cas ne s’était pas présenté.
Est-ce qu’il est possible de cacher des femmes ce que les hommes ont entendu? Cette conversation a atteint aussi les oreilles d’Akbilek, qui n’était pas du tout parmi les gens. Elle a été blessée tout de suite par le fait que le père n’avait pas attendu même le jour anniversaire de la mort de sa mère. Mais comment objecter au père! Elle a commencé à se consoler par les pensées que tout était conditionné par le soin des orphelins, que la maison est sans maîtresse... pourvu que sa nouvelle femme soit une personne honnête. Quoique... cela lui soit égal: on ne peut pas faire revenir la maman, pourquoi s’inquiéter spécialement? En plus, quand il y a sa tristesse sur le cœur, cela ne la regarde pas quand et avec qui son père a l’intention de se marier !
Une semaine à partir de cette nouvelle n’a pas passé, mais cinq parents lointains de la veuve Oryk ont apparu pour la rançon. Le même by Imanbay était à la tête. On a égorgé une brebis, ont a goûté le plat noir et blanc «kouyrouk-baour » dû pour telle cérémonie, signifiant, il faut dire, beaucoup. Le lendemain ils ont regagné ses pénates, après avoir pris avec eux trois vaches, un cheval, un étalon de l’âge d’un an et un chameau. Et pour aller chercher la femme Mamyrbay a envoyé Amyr avec trois copains et le fils Kagéken. Dans trois jours vers le soir on a amené la nouvelle mère à Akbilek.
Les femmes de l’aoul ont fait le ménage dans la maison, ils ont balayé tous les coins, ont nettoyé les tapis, ont préparé le chacha — une chose appétissante, sont sorties à sa rencontre, l’ont amenée vers la maison, l’ont amenée dans la chambre supérieure avec les vœux: «Que le grand bonheur vous accompagne» l’ont parsemée par les petites monnaies et les friandises sèches.
On a mis la belle-mère près d’Akbilek, elle s’est assise solidement, comme si elle ne se levait jamais de ce point. Sarah s’est installée sur les genoux d’Akbilek, le père était assis avec les hommes à la place d’honneur. Les femmes traînant avec elles les enfants se sont rassemblées dans la maison.
Akbilek a louché sur sa nouvelle mère. Il s’est avéré qu’elle était une femme bronzée avec le regard directe de dessous des paupières fines et des sourcils courbés, le nez court, elle était assise en se gonflant, le poing sur la hanche, comme si elle pensait tout le temps à quelque chose inaccessible pour les autres. Le cœur d’Akbilek s’est glacé. Sarah s’est cachée derrière Akbilek et est restée immobile dans une pose maladroite, comme une petite chèvre avec les yeux écarquillés. Kagébek est revenu avec le regard absent, il n’a pas ouvert la bouche, a enlevé la touloupe en silence, est allé vers le père et s’est installé devant lui. L’aksakal a examiné les enfants, on ne sait pas ce qui est arrivé dans sa tête, mais il leur a ordonné:
— Ne piétinez pas ici, allez-en!
Et comment les femmes peuvent garder le silence ici? Contredire au maître ne les arrangeait pas, elles se sont adressées à petite Sarah:
— Cette tante... chérie, est arrivée pour devenir ta mère! Approche-toi d’elle!
Après avoir entendu ce qui a été dit, la maman appelée a tendu elle-même sa main à la fille et a dit:
— Viens ici.
Sarah s’est serrée, a fait un bond en arrière et s’est cachée derrière le dos d’Akbilek. Les femmes ont braillé avec sympathie:
— Mais on comprend la petite ! Elle est restée orphelin! — et elles ont jeté le coup d’œil sur Mamyrbay.
Mamyrbay a évité de répondre. Alors les femmes ont commencé à sonder la nouvelle voisine, ont commencé à parler avec elle:
— Elle est gênée... c’est une enfant... Elle va vous importuner encore avec ses caresses — on n’arrachera pas.
Une des vieilles à cause de la pitié envers Sarah, ou après avoir oublié qu’elle n’est pas venue pour pleurer la décédée, a versé quelques larmes, en serrant le mouchoir contre ses yeux:
— Hé, là où Dieu veut, il pleut, aïe!
Pour s'habituer à la maison arrangée, il faut du temps pour une personne étrangère, dont on ne connaissait pas avant, et on n’a pas entendu parler. Est-ce qu’elle va s’habituer ou pas — on ne peut pas prévoir. Et aussi elle peut écraser par son poids toutes les maisonnées. Les femmes d’aoul ne prennent pas en compte cette philosophie: elles ont décidé tout de suite, qu’il leur serait très facile d’accoutumer la nouvelle. Sarah ne voulait pas manifestement s’approcher de sa nouvelle mère, et l’autre aussi ne se précipitait pas d’exprimer ses sentiments tendres. Même si elle s’approche d’elle elle-même, on voit d’après le visage vexé de Sarah, qu’elle se butera absolument, ne cédera pas, ne parlera pas.
La vexation était dans les yeux de la veuve Oryk, quand elle jetait les coups d’œil sur l’aksakal, il paraît ils disaient: «Pourquoi, toi, le vieil aigri, m’a privée de mes enfants, tout ce qui était accumulé, mon pays natal, où tout est cher pour moi? Qu’est-ce que j’ai eu en récompense — cette barbe roulée?». Et elle n’a pas aimé les femmes locales: «Dis donc, quels yeux avares et sévères elles ont! Elles se sont attachées à moi, elles sont prêtes à me conduire au tombeau». Et elle a pensé: «Il faut être plus aimable avec elles. Par où elles vont commencer, par quel morceau, par quelle main elles vont s’accrocher?»
Après avoir répandu les émotions dues pour le premier jour, les femmes d’aoul ont commencé à partir. Quelques hommes et une paire des voisins proches sont restés. Et ceux qui sont allés à la maison, discutaient l’apparition de la belle-fille usée.
Une femme:
— Elle a un mauvais œil, comme une païenne, non, cela ne terminera par le bien.
Encore une:
— Elle n’a pas ouvert la bouche, elle est une querelleuse, sans faute. La suivante:
— Voyez-vous ça, elle a froncé les sourcils, on voit tout de suite, que c’est une rusée. Mais c’est rien, elle n’est pas une personne importante, mais on voit que méchante.
Elles ont commencé à la comparer avec la décédée:
— Mais c’est incomparable... De radieuse mémoire... Mais quand elles se sont imaginées comment les enfants allaient vivre maintenant:
— Aïe, elle n’est pas bonne pour être la mère, la femelle sans cœur. Les femmes ont remarqué également que personne de sa famille n’avait trouvé le temps d’accompagner Oryk à sa nouvelle maison avec le respect dû.
— Mais qu’est-ce qu’elle fait d’elle?
Ourkiya versait le thé et en servant la piala à Oryk veillait attentivement chaque son mouvement. L’autre avec l’air imperturbable, ayant rapproché les genoux, s’est mise à boire le thé, après avoir tourné le dos à tout le monde présent. Ourkiya ne l’a pas aimé. Et elle voulait dire: «Tu viens de franchir le seuil, tu pourrais, chérie, ne pas affecter de grands airs et être assise vis-à-vis avec les gens et non pas de côté». Elle ne pouvait pas même s’imaginer, que devant elle était une femme, qui a survécu récemment la mort de son mari, séparée avec ses deux enfants; comment la femme en deuil doit être assise — seulement de côté, laissez-la s’habituer! Mais Ourkiya s’est imaginée que la belle-fille fraîche émoulue devait absolument vouloir complaire à tout le monde, en se gênant se proposer en qualité de celle qui verse le thé, au moins, soit assise et veille, quelle piala est vide, à qui approcher la petite assiette avec le beurre, qu’est-ce qu’il faut essuyer par la torchette ... mais la nouvelle hôtesse qui venait d’être amenée tout à l’heure a plein de soucis!
Les voisines ont attendu que les invités soient partis, et ont commencé à faire le lit pour les jeunes mariés. La matrone âgée s’est mise à secouer l’édredon de plumes de la mère d’Akbilek, à le caresser et dorloter. Et Akbilek ne pouvait pas supporter cette image: elle s’est mise en colère. «Est-ce que c’est vrai que quelque tante vilaine va se coucher sur les oreillers de sa maman chérie?! Mais ma maman aurait eu l’horreur d’essuyer ses pieds avec elle, mais qu’est-ce qui vous arrive, mais vous enterrez de nouveau ma maman!» Tout ce qu’elle a vu lui a fait mal, et elle était triste. Après la profanation du lit de la mère, il a commencé à sembler à Akbilek, que cette étrangère attenterait absolument et à ses affaires aussi, la volerait et pas autrement. Et elle a compris qu’un ennemi s’est introduit sous leur toit, l’ennemi à sa maman, son ennemi. Jusqu’à cette nuit offensante Akbilek allait dans le lit avec deux enfants dans la vaste chambre habituelle éloignée, mais maintenant ici il y a une personne étrangère, et elle va dormir avec sa petite sœur et son petit frère dans la chambre qui communique avec une autre. La pensée que cette femme étrangère a chassé tout le monde des lits habituels, a caché par elle-même leur père, est devenue insupportable pour elle. Et elle l’a amenée à une ligne définitive: c’est à ce moment-là qu’elle a perdu le père pour toujours.
Akbilek ne pouvait pas s’endormir longtemps. Les pas doux de son père dans cette chambre lui semblaient comme le bruit des sabots d'un cheval sur la glace. Voilà il s’installe, toussote... On entend tout — comment tintent les colliers de cette femme, comment coule l’eau du pot-à-eau... Elle s’est fermée avec la tête par la couverture — pourvu qu’elle n’entende pas, de toute façon les sons atteignaient ses petites oreilles. Avant, quand dans cette chambre sa maman dormait, rien ne la dérangeait. Mais maintenant tout le bruissement, tout le chuchotement, d’y arrivant attirait involontairement son attention. Qu’est-ce que cette femme fait avec son père? Pourquoi tu veux le savoir? Pourquoi cela t’intéresse? Mais parce que moi-même je ne suis plus la jeune fille, et, peut-être, je sais, ce qui s’y passe. Est-ce que les vieux aussi sont capables pour ça?
Son père toujours était son père et personne d’autre. Elle ne pouvait pas s’imaginer qu’il était comme d’autres hommes... Dans sa tête des poses bizarres sont remontées, elles étaient dignes qu’aux animaux sales, quelques mouvements de corps... Le père, quel horreur, aïe! Elle s’est imaginée d’un mâle lascif, qui n’était gêné de rien et de personne... Elle a commencé à chasser ces images, mais à leur place les autres sont venues. Celles, où... elle est dans les étreintes soit de la Moustache Noire... soit de Bekbolate, et elle-même elle a voulu de la douceur d’homme. À la folie et tout de suite. Et c’est tellement étrange qu’elle a été saisie par la vraie jalousie féminine envers le père couché avec cette femme. Les désirs dégoûtants et collants beurraient ses lèvres, ses seins... Elle comprenait toute leur affectation, sentait le dégoût profond à elle-même, se démenait dans le lit, sans s’imaginer comment elle allait continuer à vivre comme ça. Sans comprenant jusqu’à la fin les raisons d’excitation dans elle de la nature féminine, elle s’étouffait, le cœur battait... elle a souffert jusqu’à l’évanouissement, quand elle s’est endormie complètement ou s’est évanouie.
Le matin la nouvelle maman s’est levée définitivement exprès avant les autres et s’est mise à se traîner ça et là: elle a fait le lit avec des claquements, est sortie pour chercher la bassine pour les besoins connus d’elle-même et de son mari, cherchait la serviette de bain, a sorti la bassine, et tout a été fait à la volée, avec du fracas, pour la façade. Lors du thé elle ne s’est pas déjà assise à côté d’Akbilek, mais elle s’est installée à la place de la mère, près du père. Elle a mis une couverture pliée en quatre devant elle. Akbilek avec la sœur et le frère se sont retrouvés de l’autre bout de la table. Le père est toujours au centre. Cependant, d’après l’expression de son visage on ne comprenait pas: s’il approuvait ces déplacement ou pas. Akbilek n’aimait rien — et sa façon de s’assoir, ainsi que sa façon de se lever, et le fait qu’elle a commencé tout de suite à faire une hôtesse de la maison installée absolument à côté de la main de père. Ne voulant pas l’appeler : «maman», Akbilek n’a pas décidé comment appeler cette tante. D’autre côté, comment ne pas l’appeler la mère, si elle est devenue l’épouse du père de sa famille. Évidemment, elle sera obligée quand même, pour complaindre... pas à celle-ci... bien-sûr, mais au père. On a beau faire cela, le monde croit que ce mariage est une affaire assez normale, cela vaut dire, qu’elle aussi doit le croire. Il ne peut pas être autrement, ce n’est pas elle, Akbilek, maintenant peut contredire à quelqu’un ou à quelque chose. Voilà où en étaient les choses à peu près. Et c’était même la consolation pour Akbilek.
Oryk s’est avérée une femme travailleuse: tout de suite, après avoir noué la ceinture et roulé les manches, elle s’est mêlée dans la fabrication des saucissons de cheval, sans autoriser personne s'approprier la graisse intérieure, encore hier revenant aux pauvres travailleuses. La même chose est arrivée avec les rognures les plus défectueuses, avec les tendons et les veines, elle a ordonné de mettre tout dans la cuve à lessive de maître, même la rate et le larynx:
— Amenez tout ici! — a ordonné elle, en gonflant les narines.
Les femmes se sont échangées de regards et en accompagnant Oryk par les regards méprisants avançaient les lèvres: — Quel ventre anormal, mais qui est elle!
Tout ce que les travailleuses faisaient — Oryk était là, en veillant attentivement, comment elles débitaient les moutons, quel morceau allait où, comment on lavait les intestins et y met de la viande. Malgré qu’Oryk soit plus sévère et attentive en contrôlant le travail des femmes, les femmes pour la contrarier se sont mises à voler même ce, qu’avant elles ne pouvaient pas porter atteinte par délicatesse.
Tout a changé, le bétail ainsi que les valets — elle a pressé tout le monde, elle a humilié tous, elle mesurait, en contrôlant et en recontrôlant, en jetant le coup d’œil dans chaque sac, en secouant chaque bas. Elle le croyait nécessaire. On a commencé à compter toute la crosse, toute la miette. Oryk a apporté une innovation dans la réception des invités. Avant les jours de l’abattoir d’hiver l’hôtesse décédée invitait chez elle tout l’aoul, elle offrait généreusement par les choses appétissantes jusqu'aux oreilles, cette année rien de pareil n’a eu lieu. À ce point Oryk et l’aoul ont commencé à aller dans les directions différentes. Et bientôt les ennemies d’Oryk ont commencé à communiquer avec Akbilek. Akbilek a essayé d’avoir soins de deux-trois voisines dépossédées:
— Mamma, qu’est-ce que vous faîtes? Avant elles prenaient chez nous ces affaires.
— Ne te mêle pas dans les affaires de ménage! Occupe-toi de ton affaire! — a coupé l’autre et lui a tourné le dos.
Et l’aoul a prononcé son avis sarcastique sur Oryk: «Sans elle, la mendiante, la maison n’était pas riche, ohé! Mamyrbay va s’enrichir!»
Tout cela a provoqué à Akbilek l’aversion encore plus profonde envers la belle-mère, et dans son âme les offenses complexes s’accumulaient. Une fois Sarah a demandé à la belle-mère le bonbon acidulé, et l’autre lui a refusé. Qu’est-ce qui a provoqué cet acte incroyable — il n’est pas clair. Mais la petite fille continuait à demander, et Oryk s’est mise à crier:
— Est-ce que tu vas te lamenter encore longtemps? Voyez laquelle! — et elle lui a donné le coup sur la nuque.
Sarah a commencé à pleurer et a couru à sa sœur aînée. Akbilek a évité de répondre. Bientôt la belle-mère sans rime ni raison a basculé fortement Sarah, en déclarant que la fille a sali le paillasson par ses pieds. Sarah s’est mise à pleurer de nouveau. Et de nouveau Akbilek a évité de répondre. Dans un jour Kojéken a frôlé la lampe par hasard, elle est tombée en se répandant par le verre. Oryk l’a frappé à l’épaule et elle ne s’est limitée par cela:
— Quelle couche! Aïe, qu’est-ce que tu fais! Est-ce que tes yeux sont tombés — la bûche? La peste! — et elle ne pouvait pas s’arrêter, en maudissant et jurant le jeune homme par les mots les plus terribles.
Ici Akbilek qui n’a jamais entendu les malédictions pareilles, s’est mise en colère et n’a pas pu se tenir:
— Mais qu’est-ce qu’il vous a fait? Qu’est-ce qu’il en a fait de belles? Comment vous pouvez maudire l’enfant... Vous n’avez pas honte devant les voisins?
Oryk l’a arrêtée tout de suite par son hurlement: - " — Ferme ta gueule, la mégère! Ça ne te regarde pas? Pourquoi tu te mêles! Tu penses s’il n’est pas mon propre enfant... je peux non seulement le maudire, j’ai le droit de le jeter dans le feu, et il n’y a personne capable de m’arrêter! Je te défends de défendre ici! Aïe! Voyez, son petit frère! — et elle ne s’arrêtait pas.
— Aïe-aïe, ohé! Quelle honte! On va dire, la femme de tel homme... — Akbilek a essayé de dire encore quelque chose.
Oryk s’est mise à crier plus qu’avant:
— Et alors, la femme? Mais qu’est-ce que je fais — est-ce que je le déshonore, me fais quelques jeux de côté? Ou est-ce que je lui mens? Grâce à Dieu, ma main droite est propre, ma bouche est comme le dé! Et si je suis là, cela ne vient pas de moi, Dieu l’a voulu. Et qu’est-ce que tu t’imagines de toi, la trainée. Dieu m’a sauvée, il n’a pas permis de devenir comme toi, la couche russe, Dieu m'en préserve! — et elle mettait de la boue, si le chien blanc se fourre dans sa bouche — il sortira noir.
Akbilek est devenue muette, s’est mis à pleurer et s’est précipitée de s’en aller. En pleurant comme une fontaine, et en traînant Sarah par la main elle est allée chez Ourkiya. La tante Oukiya a serré les sœurs dans ses bras, s’est mise à les caresser sur les cheveux et les plaindre.
— Mais arrête, chérie! Mais arrête, enfin. Pourquoi tu t’es liée avec ce malheur? Qu’est-ce qu’elle a vu à part la boue et l’ordure, — elle essayait de calmer les nièces.
Mais Akbilek n’entendait rien, elle priait pour sa mère, maudissait son sort d’orphelin, sa honte, sa faiblesse, répétait que tel était son sort: être offensée par tout le monde, réprouvée par les gens ainsi que par le fiancé...
— Malheureuse, malheureuse! Est-ce qu’il y a quelqu’un plus malheureux que moi? Il vaut mieux mourir, que comme ça! — elle se cognait dans les bras de la tante.
Charmée par les larmes coulantes sans arrêt, Ourkiya pleurait aussi. Et elles se sont mises à sangloter ensemble, en tombant de fatigue, elles ont pleuré toutes les larmes de son corps.
Et le soir avec les mots: «Si le père l’apprend — il sera gênant» Ourkiya a accompagné Sarah et Akbilek avec les yeux rougis et les paupières enflammées à la maison de père.
Est-ce que le père n’a pas vu que les enfants souffraient, ceux, qui étaient déjà offensés par le sort? Et s’il voyait, vous allez penser qu’ils lui sont devenus indifférents. Oui, vous avez raison en quelque chose.
Est-ce qu’on voit souvent l’homme à la maison? La plupart du temps il passe aux pâturages, il faut veiller le bétail et les bergers. En plus tels maîtres que Mamyrbay ont habitude de piétiner plus dans la grange à foin, dans les coins de hangar, sur les tas de fumier, que dans la maison. Et comment va la femme, comment vont les enfants — il n’y a pas d’importance, ils vont d'une manière ou d'une autre. Il y a une hôtesse dans la maison, et c’est assez. Et le maître doit être près des travailleurs. Parce que tout doit être fait correctement et à temps. Et ils n’ont pas de temps pour les commérages et querelles, même sous leur propre toit. Et s’ils voient quelque chose par hasard, ils font semblant, qu’ils n’ont rien compris, ne se doutent de rien. Pourquoi? Mais parce qu’ils pensent que les paroles de la femme et des enfants sont le son creux, leur réclamations sont rien. Ils sont sûrs, que «la femme va aboyer assez et va se taire, et les enfants sont là pour pleurer», ce sont les piliers du foyer domestique! Les fils grandis les regardent et les imitent. Il est clair que Kajéken a préféré de ne pas se lier avec la belle-mère. Et Akbilek est restée seule.
Aïe, les sœurs, aïe! Ne croyez pas aux promesses des hommes sous la lune. Vous allez vous conduire vous-mêmes dans l’esclavage! Aïe, les enfants, aïe! Que vos mères ne meurent pas avant que vous grandissez et volez de ses propres ailes! Dans le cœur d’enfant avec le sang immature se jette la tristesse. Aïe, le bois jeune vert, les jeunes, aïe! Qui est-ce qui vous a donné le cœur chaud? Qui est-ce que vous a allaité, vous bichonnait, berçait, embrassait, protégeait? La maman... La maman... la bonne maman. Si on est capable d’aimer, si nous avons de la conscience et de l’honte, alors nous, les enfants, après avoir nous rappelé du père une fois, nous sommes obligés de nous rappeler de la maman dix fois. Le profond salut à nos mères! Beaucoup d’années de vie radieuses à nos mères! Prenez soins de vous, les enfants...
Après avoir entendu une fois comment Oryk criait aux enfants, l’aksakal a fait une remarque:
— La femme, il est assez! Où est la nécessité de gronder les enfants tout le temps?
Mais Oryk comme si elle n’entendait pas la question sévère du maître et ne s’arrêtait pas dans la chambre voisine. «Qu’est-ce qu’il va dire maintenant?» — a pensé Akbilek avec un espoir timide et a envoyé sa sœur offensée par la belle-mère avec le visage baigné de larmes voir le père. Mais il a dit seulement:
— Ohé, la femme, aïe! Qu’est-ce que tu veux! — et lui a tourné le dos en continuant à calculer et recalculer quelque chose.
À vrai dire, donner une leçon à la femme comme il faut n’arrangeait pas l’aksakal. Il est déjà âgé, elle est de dix-huit ans plus jeune que lui, c’est plus que le mouchel. Si elle lui fait porter des cornes ou le bat, cela serait la mort. Qu’est-ce qu’il y a du bien, si sur ses vieux jours il va se retrouver battu par sa propre femme. Mais le plus important, elle fait le ménage très bien, elle est très économe, que cela fait plaisir de regarder. Et pourquoi se quereller avec elle pour rien? S’il n’y avait pas de telle femme, est-ce que sa maison se teindrait debout? Se marier signifie vivre ainsi qu’accumuler. Et échanger des grossièretés toutes les heures avec la femme — il a de la honte vis-à-vis aux gens. Et il ne restait rien à faire à l’aksakal que transférer ses réclamations à Akbilek: «Est-ce qu’elle ne comprend pas ma situation, alors? Est-ce qu’elle ne me plaint pas? Elle pourrait ne pas m’envoyer les enfants, qu’est-ce qu’il arriverait? Pourquoi me pousser sur les aiguilles de la femme?»
Après cette querelle Oryk a décidé de se débarrasser d’Akbilek et s’est mise à exécuter sans tarder son entreprise. Dès qu’on éteignait la lampe, Oryk commençait à chuchotait quelque chose à l’aksakal, et lui, il paraît, se mettait d’accord avec elle: «Hé... hé... hé...» La plupart de ce mouchardage concernait Akbilek. «Ta fille ne me prend pour rien. Si quelque chose arrive — je n’aurai pas d’eau. Elle indispose les enfants contre moi, comme si je suis leur ennemi», — elle disait du mal d’Akbilek, en se rappelant du tout et, c’est clair, en mentant. D’abord l’aksakal tenait ferme: «Arrête! Mais qu’est-ce qu’elle peut, l’enfant peu raisonnable? Elle ne peut pas se comporter comme ça», — mais peu à peu, en écoutant sur les intrigues d’Akbilek, il a commencé à douter et penser: «Mais pourquoi la femme dirait tout le temps la même chose? Donc, il y a une certaine vérité».
La steppe déserte s’est figée sous le linceul de neige. On ne peut ni se promener, ni se lever, ni chanter. La tempête de neige passe en coup de vent au-dessus d’elle avec le sifflement, le gel pénétrant jusqu’aux os gémisse, le brouillard blanchâtre erre en agitant par la frange. Croise ton habille vite, au chaud vite, à la maison. Même les animaux se sont cachés dans les trous. La porte s’ouvre à contrecœur, avec le gémissement perçant. Le battant d'une porte s’est ouvert, et tout de suite deux arabas de grand froid roulent dans la maison. Les génisses sortent de l’étable plaintivement, les petits mufles noirs n’aiment pas le goût des aiguilles de la glace. L’homme aux cheveux bruns fait un pas dehors et, après avoir respiré une fois, se transforme en vieillard avec la barbe grise. Les femmes et les enfants ne montrent pas le nez dans la rue, elles se voient plus rarement, à moins qu’elles aillent chercher de l’eau. Les hommes prennent leurs soins du bétail. Ils n’ouvrent pas la bouche non plus. L’hiver de neige est une sourcière sombre, il a pressé tout vivant et hurlait par le hurlement de loup. L’habitation humaine en réponse ne fait qu’aboyer peureusement. Il semble que l’hiver se venge sur l’homme, de quoi? Dieu sait! Tremble, comme devant l’ennemi le plus terrible. La neige... la neige... la neige est partout.
Dans l’espace fermée serrée des jours d’hiver les femmes ne font que guetter et attirer par les signes mystérieux l’une l’autre et se mettent à faire des cancans ou se quereller de tout son cœur. Oryk a réussi vite dans cette occupation, et comment elle a pu lors d’un-deux mois rassembler autour d’elle les cancanières les plus vilaines?! Elle ne s’est pas arrangée avec Ourkiya dès le début, elles se sont prises de querelle au sujet de l’état de fiancé. Et comment elle a senti qu’Ourkiya était celle qui a poussé Akbilek pour le rendez-vous avec son faucon? Cependant, uniquement l’apparition d’Ourkiya faisait la bouche d’Oryk se couvrir de bulles de salive avec intensité, elle bougonnait, comme une hérissonne. Est-ce qu’il est difficile pour les femmes de trouver une raison pour la bonne querelle?
Une belle fois Oryke s’est presque jetée sur Ourkiya par le chien qui montre ses dents: «Petite maligne, salope, va-t-en, je te défends d’approcher de ma maison!» — et elle s’est mise à la pousser dehors. Elle l’a chassée. Ourkiya n’a pas demeuré en reste et, en se promenant dans l’aoul elle a annoncé publiquement tout ce qu’elle pensait de la belle-fille veuve. Il y avait les gens qui sympathisaient aux lamentations d’Ourkiya, il y avait les autres qui sont allés tout de suite voir Oryk. Ainsi l’aoul de Mamyrbay s’est fendu en deux partis forts. Le premier avait à sa tête Oryk, qui l’a organisé essentiellement des femmes vivant presque dans la misère; l’autre se composait de la plupart forte des hôtesses, qui se sont mises sous les armes d’Ourkiya et d’Akbilek. Mais qu’est-ce que peuvent faire encore les va-nu-pieds, s’ils ne lèchent pas les pieds à la gérante de maison de l’aksakal, ils sont arrivées en rampant et s’amorçaient de la table de Mamyrbay.
Et si l’affaire est arrivée aux partis, ici le principe de cruauté procède, et y ont marché les suppositions et la calomnie les plus incroyables, horribles. Elles ont épluché la conduite de tout le monde – chaque marque, chaque tache ont été mises à nu, exposées à la lumière. On a exposé au grand jour même les petits secrets, que même l’abdomen du pou peut cacher. Les femmes fouillant tellement avec application, bien-sûr, ne pouvaient pas de ne pas parvenir à savoir sur la grossesse d’Akbilek. Après avoir entendu cette nouvelle, Oryk s’est réjouie, comme si son ex-mari s’était ranimé et avait rendu ses propres enfants. À vrai dire, qu’on ne veut pas voir personnellement le plus dans ce monde, comment deux femmes sont en mauvais termes l'une avec l'autre. Si la haine se met entre deux femmes, prenez garde: en chiant des flammes on n’a ni honte, ni conscience, ni visage humain normal, les bouches sont les plaies, les âmes sont la puanteur, on met tellement de boue incroyable, qu’il ne reste qu’être consterné. Si la femme se met à piquer, le scorpion y peut seulement serrer sa queue. La femme pendant qu’elle est vivante, ne pardonne rien.
Dès qu’Oryk a appris qu’Akbilek était enceinte, elle a exclamé:
— Ah! Je vois qu’elle pousse des oh, souffle, cherche toujours à se coucher sur le côté, je pensais que c’était sa mère toute crachée... elle ne ferme pas les boutons de pourpoint... voilà pourquoi elle porte toujours le tchapan...
Maintenant il ne restait que s'approcher furtivement de la belle-fille, Oryk a commencé à se comporter de telle façon comme si elle ne se rappelait pas de mal, elle commençait à parler avec Akbilek cordialement, elle essayait de lui complaindre, là où elle pouvait. Akbilek ne comprenait rien et ne faisait que s’étonner des changements, apparus à la belle-mère.
Une fois Oryk s’est adressée avec sympathie à Akbilek qui avait intention de sortir dans la cour:
— Tu va faire prendre froid au ventre, ferme les boutons!
Akbilek s’est mise à penser: est-ce que c’est un mauvais tour ou un vrai souci, elle s’est renfermée plus, n’a rien compris et est sortie tristement sans dire rien.
Et encore un incident. En fouillant dans le coffre Oryk a trouvé un coupon de santope plié en quatre et se faisait un pourpoint avec les plis, sans manquer, il paraît, de demander un conseil à Akbilek. Elle l’a cousu, mais elle ne le portait pas, et elle jetait les coups d’œil sur le pourpoint d’Akbilek.
— Chérie, il me semble que ton pourpoint est fait pour moi. Voyons comment il sied sur la taille, ferme les boutons.
Et Akbilek a compris enfin, que la belle-mère rusait, et après avoir enlevé le pourpoint, elle lui a jeté en paroles:
— Pourquoi examiner sur moi? Tu veux essayer — essaye toi-même.
N’étant pas sûre définitivement de son soupçon, Oryk s’est levée très tôt et après avoir pénétré vers le lit d’Akbilek, a soulevé la couverture. Akbilek, après avoir senti que les doigts froids de quelqu’un touchent son ventre, s’est réveillée avec frayeur et a crié:
— Ah... ah... quoi... qui est-ce? — et elle a sauté sur ses pieds. Oryk s’est précipitée de la calmer:
— Tu t’es ouverte, et moi j’ai ajusté la couverture.
Tout est clair! Et voilà la jeune fille! Sans aucun doute, les femmes ont eu raison!
Pourquoi la femme humiliée, coincée poursuit l’autre, non moins malheureuse qu’elle, avec un acharnement incroyable? Qu’est-ce qu’Akbilek a pris à Oryk, de quoi elle la privée? Il paraît, tout est resté avec elle, la rançon est payée. Quoi? Et le fait, qu’on l’a vendue et qu’on l’a achetée après avoir séparé avec ses deux enfants, et c’est le père d’Akbilek et personne d’autre. Son âme déchirait, quand elle, voyant deux enfants plus jeunes de l’aksakal, elle pensait à ses enfants: «Qu’est-ce qu’il leur arrive maintenant?»
Le chien d'attache fait retomber sa colère en grattant tout ce qu’il est capable d’atteindre, et Akbilek est bombée sous la main d’Oryk, malheureusement.
Mais nous n’allons pas présenter Oryk comme une salope enragée irrévocablement. Peu à peu les affaires chères de bay dont la propriétaire elle est devenue, ont effacé les silhouettes de ses enfants lointains. Veiller la richesse, la multiplier sont devenus pour elle le nouveau sens passionnant de sa vie. Jour après jour le prétexte initial pour la vergence perdait sa signification, et bientôt la vergence à l’intérieur d’Oryk s’est déchirée de l’aksakal lui-même et, comme le sentiment autosuffisant, est devenu un art, une occupation pour l’âme, quand on a une heure libre. Quel est le plaisir parfois de pousser un peu celui-ci que tombe! C’est un sentiment incomparable, charmant!
Parmi les animaux l’homme est l’animal. L’animal à deux pieds a les doigts de pied en éventail après avoir trouvé la victime embrouillée! Il ne le déchire pas tout de suite, d’abord il fait le fanfaron, il aime torturer par la troupe, qu’on voit, qu’on se réjouisse du malheur d'autrui, qu’on loue, voilà c'est le pain bénit! Et ensuite traîner dans la boue sans trace, par le talon sur le sinciput. Il est particulièrement agréable de faire justice de la personne, qui par sa vie propre, généreuse provoquait à tout le monde le ravissement exceptionnel. Il est difficile d'une manière organique de les supporter, n’est-ce pas? Soyez d’accord, pourquoi vous êtes tellement gênés? À quoi bon une personne se met en avant comme une personne irréprochable? Il faut la salir jusqu’à l’état se ressemblant, pour qu’elle ne se distingue pas des autres.
À la fin d’hiver Oryk, après avoir cru que l’aksakal était complètement de son côté et s’est fié à elle, que jamais, a décidé d’en finir avec Akbilek et lui a annoncé la grossesse de sa fille. L’aksakal a eu tellement peur comme s’il avait vu devant lui un ours se tenant debout et montrant ses dents:
— Ah! Oh! Arrête... Arrête! Aïe! Aïe! — c’est tout ce qu’il a pu dire.
Mais il n’a pas pu y tourner le dos! La femme l’a fait croire à tous ses paroles, et pour finir, comme il n’y avait pas assez, elle lui a donné le coup de grâce par le fait qu’il était déjà le temps d’accoucher. L’aksakal a perdu contenance, s’est couvert de sueur froid et s’est serré. C'est peu qu’il ne s’est pas débarrassé du dégoût envers sa fille, qui est apparu dans lui à partir du premier jour de son retour, mais maintenant telle nouvelle est tombée sur sa tête!
Ces jours il a été de nouveau chez le bay et a confirmé qu’il ne marierait Akbilek avec Bekbolate, et il a déjà été dans un aoul nécessaire et s’est arrangé avec un nouveau marieur. Cependant, de ce nouvel endroit il n’y avait pas de contre-mesure. «On ne peut pas y chasser et on ne peut pas la laisser, elle n’est qu’un fardeau», — pensait-il, en préférant déjà même ne pas appeler sa fille par son prénom. «Si elle a pu devenir grosse, elle aurait pu jeter le dégénéré à temps. Il doit être d’un Russe. Même s’il est d’un Kazakh, de toute façon c’est une honte d’accoucher d’un enfant sans être mariée! — a-t-on jamais vu? Qu’est-ce qui peut être plus honteux?» — disait-il et crachait. Les Saints, aïe! Comment maintenant je peux me débarrasser d’elle? Où la fourrer, pour ne pas la voir? Est-ce qu’on étrangle les pareilles, ou quoi? Si on fait mourir sous les pierres, elle va apprendre ce qu’il sent! Les pieds et poings liés — et dans l’eau, qu’est-ce qu’elle va dire!
Le désespoir bilieux rongeait l’âme de l’aksakal, il ne pouvait pas manger, il se calfeutre dans l’hangar, sa volonté s’est répandue comme le sable, et sa femme s’est traînée de nouveau et dit:
— Ta fille a des douleurs de l'accouchement!
Les yeux de Mamyrbay sont injectés, et il a râlé:
- Mets-la à la porte, mets-la à la porte... la peste! Loin de mes yeux, la pécheresse!
Je ne veux pas la voir, je ne veux pas la voir! — c’est tout ce qu’il a pu dire.
Son cri effectivement n’a pas été long, mais lequel! Il est capable d’arracher l’hibou de la branche le jour. Et Ourkiya s’est jetée comme un hibou vers Akbilek :
— Il te dit de prendre la porte! Il te met à la porte! Ton père! Lève-toi vite! Parts! Va chez le tien. Il y a des témoins, ils ont vu comment il arrivait, et comment il partait. Mais qu’est-ce qu’on peut faire avec toi, on ne va pas se tuer? Ici personne ne lavera ton placenta.
Il est impossible d’exprimer comment ces paroles ont résonné dans l’âme d’Akbilek qui déjà souffrait et se donnait beaucoup de mal. Et tout de même elle a rassemblé ses esprits et en déplaçant ses pieds à peine, en tenant le ventre par ses mains, s'en est allée clopin-clopant.
Le printemps a ameubli les congères par la pelle d’or, la terre au-dessous d’elles a flotté par les mares avec le hachis de neige. Tu vas où? Arrête! C’est le soir ordinaire, les chevreaux et les agneaux bêlent avec remue-ménage, jetés vers les tettes de leurs mamans pas silencieuses, il faut dire. Le pêle-mêle!
Akbilek se traine avec peine parmi ce vacarme et fond, comme la neige de printemps, elle a atteint la haie, derrière laquelle Ourkiya s'affairait parmi ses brebis.
— Aïebay, aïe! Mais où vas-tu? Mais non! Il y a les étrangers à la maison!
— Si c’est comme ça, la tante, amène-moi de côté et y étrangle, tue! De toute façon je suis morte! — a poussé des sanglots Akbilek.
— Arrête, ne parle pas si mal que ça, — s’est mise à la calmer Ourkiya, mais que faire?
Elle lui a donné le bras et l’a amenée dans la hutte penchée et écrasée de Tchérépouchka se trouvant à côté. Les jeunes femmes appelaient de telle façon une vieille qui y habitait. Elle a mis au monde beaucoup d’enfant dans sa vie, mais uniquement un seul a survécu, et a atteint ses vieux jours. Maintenant il faisait pâtre le troupeau chez Mamyrbay. Elle avait une réputation d’une vieille sincère et honnête; elle restait silencieusement chez elle dans une piève minuscule et sombre, comme le tombeau, et coudait les broderies sur les feutres et tissait les fils pour tout l’aoul. Dans sa demeure il n’y a pas même de couvertures décentes, la claie d’achnatherum et des vieilleries sont sur le plancher de terre. Ourkiya a amené Akbilek dans cette masure et s’est mise à expliquer à l’oreille de la vieille les événements qui se sont passés.
— Aïebay, aïe! Et qu’est-ce que je dois faire maintenant?! — a exclamé Tchérépouchka et, en se voûtant, s’est mise à faire le lit près du four en utilisant la vieille natte, des paillassons usés et des couvertures déchirées. Ensuite elle est sortie et revenue avec les petits morceaux de différents tissus, s’est mise à les coudre en chiffon. À ce moment les douleurs de l'accouchement d’Akbilek se calmaient et redoublaient, elle ne pouvait ni s’assoir ni se coucher, elle gémit de douleur, et geint avec le visage contracté.
— Aïe, chérie, aïe! Patiente encore un peu! Le fond de la patience est l’or pur, fie-toi à Fatima, à Sainte Fatima, — chuchotait la vieille ses paroles magiques, en parsemant l’accouchée par le cendre, en l’aspergeant de l’eau et en caressant sans cesse son ventre. Quand les douleurs de l'accouchement devenaient insupportables, Akbilek entre ses dents a imploré:
— Fatima, Sainte Fatima! Ne tourmente pas mon âme!
Quand Akbilek essayait de descendre sur le plancher nu, Ourkiya l’entourait de ses bras derrière et remettait. Et la vielle la chassait:
— Aïebay, tiens-toi à l’écart! Si tu te démène ici, on va t’accuser, toi aussi. Et si quelqu’un est déjà en train de te chercher et vient ici, — et elle l’a accompagnée à ses pénates.
Pour faible Akbioliok qui ne s’est jamais incommodée par le gros ouvrage, l’accouchement était douloureux et long. Comme si quelqu’un déchirait ses lombes et l’hypogastre par la scie émoussée, tirait à la rupture, forçait et pressait, son corps brûlait insupportablement et se décomposait en morceaux flambants. Aux moments des douleurs de l'accouchement chaque son os faisait du mal et s'émiettait, tous les muscles et veines se déchiraient. Il paraît, tous les tourments du monde par rapport à sa douleur n’étaient que l’éternuement
Non, nous, les hommes, nous n’allons pas savoir, ce que l’accouchée supporte. Nous ne pouvons que deviner, que les femmes au bout du terme ne disent pas en vain, qu’elles ont fait un pas dans le tombeau. Suspendue entre la vie et la mort, en voyant son âme presque envolée d’elle, elle ne fait que penser: «Il vaut mieux de mourir plus vite que souffrir comme ça». Et voilà Akbilek périssante tombait dans le tombeau, en accrochant du regard seulement par la lumière tremblante de la lampe nue dans la pénombre tachetée, et demande, implore la défense auprès de Sainte Fatima; dans un moment la corde étranglant sur le cou le tire en haut, et elle crie de nouveau le nom de la fille de Prophète, ohé, Fatima! Il n’y a que la vieille près d’elle. À minuit, quand Akbilek en nage et la vieille sage-femme étaient complètement affaiblies, quand le temps a coulé dans l’éternité, les pleurs de bébé ont retenti victorieusement. Akbilek a perdu connaissance.
...et quand elle a ouvert les yeux, la vieille a déjà eu le temps pour couper le cordon ombilical, emmailloter le bébé dans les lambeaux propres, asperger son petit visage, et maintenant elle est en train de protéger sa vie courte. En retenant les paupières intensivement, Akbilek a demandé par la voix enrouée:
— Où est le bébé?
— Voilà, la chérie! Le garçon s’est avéré fort! — a répondu la vieille et a tendu le dokha[23] déchiré, dans lequel elle a mis le petit garçon.
— Débarrasse-toi de lui, la mère!
— Je vais me débarrasser, chérie, je vais me débarrasser! Voilà bois quelque chose! — a répondu la vieille et, en tenant sur le pli d’un bras le bébé, a tendu à Akbilek par l’autre la vieille tasse jaune ébréchée.
Akbilek a bu le lait tourné et a prononcé indistinctement quelques mots.
La vieille est sortie en serrant contre elle le paquet déchiré avec le bébé. Revenue à la maison, la vieille a assuré Akbilek, que son enfant a disparu à jamais. Ensuite elle a fait l’accouchée boire une tasse du beurre fondu pour le renforcement des forces. Après avoir bu, Akbilek s’est calmée et ses yeux se sont fermés.
La même nuit Ourkiya a mis au monde aussi, celle qui a attendu longtemps son enfant, a accouché d’un garçon adorable. Enveloppée jusqu'à la ceinture, ne voyant pas la lumière de Dieu, Akbilek est restée dans la baraque de la vieille de Korkembay plusieurs semaines; Ourkiya la nourrissait, parfois venait Sarah, elle la serrait dans ses bras et pleurait. Les seins d’Akbilek, qui n’ont pas été touchés par le bébé, ont gonflé, ils allaient s’éclater à cause de la surabondance du lait maternel, ensuite ils se sont pétrifiés, les tétins ont gonflé, se sont gercés, ce qui lui causait de nouvelles douleurs insupportables, qui ne cessaient pas soit pour une seule minute, elle a eu de la fièvre, et a passé quelques jours en fièvre. La vieille, qui a vu pas mal dans sa vie, soulageait ses souffrances comme elle pouvait, lavait ses seins par l’eau glaciale, y posait les torchettes beurrées, les serrait au plus fort possible. Tous ces efforts n’étaient pas inutiles, le lait a disparu.
À l’époque quand le lait maternel déchirait Akbilek, Ourkiya était avec les seins vides, et a failli faire mourir de faim son bébé, jusqu’au moment, quand elle a trouvé une des voisines qui a accouché ces jours et qui a accepté de nourrir et son fils aussi. On dit que ça arrive, que les femmes qui n’ont pas accouché longtemps, n’ont pas de lait...
Un jour Ourkiya est arrivée voir Akbilek. Il y avait une semaine qu’elle n’est pas venue. N’étant pas rétablie complètement de la révolte des seins, Akbilek a trouvé quand même des forces pour souhaiter amicalement du bonheur à sa tante.
— Moi aussi, je me suis presque rétablie, il paraît, je peux marcher, — a répondu Ourkiya et, après avoir sorti la feuille de papier pliée, l’a tendue à Akbilek.
Akbilek a déplié le papier, c’était la lettre de Bekbolate. Elle a lu le message et s’est mise à pleurer. Ourkiya a eu peur:
— Aïebay, ohé! Qu’est-ce qu’il y a? Je ne savais rien...
— C’est rien, — a répondu Akbilek et continuait à verser les larmes.
Le fond de l’affaire est le suivant. Après le moment quand Mamyrbay a déclaré qu’il ne marierait sa fille avec Bekbolate, ses parents ont refusé les accordailles. Mais Bekbolate n’était pas d’accord avec la décision de son père et a écrit quelques lettres à Akbilek avec intention de se marier avec elle quand même. Akbilek aussi lui a fait savoir qu’elle penser à lui comme à son promis, mais elle hésitait, rongée par l'ennui de l’âme. Qui peut savoir comment le destin ordonne? À ce moment Bekbolate a entendu dire de la grossesse d’Akbilek.
La conversation derrière le feutre dans un aoul est entendue par tous les Kazakhs à partir de l’Altaï jusqu’à Karkaly. Sans oser croire ou ne pas croire, Bekbolate a écrit cette dernière lettre à Akbilek, où il demandait: «Est-ce vrai? Si oui, je désavoue tout de suite, si non...»
Et comment Akbilek peut ne pas pleurer? Malgré que après l’accouchement secret, il paraît, qu’elle n’ait pas accouché, mais de toute façon elle ne pouvait pas lui mentir, l’assurer: «Non, jamais je n’ai été enceinte». De toute façon tout sera dévoilé. Vous n’allez pas me dire que vous pensez sérieusement, que personne n’a appris qu’elle était alitée dans la petite maison de la vieille de Korkembay. Ici il ne faut pas même chercher la langue à quelqu’un, la mamma Oryk a fait le rapport pour tout le monde elle même. Quel dommage, elle n’avait pas de preuve car il n’y avait pas d’enfant.
Une tristesse tombait dessus sur une autre, le brouillard noir a couvert de nouveau l’âme d’Akbilek, qui venait de se consoler un tout petit peu. Elle a commencé à penser de nouveau qu’il était mieux de mourir. Personne n’avait besoin d’elle dans tout le monde entier, elle est de trop, une exilée poursuivie par les chiens, et il lui ne restait que traîner sur le chemin pierreux en usant ses pieds jusqu’au sang toute sa vie restante; son cœur s’est serré dans la gorge, et les yeux comme les lacs comblés versaient les larmes sans cesse...
Quatrième partie
Amour
Cinq ans ont passé.
L’Irtych est un grand fleuve. La source est suspendue au-dessus de la Chine montagneuse comme la lumière.
Deux rives d’Irtych se trouvent dans les villes et les villages libres. Il y en a plein de monde différent. Au milieu du monde d’Irtych se trouvent Sept Chambres, Semipalatinsk, la ville des sciences et des arts!
La ville s’est levée par le chanyrak[24] très ancien, et les bateaux à vapeurs et les locomotives y abordent en éclaircissant leur voix par la fumée, les bateaux sont avec les marchandises et les locomotives roulent avec les machines. Ce sont les revenues!
Semeï est le cerveau de la région. À Semeï vous allez trouver la solution de tous vos problèmes. Tout le monde y trouve l’abri et du pain.
Semeï est le cœur de la région. Si Semeï bouge, tout le peuple de la région commence à bouger. Semeï sourit — toute la steppe rie.
Semeï se trouve sur la rive droite, et la petite ville Alache se trouve sur la rive gauche. À l’est est l’Ouest, à l’ouest est l’Est. Le fleuve Irtych se tourne et se retourne entre eux comme une chamelle, et il fait ressortir des vagues l’île solitaire. Le bout gauche de l’île est envahi par un petit bois épais.
En été le bois, après avoir étendu devant lui le tapis de pré, et après avoir ouvert au-dessus la tente bleue de ciel, est attractif de telle façon, que les jeunes et les vieux y vont en canots en abandonnant tout. Les hommes et les femmes mettent les habits de fête de couleurs éclatantes, quels visages! Dans la foule on voit plus de nuances de rouge et de vert. Une route court sur l’île, sur ses bords il y a des arbres et des herbes diverses. Le tressage des toiles d'araignée est le dais des buissons. Et le long de la route errent les silhouettes enchantées par l’écriture arabe des fleurs. Allons-y des broussailles sourdes et des coins tranquilles. Là-bas, les compagnies se sont installées dans l’ombre sous les arbres. Le vrai pandémonium! Parmi eux on voit les Tatares avec les paniers pleins de petits pâtés avec la viande — les paramiches et avec le samovar hautain, en plus il y a de la khalwa[25], des raisins secs; les Kazakhs près des kazans bouillant sur le feu déchiquètent les moutons, en apaisant la soif par le koumis. Les jeunes hommes russes se promènent avec les filles bras dessus, bras dessous, ils ont des fleurs dans les boutonnières de leur vestons, la casquette est penché sur la tête, la touffe ondulée, en voilà! Les Tatares russifiés boivent de la vodka, et enivrés chantent et soufflent dans les sarnays[26]. Il y en a du tout: les chansons et les mélodies, les prix amusants, et les beautés, et les lutteurs, et l’amour, et la bière, la vodka, les cartes, les peignées — le sang du nez, les jeux et le rire, le bruit et le brouhaha.
Vendredi. Tu as de l’argent? On va sur l’île! Rame! Allez! La dombra à la main! Où est Amyr? Appelle-le! Qu’il chante son «Ardak»! Qu’il fasse résonner tout l’île! Vas-y! Que la chanson atteint le sommet de Semeï! Ohé, mon île verte! Oui, Il y avait les jours heureux, il est intéressant tout y est comme avant? Il y a longtemps qu’on n’y est pas allé, plusieurs années ont passé. On s’ennuie de l’île, ohé. On s’ennuie de Semeï, d’Almaty!
Une jeune femme au visage blanc avec le mantelet léger jeté sur les épaules est assise sur le bord de l’anse de l’île, près de chêne moussu, le visage dirigé vers la petite ville Alache, et elle regarde le courant d’eau bouillonnant un peu, ohé les Saints, le public de l'île erre en buvant de la vodka et du koumis, en recherchant des aventures, pourquoi elle est seule, et qui est-elle, et qu’est-ce qu’il a fait s'isoler? Il est clair qu’il y a une raison.
Elle reste assise et comme une folle parle à elle-même:
— ...et quelles herbes sont sur les pâturages de notre aoul! On ne voit pas de veaux! Et quelle odeur, surtout quand on met des yourtes, la tête me tourne! Et quel est le lac près des montagnes! Il est lisse. On le regarde comme un miroir. La marmaille de tout l’aoul se rassemble, et on court au lac, on s'ébroue, on ramasse les petites pierres «les têtes de serpent» et «les boutons». Mes parents, aïe! Mon pays doux, aïe! Je n’ennuie tellement... je ne peux rien faire...
À ce moment une femme habillée d’une robe de ville à la mode s’est approchée de l’eau pour une minute et, arrêtée de côté a écouté ce monologue. Après avoir entendu la voix connue elle s’est approchée du chêne, et après avoir regardé le visage d’une jeune femme triste, s’est arrêtée:
— Les Saints, ohé! Si je ne me trompe pas... Je te connais. Tu es Camillia, n’est-ce pas? — et elle a fait un pas vers elle avec sympathie.
— Oui, — a répondu Camillia et a ramené vite ses jambes sous elle, en jetant les coups d’œil sur la citadine avec étonnement.
Et l’autre sans quitter la jeune femme de son regard, l’a serrée dans ses bras ardemment et a crié cordialement:
— Ma sœur ... chérie! Je ne pouvais pas même penser que je te reverrais!
Les yeux de Camillia étaient gros de larmes et elles ont commencé à glisser sur le visage. Les jeunes femmes se sont serrées et, en regardant fixement l’une l’autre avec attendrissement, se sont assises en entrelaçant ses pieds:
— Comment ça va ici?
— D’où viens-tu? — elles ont commencé ensemble,
— Non, toi est la première!
— Non, toi! — la citadine a tendu la main de Camillia et l’a serrée contre elle.
— Bien, si c’est comme ça, — la personne triste a commencé son histoire. — Mon Dieu! Rien à faire! — Elle s’est écoutée et a continué: — Je ne pouvais pas m’imaginer que je te verrais... combien d’années ont passé, quand tu étais chez nous au djaylaou[27] avec ta mère... À cette époque on était encore les enfants toutes les deux... Les Saints, ohé! On ne s’est pas revues depuis, n’est-ce pas?
— Personne ne peut savoir, avec qui on se sépare, et qui on rencontre — dans son nid paternel, au carrefour des chemins ou...
— Oui, c’est ça! Il a mal tourné! Rien n’est resté de ces jours là. On pouvait vivre tranquillement en paix, mains ce Rakymjam a apparu...
— Je ne me rappelle pas de lui.
— Mais lui, il se rappelle de tout le monde. Il a troublé tout le monde. Il a recruté des Kazakhs pour les soldats et les a amenés pour faire la guerre avec les rouges... Tout le monde est devenu fou, ou quoi?! Est-ce qu’il aurait quelque chose de mal, si on ne faisait pas de guerre? Et après il a apparu et déclarait: «Les bolchéviks ont gagné! Ils vont prendre le bétail et faire les femmes communes. Pendant qu'il en est temps pour vous, partez en Chine». Le chef est allé dans la ville, il est revenu: «Nous traversons!», qu’est-ce qu’il nous restait à faire, si on ne se préparait pas et ne partait pas à l’étranger? Toutes les yourtes sont parties. Nous avons eu le temps pour prendre avec nous ce qui était de léger, et les habilles, combien de coffres avec les foulards et de malles avec la soie on a laissé! Et je plains l’indienne. On allait le jour et la nuit, en conduisant le bétail, on s’est détaché à peine de la poursuite. Je ne me rappelle plus combien de jours nous avons marché, mais enfin nous sommes arrivés en Chine, chez les Kazakhs chinois.
— Oui, nous avons entendu dire, que vous vous êtes sauvés.
— On s’est sauvé, mais on s’est retrouvé que parmi les petits gens vilains, effrénés. Ils ont leurs propres lois, qui n’étaient pas compréhensibles pour nous, et chacun les interprétait comme il voulait, ils nous ont pris tout notre bétail. Surtout un chef local était furieux: il a pris à notre père tout le bétail, et nous sommes restés le bec dans l'eau. Nous n’avions ni bétail, ni maison, ni parents, ni proches, nous vivions dans une hutte. Je ne souhaite pas telle vie au chien dernier. On voulait me voler, mais Dieu a épargné. Mais il n’y avait rien à faire, on a eu de la peine à joindre les deux bouts en hiver, on a failli mourir de faim, et en été on est arrivé en boitant ici, chez les siens. On est revenu à notre aoul, on regarde, mais toutes nos constructions, toute notre terre sont appropriées par un va-nu-pieds des voisins. Il ne nous laisse pas entrer dans notre propre maison. Le père s’est adressé aux doyens, il est allé voir le volostenoy, tout était sans résultat. Mais comment autrement! C’est le volostenoy lui-même qui a donné notre maison. Le père essayait de trouver quelque solution, il a écrit une plainte sur le volostenoy. Il pensait que tout était comme avant, mais les temps ont changé, mais d’où il pouvait le savoir? Un jour deux miliciens avec les fusils sont arrivés à l’aoul, ont attrapé le père l’ont amené avec eux. Il leur demande: «Où est ma faute?» — et ils lui répondent: «Tu es un fuyard, un bourgeois». D’où on pouvait savoir qui étaient les bourgeois. On a amené le père dans la ville et l’ont enfermé en prison. Et il était là, on ne le laissait pas sortir. On avait notre oncle Akan, tu l’as vu. Il se jetait avec les demandes partout. Mais il n’a pas pu libérer le père. Et mon père n’est pas seul à qui cela est arrivé. Je suis restée seule, car la mère a décédé il y a longtemps, et là...
— Qu’est-ce qui se passe dans le monde! Mon oncle t’aimait beaucoup.
— Hé, comment il pouvait ne pas aimer sa fille unique. Il ne m’a pas donnée en mariage au Kazakh chinois, m’a ramenée. J’étais encore une enfant, je venais d’avoir seulement quinze ans. Je me désolais beaucoup quand il était en prison. Presque un mois a passé. L’oncle Akan a finalement pu l’en retirer. On était heureux. Avec la libération du père on nous a rendu toutes nos constructions et nos pâturages.
— Comment bien ça s’est terminé!
— Que cette fin soit maudite! Il n’y a rien de bien. Dans une ou peut-être deux semaines, vers le soir trois personnes très importantes de la ville sont venus chez nous... On les a amenées dans la chambre des invités, on les a faites s’assoir sur les couvertures en satin, on a égorgé le mouton, le père a tant couru qu'il n'en pouvait plus. Moi j’essayais de deviner qu’ils étaient? Les femmes ont commencé à se rassembler de tous les côtés. Elles demandent l’une à l’autre: «Est-ce que tu as vu le fiancé?» Mon cœur a glacé. Je demande: «Quel fiancé?» «Aïebay, aïe! Et alors, tu n’es pas au courent que ton fiancé est arrivé?» Je ne savais pas quoi faire. Les larmes ont commencé à couler. La belle-mère a vu que je pleurais, et me dit: «Pourquoi tu pleures? Tu n’es plus une enfant. Ou tu ne veux pas te marier du tout? Il n’y a pas de quoi réfléchir. Il est ton égal, jeune monsieur qui a fait ses études. Arrête, ne pleure pas!» Mais moi, je ne peux pas m’arrêter. Je lui ai tourné le dos, pliée en chien de fusil et pleurais à chaudes larmes. Je suis encore jeune, je n’avais pas encore d’idée de me marier... Mais on ne m’a pas dit un mot, rien du tout, et on te dit d’un coup: «ton fiancé est arrivé»...
— Aïe, rappelle-toi d’Allah, aïe!
— Je ne me suis pas levée pour manger, je restais couchée presque sans connaissance. L’oncle Akan s’est approché. Il m’a soulevée, il passe sa main dans le dos et a commencé à m’apprendre à vivre: «Nous ne voulions pas te donner en mariage. Nous avons mis d’accord avec quelqu’un de sauver ton père. Et maintenant cet accord est de travers dans notre gorge. Le temps est mauvais: si on ne devient pas parent avec un homme du pouvoir, on restera coupable pour toujours. On croit que vous êtes les fuyards, vous êtes la bête noire de tout le monde». J’ai compris quelque chose des paroles de l’oncle. Mais de toute façon je ne pouvais pas obéir avec résignation, je ne voulais pas. Quel horreur, comme ça, sans rime ni raison se marier avec quelqu’un! J’étais heureuse qu’on a libéré mon père, ma pauvre petite tête, mais il s’est avéré, qu’on m’a vendue pour cette liberté.
— Et après?
— Après? Après le diner les tantes, sans faire aucune attention à ma mauvaise volonté, m’ont traînée pour lier les mains avec ce fiancé. On m’a amenée dans cette chambre, et la lumière y vacillait à peine. Et près de la fenêtre quelque chose énorme, noir comme un ours s’entasse. Terriblement énorme. Et il donne les bouffées de fumée de sa gueule.
— Aïe, les Saints, aïe!
— Et à ce moment j’ai eu vraiment peur. J’ai pensé que cet animal énorme bossu m’avalerait.
Les tantes m’ont laissée devant lui et disent: «Pourquoi tu as peur? Tu n’as pas vu d’homme, ou quoi? Ne sois pas une enfant. Tu va t’habituer peu à peu», — et après avoir fait m’assoir à côté, elles sont sorties, en emportant avec elles la lampe. Je me suis toute serrée, je tremble, n’ose pas lever mes yeux. Cet ours a arrêté de fumer, s’est rapproché vers moi et a pris ma main. J’ai eu le cœur dans les chaussettes. Sa main avait l’air d’être en fer. Il me tire et dit: «Pourquoi tu restes assise? Assied-toi plus près!» Le cœur bat. Il m’a serrée contre son côté et s’est englué par ses lèvres charnues dans mon visage, m’a éraflé de sa moustache, et il puait de sueur. Il m’a prise par la taille et traînait au-desous de lui. Je pleurais et demandais grâce, et piquait comme je pouvais. Il faisait semblant de ne pas entendre. Il a cassé tout mon corps par ses doigts en fer. J’ai souffert la mort éternelle, ma sœur, il m’a torturée complètement, j’ai maudit tout dans le monde entier.
— Ce n’est pas de ta faute... Et qu’est-ce qui s’est passé après?
— Il est parti le matin. Dans environ dix jour, l’oncle Akan avec la belle-mère m’ont amenée sur l’araba avec la rançon dans la ville. Quelques hommes aimables et une femme nous ont accueillis, ont amené à la maison. L’antichambre est petite, mais deux autres pièces sont plus grandes. Le plancher est en bois, nu, n’est couvert de rien. Dans un coin il y avait un lit en fer. Nous avec la belle-mère se sont assises sur ce lit. Les hommes se sont installés sur les chaises autour de la table russe qui était au milieu. On parle de quelque chose incompréhensible, on fume les cigarettes. On ne sait pas où aller, et quoi faire.
— Oui, c’est vrai. Eux, les citadins, ils agissent de telle façon lors de la première rencontre. Et après?
— Ensuite on a invité les hôtes pour le soir. On a garnit le lit d’un rideau pour moi. La belle-mère avait mal à la tête et elle s’est couchée dans l’antichambre. Les invités ont commencé à se rassembler, ils disent bonjour très poliment. On s’est mis autour du plat de viande et on a commencé à trinquer par les verres et boire de la vodka en criant: «Santé de la fiancée!» L’oncle Akan ne voulait pas boire, mais ils ne le laissaient pas tranquille jusqu’au moment quand il a bu. Et moi, je restais seule au garde-à-vous derrière le rideau. Je restais assise et je plains mon oncle... Ils sont devenus trop ivres. Un garçon, il paraît, buvait moins, mains ils se sont entassés sur lui aussi. Et surtout mon mari hurlait, insistait: «Bois, pourquoi tu ne bois pas?» On les calme, mais ils n’entendent pas, et celui-ci, mon mari a la langue pâteuse et engueule, crie: «Je vais te tuer!» — et il se jette vers son fusil.
— Mon Dieu! Sauve!
— J’ai failli piser de la peur. Tous se sont levés brusquement, ont cassé la vaisselle, le plancher, la table, tout grondait, on a renversé tout dans la maison. J’ai sauté sur mes pieds d’horreur, j’ai regardé du rideau, je voyais que deux garçons étaient en train de tenir mon mari. Ses yeux sont écarquillés, biglés. Et seulement à ce moment j’ai remarqué qu’il était bigle, mais, il faut dire que pas bossu. Il a le fusil dans sa main, et il essaye de soulever la bouche. J’ai été chagrinée, la peur de lui s’est enfoncée dans mes os. Alors, ma sœur, son caractère s’est avéré vilain. Les invités ont calmé les deux à grand-peine, ont commencé à partir. Le chaos est partout: les verres et les bouteilles cassées par terre, les marres de vodka, les meubles sont renversés. Effrayée par la bagarre, j’ai sauté sur mes pieds, j’ai eu mal au cœur, et me suis allée en courant dans l’antichambre. Mais qui va m’aider? Le mari a accompagné les invités, en titubant s’est approché de moi et après m’avoir serré dans les mains a commencé à m’embrasser de nouveau. Il puait de vodka insupportablement. Il jurait le garçon avec lequel il s’est battu, a atteint le lit, y est tombé habillé et a commencé à ronfler.
— Aïe, les Saints, aïe! Quel mari tu as! Un mauvais mari...
— Mauvais? Je vais seulement commencer à parler du mauvais...
— Et qu’est-ce que tu as fait?
— J’ai beaucoup pleuré, en me saignant aux quatre veines j’ai étendu une couverture sur le plancher près du lit, je me suis couchée et seulement le matin j’ai pu m’endormir. À partir de ce moment il n’y avait pas un seul jour tranquille, il arrive du travail et boit de la vodka, ivre engueule tout le monde, et il n’y a rien à ajouter. Il n’a pas échangé un mot avec moi, comme si j’étais quelque objet inhumain. Il ne faisait que grimper sur moi, faire son affaire, et c’est tout. Il me restait que me bouler et rester immobile. Dans une semaine le mari a été licencié. Le parti, il me semble, ou quelqu’un a décidé. Il a été pris sur le fait d’accepter un pot-de-vin, s’est battu avec tous ses copains, brièvement dit, il s’est montré complètement. Après cela il a décidé de revenir avec moi dans son bled. Une Kazakhe venait nous voir. Elle était bavarde, elle avait la langue bien pendue. Une fois elle arrive et dit: «Ne te cramponne pas à ton mauvais mari, il va se retrouver en prison. En plus, il n’a rien, il ne va pas s'affranchir. Et ne pars pas avec lui. Reste ici! On te trouvera un nouveau mari...» Elle séduisait par plusieurs choses, je n’ai pas même tout compris. Bien-sûr, j’ai raconté tout à mon mari, quand il est revenu. Comment je pouvais le divorcer, si je venais de le marier? Et mon mari me dit: «Ce sont mes ennemis. Ils mentent tout. Ne t’inquiète pas». Et il m’a amenée ici.
— Alors, il est de Semeï?
— Oui, ici il a une piètre maison. Mais il ne m’y a pas amenée, il m’a installée chez un de ses amis louant l’habitation. Sa femme est Tatare, il a deux enfants blancs un peu hirsutes. On a mis le thé. On a bu le thé avec la famille du maître de la maison. Brusquement quelque femme russe grêlée apparaît, suffoque, les lèvres tremblent, s’est arrêtée près de la porte, tout pâle. Tout le monde s’est tu et a baissé les yeux. Mais le silence n’était pas long, la grêlée m’a regardé fixement avec la haine et dit:
— Alors, tu es sa nouvelle femme? Moi aussi, je suis sa femme. Il m’a quitté avec le petit fils. Et il n’y a pas d’argent pour le nourrir. Prends-le pour toi! — et elle pleure, et ne me quitte pas de regard. Je garde le silence stupéfiait. Après, le maître de la maison m’a tout expliqué. Il s’est avéré, que mon mari était marié avec une Russe. Mais il me l’a caché.
— Aïebay, quelle honte!
— Une affreuse honte! Je suis là et je ne comprends rien. Si c’est de la réalité ou si je rêve, je ne comprends pas. Je pleure, et mon mari s’approche. Cette femme est déjà partie. Le mari boit du thé et dit:
— Je ne vais pas prendre l’enfant.
Ses amis:
— Comme tu veux, — ils disent, et malgré qu’ils n’ont rien dit directement, je sentais leur dégoût envers lui.
Ici je me suis éclaté et dit:
— Pourquoi tu ne le prendras pas? Avec la mère russe il va devenir Russe. Prends-le chez toi!
Qu’est-ce qu’il me restait à faire... c’est ce que j’ai dit. J’ai été très touchée par son mensonge et sa cruauté. Comment il pouvait refuser son enfant, mais de toute façon il est son fils, et l’enfant de mon mari est mon fils aussi. Et moi, je ne comprends pas cette femme non plus, comment on peut abandonner son enfant. Le mari n’a pas suivi mon conseil. Sa première femme est partie de la maison quelque part, et nous y sommes venus. C’était une piètre maison, comme pour la femme cadette. L’enfant abandonné par le mari venait nous voir de temps en temps. C’était un enfant adorable de cinq-six ans. Il n’a jamais soufflé un mot, que mon mari était son père. Il parlait kazakh. Je le plaignais, le pauvre. Je demande:
— Tu vas être mon fils?
— Oui, — répond-il.
Mon mari est arrivé et tout de suite:
— Va chez toi, ne viens plus! — et il le chasse. Où est-ce qu’il pouvait aller? Et il quémandait dans la rue.
Une fois il a rencontré mon mari, son père, il lui a tendu sa petite main, mais l’autre n’a rien donné. Quel homme insensible, je ne sais pas... — a dit la jeune femme et s’est tue.
— Et où est ton mari à ce moment?
— Il est parti pour les affaires dans une autre ville, il a dit que c’était pour le travail. Deux mois ont passé, mais je n’ai aucune nouvelle de sa part.
— Tu as accouché?
— J’ai eu une fausse couche. Et j’ai enterré le deuxième enfant moi-même.
— Et comment s’appelle ton mari?
— J’ai trop parlé de lui...
— Tu n’as rien dit de spécial, ma sœur. On a tout simplement parlé un peu. Pourquoi tu as peur, tout simplement dis son nom, c’est tout.
— Qu’est-ce que le cheval a sur son cou?
— Un collier.
— Non, plus haut.
— Un douga[28]?
— Voilà est son nom.
— Quel bizarre nom. Et tu n’es pas malade? Pourquoi tu es tellement maigre?
— Mais est-ce qu’on ne peut pas maigrir dans cette situation? Même l’oie dépérit de la solitude... Je suis indisposée... c’est vrai. Je toussote.
— Aïe, chère Camaillia, aïe! Ma pauvre, qu’est-ce que tu as supporté, comment tu as souffert...
— Mais c’est moi... Il vaut mieux que tu parles de toi!
Après avoir entendu la demande de faire part de ses souvenirs, la citadine a hésité, et un chapelet des années et jours passés s’est déroulé devant elle de nouveau.
Les lecteurs du roman, peut-être, ont déjà deviné eux-mêmes, qu’il s’agissait d’Akbilek. Et la jeune femme est sa cousine, la fille du frère de sa mère, à son époque une personne aisée, qui a été volostenoy. Mais bien, il vaut mieux revenir à l’histoire d’Akbilek.
En été de cette année tragique pour elle, son frère aîné Toléguen est arrivé à l’aoul avec la prodrazverstka. Il a retrouvé Akbilek cachée dans la maison d’Ourkiya. Après avoir vécu à l’aoul un mois et demi, Toléguen a concilié le père avec tout ce qui s’est passé avec sa fille, et a ramené Akbilek à la maison. Comment elle traînait dans l’aoul avec le visage brûlant, ohé, il vaut mieux de na pas se rappeler.
Toléguen a déclaré qu’il était prêt de prendre la sœur avec lui dans la ville. Le père a évité de répondre. Evidement il est content de se débarrasser d’elle.
Il se trouve, que Toléguen avait intention de se marier avec une jeune fille, Maricha, qui est arrivée avec son frère aîné, le professeur, de l’Oural. Là-bas habite leur peuple, les Esseks. Ils se diffèrent des Kazakhs seulement par la langue, ils étaient les gens ouverts, de grande classe. Et la belle-sœur est d'une belle stature, grande, les yeux noirs comme les braises. Evidemment elle avait ses propres raisons pour déménager au Kazakhstan, peut-être, liées au fait que là, à leur patrie, ils étaient reportés à la noblesse.
La noce de son frère avec Maricha a étonné Akbilek, il n’y avait ni recherche en mariage, ni tout ce qu’il fallait selon les traditions séculaires. Personne n’a lié les mains des jeunes mariés, et il n’y avait aucunes tantes, lesquelles devaient amener la jeune mariée vers le lit et faire ce lit, personne ne l’a coiffée, n’a étendu la dot, on n’a pas offert les tchapans aux marieurs. Tout simplement Maricha est entrée elle-même à la maison sans la toilette nuptiale avec le visage ouvert. Elle est entrée, ne s’est inclinée à personne, n’a exprimé son hommage à personne. Et personne ne l’a accueillie avec la chanson «Jare-jare». Tout est d’un seul coup, et voilà toute la fête. C’est vrai, qu’il y avait des invités. La belle-sœur préparait la table elle-même, elle était assise près du frère et parlait librement avec les invités.
Akbilek a aimé sa belle-sœur tout de suite. Et Maricha a commencé à signifier pour elle, peut-être plus, que son frère aîné. Elle avait la voix timbrée, le caractère tendre, et elle était bienveillante. Elle croyait à tout ce qu’on lui disait. Elle ne savait rien des affaires de Toléguen et elle n’essayait pas de s’y mêler. Avec chaque personne elle savait parler clairement et d’une manière compréhensible pour lui. Parce qu’elle était une personne instruite, a décidé Akbilek. Elle a ouvert les yeux d’Akbilek sur plusieurs choses, autrement...
Bientôt Toléguen a été envoyé travailler à Semipalatinsk. Ils ont reçu un vaste appartement, vivaient dans l'aisance. Le frère a inscrit Akbilek aux cours.
À part Akbilek à l’école il y avait encore cinq jeunes filles. La plupart était les adultes. Même si elles savaient avant lire et écrire en kazakh, si on compare avec ce qu’elles allaient apprendre, cela dûment ne signifiait rien. On peut dire, elle n’a pas fait ses études. Au début Akbilek ne comprenait rien. Le mollah âgé l’enseignait lire et écrire à la maison de son père. Et ici il y avait des hommes habillés aux costumes de ville, et ils écrivaient les mots au tableau noir par la crée, et ces mots n’entraient pas dans la tête, ensuite ils expliquaient quand même, ce qu’ils avaient écrit. Pour la première fois elle a entendu de l’arithmétique, de la géographie. Ce qu’on enseignait, Akbilek notait avec application dans le cahier. Elle arrive à la maison et elle demande à la belle-sœur ou au frère de lui expliquer les endroits qu’elle n’avait pas compris. Ils expliquaient. Akbilek a fait ses études aux cours pendant six mois. À la maison elle aidait sa belle-sœur à faire le ménage. Elle mettait le tablier et pelait des pommes de terre, découpait les nouilles. Elle a appris les secrets culinaires de la préparation des petits pâtés, de samossa, des pelménis, des boulettes. Et elle a commencé à s’habiller autrement. Après le déménagement à Semipalatinsk le frère et la belle-sœur lui ont commandé des robes de ville à la mode.
Parfois Akbilek avec son frère et Maricha allait au théâtre et aux images animées. Elle s’étonnait: «Comment ces silhouettes plates peuvent bouger? Est-ce qu’ils ont une âme?» — elle n’arrêtait de demander à la belle-sœur. Il s’est avéré qu’elles ne faisaient que donner impression d’être vivantes, c’est-à-dire le moyen technique.
Ensuite Toléguen a obtenu au secteur d’enseignement le bulletin de placement à l’université ouvrière à Orenbourg. Elle y est allée avec une jeune fille. Avec Ajare, il faut dire, qu’elle était une personne légère. Une citadine. Ajare se comportait comme un enfant capricieux. Elle se maquille et court pour rien ou reste dans son lit le jour et la nuit.
Cette fois-ci Akbilek a pris le train pour la première fois. Elle a entendu parler du chemin de fer et des locomotives respirant par le feu, mais prendre le train c’est tout à fait différent. La nuit le frère avec Maricha l’ont amenée en briska à la gare. Il y avait la foule de gens, tout le monde se précipitait quelque part, s’afférait. La locomotive hurlait. Le frère a pensé au billet d’avance, et ils ont pris le billet sans faire la queue.
Assise dans le train, Akbilek a passé le long de quatre villes, elle a du changer une fois pour un autre train, passer la nuit avec la campagne à la gare. Ajare y a fait connaissance avec un garçon, ce qui a tourné pour elles par un certain avantage. Il était utile pour faire la queue fermement, et il leur a acheté les billets. Elles ont vu les endroits différents et étonnants. Elles ont passé à côté des lacs énormes et sur les ponts hauts. Les montagnes et les bois traînaient derrière les fenêtres. Akbilek veillait tout le temps que le train ne s’écrase pas contre quelque roche, qu’il ne reste dans le fourré. Mais non, il court, en sautant habilement entre les pierres et les troncs des arbres. Et comment il va! Il vole à une vitesse vertigineuse!
À l’arrivé à Orenbourg les voyageuses ont pris le briska et sont arrivées chez les connaissances d’Ajare. Dans la ville d’Orenbourg tout était plus décent, qu’à Semipalatinsk. Les rues étaient pavées, et elles ont aimé les briskas. C’est une petite voiture, qui se balance un peu.
Matin elles sont allées à l’école avec les papiers. On leur a indiqué une grande maison. Elle a été pleine de jeunes. Elles ont trouvé le bureau, ont montré leur bulletin de placement. On leur a pris sans demander leur reste.
La commune des filles se trouvait dans un immeuble séparé. Akbilek et Ajare ont eu les lits séparés. Elles ont apporté des draps et se sont installées. Toutes les filles autour d’elles étaient Russes. Parmi elles il y avait seulement cinq-six Kazakhes.
Les études se sont avérées dures, ce n’était pas comme à Semipalatinsk. A Semeï les professeurs étaient Kazakhs et les livres étaient en kazakh. Il y avait très peu de leçons russes. Mais ici les études étaient en russe. Tous les professeurs étaient Russes, à part un-deux Kazakhs. Akbilek a appris quelques mots et expressions russes chez le frère et la belle-fille, mais est-ce que c’était une science!
Ce qui était bien, c’est ce qu’il y avait beaucoup de filles russes autour d’elles, les conversations avec elles étaient plus utiles que toutes les leçons de russe. S’il n’y avait pas de filles russes, auxquelles elle voulait tenir tête, Akbilek ne ferrait pas ses études tellement bien.
Bien-sûr, il y avait les filles, qui couraient et sautaient comme les petites chèvres échappées la clôture. Après les en avoir vu, les Kazakhes aussi ont commencé à sauter comme les folles. Surtout notre Ajare et encore une fille. Elles disparaissaient la nuit. Dans la commune, en se cachant dans les coins sombres, elles s’embrassaient avec les hommes. Ajare s’est attirée des ennuis jusqu’à la fin: au milieu de l’hiver elle est partie de l’université ouvrière. On disait qu’elle est devenue enceinte. C’est peut-être vrai, qui sait?
Les garçons faisaient la cour à Akbilek aussi, si on peut l’appeler faire la cour. Mais elle évitait avec application les rendez-vous avec eux. Pour elle il était plus intéressant de rester avec ses copines discrètes russes. Mais les garçons ne la laissaient pas tranquille: «Allons nous promener, allons danser, parlons». Mais elle n’écoutait pas le chant des sirènes. Elle a déjà vu la vie. Qu’est-ce qu’elle a à faire avec les passe-temps des jeunes? Est-ce qu’elle n’a pas souffert des hommes? Bientôt elle a eu une réputation d’une jeune fille trop arrogante, d’une fille de bay, infatuée de sa personne. On assurait qu’elle était en correspondance avec un tas de garçons. Et il paraît, que toutes ces lettres étaient les lettres d’amour, et que tout ne se limitait par elles. On lui envoyait les mots avec les propositions ignobles, les menaces. Un soir sombre on l’a battue tout simplement, l’a faite tomber. On lui volait les cahiers, les livres, les mouchoirs. Mais ils se sont trompés d’adresse, va au diable! Mais les garçons n’étaient pas son problème le plus grand. Tous les deux-trois jours il y avait des réunions. C’était abominablement. Elle ne pouvait pas croire, comment tous y essayaient d’calomnier l’un l’autre, faire allusion, salir son proche, humilier, effrayer. Mais si on ne vient pas, on dénonce tout de suite. Et dans cette affaire nous Kazakhs étaient spécialement appliqués. Akbilek ne comprenait pas: mais qu’est-ce qu’ils veulent, qu’est-ce qu’il leur manque?
Dans la commune de foyer il y avait près de cinq cent personnes. Ils y habitaient densément et dans le froid. S’ils se lavaient ou pas, ça, vous savez, c’est une affaire privée, on ne sait pas. Mais il puait fortement. Dans quelque mesure cette ambiance était inévitable. Si on ouvre la fenêtre, il fait froid, si on ferme, il n’y a pas de quoi respirer, et il est facile d’attraper le froid. En plus il était difficile avec les produits alimentaires. Les années de disette. Pour un jour ils ont eu une demi- livre de pain noir et du potager aux pommes de terre. Le soir ils ont eu une tasse d’eau bouillante.
Il était plus simple de crever de faim que saisir les cours. Combien de jeunes créatures ont disparu après avoir tombées malades ! Il y avait parmi elles et celles qui sont vraiment mortes. Vers la fin de l’hiver Akbilek a atteint la consomption. Au printemps avec deux-trois personnes de son année elle est revenue à Semipalatinsk. Akbilek s’étonnait comment elle a pu survivre à Orenbourg, mais une chose elle savait fermement: personne ne devenait pas plus faible à cause des études.
Le frère d’Akbilek occupait déjà une place importante au comité de la région. Il lui a embauché tout de suite un professeur de russe sans enfants pour quatre mois, qu’elle ne s’ennuyait pas sans rien faire. Et elle a enseigné à Akbilek à écrire sans faute et parler russe. Le temps comme ça est venu, il le fallait. On ne va pas vivre de telle façon que les Kazakhs continuaient à vivre: dans la suie, la puanteur et les poux. La richesse est dans la connaissance.
— Même dans la suie, même avec les poux, mais avec les siens, parmi les siens. Je m’ennuie tellement de mon aoul, des visages proches! Il me semble je donnerai tout dans le monde entier pour me retrouver parmi eux!
À Orenbourg Akbilek a fait ses études pendant trois ans. La ville n’était plus étrangère pour elle. Les étudiants ont eu une idée de donner un spectacle «Baybiché et tokal», et Akbilek y a joué un rôle. Le spectacle a été donné dans le club Sverdlov. Les billets ont été distribués parmi les étudiants. Et le spectacle a réussi, et Akbilek était contente de son jeu. On a offert des fleurs. Un des professeurs l’a invitée à boire du thé tout de suite après le spectacle. À table on l’a présentée à deux camarades: Akbala et Baltache. On lui a offert de boire la bière. Elle a refusé. Les hommes n’insistaient pas.
Il lui est arrivé de rencontrer Akbala dans les rues de la ville. On parlait de lui comme d’une personne éloquente et instruite. Il était de taille moyenne, mais il avait le front est haut, le visage blanc. Effectivement, quand il commence à parler, — on ne se laisse pas d’écouter. Et ce soir Akbala parlait plus que les autres. Chaque son mot était pesé, le chrisostome, et c’est tout. Les autres l’écoutaient et riaient de ses blagues. Il s’est adressé à Akbilek et lui a demandé à propos des études, de sa vie. Il ne détachait pas les yeux d’elle. Baltache était assis à côté d’Akbilek, il faisait la cour, lui offrait de goûter ça et ça. En lui disant au revoir il a fait une remarque:
— Si vous avez des problèmes, vous pouvez vous adresser. Nous avons besoin du personnel pareil, nous sommes obligés de vous apporter tout notre soutien.
Akbilek ne s’est pas mise à chercher les rencontres avec les nouveaux camarades, elle faisait ses études.
Un jour elle a lu dans un journal que le camarade Akbala était en train de préparer un rapport. Il n’était pas clair pourquoi, mais elle a eu une intention d’écouter de quoi il allait parler. Les mains se sont tendues elles-mêmes vers le peigne, les pieds vers le miroir, elle ne comprend pas comment elle a mis le manteau et sortie dans la rue.
C’était une grande réunion. Akbilek s’est installée sur le dernier rang des chaises. Après le discours de quelque camarade russe le président a déclaré: «Et maintenant la parole est au camarade Akbala». Le cœur d’Akbilek a chancelé.
Akbala est entré en scène par le pas ferme. Il a mis la serviette sur la table, il a examiné attentivement la sale. Akbilek espérait qu’il n’allait pas la remarquer, non, il paraît, qu’il n’a pas remarqué, ou il a remarqué?
Akbala a commencé son discours. Il parlait lentement, par la voix bien placée. Akbilek a fixé ses yeux sur lui. Il parlait de quelque grande question d’état. Mais de quoi, Akbilek n’a pas compris. Elle voyait seulement son visage, écoutait seulement son baryton. Il parlait passionnément, en serrant le poing par la main droite et le démolissant sur la tribune comme un forgeron met son marteau sur enclume. Avec chaque mot il s’excitait de plus en plus, sa voix devenait plus forte. Le caractère passionné de son discours a été transmis à Akbilek. Chaque son sorti de sa langue, résonnait comme le bruit des sabots, et il a terminé son discours en jetant un regard de rois comme un étalon éloigné au galop des bandits. La salle a éclaté des applaudissements. Akbilek applaudissait aussi sans manager ses mains.
Après le discours d’Akbala on a donné la parole à ses opposants. Il y avait quelques remarques et opinions critiques à son adresse. Akbilek brûlait de regard foudroyant chacun de ses critiques. Elle n’aimait pas que les gens, qui venaient d’applaudir l’orateur, étaient en train de le critiquer. Akbala triait tranquillement ses papiers, ensuite il est entré et a répondu en détail à toutes les remarques critiques. Il a remercié quelqu’un pour son avis, il n’était pas d’accord avec quelqu’un d’autre, il a fait disparaître quelqu’un par ses arguments, ohé!
La nuit est tombée. Après la fin de la réunion Akbilek est sortie de l’immeuble. Pendant qu’elle regardait autour d’elle en se cherchant une compagnie, avec laquelle elle pouvait aller tranquillement au foyer, quelqu’un s’est approché d’elle de dos et a touché son épaule. Elle a regardé, c’était Akbala. Il sourie:
— Bonjour.
Elle s’est troublée. Il est possible qu’elle ait même rougi. Elle a eu peur qu’il avait remarqué le rouge révélateur sur son visage.
— J’allais revenir au foyer d’étudiants.
— Ah, je vais vous amener, on y va.
Elle est devenue confuse. Avant elle n’avait pas d’occasion d’aller dans la calèche de commissaire. Mais la pudeur de la jeune fille ne pouvait rien changer déjà. D’ailleurs, aller avec le commissaire dans une araba était flatteur.
Akbala l’a aidée à monter la calèche, s’est assis à côté et l’a amenée directement à l’immeuble d’école. En route il a demandé:
— Vous avez écouté mon discours?
— Oui.
— Qu’est-ce que vous en pensez?
— C’est un bon discours.
Sa question sur son discours, son désir de savoir son avis, sa main sur son poignet, son aspiration de s’assoir plus proche d’elle, le reflet doux de ses yeux lors de la lumière des lanternes rares — tout cela était plus qu’assez pour Akbilek. En lui disant au revoir Akbala a proposé:
— Et si on va au théâtre demain?
— D’accord.
Cette nuit Akbilek a vu Akbala dans son rêve sans rime ni raison. Peut-être, c’est de la sympathie à son égard? Akbilek n’y a pas pensé trop. Le lendemain à l’heure convenue elle s’est approchée du théâtre, et Akbala la déjà cherchait de regard. Ils sont entrés dans la salle de spectateurs. Ils se sont assis à côté. Ils ont parlé de beaucoup de choses. Il a commencé à parler des femmes instruites, de l’amour. Il dit quelque chose et il demande si elle était d’accord avec lui ou pas. La certitude d’Akbilek se perdait, elle voulait dire quelque chose absolument agréable, soit même loin de la vérité, mais elle n’arrivait pas — elle disait ce qu’elle pensait. Et lui: «J’aime votre opinion». Il lui a posé des questions sur ses parents et ses proches. Il l’a amenée de nouveau en briska. Il lui a serré doucement la main, et n’arrêtait pas de la caresser. Parfois au lieu de la langue engourdie de la personne amoureuse ses mains parlent.
Ce soir Baltache a été aussi au théâtre. Il avait une place dans un autre rang, mais pendant la pause il s’est approché d’eux et ne les quittait pas. Akbala et Baltache s’échangeaient des mots en se promenant avec Akbilek dans le hall de théâtre. Akbilek a eu plaisir d’être entre deux hommes intelligents, elle était dans les nuages, comme si elle avait des ailes. Il lui a semblé que Baltache était une personne instruite courtoise, n’ayant pas une trop haute opinion de lui, cherchant une attention de sa part. Et s’il lui posait une question, c’était à peu prêt de la manière suivante:
— Vous avez commencé à aller aux spectacles. Et alors... vous avez aimé le spectacle?
La vivacité avec laquelle les commissaires parlaient a excité Akbilek aussi. Et non pas un tout petit peu, mais énormément. Il lui semblait, qu’ils se pavanaient pour elle, et elle aussi, elle voulait briller.
Une fois elle a rencontré Baltache dans la rue, il s’est arrêté, a commencé à marcher près d’elle, en racontant quelque chose. Mais il n’était pas tellement éloquent qu’Akbala, il se répétait, hésitait. Il parlait généralement des études, de la vie quotidienne, du printemps. On voyait qu’il ne savait pas parler avec les jeunes filles. En se quittant il a retenu la main d’Akbilek et a dit:
— Je voudrais vous parler. Vous allez avoir du temps?
— Oui, — a répondu Akbilek. Elle a aimé qu’il se trouble. Elle attendait ce qu’il allait dire. Mais quelle femme peut refuser ce plaisir?
Dans trois jours Baltache a envoyé une lettre par ses soins d’un étudiant:
«Camarade Akbilek! Je vous demande, si vous avez du temps libre, de venir au parc Karl Marx. Envoyez la réponse avec cet étudiant. Baltache».
Akbilek sympathisait à Akbala, mais maintenant Baltache aussi a commencé à faire la cour, c’était amusant. Il n’était pas bien de ne pas aller au rendez-vous, elle a pensé qu’il pouvait s’offenser. Les femmes ont cette chose étrange dans leur comportement. En plus c’était le début de l’été. Les études se sont terminées, elle avait une bonne humeur. Et elle est venue à l’heure convenue. Elle s’est présentée, mais il n’était pas là. Elle a attendu, mais il ne venait pas; elle attendait, mais il n’arrivait pas. Elle s’est offensée, et allait partir. Mais il courait, essoufflé, comme s’il venait de la rive de l’Oural. Akbilek a attendu. Il est arrivé en courant, l’a saluée.
— Je vous ai fait attendre longtemps? — il a demandé pardon. Il s’est avéré qu’il était en retard à cause d’une affaire. Il s’est tu pour longtemps, n’osant pas de continuer la conversation. Et tout à coup il a déclaré:
— On croit qu’il est normal que l’homme est marié. Je cherche moi-même la compagne de vie.
— Je vous souhaite de trouver ce que vous cherchez, — lui a souhaité en souriant Akbilek.
Il a essayé de parler à propos des sujets abstraits, et ensuite est revenu aux préoccupations cordiales:
« Vous me plaisez ».
Akbilek ne pouvait pas avouer que Baltache n’avait pas la sagesse de Salomon. Voyez, un des professeurs la lui a louée! Akbilek a évité la réponse directe, après avoir prétexté qu’elle avait besoin de demander le conseil de ses parents. Telle attitude au mariage il croyait correcte. Ils se sont promené un peu, il l’a amenée jusqu’au foyer d’étudiants. Stupide, il n’a pas même pris doucement la main d’Akbilek comme Akbala, il ne savait pas.
Le lendemain une lettre d’Akbala est arrivée. Il a écrit de différents beaux mots. Il a noté qu’il brûlait passionnément d’un sentiment connu à son égard: «Je vous écrit parce que je ne suis pas capable de ne pas vous écrire. Vous êtes mon idéal, je vous aime. Sans vous ma vie perd tout l’intérêt. Je vous demande de me répondre».
Après avoir lu la lettre Akbilek a été saisie par les sentiments de joie. Est-ce qu’elle pouvait penser, qu’il lui offrirait son cœur et sa main? Elle a décidé qu’il avait décidé de s’amuser avec elle, elle ne pouvait pas s’imaginer autrement. Elle a même demeuré interdite. Toutes ses pensées cordiales étaient à propos d’Akbala. Baltache à côté de lui paraissait mal avenant, pas sérieux. Elle a répondu à Akbala: «Vos paroles me font plaisir. Vous m’avez plu aussi. Mais je dois en parler avec mes proches. Bientôt vous aurez la réponse définitive. Soyez patient, ne vous vexez pas».
Et maintenant il restait à refroidir les sentiments de Baltache, qu’il ne se donne pas de peine. Elle l’a vu de nouveau dans un jardin près de l’immeuble de caravane sérail.
— Il y a un homme à qui j’ai promis de le marier, — et elle attend sa réaction.
Baltache est devenu sombre et demande:
— Qui est-il?
Elle n’a pas répondu. Mais il insistait. Ayant vu qu’il ne se calmera pas, Akbilek lui a donné le nom. Baltache a dit:
— J’ai pensé à lui, moi aussi. Il provoquait toujours le ravissement aux femmes. Mais il ne s'éprenait jamais des étudiantes. Evidemment, il est pénétré de quelque façon... si une autre chose ne lui est pas donnée.-
Akbilek a été pleine des sentiments romantiques, mais on lui répondait par la prose de vie. Baltache est parti offensé. Elle ne le rencontrait pas longtemps.
Il n’y a pas de pire que si deux garçons amoureux d’une jeune fille se heurtent, pensait Akbilek. Au début tout se présente amusant, mais ensuite cela devient une grande vexation. Elle ne voyait pas de plaisir spécial quand elle était obligée de dire: «Tu es pire que lui, je ne t’aime pas». Tout le monde peut dire la même chose de soi.
Dans deux-trois jours Akbilek a eu le rendez-vous avec Akbala. Il s’est avéré qu’il n’avait pas aimé ses paroles qu’il y avait les gens, auxquels elle devait demander le conseil. «Est-ce que la femme instruite n’est pas la maîtresse de son cœur?» — il a déclaré avec un certain part de morgue. Et après son assurance que son frère aîné et sa belle-fille donneraient leur accord avec plaisir et l’accepteraient, il s’est calmé, et les paroles que, de toute façon, elle ne lui refuserait pas, ont restauré entre eux les relations de confiance. Il s’est mis à l’embrasser avec les mots: «Chérie... bien aimée... mon rayon de soleil». Il est un fiancé, elle est une fiancée, de quoi avoir honte. De quoi on peut encore rêver, quand on a un fiancé comme Akbala? La joie remplissait Akbilek. Elle n’était pas capable de rester sur place. Elle commençait à parler à tout le monde qu’elle rencontrait, riait de toute la bêtise. Elle a passé ces jours comme à l’aliénation mentale légère.
Un mois a passé comme ça. Il était le temps de revenir à la maison. Elle a eu une lettre de son frère: «S’il a promis de se marier, marie-toi avec lui».
Elle a été heureuse. Tout de suite, elle est allée en courant dans le bureau d’Akbala. Elle connaissait la route, elle est déjà allée le voir. Elle lui a montrée la lettre de frère. Il a mis la lettre de côté, a fermé la porte, il a commencé à l’embrasser en serrant dans ses bras. Les deux se baignaient dans le bonheur. Soir ils sont allés au cinéma, se sont installés dans la loge lointaine et, dès qu’on a fermé la lumière, ils se sont mis à s’embrasser de nouveau. Ils ne regardaient pas l’écran. Akbala a pris la décision d’organiser la noce dans une semaine et faire déménager Akbilek chez lui.
Le lendemain Akbilek a reçu une lettre de Baltache:
«Je dois vous voir pour une chose très importante. Elle est liée avec votre proche avenir. Je vous demande de me voir dans tous les cas».
Akbilek s’est étonnée, mais elle s’est faite aller à ce rendez-vous — il n’était pas convenable de refuser à tel camarade. Elle y est allée avec un certain dépit. Ils se sont rencontrés, se sont salués. Il déclare, imaginez-vous:
— Akbala n’est pas l’homme qu’il vous faut.
— Pourquoi ?
— Avant vous il était amoureux des jeunes filles pareilles. Mais après il les quittait, vous voyez, parce qu’elles arrêtaient de lui plaire!
— Cela ne m’intéresse pas, — a répondu Akbilek, en comprenant qu’il voulait la brouiller avec Akbala.
— Si vous ne me croyez pas, tenez son journal, — insistait Baltache et après avoir sorti le bloc-notes de la poche intérieure du veston, l’a tendu à Akbilek.
— Vous l’avez pris où?
— Nous sommes amis, alors je l’ai pris.
— Vous n’avez pas de honte pour voler le journal de l’ami? — s’est fâchée Akbilek en sentant comment le sang se lui est jeté dans la figure.
— Je sais — et j’ai honte. Ses notes concernent ses rendez-vous avec une jeune fille, je voudrais que ce soyez vous qui les lisiez. Vous ne voulez pas savoir comment est votre fiancé en réalité?
— Non, je ne veux pas.
Baltache s’est mis à assurer, que ces bagatelles d’Akbala étaient très intéressantes, il s’est collé comme une bavure:
— Permettez-moi de lire moi-même.
— Si vous voulez, lisez.
Le journal se reportait à l’époque quand Akbala pour quelque raison, peut-être une erreur commise au travail, a été envoyé d’un poste élevé au district. D’ailleurs, on pratiquait aussi la rotation du personnel.
«Lundi, le 5 février.
...Koulian s’est approchée de moi près de l’école. J’essayais de ne pas la voir. Je pensais qu’elle voulait me dire quelque chose. Elle a commencé à parler de la femme d’Abyken. Je lui ai fait comprendre que je ne supportais pas les cancans. Elle s’est éclatée de rire, mais d’après ses yeux j’ai compris que ce n’est pas de cela qu’elle voulait me parler.
Le 6 février.
En revenant à la maison j’ai vu Koulian et Janyl qui allaient à ma rencontre, elles bavardaient de quelque chose et riaient. Hier j’ai vu qu’un garçon a rencontré Koulian et est allé l’accompagner à la maison.
Le même garçon l’attendait aujourd’hui aussi.
Le 9 février.
Le secrétaire du comité a été pris en faute d’accepter un grand pot-de-vin. Seksembayev l’a laissé partir contre un gage.
Le 11 février.
Ce qu’il me faut dans la vie c’est le caractère passionné de la vie, quelque chose pareille. Si j’avais une bien-aimée, uniquement à elle je consacrerais ma vie, je me fiche de la carrière, cet exploit de travail. Maintenant je suis comme si j’ai perdu quelque chose, je me suis privé de quelque chose, comme partagé...
Hier j’ai été invité chez les gens. Koulia y a été aussi. Tous les hommes ont essayé de la faire parler. Je ne me mêlais pas dans la conversation, j’étais assis de côté. Elle était en blouse rouge parfaite, les cheveux en boucles, peut-être frisés, de quelque façon. Elle a commencé à me parler la première. Je lui répondais brièvement, un peu avec froid. Je demandais de rendre mes lettres. Evidemment elle a senti mon aliénation, et s’est mise à rire en prenant une bonne figure. Elle a demandé si mon désir de récupérer les lettres était lié avec ce qui s’est passé à la ville X. J’ai répondu que je ne voulais me rappeler de personne de cette ville. Elle a demandé: «Et les jeunes filles?» J’ai répondu: «Et les jeunes filles». Elle n’attendait pas de la réponse pareille, et s’est étonnée. J’ai rencontré une d’elles récemment dans la rue. J’ai passé sans dire bonjour.
Le 12 février.
Koulia a pris une habitude de se promener au parc avec deux-trois garçons, elle fait le bras croche bras avec eux, rit, parle avec eux de quelque chose. Aujourd’hui elle ne s’est pas montrée. Elle n’est pas sortie de sa classe. Peut-être elle est occupée par ses leçons. L’humeur est comme ci comma ça. Mais elle n’est pas des femmes sur le visage desquelles toutes les émotions sont reflétées.
Le 14 février.
Les garçons de deuxième degré ont organisé un cercle, ils ont commencé le travail. Mais le travail n’a pas marché ils ont réélu le dirigeant. Ceux qui sont resté avec le premier, ont acheté de l’eau de vie chez les garçons russes, ont bu à l’occasion de l’anniversaire du dirigeant. On en est venu aux mains. Il paraît que l’ancien est le fils de bay. Mais comment les bons gens peuvent devenir des gens pareils?
Le 16 février.
Les gens de la ville X sont arrivés, ils se sont mis à me louer, ils assuraient que je leur manquais beaucoup, m’appelaient dans la ville. Mon ami Kapay a commencé à parler, que maintenant je pouvais les utiliser comme je voulais. Qu’est-ce que les Kazakhs peuvent faire! On ne comprend pas qui a raison et qui a tord. Quel parti prendre? On reste assis, écoute, sympathise, il n’est pas convenable de chasser. Et après, il est intéressant de savoir qu’elle idée ils ont eu, autrement je n’aurais pas écouté. Si je commence à me mêler dans tous leurs cancans kazakhs, je n’atteindrai pas mes objectifs. Et je ne voudrais pas que leurs allers-retours me nuisent. On va regarder qui vient me voir et on va parler de moi n’importe quoi. D’un autre part, malgré qu’ils soient bons ou mauvais, de toute façon ils sont les siens. On peut facilement se russifier, si on commence à éviter son peuple.
Le 17 février.
Les citoyens de la ville X ont une spécialité : rien ne va chez eux. Personne ne veut voir le fond du problème, ils ne croient à ceux, qui occupent des fonctions, et cela n’est pas utile pour le travail d’état. Il est assez de cette seule raison pour se tenir au large d’eux. Ils m’ont écrit une lettre avec la demande d’aider à libérer de prison quelques garçons, qui faisaient bien leur études à l’époque. Pas mal!
Le 27 février.
J’ai reçu une invitation d’une parente de Koulian de venir la voir. Je suis venu avec Kapay. Nous sommes restés longtemps avec le budget, nous nous sommes libérés seulement à onze heures. On arrive, et Koulian y a préparé du samossa, elle verse du thé. Elle a rougi, elle restait assise et ajustait ses cheveux. Entre nous sur la table il y avait une lampe. Il a mis la lampe de côté. Comme ça son visage s’est retrouvé dans l’ombre du samovar, et le mien étaient resté dans la lumière de la lampe. À la place de la lampe elle a mis une assiette avec la farine d'avoine sucrée au beurre. Plus près de nous. D’ici j’ai fait trois conclusions : 1) elle s’est caché exprès dans l’ombre du samovar haut; 2) elle voulait que l’assiette avec le plat sucré se retrouve près de moi, autrement... 3) elle a décidé d’enlever la lampe, comme un obstacle entre nous. D’ailleurs, la farine d'avoine n’y est pour rien. Probablement, elle pense de renouveler les relations avec moi, si c’est ça, c’est la meilleure solution.
Le 10 mars.
Ce matin dans le lit j’ai eu une idée. Il faut se renseigner, est-ce que je plais effectivement à Koulian. Il faut une netteté. Il faut trouver un moyen d’apprendre quelque cours. Autrement, je vais tout simplement mourir d’attendre. J’ai demandé un conseil à Kapay. Il a proposé de parler avec la parente de Koulian. On a juré de garder tout en secret.
Le 12 mars.
Hier soir Kapay est allé voir cette parente. Comme je le pensais, sans résultat. Il n’a pas réussi de parler tête-à-tête.
À onze heures je suis parti avec une compagnie pour une promenade dans les montagnes. Kapay allait à côté de Koulian, moi avec un aide-médecin russe. J’ai réussi à parler avec Koulia. De nouveau ses blagues, son rire... Et tout le tremblement, elle n’a rien dit de concret. J’ai cru que ses sentiments à mon égard n’étaient pas forts, elle ne brûlait pas de passion, au total. La femme peut être la plus instruite, intelligente, éduquée, mais le plus importent est la sensualité. La femme sans sentiments est la même chose que la rose sans parfum. Qu’est-ce que c’est que les idées: «Je vais faire mes études», «Le mariage va m’empêcher dans mes études»! Les études, c’est la voix de la raison. L’amour, c’est la voix des sentiments. Mais elle n’aime pas, et ne sent pas non plus...
Trop rationnelle! Elle ne se permet pas de dire: «J’aime». Elle ne désire pas de changer ses projets. Tout est consacré aux études, malgré qu’elles soient difficiles pour elle. Est-ce que l’amour ne doit pas vaincre tout dans le monde? Je ne comprends pas. Il faut écrire une lettre et enfin avoir une explication avec elle.
Et ce soir quelque vieille Kazakhe s’est traînée, la mère de quelque milicien, et a déclaré, qu’une fille de bay que je ne connaissais pas, était amoureuse de moi et voulait se marier avec moi, son frère aîné travaillait ici comme professeur. Et elle s’est mise à décrire quelle beauté elle était... aux grands yeux, prompte, comme une chevrette... Probablement c’est le professeur, qui a envoyé cette marieuse chez moi. Et je ne sais pas si on peut croire à cette vieille ou pas. Je ne voudrais pas avoir un mauvais tour de la part des types connus de la ville X. J’ai demandé de m’amener la lettre de la jeune fille.
Le 13 mars.
Aujourd’hui j’ai écrit une lettre à Koulian. Je ne serai pas refusé — ma... J’ai devant mes yeux ce voyage dans les montages, quelles belles images douces à mon cœur. Je suis resté toute la matinée dans le lit, en éveillant dans mon imagination cette promenade...
...Les montagnes. Entre les arbres la trace de la luge serpente, et au loin, il paraît, qu’elle serre les tailles des bouleaux. Soit en haut, soit en bas. Les roches... le bois est autour... la neige est blanche et croustillante. L’aide-médecin a gelé à la selle, le manteau citadine ne chauffe pas, il bouffe, n’ose pas de donner un coup de fouet au cheval, il ne fait qu’à essayer. Mais Koulian porte une petite pelisse kazakhe en lièvre, le malakhay en renard est sur sa tête, elle est assise dans la selle comme un vrai djiguite, rit aux éclats, avance, excite par sa mine de chanoine...
Hier soir j’ai été avec Kapay au spectacle. On donnait un drame d’un acte sur l’esclavage. Koulian avec sa parente ont apparu au théâtre aussi. De temps en temps je la retrouvais par mes yeux. Et elle, j’espère, ne restait pas indifférente, aussi, en faisant les yeux en coulisse, jetait les coups d’œil dans ma direction. Evidemment elle croyait qu’on l’accompagnerait à la maison après le spectacle, et effectivement, elles étaient près de la porte. Kapay faisait la tête et m’a traîné à la maison. Et Koulian avec sa parente sont parties avec l’aide-médecin. Je ne comprends pas ces amusements de sa parente avec l’aide-médecin russe! Son mari est dans une autre ville, et elle se promène avec lui ici. Non, on ne peut pas croire aux femmes.
Le 15 mars.
Je suis sorti pour la pause de déjeuner pour prendre le frais. Soudain Koulian est sortie d’une porte voisine, a sourie et m’a appelé par le doigt. Je me suis approché. Elle a dit, qu’il était possible qu’elle m’avait écrit une lettre en réponse, mais elle ne l’avait pas avec elle. Et encore, qu’elle n’aime pas écrire, et a proposé d’en parler. On s’est mis d’accord où. Elle a promis de dire à propos de l’heure.
Le 16 mars.
J’ai vu Koulian dans mon rêve, j’ai parlé de quelque chose avec elle, je la serrais dans mes bras, l’embrassais. La science affirme, que l’homme voit dans son rêve ce dont il a pensé beaucoup et longtemps. Alors, mon rêve reflète mes désirs actuels. Autant que je peux, je me jure pour cette faiblesse. Je me suis appelé de plusieurs manières! J’essaye de m’arrêter. Je suis tombé amoureux en vain, tout cela c’est de la tromperie, et cette passion ne m’apportera rien de bien. J’ai décidé de trouver ses défauts, pour me provoquer des sentiments malveillants. Et ma vie il faut examiner par ordre, j’ai commencé à me rappeler de mes fautes peu attrayantes. J’ai compris que c’était peu probable que le bonheur familial m’attendrait, si je vais me marier avec une jeune fille instruite. Non, je ne réussis rien. Je continue à penser à elle. Je me tourne, comme un corbeau sur la branche. Elle a lié mes mains et mes jambes, et elle me tient comme par la bride. Je suis dans un piège, et le nom de ce piège est Koulian.
Quand je l’ai vue dans mon rêve: aujourd’hui? Ou je suis en train de la voire pendant un an? Je me rappelle, que je l’ai vue dans mon rêve pour la première fois en été, après l’arrivé dans la ville. Je me rappelle de sa robe, des dentelles sur elle, elle a passé comme a rasé par le rasoir. Je l’ai vue dans mes rêves et à Orenbourg, et dans cette rêve elle parlait avec moi ayant retournée de côté. J’ai essayé de me consoler par l’idée, que l’homme tout simplement fait la chasse à la femme et c’est tout. Non, mais c’est une consolation futile, maintenant je le sais surement.
J’ai rêvé, que je pourrais la rencontrer, avoir une explication, j’ai imaginé quelque vie irréelle avec elle, les jours heureux nous attendant... tout est futile. Je sens que cela me fait bouillir le sang. Je veux courir quelque part, faire quelque chose tout de suite. Je suis coupable, coupable! Je ne suis pas devenu bien-aimé, pendant que j’ai amorcé.
Le 17 mars.
J’étais à côté de l’école. J’étais avec un professeur. Je l’ai saluée par le signe de la tête et lui ai dit dans mes pensées: «Je suis à toi». Elle m’a regardée soit avec dépit, soit avec attendrissement. Quels yeux elles a: doux, aimés! Une des étincelles de ses yeux brillants a brûlé mon cœur. Les rayons enchanteurs de son regard fond trembler mon cœur, remplissent mon âme par la félicité! Non, je retire! Ils ne remplissent de rien mon âme et ne réchauffe pas le cœur, mais ils frappent et disparaissent mystérieusement. Le son est comme un attouchement de l’archet aux cordes de la kobyz: il est merveilleux, il excite, mais il est plein de tristesse et ne fait que promettre la mélodie d’amour. Il serre mon cœur contre sa poitrine. Le rayonnement de ses yeux me noie, plonge dans l’éternité. Ils flottent comme les vagues, chuchotent quelque chose...
Elle a promis de venir me voir à six heures. Je regardais ma montre tout le temps. J’ai envoyé un garçon la regarder. Avec chaque minute le cœur bat plus vite. Il reste encore une demi-heure. Comment le temps traîne! Je ne sais pas comment m’occuper, je me suis mis au journal. Il me semble que c’est la limite de bonheur, si elle arrive dans vingt minutes, me sourie, me tend sa main, et dit par sa voix douce: «Bonjour». Je ne peux penser à rien d’autre... Les pensées sautent. Je reste assis et je ne sais pas comment me calmer. Elle va venir! Elle viendra, si rien n’arrive. Ou elle ne vient pas? Il est possible aussi. Qu’est-ce qu’elle est en train de faire? Elle est en train de s’habiller? Elle est en train de se faire belle, de regarder dans le miroir? Ou... ou... il faut regarder le temps! Il reste encore 18 minutes. Tiens, il faut sortir, si j’arrive en retard, si sa montre avance...
Minuit.
Je l’attendais à l’angle de la rue. J’ai vu l’observateur venir, j’attendais avec impatience, je n’ai pas pu me retenir, et suis allé à sa rencontre, il dit: «Elle est sortie de la maison». Je me suis précipité. Elle s’est approchée du commissariat d’une côté, moi – de l’autre. On s’est vu dans le hall. Quelque Russe s’est approché de nous et a demandé un billet. Demain il va y avoir un spectacle ici. J’ai attendu qu’il nous laisse tranquilles à peine. On est resté quelque temps tous les deux. Quelques étudiants ont apparu dans la rue, sont entrés dans le commissariat... Elle s’est troublée et elle est allée derrière la scène. Ils font les études avec elle et elle avait peur des cancans. Nous sommes sortis dans la rue par une autre porte.
On parlait de n’importe quoi. Les cancans de la ville X, les cancans d’ici, qui a dit quoi, qui a entendu quoi, j’ai exprimé mon avis sur les jeunes filles étudiantes. Une des raisons de mon désir de la voir était la même: éclaircir nos relations. On s’est mis d’accord qu’il était le temps de jeter le rideau. Il fallait s'isoler quelque part pour la conversation longue. On a décidé qu’elle viendrait chez moi un jour ou l'autre. Mais elle a prévenu que les garçons qui habitent avec moi ne doivent pas faire du blabla ce qu’il ne fallait pas. Il paraît on a beaucoup parlé, mais de nouveau on ne s’est dit rien de nécessaire, on n’a pas réussi. Les paroles les plus importantes ont été dites par nos yeux. Elle répétait tout le temps qu’elle avait besoin de revenir, je n’ai pas fait attention comment je me suis retrouvé près de sa maison.
Le 18 mars.
On était au spectacle. Elle est arrivée. Elle s’est assise à sa place habituelle derrière notre rang. Je me retournais tout le temps sur elle, avant qu’on ne m’ait pas fait de remarque. J’ai changé de place. L’attirance vers elle était très forte que je regardais plus elle que la scène. Et elle aussi jetait les coups d’œil. J’attendais avec impatience l’entracte, mais quatre étudiants ont gâché tout. Ils l’ont entourée et lui ont étourdi les oreilles complètement. Je connaissais un d’eux, un roux, je l’ai vu l’accompagner à la maison. De quoi ils y parlaient, je ne sais pas, mais je voyais qu’elle parlait à contrecœur.
Je ne supporte pas ceux-là de la ville X. Koulian assurait qu’ils ne lui plaisaient pas non plus. Il n’y a pas de citadins pires qu’eux, d’ailleurs.
Revenue à sa place elle a demandé quelque chose à sa parente assise près d’elle, l’autre n’a pas aimé sa demande évidemment. Mais quoi qu’il en soit, bientôt je me suis échangé des places avec la parente et me suis retrouvé près d’elle...
Nous avons accompagné nos compagnes avec Kapay.
L’étudiant roux tournait autour de nous toute la route, il avançait, et traînait derrière nous. Il a surgi de quelque part de côté, a passé directement devant nous et a soufflé de sa cigarette de telle façon que les étincelles se sont envolées. J’ai fait une remarque: «Il peut se brûler comme ça». Et elle m’a répondu : «Pourquoi vous êtes tellement méchant? Est-ce qu’on ne peut pas traiter les gens avec indulgence?» Il m’a semblé, que son humeur a été gâchée. Il s’est avéré que ces étudiants bavardaient, comme si elle était chez moi, dans mon appartement, ce qui n’était pas vrai. Ils allaient fêter le Norouz[29] et ils invitaient Koulian pour la fête de printemps.
Koulian ne désire pas de cesser les relations avec eux, en prétextant qu’ils font les études ensemble, et le fait qu’ils disent des absurdités, cela arrivait dans une compagnie d’amis. On croirait, que même sans amitié ils jasent. Maintenant elle ne s’imaginait pas comment elle pouvait venir me voir. Mais qu’est-ce que c’est que ça, alors?! Pourquoi elle ne les quitte pas?!
Le 19 mars.
Les montres des citadins locaux ne montrent jamais l’heure exacte. Absolument il y a une personne dans la rue qui te colle: «Quelle heure est-il?» et avance les aiguilles sur sa montre.
Les étudiants d’ici sont complètement immoraux, il y a deux garçons et on peut entendre: «Est-ce qu’il y a un spectacle aujourd’hui? On va avec les chevrettes ? (ou les vieilles?)», —ils parlent des filles sans cérémonie (et ils y reportent les filles qu’ils connaissent, et Koulian est entre elles).
Le 21 mars.
J’ai été invité chez les gens. On a bu du koumis. Il n’était pas très intéressant. Koulian avec sa copine Jakime sont allées fêter le Norouz avec les étudiants de leur année. Koulian ne les aiment pas, elle parle d’eux sans concession. Si c’est vrai, pourquoi elle est partie avec eux?
Une autre chose, si elle les respectait, ou si elle ne les critiquait pas... Est-ce qu’on peut croire à cette fille? Si elle le fait pour me contrarier, ou avec un autre but? Elle a peur d’être désapprouvée par eux? L’homme doit distinguer bien le bon du mauvais, ne pas serpenter dans la vie. Et est-ce qu’elle est comme ça, celle que je prends pour mon ange? L’angoisse. On ne peut pas être plus triste. Il est intéressant comment elle va essayer de se justifier? On va voir.
Le 22 mars.
Hier on a été à la maison de la parente de Koulian. On a parlé de Norouz. La parente me soutenait et exprimait sa désapprobation de ce voyage dans la campagne. Koulian a avoué, qu’elle a agit mal. La parente de Koulian s’est assise exprès pour parler avec Kapay. Et nous, on s’est éloigné vers le four et là, debout, on a parlé. J’ai demandé de nouveau de venir me voir chez moi dans mon appartement. Elle a dit de nouveau qu’elle avait peur des cancans. Elle a dit: «Quand on partira de cette ville».
Le 24 mars.
À six heures je me suis approché de l’école pour la réunion. Personne n’est venue. Je suis resté un certain temps près de la porte. Jakime a apparu, en amenant son enfant par la main. Elle a 19-20 ans environ. Et on racontait d’elle des choses affreuses effectivement. J’ai entendu dire qu’elle s’est liée avec quelque professeur, et non seulement avec lui, elle faisait l’écoles buissonnière. Après m’avoir vu, elle a dit à son enfant à haute voix: «Dis-lui, que Koulian et Malina vont venir», — et l’a envoyé quelque part. Il était clair que cela a été fait pour moi.
Les jeunes filles russes en se promenant avec les jeunes hommes parlent à haute voix, sans se gêner, s’embrassent avec eux, rient aux éclats à toute la rue. Cette Jakime est complètement pareille. Les filles gâtées se ressemblent à s'y méprendre, elles ont les mêmes manières. Les marchandes, pour vendre ses marchandises aux hommes leur font des avances, elles font des allusions, qu’ils peuvent compter à quelque chose plus grand. Les filles faisant semblant de rire, riant aux éclats sont de même tribu. Est-ce que toutes les filles instruites sont pareilles? Est-ce qu’il ne reste plus de filles bien élevées?
Le 26 mars.
Hier à six heures Koulian est venue chez moi. Nous avons fermé la porte et avons parlé cordialement. Nous avons discuté tout: et nos relations, et nos caractères, et ce, dont les cancaniers parlaient de nous, et les projets pour l’avenir, et l’amour, bien-sûr. Après on a commencé à s’embrasser. Elle a dit, qu’elle faisait ses études à requête de son père et elle ne voulait pas, que son travail soit inutile. Et elle a ajouté, qu’elle abandonnerait les études. Je lui ai répondu que cela n’était pas le problème, le plus importent pour moi était sa déclaration de l’amour. Et elle est devenue plus accommodante. Malgré qu’elle se trouble dans mes embrassades, mais elle s’est échauffée. J’ai gardé une impression douce et agréable.
J’ai reçu «le Kazakh Travailleur», et il y avait le communiqué de deuil que Berniyaz connu s’est tué avec sa jeune fille. Un événement triste. Dommage, c’était le poète de talent! Qu’est-ce qui peut arriver! Les suicides parmi les Kazakhs étaient rares. Une affaire incroyable! À cause de la buverie, ou l’amour, ou la tromperie? Qui est coupable : la vie quotidienne ou les ennemis? Qui qu’il en soit, il faut croire qu’il lui était difficile. Oui, la vie... un coup et elle s’achève!
Le 28 mars.
Il me semble que c’est Belinski qui a écrit: «L’amour imaginé est plus dure, plus dangereux que l’amour vrai. Les rêves d’amour tombent sur le cœur par la pierre lourde, ils sont délicats, douloureux, venimeux». Je pense que c’est vrai. Mon cœur me faisait mal, comme s’il était troué entièrement.
Le 29 mars.
J’ai passé le soir avec Koulian, on se promenait, parlait. La lune brillait à toutes ses forces, il faisait chaud. Elle ne se décide pas en aucune manière. Toujours la même chose: «Qu’est-ce que la princesse Mariya Alexeevna va dire?», qu’est-ce que les oncles et les tantes vont dire! Quel genre de personne: ni chair ni poisson! Alors où est la différence entre la fille instruite et la fille non instruite? J’ai jeûné tout l’hiver avec des prières diligentes, et il paraît, tout est en vaine.
Le 4 avril.
Kapay a déclaré que Moulian lui avait dit, qu’il paraissait qu’il y avait quelques lettres, que j’avais écrites à sa copine avec laquelle il allait se marier. Je l’ai assuré que je n’avais pas écrit et ne lui allais pas écrire. Qu’elle montre, s’il y a des lettres pareilles. Kapay est mon ami et je ne lui cachais rien. Pourquoi elle l’a fait? Pour nous brouiller? Je ne m’attendais pas que Koulian, comme tous les autres, est capable de mentir.
Le 6 avril.
Et maintenant de nouveau à propos des lettres. Kapay est le Président du comité exécutif de la ville. Il lui n’était pas difficile de trouver une personne à laquelle Koulian a lu mes lettres, qui étaient lui adressées. Il s’est avéré que cet homme était cet étudiant roux montrant avec moquerie les lettres à ses amis. On disait qu’avec cet étudiant elle a passé la nuit chez sa copine débauchée Jakime dans la maison près du marché il a un mois.
Ma pauvre petite tête! Comment je me suis trompé! Comment j’ai été trompé! J’avais soif de l’eau propre dans la tasse non cassée, mais c’est le sale chien qui l’a lapée. L’amoureux est comme aveugle, c’est bien dit. Comment je pouvais me tromper tellement?! Maintenant je ne vais croire jamais à un seul mot d’une femme instruite! Tout est enterré: et mon cœur sacrificatoire, et l’inspiration pour elle, et la volonté de lui donner tout mon temps!
Le 8 avril.
J’ai écrit la lettre à Koulian avec une sollicitation polie de me rendre toutes mes lettres. Et j’ai fait mes adieux froidement pour toujours. Il y avait seulement trois phrases. Elle m’a répondu: «J’ai déchiré et jeté toutes vos lettres. Croyez-moi».
Le journal n’a pas fait de l’effet que le camarade Baltache attendait. Akbilek a pensé que c’était la jeune fille Koulian qui était coupable dans cette histoire peu attrayante. Le camarade Baltache insistait sur la culpabilité d’Akbala. Et plus il parlait de mauvais traits de son copain, l’irritation d’Akbilek commençait à bouillir plus fort. Elle ne voulait entendre rien de plus, il lui rester un seul désir: partez, laissez-moi!
— Mais qu’est-ce qu’il y a de spécial ici? Tout peut arriver à chacun.
Non! Il ne la laisse pas tranquille, il n’arrête pas de dire qu’Akbala n’était pas l’homme qu’il prétendait être... Perdue complètement, elle a prononcé ce qu’elle n’attendait pas d’elle-même:
— Et alors? Et moi non plus, je ne suis pas... la fille pareille. Je suis pire, j’ai accouché sans mari!
Rien à dire, elle a étonné le camarade Baltache, mais elle n’a pas réussi de se débarrasser de lui. Il ne l’a pas laissée tranquille, mais au contraire, s’est mis à lui poser les questions à propos du secret qu’elle a laissé échapper. Il a écouté et avec les paroles: «Vous avez bien fait, que vous m’avez raconté tout», il est parti enfin.
Dans un jour Akbala a envoyé une lettre à Akbilek avec une demande de venir au parc Marx. Elle est venue. Arrivé au rendez-vous Akbala était maussade, il parlait à travers ses dents:
— Vous ne voulez rien me raconter sur votre passé?
— Non, — a répondu Akbilek pantoise.
— Il n'y a pas à tortiller. Mais tu as fait part à Baltache. Je veux entendre la vérité. Est-ce que ce que tu as raconté sur toi est vrai?
Oui c’est vrai, — a répondu Akbilek.
Alors, nos chemins se sont séparés. Je croyais que vous étiez une jeune fille, — et il s’est éloigné par une allée du parc bien arrangée.
Akbilek est restée seule assise sur le banc en bois. Elle reste assise et ne peut pas comprendre comment c’est arrivé.
«L’aube de Zaysan» a hurlé deux fois. Les femmes habillées à la mode descendaient avec précipitation du bateau.
Sur le pont il y avait une femme accoudée à la rampe. Elle était svelte, au visage blanc et aux yeux noirs en robe parfaitement faite, avec le panama blanc en soie sur sa tête, Elle regardait les gens s’agiter sur le quai.
La dernière sirène de bateau a retenti, la femme s’est approchée du hublot ouvert de la cabine de première classe et a prononcé quelque chose. Ceux, à qui elle s’est adressée, sont sortis tout de suite sur le pont. Un d’eux était Baltache. Ses deux compagnons jadis travaillaient avec lui, ils ont faits les études quelque part ensemble. Depuis trois jours les copains de Semipalatinsk étaient en train de recevoir Baltache avec son épouse, ils les ont amenés sur l’île, se sont promenés dans la ville, et à ce moment, en retardant la séparation, ils terminaient leurs conversations amicales sur le bateau. Baltache, comme un vrai voyageur, a offert de la bière aux copains et en continuant à leur parler avec enthousiasme, il est allé avec eux sur le nez du bateau.
Les semipalatins avaient des motifs sérieux pour exprimer tout le respect à l’invité. Qu'on le veuille ou non, Baltache occupait une des places de commissaire à la capitale de la république. Il est clair et pardonnable aux gens de la région se traîner derrière les visiteurs de la capitale, comme aux enfants traînant derrière le père arrivé du marché avec les sacs pleins de cadeaux.
Baltache est un communiste éminent, capable de répondre à toute la question politique, un fonctionnaire expérimenté, préparant des résolutions. Baltache est jeune, mais on ne va pas exagérer, si on l’appelle même le patriarche du service soviétique, et ses copains ont encore à passer les marches, qu’il a déjà passé en se levant en haut. Il a travaillé à Akmol et Semipalatinsk, et à Ouralsk, et à la région Boukeyevskiy, il connait toutes les manœuvres astucieuses administratives, les questions du personnel, il est en rapports sans cérémonie avec les célébrités, c'est pourquoi, on peut dire que tout le monde entier se trouve à ses pieds. Malgré qu’il n’est pas reporté aux premiers leaders de parti, mais son fauteuil de chef est soutenu de tous les côtés, il ne va pas se balancer. Il pouvait bien critiquer qu’il fallait, et à temps citer le nom de sommité nécessaire, faire prévaloir son opinion à n’importe quelle réunion, au total, il est un homme d’état. Le camarade Baltache se différait du respect aux regards indépendants, il aimait souligner: les camarades, malgré que le camarade K. marche avec les masses, mais a son propre chemin, je le salue. Il était un homme à cheval sur les principes et montrait toujours les erreurs aux camarades, et si les camarades ne réagissaient pas, il pouvait se séparer d’une manière la plus décisive. Mais il savait être l’ami aussi.
Les amis s’intéressaient:
— Et comment va Akbala?
— Et qu’est-ce qui peut lui arriver? Akbala va bien. Il vit dans ses rêves. Comme toujours il prend quelques affaires incroyables, et il va en avant, en quatrième pompe. Comme avant il pérore éperdument, — et il a sourie.
— Et comment va celui-ci?
— Aïe, oubliez-le! Il se prend pour un grand rusé, capable de tromper tout le monde. Mais où à ce moment on trouve des naïfs? Il s’est tortillé complètement. Il n’est pas un camarade perspectif.
Voilà, Baltache avait son propre avis à propos de chaque personne. «L’aube de Zaysan» a hurlé la troisième fois. Baltache avec la compagnie s’est approché de la propriétaire du panama blanc qui était toujours près de la rampe. Vous l’avez reconnue? Akbilek.
— Au revoir, les camarades! Faites comme ça! — Baltache a serré les mains des camarades en disant adieu.
— Au revoir! Au revoir! — les camarades de Baltache ont dit au revoir à Akbilek aussi et se sont précipités de descendre de la trappe.
«V-voir! V-voir! V-voir!», — le bateau essayait de faire écho aux gens.
Les accompagnateurs, avec les larmes et les sourires, regardaient fixement avec avidité des visages des passagers du bateau et criaient quelque chose incompréhensible dans le dos de la poupe partante. Les cœurs ont commencé à battre plus vite. Le bateau a applaudi par les palettes des roues sur l’eau, comme le vieux chien par sa langue sur le brouet maigre. Dans l’air au-dessus de quai les chapeaux ont apparu ça et là comme les corbeaux et les mouchoirs en soie comme les papillons, les têtes ont baissé, les larmes ont commencé à couler sur les joues. Les passagers amassés sur la poupe arrière étaient en poses: «Et nous ne désirons pas vous quitter non plus».
Sur le pont du bateau la fanfare militaire a retenti: les trompettes, le tambour et les timbales jouaient une marche alerte, le pouls d’Akbilek est devenu plus fréquent, l’âme a balancé avec les vagues. Elle aussi agitait par le mouchoir blanc. Le cœur serrait comme si elle disait au revoir pour toujours à une personne très chère pour elle, en le plaignant infiniment. La personne très chère pour elle est, bien-sûr, Camillia.
«Pauvre Camillia n’a pas pu venir à la quai. Si rien de terrible ne lui est arrivé, de toute façon il lui reste à vivre comme à un oiseau blessé dans une cage!» — pensait Akbilek à elle, en se rappelant du jour passé sur l’île d’Irtych. Elle s’est rappelée aussi d’un autre jour. Le jour de son mariage avec Baltache.
C’était au bureau de l'état civil, les bureaux pareils ont apparu. Ils sont arrivés pour le mariage. L’enregistreur était un homme à la moustache noire. Dès qu’il a entendu le nom d’Akbilek, il a levé les yeux sur elle et a fixé son regard sur son visage. Akbilek l’a reconnu tout de suite. La Moustache Noire!
Ohé! Les Saints, aïe!
Effrayé que Baltache soupçonnera quelque chose, Akbilek a louché sur lui. Non, il était heureux.
En sortant du bureau de l'état civil, Akbilek a regardé en arrière sur la Moustache Noire. Il regardait dans son dos, il lui a semblé qu’avec la tendresse. Elle a secoué la tête en lui disant au revoir presque imperceptiblement. Il a mis ses doigts dans les cheveux et a serré le poing. Est-ce qu’il regrettait... qui le sait.
Le pont a balancé. Les larmes ont coulé des yeux d’Akbilek. Baltache s’est précipité de la serrer dans ses bras:
-Quoi?
— Tout simplement... Je plains la pauvre Camallia... Comment je peux l’aider? Elle est ignorante, soumise... qu’est-ce qui l’attend? Les ténèbres sépulcrales... — a dit Akbilek avec une tristesse profonde.
— Mais il ne faut pas perdre ta belle humeur pour un rien. On ne peut pas changer tout en un seul jour. Le socialisme arrive et il a déjà amené l’égalité, n’est-ce pas? Rappelle-toi de toi-même, — a encouragé son épouse Baltache.
— De toute façon c’est difficile... — a répondu Akbilek, en continuant toujours à respirer par la tristesse et la solitude de sa sœur restée sur la rive.
Le jour de juin avec le soleil blanchâtre est sur l’Irtych. Les rives sont vertes. Le bateau glisse en traçant le miroir des eaux. Sur le pont le camarade Baltache se promène avec son épouse le bras croche bras, en respirant à pleine poitrine la faible brise rafraîchissant et enivrant, comme le koumis battu. Mais comment on ne peut pas croire à ses paroles à propos de l’égalité arrivée, les assurances sérieusement dites par le fonctionnaire responsable? Si ce n’est pas lui, qui sait tout? Et Akbilek s’est calmée.
Après avoir respiré à satiété par l’air frais, ils sont entrés dans le salon brillant par les murs en miroir. Sur la scène entre deux colonnes une blonde avec le dos incroyablement droit exécutait quelque œuvre au piano. Dans le coin à droit autour d’une petite table quatre citoyens aux nez longs se sont installés, d’après les cols blancs et les manières qu’on devinait, c’était les types de commerce, et ils tapaient à la préférence: «Passe... Passe...»
Baltache et Akbilek en prêtant l'oreille au jeu de la pianiste svelte, se sont assis à la grande table couverte de la nappe blanche comme la neige. En étudiant la carte ils se sont mis à faire la commande à la serveuse arrivée en tablier blanc en dentelle. Baltache a commencé à lire les noms des plats en demandant: «Tu veux?»
— Et toi-même qu’est-ce que tu vas manger?
— Je ne comprends rien dans ces entrecôtes, je voudrais du mouton.
Le choix du mari semblait drôle pour Akbilek et elle s’est éclatée de rire. Après avoir entendu le rire fou, un des mercantis a arraché ses yeux des cartes et a regardé avec curiosité la femme riant. À partir de ce moment de temps en temps il jetait son coup d’œil indécent sur Akbilek.
Après avoir ri Akbilek a dit:
— Je pense que je vais manger la perdrix.
Après avoir mangé, les époux ont bu une paire de bouteilles de bière «Jigouly» et en bonne humeur sont partis dans leur cabine propre à deux places, ils se sont couchés sur le lit à ressorts et en regardant le magazine «Smekhatch», et ont ri.
— Le rire est très bon pour le processus de digestion, —
a déclaré avec autorité Baltache.
La vie est agréable, la vie est drôle! Tout semble drôle pour les jeunes mariés. Akbilek est devenue amateur de jouer un tour à son mari. Et c’est rien, il patiente, il n’y a pas même de l’ombre de vexation.
— Tu as remarqué comment ce mercantis te mangeait des yeux?
— C’est vrai? Moi j’espérais que tu ne l’as pas remarqué!
— Ma chérie, fais attention. Ces aigrefins sont dangereux, — l’a prévenue Baltache.
— Et toi mon chéri fais attention. Aujourd’hui un commandant a levé mon mouchoir tombé sur le pont.
Baltache est tranquille, mais d’ailleurs, qu’est-ce qu’il lui reste à faire? Il a choisi lui-même, il s’est collé à Akbilek lui-même. Il est tranquille, tout d’abord parce qu’il sait qu’Akbilek ne lui cachait rien, elle lui parlait de tout, ce qui lui arrivait. Revenue du travail lors du thé elle lui racontait à propos de toutes les conversations avec les collègues, avec les visiteurs. Elle lui confiait toutes ses pensées, doutes et même les rêves. Et Baltache aussi lui faisait part de ses problèmes; c’est le secret, mais on va vous dire: c’est elle qui l’aidait à écrire ses rapports et discours. Tel son talent s’est relevé. Elle écrit parfaitement, juste, avec les paragraphes. Uniquement il fallait, si elle travaillait longtemps après minuit, lui faire du thé chaud à temps.
Le troisième jour les jeunes mariés sont arrivés à Zaysan. Sur le quai ils ont été accueillis par Toléguen avec sa femme et la petite fille sur ses bras, qui ont reçu le télégramme gouvernemental: «Attendez». L’accueil chaleureux, les étreintes, les bisous.
Baltache connaissait le frère d’Akbilek, ils travaillaient ensemble. Avant il s’adressait à lui: «Camarade Toléguen», — mais aujourd’hui il lui dit cordialement: «Mon cher, comment ça va?» — et il l’a embrassé sur la bouche. Il a embrassé sur la joue l’épouse de Toléguen.
Toléguen croyait toujours que Baltache était une personne bornée. Maintenant il ne s’en rappelait plus. Maintenant Baltache est son beau-frère, en plus travaillant dans le centre. Quelle peut être étroitesse dans sa nouvelle position? Il ne s’est pas mis à s'enorgueillir, il est assez.
Ils attendaient deux briskas. Toléguen en soutenant les coudes des femmes, a installé les invités dans les sièges rembourrés, et les calèches en levant les bouffées de poussière crânement, ont passé en coup de vent dans les rues de la ville, directement à l’appartement.
Pour le jeune couple on a préparé une chambre avec le tapis sur le plancher et le lit avec les draps frais. Dans le salon on a préparé la table de fête pleine de victuailles. Il y en avait tout! Et les boursaqs, et les petite pâtés paramiches, et le samossa, et les bonbons, et les pastilles berlingot, et les graines de tournesol torréfiées, et les pistaches, et les petits fours cuits à la noix, et tout était en petits tas dans les assiettes... Au bord de buffet se sont entassées les bouteilles avec les petites têtes rouges, bleues et dorées, en tendant leurs cous comme les signes sur l’étang avec un appel suppliant: «Quand, quand vous allez vous serrer contre nous!..»
Toléguen a décidé que la vodka ne correspondait pas au statut du chef de son beau-frère, et a acheté pour lui une bouteille de champagne même pour 25 roubles.
Après avoir entendu dire qu’un commissaire de capitale est arrivé, les commissaires-débutants du district aux pantalons godant sur les genoux et vestons mâchés se sont précipités vers la maison de Toléguen comme les croyants vers la Mecque. Sans tarder ont apparu les chanteurs de quatre sous accourant à l’odeur du kazan ainsi que les flatteurs titulaires et les caudataires, habitués au toy, comme les poules aux grains.
«Félicitations!», «Venez!», les mouvements aller-retour, les chaises grincent, le bruit de la vaisselle, le cliquetis des couteaux et des fourchettes, le cliquetis des petits verres — tous ensemble, ce n’était pas la maison, mais le tourbillon de foire. Les petits verres tsoin-tsoin, le champagne pétillant pique le nez par l’odeur douce de vin, la vodka déborde, on a déjà commencé à chanter. La compagnie s’est excitée, et comment! Akbilek et Baltache sont de la capitale elle-même, comment on peut ne pas le fêter avec envergure? Est-ce qu’on a une raison plus solide pour la joie?! «Verse la vodka! Lève le petit verre! Chante! Faisons de la fête! Vas-y!»
La compagnie emballée de la fête s’est soûlée vite et tous ensembles. Les têtes pendent, les pieds sont en caoutchouc, les murs de la pièce flottent dans le ciel, et seulement quand la table a commencé à trembler, les invités en s’accrochant l’un par l’autre ont commencé à partir. Akbilek a traîné son mari hors de lui vers le lit, et elle s’est mise à débarrasser la table avec la belle-sœur. Le maître de la tablée s’est coché quelque part aussi, en remerciant Allah, que tout s’est bien passé.
Dans deux-trois jours Akbilek et Baltache, fatigués par les invitations des gens et les cérémonies de la ville, ont continué leur route dans la direction de leur monde d’aoul natal.
On ne peut pas monter dans les montagnes en briska, uniquement dans la selle. Ce n'est pas grave, ils ne sont pas les Kazakhs ou quoi? On a vite choisi les chevaux dressés pour le voyage du beau-frère respectable.
La femme de Toléguen avec son enfant est montée sur la jument grise pommelée, après avoir mis au-dessous d’elle la couverture pliée. Toléguen lui-même s’est assis sur l’étalon roux, Akbilek a eu un cheval doux couleur cendrée claire, Baltache est parti sur le cheval moreau, le camarade local accompagnant les invités n’a pas été laissé pédestre non plus.
Ils sont partis tôt le matin. Akbilek souriait en regardant comment bougeait sa belle-sœur sur le cheval, elle n’était pas habituée à l’équitation. Elle se tenait par le pommeau d’une main, et par l’autre main elle tirait trop ou perdait la bride. Toléguen était obligé d’installer sa petite fille devant lui.
Il était un jour chaud d’était. À midi les voyageurs se sont arrêtés pour se reposer dans un aoul casé sur la pente de montagne, ont mangé du mouton, ont bu du koumis et se sont installés dans les selles de nouveau. Ils allaient moins vite que le matin, la belle-sœur souffrait, en se tenant à peine sur sa jument. Mais Akbilek presser vivement son cheval par les touches légères de kamtcha. Et la fille somnolait avec insouciance, en secouant la tête. On l’amenait à tour de rôle.
Vers le soir les femmes ont commencé à se plaindre de la soif, et les cavaliers ont tourné vers l’aoul le plus proche sur la rive du lac. Au centre de la colonie il y avait une grande maison, près de laquelle dix poulains tournaient. À droit de la maison une yourte blanche a été montée. Les voyageurs se sont arrêtés près de cette yourte. Ils ont appelé l’adolescent apparu dans la porte et ont demandé à propos du maître. Le jouvenceau a répondu que l’exploitation appartenait à Bekbolate. Le cœur d’Akbilek qui a entendu ce nom a commencé à battre très vite et est tombé en bas, le premier élan était de courir n’importe où au plus loin, mais le désir de voir de nouveau son ex-fiancé a été plus fort, et elle attendait en silence son apparition.
Le béjaune a disparu, et à sa place Bekbolate a apparu avec son chapeau en renard mis sur le côté, et le tchapan jeté sur une épaule. En regardant en dessous, il a bougé en avant vers les hôtes inattendus et a pris la bride du cheval de Baltache pour le signe de salutation. Après avoir rencontré les yeux d’Akbilek il est devenu pâle, mais l’a saluée et a salué sont frère, comme les vieilles connaissances. Et il s’est précipité d’amener les hôtes dans l’yourte.
Une jeune femme camarde était absorbée par la couture devant une pile des couvertures. Sa silhouette s’est jetée tout de suite dans les yeux d’Akbilek. La jeune hôtesse avec un air mécontent a examiné d’avance les femmes aussi. Il était évident qu’elle n’a pas aimé que les femmes se sont assises sans se gêner à côté des hommes, presque le genou contre le genou! Son regard a exprimé une seule pensée: «Voyez lesquelles! Comment elles se sont affublées! Qu’est-ce qu’elles s’imaginent d’elles? Allez au diable!..»
Bekbolate a envoyé immédiatement le jouvenceau dans la grande maison chercher le koumis, et a étendu lui-même la nappe devant les hôtes, et ensuite s’est mis à mousser par la puisette la boisson rafraichissante apparue dans le grand vase. Il n’osait plus regarder Akbiliok, perdait courage, comme s’il était coupable devant elle. Sa femme au contraire, après avoir fait son petit nez court, est sortie de l’yourte, faisant comprendre, qu’elle ne voulait pas se mettre à plat ventre devant n’importe quels citadins, et toi, dit-elle, tourne, si tu as envi, devant eux, comme le pitre, ohé! Bekbolate a regardé avec la haine dans son dos.
L’ôte vient pour une minute, mais il voit toute la vie. Akbilek a pensé que Bekbolate n’aimait pas son épouse, et elle l’a plaint. Ses quelques rencontres avec lui se sont ranimées devant elle, mais pas tellement pour la bouleverser comme avant. Et tout de suite elles sont tombées dans le domaine du passé irrévocablement, sans une goutte de regret. Qu’est-ce que c’est que les rêves de jeune fille? C’est du sable au-dessous des pieds de la femme, elle marche sans s’y noyer pas du tout, en respirant de nouveaux désirs. Mais Bekbolate est déjà complètement un autre — il est devenu plus lourd, la barbe a adhéré à la moustache, il avait des plis à côté de la bouche, il paraît qu’il est devenu plus bas. Et la conversation?
— Hé, alors, vous allez chez les parents... Quelles sont les nouvelles dans la ville? On va égorger le mouton, soyez les invités! — voilà c’est tout de quoi il parlait.
Akbilek avait peur que Baltache pouvait deviner de ses relations avec Bekbolate, malgré qu’ils soient anciennes mais proches, et d’une possibilité que Bekbolate lui-même pouvait d’un coup ranimer les sentiments inutiles maintenant, et elle a dit en russe: «On y va!» Sans faisant attention aux demandes d’être les invités qui continuaient, tout le monde s’est levé et parti vers les chevaux qui n’étaient pas dessellés.
Ils allaient un certain temps en silence. Akbilek jetait les coups d’œil sur le frère, mais d’après son visage impénétrable il était impossible de comprendre, à quoi il pensait. Il était occupé par le choix du sujet de conversation qui en aucun cas ne soit pas capable de pousser les interlocuteurs aux souvenirs. Enfin après avoir commencé à parler avec la sœur il s’est assuré avec soulagement, qu’elle avait compris l’intention prévoyante.
Sur la pente de la montagne cinq cavaliers et cavalières ne sont plus que les fourmis, et dans les herbes puissantes de hautes montagnes d’Altaï ils ne se voyaient pas du tout. Ils ont passé le défilé rongé par les cavernes, passaient entre les roches suspendues au-dessus d’eux comme les bosses de chameau, contournaient les pierrailles polies par les vents comme les seins des géantes... Ici, tout près des sommets d’Altaï, Akbilek s’est rendue compte comme jamais avant, que l’ assassinat de la mère, et la violence d’elle-même, et la persécution de la belle-mère, et les heures dans les ténèbres au bout du tombeau dans la masure de vieille Tchérépouchka sont restés là — loin en bas — et ils ne vont jamais la déranger. Elle apportait son cœur à travers sept cieux et elle l’a lavé dans l’univers dans la coupe en or, elle est née de nouveau — propre et autre.
Akbilek, montée comme la corde, voit tout le monde d’Altaï dans les rayons de la couché de soleil: les chevaux vont à toute vitesse, en levant les crinières, avec l’hennissement et le rugissement le long des vagues cristallines de Markakole, les juments poussent les poulains, les traînent avec elles sur les prés de montagne, les chapeaux en renard des bergers brûlent; sur la pente vers la rive les petites têtes féminines d'amande ont apparu en foulards à dessin, les robes vertes dessinaient les courbures des corps, et tout se voyait, comme à travers les lunettes aux verres jaunes. Tout dore et flotte.
On entend l’aboiement des chiens et le bêlement des moutons dans les enclos de l’aoul proche. Les chevreaux appellent leurs mamans à cornes par les voix plaintives. L’alouette chante dans le ciel. Et les martinets volent près de la terre et clissent les gens. Trois jeunes filles, allant chercher de l’eau, ont commencé à chanter avec les modulations:
L’ordre de roseaux a caché la boucle d’oreille,
Un étranger inattendu est passé pour chercher la sœur.
Les bagues doubles coupent les doigts,
Je la plains jusqu’au mal au cœur...
On ne sait pas d’où un gamin est arrivé en courant sur l’étalon avec la queue flottante, il a vu Akbilek avec les compagnons et après avoir leur tourné le dos, s’est jeté vers l’aoul.
Le rêve d’aksakal Mamyrbay était de voir sa belle-fille, avant son arrivée rare il mettait une yourte blanche pour les jeunes mariés, en espérant que cette fois-ci Toléguen amènerait avec lui sa femme. Et aujourd’hui elle est montée près de la maison d’aksakal — le vieillard attendait.
Le gamin a hurlé directement de l’étalon:
— Les oncles s’approchent! Et Akbilek est avec eux! Après avoir entendu la nouvelle attendue, l’aksakal s’est secoué et s’est mis à démener les pièces en criant:
— Aïe! Qu’est-ce qu’il y crie!
Il n’a pas vu Akbilek depuis le jour, quand elle est partie avec le frère. Il a entendu dire qu’elle faisait ses études, mais il ne faisait que faire la grimasse d'un air mécontent, sans rien dire: «Qu’est-ce que la jeune fille peut apprendre?» Comme si elle a disparu de la terre pour lui, il se rappelait seulement qu’il avait telle fille. Il ne pensait pas à elle et ne s’imaginait pas qu’il la verrait de nouveau. Qu’est-ce qu’il doit faire maintenant? Rester à la maison? Ou aller les accueillir. Comment dire bonjour? On ne peut pas rester assis comme si rien ne se passe. Demander pardon? Quelle malchance pénible est tombée sur lui.
Rien n’arrive dans sa tête, et près de la fenêtre sa femme a commencé à glousser:
— Voilà ils ont apparu! Quatre personnes! Non... cinq... deux femmes... une doit être la belle-fille...
L’aksakal, après avoir entendu à propos de la belle-fille, n’était plus capable de rester assis, comme s’il a eu le coup sur le côté. En se rappelant d’un proverbe connu, que le vieillard est obligé de sortir à la rencontre et saluer le premier comme il faut saluer les invités, même l’enfant de six ans, s’il est arrivé de loin, L’aksakal Mamyrbay a décidé de sortir de la maison et accueillir les invités comme il faut.
Il est sorti et ils sont arrivés au même moment tous ensembles. Une femme en robe planche assise sur le cheval cendré clair était en train de le regarder. Sarah s’est installée devant elle. Pendant qu’il essayait de deviner: «Qui cela peut être», — Ourkiya était en train de la serrer dans ses bras et embrasser sur le front. Il s’est avéré que c’était Akbilek. À sa grande surprise, elle était la première de qui les hommes et les vieillards de l’aoul s’approchaient. Vu que tout le monde la traite avec l’attention respectueuse, l’aksakal a décidé de niveler son hostilité envers sa fille.
Toléguen s’est approché de lui, a dit bonjour et en indiquant Baltache qui le suivait l’a présenté:
— Voilà est votre gendre. Il s’appelle Baltache.
— Hé, comment tu vas, mon cher? — a dit l’aksakal stupéfait.
Et il ne peut pas comprendre, ce qu’il peut dire encore, il a seulement un mot absurde qui brûle le bord des lèvres: «Félicitations!». Après le frère, en amenant Sarah avec elle, Akbilek s’est approchée du père et lui a tendu la main.
— C’est toi, Akbilek, chérie? — la voix d’aksakal a tremblé, les yeux sont trempés. Après avoir aspiré à pleins poumons, il a pu à peine retenir les larmes.
Akbilek était triste et ne levait pas les yeux.
— Comment vas-tu? Comment est la santé, chérie? — lui a demandé l’aksakal. À ce moment les femmes d’aoul ont amené la belle-fille dans l’yourte des jeunes mariés, y ont fait le tour avec elle et l’ont sortie.
Les habitants de l’aoul ont commencé à venir, dire bonjour. Après avoir serré les mains à tout le monde l’aksakal a ordonné:
— Il est assez, laissez passer! Qu’ils entrent dans la maison! Les invités sont entrés dans les pièces. Et l’aksakal est avec eux. Les femmes se sont jetées pour chercher le rideau pour la belle-fille, l’aksakal a arrêté leur agitation:
— Laissez, ne courez pas ici! — Et à belle-fille: — Ne sois pas gênée, chérie! Tu peux! Maintenant toutes les cérémonies sont mal à propos.
L’autre, entre outre, n’a pas même pensait d’être gênée. Et les femmes continuaient à faire du bruit:
— Hé, l’aksakal, quel vieillard! Les enfants sont arrivés! L’abondance! Alors, tu es content? Et ce garçon est le gendre, alors! Nous souhaitons de vivre longtemps et être jeune! Pour le bien de tous vos enfants!
L’aksakal est effectivement très content.
On a amené les affaires de voyage, ont les a installées. L’aksakal est allé dans la cour et au clair de la lune il égorge avec les travailleurs le mouton et demande le frère:
— Et le gendre est de quelle famille? Vous vous êtes renseignés?
Amyr, qui a déjà réussi d’apprendre de Toléguen tout sur Baltache, est pressé lui-même de parler du gendre.
— Il est de Semeï, de la famille des Tobyktes. Il occupe une fonction importante, monsieur! Il est au service de l’Etat à Orenbourg! — ventait-il.
Les anciens sentiments d’aksakal se sont envolés complètement, l’humeur remonte, il est content infiniment.
Matin en regardant Akbilek et Maricha retourner de la promenade hors l’aoul, il a pensé avec plaisir: «La femme du fils est une femme digne — corpulente, blanche et se mouvoit harmonieusement». On lui disait qu’elle n’était pas Kazakhe, qu’elle était des Estèkes, mais il a cru, que les Estèkes étaient absolument une famille kazakhe. Après avoir vu que Sarah, ayant pris la fille de Toléguen sur ses bras, allait sortir avec elle dehors, l’aksakal a dit:
— Tu me la donne, chérie! — et il a senti tendrement le cou de l’enfant, l’a embrassé sur le visage.
L’humeur — il avait le cœur en joie.
— Hé, c'est pain bénit, pardonne-nous!
Toléguen avec Baltache allaient sortir dehors après avoir mis les manteaux de demi-saison et les chapeaux un peu de côté. L’aksakal les a accompagnés de regard et a pensé: «Il faut croire, que le temps appartient au gens comme ça». Et avec tels messieurs parents il a voulu vivre très longtemps.
Lors que les jeunes gens se promenaient, buvaient du thé chez eux, l’aksakal est passé dans l’écurie et a ordonné de battre du lait de toutes les sept juments, il est revenu et a vérifié sévèrement si les pièces ont été bien balayées et nettoyées. Il a dit à sa femme d’étendre la couverture spécialement épaisse pour Akbilek.
Il a patienté une heure, et a envoyé son frère chercher les jeunes. Il a invité Toléguen et Baltache, qui ont apparu sur le seuil, de s’assoir en tête du dastarkhan, et il a installé Akbilek et Maricha à son droit.
La belle-mère s’est mise elle-même à verser le koumis dans les pialas rouges, généreusement, avec application, sans rogner la part des voisins et des enfants. Et elle s’est collée tout simplement à la belle-fille Maricha:
— Bois, chérie, bois! Je vais t’ajouter encore!
Mais elle n’ose pas de regarder dans le visage d’Akbilek, elle ne fait que se pencher en s’étendant au-dessus de son piala. L’aksakal n’arrête pas de régaler son gendre:
— Pourquoi vous ne buvez pas? Mais le koumis est excellent!
— J’en ai bu assez! — répond Baltache.
Et l’aksakal fait une remarque d'une manière judicieuse et avec le cœur gros:
— La vie citadine ne laisse rien de l’estomac de la personne.
L’aksakal est à cheval: quel fils! Quel gendre! Quelle belle-fille! Quelle fille! Mais la vie de qui actuellement a réussi tellement avec succès?! S’il crache tout de suite à travers le seuil — il est sûr: le crachat va directement tomber sur le nez du chien.
Alors, cela va de soi, Mamyrbay a organisé un toy! Il voulait égorger le cheval de trois ans, mais Toléguen a insisté sur celui antenois. En plus dix maisons parentales ont égorgé par un mouton. Cinq aouls de Markakole ont célébré la fête de Mamyrbay! La viande n’entrait pas dans les kazans, le koumis ne coulait que dans le lac, les lutteurs jouent de leurs épaules, les cavaliers se sont battus au buzkaschi, les chanteurs ne laissaient pas le dombra...
Ils ont terminé la fête avec difficulté. Akbilek avec sa belle-sœur, après avoir pendu sur l’yourte la toile rouge, se sont mises à enseigner aux femmes à lire et à écrire. Les hommes, Toléguen et Baltache ont pris plus haut: ils ont amené les hommes vers les sommets de l’éducation politique.
Akbilek est douce, causeuse et silencieuse avec le père. Ne s’imaginant pas de quoi encore il pouvait parler avec la fille, si ce n’est pas demander pardon, Mamyrbay fait une remarque:
— Akbilek, chérie, ohé! À quoi bon vous déranger? Reposez-vous. Est-ce que cela vaut de la peine à enseigner les femmes à lire?
— Mon père, le temps est comme ça.
— De toute façon elles ne vont pas devenir comme vous!
Akbilek ne discute pas. Dans ses pensées elle est occupée de Sarah. La sœur a douze ans, elle porte déjà les robes longues, c’est le temps d’aller à l’école, elle va la prendre absolument avec elle dans la ville. Il est plus difficile avec son petit frère. Kojéken l’a dessue que pendant les années de son absence à la maison il est devenu mensonger et vindicatif. Un jeune homme maussade, impatient — il la chagrinait et l’inquiétait. Alors, que Toléguen s’occupe de lui.
Akbilek va souvent au bord du lac avec Ourkiya qui la traite avec tendresse comme avant. Un jour la conversation pas pressée toute seule a fait demander Akbilek à propos de l’homme, qui a guidé les Russes sur elle:
— La tante, qu’est-ce qui est arrivé à celui-ci... à Moukache?
— Et tu n’as pas entendu dire? En hiver il est sorti de son hivernage et a disparu.
— Comment il a pu disparaitre?
— Qui le sait? Peut-être, quelqu’un l’a tué.
— Il a fait beaucoup de mal.
— Et le mal revient.
D’où pouvaient-elles savoir, que le verdict a été rendu un jour hivernal, qui nous est connu, par le bay Aben Matayin et exécuté par ses gens.
Les femmes restaient pensives et regardaient silencieusement comment Sarah jouait sur le sable de bord avec la fille de Toléguen. Il paraît, il fallait parler des filles, mais Ourkiya sait parler uniquement de son fils Iskander. Iskander est un joli garçon entêté.
Elle aime infiniment. D’après sa mère, il est intelligent: il compose des chansons, et pendant les jeux il sait comment suivre la brebis, et tenir le veau. À moins qu’il est très irascible, s’il n’aime pas quelque chose, il se bute et pour rien au monde, s’il commence à se battre, il agite les poings jusqu’au moment quand on lui tient les bras, si on le fait tomber, il commence à se battre par sa tête et par ses pieds.
Voilà et maintenant il a commencé à se battre avec un gamin, qui a fait pleurer sa cousine de la ville. L’autre était plus âgé et plus grand, mais il s’est arrêté stupéfait, et s’en est allé. Ourkiya a eu peur, a agité ses bras. Mais Akbilek a dit avec enthousiasme:
— Iskander, viens ici, chéri! Mon petit frère! — et elle l’a serré fortement dans ses bras, l’a embrassé.
Iskander s’est sauvé et est allé en courant vers l’eau. Sans le quitter de regard Akbilek a demandé:
— La tante, pourquoi Iskander? En russe c’est Alexandre.
Ourkiya a répondu tranquillement:
— Tu te rappelles de ton douana Iskander? Il t’a sauvée. Voilà, j’ai donné le prénom à mon fils à son honneur.
Les yeux d’Akbilek ont arrondi, elle a réfléchi et a prononcé:
— La tente, ohé! Iskander me ressemble, n’est-ce pas? Ourkiya s’est éclatée de rire et lui a répondu:
— S’il te ressemble, peut-être, que c’est toi qui l’a mis au monde!
— C’est vrai, la tente? — a exclamé Akbilek et de nouveau: — Iskander! Iskander, viens ici!
Le garçon est arrivé en courant, et elle l’a serré tellement dans ses bras, qu’elle ne pouvait pas respirer elle-même.
— Tu es mon petit poulain! Tu as fait tout très bien, la tente, ohé! — et elle s’est jetée d’embrasser Ourkiya. — Je pensais: que je l’ai perdu... je suis tellement heureuse! Est-ce que tu vas me le donner? Quand il sera assez grand pour l’école?
— Entendu, — a répondu Ourkiya.
L’eau de Mamarkal est douce comme le miel. Et les bêtes mamelées de Dieu, nourries par son eau et la petite herbe, ont dans leurs trayons énormes non pas le lait, mais la bénédiction... Ici elle est Akbilek Mamyrbaydina, la fille de Markakol, la mère du fils, la femme.
[1] épouse principale
[2] Cravache en cuir
[3] prison
[4] pet-de-nonne
[5] district
[6] Système de prélèvement des denrées agricoles
[7] maison
[8] fille
[9] Fromage blanc
[10] Personnages démoniques
[11] Voleur de bétail pour le vengeance ou le paiement
[12] dromadaire
[13] Chapeau chaud d’homme
[14] chef du pouvoir local
[15] Bonne nouvelle qui nécessite une récompense
[16] Jeu kazakh
[17] Deuxième femme
[18] Pièce instrumentale kazakhe
[19] Coiffure kazakhe de la femme mariée
[20] Nappe réctangulaire
[21] hercule
[22] Saucisson de cheval
[23] pelisse longue
[24] voûte de yourte
[25] friandise orientale aux noisettes, au sucre et à l'huile
[26] cornemuse tchouvache
[27] Pâturage d’été
[28] arc de limonière
[29] fête traditionnelle